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Mardi 13 mai 2025, retrouvez Fabien Bossy (Chef économiste France, Société générale CIB), Hervé Goulletquer (Senior Economic Advisor, Accuracy) et Gustavo Horenstein (Responsable Recherche Macro et Allocation d'Actifs, Dorval AM) dans SMART BOURSE, une émission présentée par Grégoire Favet.

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Transcription
00:00Générique
00:003 invités avec nous chaque soir pour décrypter les mouvements de la planète marché.
00:13Fabien Bossier est avec nous ce soir, chef économiste France de Société Générale CIB.
00:17Bonsoir Fabien.
00:18Bonsoir.
00:18Bienvenue, merci beaucoup d'être avec nous.
00:20Ravi de vous accueillir, ravi de retrouver Gustavo Renstein,
00:23le responsable de la recherche macro et de l'allocation d'actifs de Dorval Asset Management.
00:27Bonsoir Gustavo.
00:28Bonsoir.
00:28Et merci à Hervé Gouletker de nous accompagner également.
00:31Bonsoir Hervé.
00:32Bonsoir.
00:32Vous êtes senior economic advisor d'Accuracy.
00:35Hervé, si l'incertitude, et beaucoup d'économistes m'ont appris que plus que les tarifs,
00:40c'était même encore l'incertitude générée par la conduite erratique de la politique économique aux Etats-Unis qui posait problème,
00:48si l'incertitude est le fond du problème, est-ce qu'avec une dynamique de négociation commerciale,
00:54est-ce qu'on est en train d'effacer une partie de cette incertitude ?
00:58Et de regagner au moins en partie, et la question étant dans quelle mesure, en visibilité pour la suite ?
01:04Alors, les marchés ont envie de répondre que la normalisation est en marche, ça se voit au niveau des marchés actions, ça se voit dans la relation entre taux longs et dollars.
01:17Donc, on peut avoir le sentiment ou une illusion, la perception de normalisation, mais en fait, je ne crois pas qu'il y ait de linéarité dans la tendance.
01:27Et en fait, je crois qu'il y a trois niveaux qui permettent de dire qu'on n'est pas en train de normaliser.
01:35La première chose, c'est que, à dernière information connue, si les marchés nous disent, voilà, le pire est passé,
01:44les enquêtes de conjoncture, la confiance reste à un bas niveau, le consommateur américain, c'est évident,
01:50les entreprises, c'est quand même coup ci, coup ça. Donc, en fait, est-ce qu'il y a adéquation ?
01:56On n'en sait trop rien parce que les temporalités des sondages ne sont pas exactement les mêmes.
02:01Mais bref, première prudence. Deuxième prudence, puisqu'on a affaire au président Trump et à son art du deal,
02:08à quel stade en est-on de la négociation trumpienne ? Est-ce qu'on ne va pas réavoir des périodes de tensions devant nous ?
02:17On n'en sait rien. Mais en fait, s'il y a des gens qui ont essayé de découper l'art du deal en tranches,
02:23normalement, il y aurait d'autres tensions devant. Et puis, il faut bien voir qu'on est en train de vivre un changement d'époque
02:30et que, est-ce que le marché des capitaux a pris toute la mesure de ce changement d'époque sur la géoéconomie,
02:37donc la relation entre l'économie et puis la géographie humaine, on va dire les choses comme cela.
02:43Certes, il y a les tarifs, il y a les droits de douane. On dit « Ah ben voilà, c'est plus comme avant ».
02:48En n'oubliant pas tout de même que parler de normalisation, alors que le droit de douane moyen américain est passé de 2 à 7 ou 8,
02:57et aujourd'hui, on pousse un ouf de soulagement parce qu'on n'est plus à 25 ou à 20 et qu'on est à 7 ou 8.
03:03Il y a quelques petits mois de cela.
03:05Moi, j'ai un chiffre un peu plus élevé que 7 ou 8. Mais bon, enfin, il y a peut-être débat sur les sources qui permettent de suivre
03:11les tarifs moyens pondères aux Etats-Unis. Voilà, ce sont parfois diverses.
03:16Voilà, mais bon, ça peut être même un peu plus que 7 ou 8, selon les calculs.
03:21Non, non, mais je vous l'accorde sans problème.
