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00:0018h40 de retour dans Punchline sur CNews et sur Europe 1, toujours avec Laetitia Guinan,
00:05Rachel Kahn et Henri Guaino.
00:06Henri Guaino, vous avez fait une tribune dans le Figaro pour évoquer la tentation du gouvernement
00:10du juge.
00:11En cédant à cette tentation, dites-vous, les magistrats préparent leur propre destitution.
00:16Ça nous amène évidemment à parler de l'affaire Marine Le Pen, mais aussi du procès en cours
00:20pour Nicolas Sarkozy.
00:21On va peut-être d'abord commencer par écouter Laurent Wauquiez, qui sera demain l'invité
00:25d'ailleurs de Gauthier Le Bret, dans 100% politique.
00:27Lui, écoutez ce qu'il dit sur la condamnation de Marine Le Pen.
00:58Ça ne doit pas faire oublier qu'à la base, il y a quand même une affaire de détournement
01:02de fonds publics.
01:03Et les politiques ne doivent pas être des justiciables au-dessus des autres justiciables.
01:07S'il y a du détournement d'argent, il y a une condamnation.
01:10C'est normal.
01:11Est-ce que vous êtes d'accord avec ça, Henri Guaino ?
01:13S'il y a une condamnation, les politiques ne sont pas des citoyens au-dessus de la loi.
01:16Je ne suis pas d'accord pour tout mélanger.
01:18Je pense qu'il faut traiter les problèmes les uns à part des autres.
01:23D'abord, il y a cette histoire d'exécution provisoire.
01:26Cette exécution provisoire, c'est écrit dans le jugement.
01:30Elle a pour seul but, non de sanctionner la faute, mais d'empêcher Mme Le Pen d'être
01:37candidate à la présidence de la République.
01:38C'est écrit noir sur blanc.
01:39Donc, ce n'est pas une invention.
01:41Ce n'est pas une construction.
01:42C'est écrit.
01:43Je trouve ça non seulement profondément choquant, mais je pense que ça nous pose
01:48un vrai problème quant au fonctionnement de la justice et au rapport entre le judiciaire,
01:54le politique, la démocratie.
01:55S'il y a un trouble à l'ordre public démocratique, une nouvelle invention de la justice, il se
02:02trouve plutôt là.
02:03En tout cas, on ne peut pas éluder cette question.
02:05Je rappelle encore une fois que cette exécution provisoire n'était pas prévue explicitement
02:11dans la loi.
02:12C'est-à-dire que la loi dit d'une façon générale que pour n'importe quel type, au
02:16niveau civil d'ailleurs comme au pénal, le juge peut prononcer une exécution provisoire.
02:20Elle n'est pas liée automatiquement à l'inéligibilité, donc le juge pouvait l'appliquer ou ne pas
02:28l'appliquer.
02:29Voilà.
02:30Ça, c'est la première des choses.
02:31Il a décidé de l'appliquer avec des raisons qui sont sur le plan du bon fonctionnement
02:35de la démocratie, de la séparation des pouvoirs, des grands principes qui régissent nos rapports
02:40de la société et de la justice.
02:42Il pouvait ne pas l'appliquer.
02:44Je rajoute une deuxième chose.
02:46C'est qu'il y a la question de l'inéligibilité en elle-même qui est posée, qui faudra poser
02:51par la suite, qui est de savoir, le législateur l'a prévue, on a fait une peine obligatoire
02:58en cas d'atteinte à la probité, en cas de condamnation pour atteinte à la probité.
03:03Obligatoire ne veut pas dire automatique, elle laisse au juge la possibilité de déroger
03:09à cette obligation s'il motive, sérieusement, ça s'appelait les peines planchées que
03:14les mêmes députés, les mêmes parlementaires avaient abrogées quelques années auparavant.
03:21Les mêmes, dans la même majorité.
03:23Donc le juge pouvait aussi ne pas appliquer l'inéligibilité.
03:28Et moi, je crois qu'on a un vrai débat à avoir parmi tous les débats qui concernent
03:33la justice, sur la question de savoir si l'inéligibilité est une sanction pénale
03:40légitime.
03:41Je comprends que le juge pénal condamne à des peines préalatives de liberté, à prison,
03:47à des peines de sanctions financières, etc.
03:50Est-ce que l'inéligibilité, ça doit être dans les mains du juge pénal ? Puisque les
03:56procès sont publics, les sanctions publiques, etc., est-ce que c'est à l'électeur qui
04:01sait tout ça, de choisir lui-même pour qui il veut voter ou pas voter ? Sauf peut-être
04:06pour la respiraison, l'intelligence avec l'ennemi, mais c'est une question qu'il
04:12faudra absolument débattre.
