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[Droit dans ma blouse] Rédiger un certificat médical pour un proche peut sembler anodin. Pourtant, cet acte engage pleinement la responsabilité du médecin, qu’il soit en activité ou retraité. La délivrance d’un arrêt de travail ou d’un certificat dit « de complaisance » peut exposer à des risques déontologiques… mais aussi pénaux. Les éclairages de Me Dominique Decamps-Mini, avocate chez Theis 360.
Ce que dit le Code de déontologie
En théorie, rien n’interdit à un médecin, même retraité, d’établir un certificat médical pour un proche. Mais en pratique, plusieurs garde-fous déontologiques rendent cette pratique très risquée.
L’article 105 du Code de déontologie impose au médecin d’exercer « en toute indépendance et avec objectivité ». Autrement dit, il doit être en mesure d’évaluer son patient sans conflit d’intérêt.
Dans le cas d’un proche, cette indépendance est difficile à garantir. Le risque est alors que le certificat soit considéré comme « de complaisance », c’est-à-dire rédigé davantage pour rendre service que sur la base d’un réel besoin médical avéré.
L’arrêt de travail : un acte médical à part entière
L’arrêt de travail est un acte thérapeutique. Il ne peut être délivré qu’après un examen médical complet, ce qui exclut toute prescription « de confort » ou sans consultation. Même un médecin retraité reste soumis à cette exigence.
Or, en pratique, un médecin à la retraite n’a souvent plus accès à certains outils réglementaires nécessaires, notamment :
• Le téléservice de l’Assurance maladie pour les arrêts dématérialisés ;
• Le certificat Cerfa officiel ;
• Et surtout, la carte CPS, indispensable pour sécuriser l’envoi.
Sans ces moyens, établir un arrêt de travail conforme devient juridiquement bancal, voire invalide.
Le risque de certificats de complaisance… et leurs sanctions
En cas de plainte, un médecin ayant rédigé un certificat de complaisance encourt deux types de sanctions :
• Déontologiques, avec une procédure disciplinaire devant l’Ordre des médecins ;
• Pénales, notamment si le certificat contient des informations erronées, inexactes ou fausses.
Les sanctions prévues sont lourdes :
• Pour un certificat mensonger ou erroné : jusqu’à 1 an d’emprisonnement et 15 000 € d’amende.
• Pour un faux certificat établi sciemment dans l’intérêt du patient (sans réalité médicale) : jusqu’à 3 ans d’emprisonnement et 45 000 € d’amende.
En conclusion : une pratique fortement déconseillée
Même si le Code de santé publique n’interdit pas explicitement à un médecin retraité de rédiger un certificat médical, la prudence est de mise. En l’absence d’indépendance, de consultation formelle, et sans accès aux outils réglementaires, le risque juridique est réel.
Il est donc vivement déconseillé d’établir des arrêts de travail ou certificats pour ses proches, y compris à la retraite. Pour éviter tout soupçon de complaisance, le respect strict de la procédure médicale reste la meilleure protection.

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Transcription
00:00Raphaël est médecin retraité à Lille.
00:04Il est passionné par la construction en Lego
00:06et s'interroge surtout sur les risques liés à la rédaction des certificats médicaux
00:12et surtout le risque lié à des certificats médicaux de complaisance.
00:17En tant que médecin retraité, est-ce qu'il peut effectuer des certificats pour ses proches
00:22et en particulier la question des arrêts de travail ?
00:30Il faut savoir que l'arrêt de travail est un acte thérapeutique
00:43qui est destiné à évaluer l'état de santé d'un patient
00:47et le médecin va engager pleinement sa responsabilité lorsqu'il va effectuer cet arrêt de travail.
00:54Théoriquement, il peut le faire, mais sur le plan déontologique,
00:59on a quand même quelques garde-fous, notamment la problématique de l'indépendance.
01:03Le médecin va devoir examiner le patient, c'est obligatoire pour un arrêt de travail
01:08et il faut qu'il garde son objectivité, l'indépendance,
01:12qui est prévue à l'article 105 du Code de déontologie.
01:14Ça peut aussi créer une situation pratique compliquée
01:18parce que pour pouvoir aujourd'hui faire des arrêts de travail,
01:21il y a toutes les plateformes dématérialisées,
01:23notamment l'accès au CERFA et à la plateforme de dématérialisation des arrêts de travail,
01:28qui peuvent nécessiter une carte CPS.
01:30Donc en tant que médecin retraité, il peut ne pas avoir accès à ces plateformes
01:34pour pouvoir rédiger ses arrêts de travail.
01:36Donc ce n'est pas réglementairement interdit,
01:39mais il faut prendre toutes les précautions lorsque l'on est médecin retraité.
01:44On va fortement déconseiller de le faire pour à peu près les mêmes raisons,
01:53déontologiques, mais aussi réglementaires.
01:56Lorsque je vais prescrire un arrêt de travail, je dois examiner le patient
01:58et je ne peux pas m'auto-examiner de façon indépendante et objective.
02:03Donc c'est un premier frein.
02:05Le deuxième frein, en fait, ça peut être un conflit d'intérêts,
02:08toujours ce problème d'indépendance, article 105 du Code de déontologie.
02:11Et on peut avoir là beaucoup plus de risques sur le fait que ce soit considéré
02:17comme un arrêt de complaisance, comme un certificat de complaisance.
02:21Ça veut dire que je peux avoir des sanctions déontologiques et pénales.
02:29Lorsque l'on est retraité, c'est surtout la sanction pénale.
02:33Les employeurs qui reçoivent ces arrêts de travail peuvent déposer une plainte
02:37contre le médecin prescripteur.
02:39Donc pour un certificat de complaisance, c'est un an d'emprisonnement
02:43et 15 000 euros d'amende.
02:45Donc là, c'est lorsque ce sont des informations qui sont erronées,
02:49qui ne sont pas complètement complètes, où il y a un problème de date, etc.
02:52Par contre, lorsque ce sont des faux certificats,
02:55donc vraiment pour l'intérêt uniquement du patient,
02:58qui ne repose pas sur une réalité médicale,
03:01là on est plutôt sur l'infraction des faux certificats.
03:05Et c'est 3 ans d'emprisonnement, 45 000 euros d'amende.
03:09Donc en conclusion, il faut prendre énormément de précautions
03:13parce que même si on est médecin retraité ou si on est salarié,
03:18il n'y a pas seulement le volet déontologique,
03:21il y a aussi des infractions pénales associées.
03:24Sous-titrage Société Radio-Canada

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