03:23Mais il y a quelques trimestres, ça aurait été un effroi.
03:26Et donc, parler de normalisation alors que la situation est effroyable, c'est un peu particulier.
03:33Mais derrière cela, il faut quand même bien voir qu'en géoéconomie, on entre un peu dans le capitalisme de la finitude.
03:41Au niveau du sourcing, il y a la démographie, qui n'est pas très bonne.
03:45Au niveau de l'accès aux matières, on voit bien que les terres rares, c'est compliqué.
03:51On voit bien que la transition énergétique nous emmène dans un monde différent.
03:54Et puis, au niveau des marchés, les marchés ont tendance à se rétrécir.
03:59Et donc, en fait, le capitalisme de la finitude, c'est quand même un fonctionnement de l'économie différent de celui d'avant.
04:07Celui d'avant, c'était les marchés qui s'ouvraient, c'était la mondialisation.
04:11Et puis, il n'y a pas que la géoéconomie, il y a la géopolitique aussi.
04:15Alors, on voit bien, on a tous été effrayés par Trump qui disait, tiens, je vais prendre le Groen Lang.
04:21Et si, le Canada devenait le 51e État.
04:24Mais on voit bien qu'on a notre série de guerres aujourd'hui.
04:28Et en fait, derrière tout cela, il y a quand même un rapport entre les pays qui est en train de changer.
04:34Alors, on a parlé de ce monde qui vivrait une pluralité de pouvoirs.
04:40Mais en fait, moi, j'ai l'impression, quand on regarde Trump, on n'est pas face à ça.
04:44On est un peu face à un nouveau concert des nations.
04:47Le congrès de Vienne, 1815.
04:49Où les grandes puissances européennes s'étaient dit, on organise l'Europe à défaut d'organiser le monde.
04:53Mais aujourd'hui, Chine, Russie, États-Unis organisent tout ça.
04:59Quelle est la place pour les autres ?
05:00Même l'Inde, même l'Europe.
05:02Et en fait, tout ça, toute cette imbrication entre géoéconomie et géopolitique,
05:07ça fait sans doute un fonctionnement de l'économie très différent.
05:10Un fonctionnement derrière, quoi.
05:12Ou une caisse de résonance des marchés très différente.
05:15Et donc, tous ces éléments mis bout à bout, normalisation, non.
05:18Bon. Donc, vous prenez avec beaucoup de distance le fait que les indices actions, par exemple,
05:23soient revenus en quelques semaines sur les niveaux qui prévalaient avant le jour de libération,
05:27si je comprends bien, Hervé.
05:28Et il faut prendre avec autant de prudence un rapport sur l'inflation tel qu'on l'a vu pour le mois d'avril,
05:34publié aux États-Unis.
05:36On n'a encore rien vu des effets de ce que vous décrivez.
05:40Il n'y a pas que la politique tarifaire de Trump.
05:42Beaucoup de choses sont en train de bouger.
05:44Le monde est en train de se recomposer d'une manière assez différente.
05:47On n'a rien vu encore de tous ces effets.
05:49Non. Je pense qu'il y a des choses qui sont en mouvement.
05:52Et donc, les références d'hier ne valent vraisemblablement pas pour les extrapolations.
05:57Alors, c'est compliqué.
05:59Mais c'est là où, si on dit tout est lié à l'incertitude,
06:02le thème de l'incertitude, il n'est pas fini.
06:06On va rester dedans.
06:07Quant au prix, ce qui se passe sur les services, ça chatouille tout de même un peu.
06:11Parce que 3-6 en glissement sur un an sur les services,
06:14il faut vraiment que le prix des marchandises reste très, très sage
06:18pour qu'on soit à 2 sur les indices d'ensemble.
06:20Or, sur les marchandises, il y a la crainte avec les droits de douane.
06:24Et puis, le dernier chiffre de productivité aux Etats-Unis
06:26qu'on a connu la semaine dernière sur le premier trimestre,
06:29il n'était pas bon.
06:30Les coûts salariaux unitaires d'un trimestre à l'autre,
06:33ce n'était pas bon non plus.
06:34Donc, en fait, sur l'inflation, l'histoire n'est pas finie.
06:38On aimerait qu'elle soit mise derrière.
06:41Mais je ne crois pas qu'on puisse déjà dire cela.