04:13J'entends ça.
04:14Mais sur le fond, ce que dit Laurent Wauquiez, c'est ce que disent énormément de gens.
04:18S'il y a une faute, il faudra payer.
04:20Il n'y a pas de passe-droit si l'on est un politique homme ou femme.
04:25Il n'y a pas de passe-droit, mais cela ne donne pas une peine obligatoire, une peine
04:31automatique.
04:32Il n'y a pas de passe-droit, mais vous pouvez condamner à une peine légère, à une peine
04:35très lourde.
04:36Le fondement de notre droit, c'est quand même qu'on traite chaque cas individuellement.
04:42Pour reprendre le vocabulaire du Conseil constitutionnel de la Cour de cassation, ça doit être proportionné
04:48aux circonstances de l'espèce et à la personnalité de celui qui est condamné ou qui est jugé
04:56coupable.
04:57Évidemment, pour une personnalité politique, les conséquences de la sanction ne sont pas
05:04les mêmes que pour d'autres citoyens.
05:06Il faut en tenir compte aussi.
05:07Quand vous vous obligez quelqu'un à abandonner son mandat immédiatement, et que 3-4 ans
05:19après, comme ça a été le cas de certains élus locaux et de certains maires, il est
05:25relaxé en appel, et il a subi un dommage irréparable.
05:29Il ne faut pas supprimer du code pénal l'exécution provisoire, parce qu'elle sert dans beaucoup
05:38de cas.
05:39Elle sert beaucoup aux civils en particulier, mais même au pénal, il y a des gens qu'il
05:42faut laisser en prison, même en attendant leur appel.
05:46Mais tout ça doit faire l'objet d'un effort de discernement de la part du juge quant aux
05:54conséquences du jugement.
05:56Tout le monde est égal devant la loi, mais personne n'est jugé de la même façon, parce
06:01que personne n'est dans la même situation.
06:02Qu'est-ce que vous pensez de la proposition de loi d'Éric Ciotti, qui reviendrait sur
06:11la loi Sapin-II ?
06:12La loi Sapin-II n'a pas été appliquée à ce procès, on a découvert ça au fur et
06:18à mesure.
06:19Deuxièmement, je suis viscéralement opposé à toute loi faite dans l'émotion, dans
06:31l'urgence.
06:32Je pense qu'il faut prendre du recul, réfléchir, regarder ça dans la nécessaire remise à
06:39plat de notre code pénal.
06:41Tout à l'heure, vous avez parlé de l'Université Lyon II et de ce qui s'est passé, ça nous
06:49renvoie, par exemple, à une remise à plat des principes de notre code pénal.
06:54Il y a beaucoup de choses à faire sur ce sujet, il y a un vrai débat à avoir, le
06:58faire comme ça ne me paraît pas une bonne idée.
07:00Maintenant, je pense que la loi Sapin-II est trop loin, en tout cas en matière de…
07:05Mais parce qu'il faut poser non pas tant la peine obligatoire que l'inéligibilité
07:09elle-même est un vrai sujet, c'est un vrai sujet de débat démocratique, et je rappelle
07:13aussi quand même que la justice est indépendante, très bien, au moins la contrepartie de ça,
07:19ou les deux contreparties de ça, c'est un, qu'elle est impartiale, et il faut qu'elle
07:23s'y efforce, alors c'est difficile à contrôler, mais il faut qu'elle s'y efforce, pas toujours
07:27cet effort n'est pas toujours fait, et deuxièmement, on devrait avoir un droit de critique, c'est
07:33la moindre des choses, quand une institution est indépendante, qu'on puisse critiquer
07:37ce qu'elle fait, alors critiquer, pas menacer, pas de menace, mais critiquer, même critiquer
07:42fortement, même critiquer violemment, dès lors qu'il n'y a pas de menace, qu'il n'y
07:46a pas de pression, c'est la moindre des choses pour une institution qui réclame et qui revendique
07:51son indépendance.
07:52Laetitia Guynon, une question.
07:53Et vous, le conseiller politique, qu'est-ce que vous conseilleriez à Marine Le Pen, justement,
07:57aujourd'hui, quelle attitude devrait-elle avoir pour espérer se sortir de l'house
08:02et conduire le RN, son parti, à la victoire en 2027 ?