06:42Je vous ramène aux deals ou aux prémices de deals commerciaux en cours.
06:48Alors, il y a eu un accord plus ou moins formel quand même
06:51entre les Etats-Unis et le Royaume-Uni, Gustavo.
06:54Il y a cette discussion qui se formalise entre la Chine et les Etats-Unis.
07:00D'autres deals qui sont encore à conclure d'importance
07:02avec le Japon, alliés stratégiques, avec l'Union européenne.
07:05On a l'impression qu'on reste bloqués pour l'instant un peu au niveau technique
07:08en termes de négociations entre les Etats-Unis et l'Europe.
07:11Mais est-ce qu'il y a déjà des leçons à retirer de la manière dont la situation s'est dénouée
07:16entre les Etats-Unis et le Royaume-Uni et dont la situation pourrait se dénouer ?
07:20Alors, qu'est-ce qui est possible en 90 jours entre les Etats-Unis et la Chine ?
07:25Oui, c'est très complexe parce que, d'abord, fondamentalement,
07:27des accords commerciaux, ça met des années à se négocier.
07:30C'est extrêmement complexe.
07:32Donc, je crois qu'en réalité, du point de vue des investisseurs et sur les marchés financiers,
07:37le détail n'est pas extrêmement important.
07:39Ce qui compte, c'est le ton dans toute cette histoire.
07:43Or, la désescalade est là depuis un certain temps déjà.
07:46C'est dans cette logique...
07:47Depuis l'8 avril.
07:48Ça a été assez rapidement parce que le calcul des économistes a été assez rapide
07:54pour dire que si on fait un embargo sur les importations chinoises, il y avait un problème.
07:57Ça ne marchera pas, oui.
07:58Donc, ça, ça ne marche pas.
07:59Bessent l'a dit très rapidement.
08:01Après, il a fallu peut-être convaincre Trump, etc.
08:04Il y a des choses liées à la politique américaine et au débat interne au gouvernement américain.
08:09Mais fondamentalement, le deal anglais ou le deal chinois,
08:12ce n'est pas ça qui est le plus important.
08:14Ce n'est pas le détail.
08:15C'est plutôt la désescalade verbale
08:17et le fait qu'on croit comprendre que Trump,
08:21contrairement à ce qu'il a pu dire à un certain moment,
08:23il ne veut pas du tout provoquer des énormes coups dans l'économie,
08:26une récession, etc.
08:29Donc, une fois les bravades passées,
08:30en fait, il n'a aucun intérêt de créer un énorme choc maintenant.
08:36Donc, on fait des deals, c'est-à-dire qu'on noie ça dans le temps et puis on verra.
08:40Et ça veut dire qu'on prépare...
08:41Il s'agit de se fâcher maintenant avec qui que ce soit.
08:44Alors, il y a le cas européen, évidemment,
08:45parce que tout le monde se tourne maintenant vers les négociations avec l'Union européenne.
08:50Je te rappelle, les tarifs réciproques pour l'Union européenne, par exemple,
08:52sont suspendus pour 90 jours depuis le 8 avril.
08:55Donc, ça nous mène à début juillet.
08:57Enfin, voilà.
08:58Là aussi, il y a toujours un compteur qui tourne quand même de ce point de vue.
09:00Et il va être aussi compliqué, peut-être même plus compliqué en un sens avec l'Union européenne,
09:05ses spécificités et le fait que, vraisemblablement,
09:08il y a une haine farouche du président américain vis-à-vis de l'Union européenne,
09:12pas forcément des pays eux-mêmes, mais de l'Union européenne comme ensemble.
09:14Bon, mais le point important, je crois, c'est que, dans la mesure où il ne veut pas faire souffrir profondément
09:21l'économie américaine, ni les consommateurs américains,
09:23bon, ça veut dire que ça limite un petit peu la capacité de, disons, vraiment de faire du mal
09:29dans ce cadre de ces négociations.
09:31Donc, on peut espérer quand même que ça peut bouger un peu sur le discours,
09:37mais fondamentalement, il n'y a pas l'envie de créer des énormes problèmes pour l'économie américaine elle-même.
09:43Je prends tout à fait le point. J'imagine bien que Trump n'a pas envie de s'aborder l'économie américaine.
09:49Ce n'est pas non plus le mandat pour lequel il était.