08:05Alors moi je ne suis pas un conseiller politique par nature ou par essence, je me garderais
08:09bien de lui donner des conseils, je peux simplement observer qu'elle a une conviction, je ne partage
08:17pas forcément, mais qu'on peut admettre, c'est qu'elle n'a pas fait de fautes, que
08:22c'est un différend administratif, et là il y a un vrai sujet de toute façon, le vrai
08:26sujet c'est de savoir jusqu'où le juge est apte à faire le partage entre l'activité
08:32politique d'un parlementaire et son activité stricte de législateur, et ça c'est quand
08:37même très très compliqué, il ne faut pas qu'on déplace sans arrêt la frontière,
08:42sinon il n'y a plus… on va finir par dire qu'un parlementaire n'est pas un homme
08:47politique, n'est pas une personnalité politique, il ne fait pas de politique, ce n'est pas
08:50pensable.
08:51Donc je crois que ce débat il peut exister, mais en l'état des jurisprudences, de la
08:57législation, des règles du Parlement européen, etc., très bien, on peut considérer qu'il
09:01y a eu une faute, qu'on qualifiera comme on veut, et après tout, sa stratégie, sa
09:09conviction, elle est parfaitement recevable.
09:11Je suis un peu choqué quand même qu'on laisse entendre dans le jugement que, puisqu'ils
09:16n'ont pas reconnu, ou elle en particulier n'a pas reconnu qu'elle était coupable
09:20de ce dont le tribunal l'a jugée coupable, il y avait un risque de récidive et que c'était
09:26une déraison, ça veut dire que vous n'avez pas le droit, vous n'avez pas… Or, ce
09:30qui est dans notre code pénal, c'est qu'évidemment, un accusé a le droit, a le droit de ne pas
09:35s'accuser lui-même.
09:36C'est un droit.
09:38En revanche, en matière de cohérence, il y a un petit problème, c'est que si vous
09:43faites appel à la justice, c'est difficile de combiner ça avec une stratégie de la
09:50tension très forte, parce que, bien sûr, les magistrats ils sont humains, et plus la
09:57tension est forte, et plus ils vont se réduire tout naturellement.
10:00Donc, je ne suis pas sûr que cette dimension-là de la stratégie employée soit la meilleure.
10:07Si vous les attaquez, ils vont essayer de se défaire.
10:12Je vous rappelle quand même, parce que je vous écoutais avant de rentrer, qu'il suffirait
10:17en réalité, mais ça provoquerait des commentaires infinis, que la cour d'appel ramène la peine
10:24d'inéligibilité de 5 ans à 2 ans.
10:26Si elle le fait, et peut-être qu'ils n'iront pas en cassation à ce moment-là, mais même
10:33s'ils y vont, et que la cour de cassation approuve, elle peut parfaitement se présenter
10:37puisqu'on va imputer sur son inéligibilité, ce qui est déjà effectué depuis le dernier
10:43jugement.
10:44Henri Guaino, vous dites aussi que les récents procès de Nicolas Sarkozy ou de Marine Le
10:48Pen, les poursuites aussi qui ont conduit Eric Dupond-Moretti vers la cour de justice
10:51de la République, ont montré une subjectivité pleinement assumée par les juges.
10:56Alors cette subjectivité, elle n'a cessé de croître depuis des années, même des décennies.
11:02Et elle touche, encore une fois, pas seulement les grands procès emblématiques, elle se
11:08voit beaucoup dans les procès contre les élus.
11:12Il y a aussi de la subjectivité qui a beaucoup grandi pour les procès des autres, mais là,
11:18elle est assumée ouvertement, et ces procès-là nous la font voir.
11:21Maintenant, les élus locaux, l'élu local qui est condamné pour prise illégale d'intérêt
11:28parce que sa municipalité a vendu un bien à quelqu'un avec qui il avait des liens
11:36d'amitié, avec qui il avait été partenaire de golf, je cite la cour de cassation, il
11:42suffit qu'il ait eu des liens d'amitié et qu'il était son partenaire de golf, alors
11:46qu'il n'y avait aucune irrégularité, que personne n'a contesté le prix, qu'il
11:50n'y a eu aucun préjudice.
11:51C'est la subjectivité pure, pour Eric Dupond-Moretti, c'était l'inimitié, c'est l'inverse,
12:00et pour Nicolas Sarkozy, dans les deux cas, personne n'empêchera de constater que l'essentiel
12:07de l'accusation est fondé sur une construction intellectuelle, un pur faisceau, donc subjective,
12:13on prend quelques faits, quelques bribes de conversation téléphonique, on met tout
12:17ça, on regroupe tout ça et on construit une histoire, et c'est cette histoire qui
12:22est jugée, mais c'est une histoire mentale, donc là on est en pleine subjectivité, c'est-à-dire
12:27que la subjectivité judiciaire depuis quelques décennies et de plus en plus dévore la preuve,
12:35et ça c'est quand même un vrai sujet, il faut quand même qu'il y ait quelques éléments
12:38de preuve, même si le code pénal dit que la preuve est libre en droit pénal, même
12:43si le code pénal dit que c'est l'intime conviction du juge qui est tirée des débats
12:48contradictoires qu'il emporte, quand même il faut quelques éléments de preuve, si
12:52vous en êtes, comme on en est aujourd'hui, à condamner quelqu'un pour un pacte de corruption,
13:00pour simplement la pensée du pacte, parce que c'est ça qui était dans le précédent
13:05procès de Nicolas Sarkozy, la pensée du pacte, et donc en réalité la pensée de l'accusation
13:11sur la pensée du pacte, c'est-à-dire il pense la pensée, donc si vous pensez la pensée
13:17du pacte, alors vous êtes coupable, et il y a quand même des grands principes, outre
13:22la séparation des pouvoirs qui est plus respectée dans le procès sur la Libye, c'est quand
13:26même énorme, il y a quand même le doute profita l'accusé, c'est un très vieux
13:32principe jamais démenti dans le droit de tous les pays où il y a vraiment un état
13:39de droit, et là maintenant le doute vous condamne, il faut quand même qu'on réfléchisse,
13:44qu'on s'arrête sereinement, je n'accuse personne, je ne veux pas ouvrir une guerre,
13:48je veux juste dire qu'il faut ouvrir un débat, ouvrir une réflexion collective, parce que
13:52sinon le juge finit par sombrer dans le gouvernement des juges, il va se heurter à la société
13:59d'une part, et il va se heurter à la politique, et dans ce combat frontal, le juge perd toujours,
14:06le droit perd toujours, la liberté perd toujours, parce qu'à la fin vous n'avez pas la dictature
14:10des juges, à la fin vous avez la dictature tout court, et donc il faut que chacun se
14:15mette en face de ses responsabilités, et se dise qu'il faut que chacun se mette des
14:19limites, et si ça n'est pas le cas, si on n'y arrive pas comme ça, c'est la violence
14:23qui l'emportera, et je disais à la fin dans ma tribune, ce qui se passe aux Etats-Unis,
14:29ce qui s'est passé avec les électeurs américains, parce que tous ceux qui ont voulu utiliser
14:34la justice, ou la justice elle-même, qui ont voulu coincer Donald Trump avant l'élection,
14:39ils n'y sont pas arrivés, résultat, ils se sont fait piétiner par le suffrage universel,
14:44et la guerre continue, mais ça, ça n'est peut-être qu'un tout petit avant-goût de
14:48ceux qui nous attendent.
14:49Ça pourrait arriver en France, Henri Guesneau ?
14:50Mais bien sûr, ça peut arriver en France, ça peut arriver partout, toute l'histoire
14:52en est pleine, voilà, l'histoire en est pleine, et donc je crois qu'il est nécessaire, encore
14:59une fois, que chacun prenne bien conscience de ses responsabilités, qu'on ne peut pas
15:02s'en tirer en brandissant l'État de droit, la démocratie, l'indépendance de la justice,
15:07c'est pas possible, il faut se demander, ça n'est pas une réponse, c'est une façon
15:11de clore le débat.
15:12Mais de la même façon, on ne peut pas non plus brandir sans cesse la république des
15:15juges, la tyrannie des juges, etc.
15:17C'est-à-dire qu'il y a quand même un problème là, voilà, on ne peut pas brandir sans cesse,
15:20on constate qu'il y a un problème, si on ne constate pas qu'il y a un problème là, alors
15:23très bien, restons comme ça, et vous verrez où ça finira, voilà, ma conviction profonde,
15:27c'est le cri d'alarme que j'ai voulu pousser.
15:30Après, on peut considérer que c'est néofasciste, que dès qu'on prononce une critique contre
15:36la justice, on s'attaque à la démocratie, à la liberté, etc., mais le problème, c'est
15:42que la vie, ce n'est pas ça, voilà, la vie, c'est bien plus compliqué que ça, la nature
15:46humaine est toujours là, et là, elle nous mène toujours au même endroit, parce que
15:52les mêmes comportements produisent les mêmes effets.
15:54Merci beaucoup Henri Guineau, merci Laëtitia Guinan, Rachel Kahn.

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