09:51Oui, mais la question étant, est-ce qu'il n'y a pas déjà des dommages, quand même, qu'il va falloir voir à un moment ?
09:59Bien sûr, ça a été dit. De toute façon, ce qui s'est passé, si on regarde comment les économistes ont révisé à chaque fois,
10:05donc le 2 avril, le 9 avril, le 15 avril, et maintenant le 12 mai,
10:10grosso modo, au maximum de la tension, je crois qu'il y avait une hausse de 3%, quelque chose comme ça,
10:18du niveau des prix aux Etats-Unis, mesuré par le PCE,
10:21et puis ça allait coûter quelque chose comme un point de PIB sur l'ensemble de l'année 2025.
10:25Tout ça a été grosso modo divisé par deux, on va dire, pour fixer les idées.
10:31Donc on revient sur un schéma de ralentissement de l'économie américaine,
10:35mais en évitant des risques extrêmes, d'une récession du moins profonde.
10:40Voilà, pour créer vraiment une récession, vraiment, tout d'un coup, l'économie chute très très brutalement.
10:45Par contre, oui, il y aura effectivement des hausses de prix, et donc on va avoir des conséquences.
10:49Est-ce que ces hausses de prix vont être inflationnistes ?
10:51Là aussi, c'est compliqué, puisque ça dépend aussi beaucoup de dans quel environnement
10:54et dans quel narratif ça a lieu.
10:57Il faut pas oublier qu'à la fin, l'inflation, c'est quand même des entreprises,
11:00des milliers d'entreprises, qui augmentent effectivement leur prix.
11:02Donc après l'effet mécanique, peut-être, de transmission,
11:06les effets de second tour sont plus ou moins compliqués, ils sont incertains.
11:10Je pense quand même que, vu la sensibilité très forte déjà indiquée des consommateurs américains
11:15à hausses de prix, c'est pas évident d'augmenter massivement ces prix
11:19ou d'utiliser, on va dire, le moment pour une entreprise pour augmenter ces prix sans justification.
11:24On n'est plus dans le même univers ou dans le même monde qu'il y a deux ou trois ans
11:29où tout le monde pouvait se permettre, même sans un pouvoir de fixation des prix énormes,
11:34de monter ses prix.
11:35Oui, c'est un peu ce qui s'est passé après le Covid.
11:37Il y a quand même eu des hausses de prix stratégiques, tout le monde a augmenté ses prix,
11:41comme ça passe, tout le monde le fait, je le fais aussi, hop.
11:44Bon, là, ça va être plus difficile de le faire sans pouvoir vraiment le justifier.
11:48Mais bon, évidemment, il y aura bien une hausse des prix,
11:51il va voir comment ça impacte l'ensemble de l'économie américaine.
11:56Sachant qu'encore une fois, l'économie américaine, c'est une économie relativement fermée
11:58où les services sont ultra dominants.
12:00Donc cet effet-là est relativement petit quand même.
12:03Fabien, alors vos commentaires sur cette vue un peu globale de détente commerciale.
12:10Et puis un point que vous apportez également dans cette discussion,
12:14c'est la justification des droits de douane, la capacité d'un homme, le président américain,
12:20à travers une utilisation frénétique des executive orders,
12:24de mettre des tarifs ici et là, du jour au lendemain, d'une heure à l'autre, etc.
12:28Donc ça a généré beaucoup de débats aux États-Unis.
12:31Est-ce qu'il faut laisser ce pouvoir au président des Américains ?
12:33Est-ce qu'il faut que ce pouvoir soit rapatrié à un moment au Congrès ?
12:37Il y a toute une question juridique aussi derrière cette politique tarifaire.
12:41Alors effectivement, il reste quand même des incertitudes juridiques assez importantes
12:45sur les décisions qui ont été prises par le président Trump.
12:48On a été un peu surpris, on a été pris de court par ces décisions qui sont venues très rapidement.
12:53Et c'est une guerre commerciale, mais c'est une guerre éclair commerciale qui a eu lieu.
12:57Il a mis ses droits de douane, il les a enlevés, il les a montés contre la Chine,
13:02il les a enlevés aussi très rapidement.
13:05Et tout ça, c'est basé sur des fondements juridiques finalement assez douteux.
13:09Là où les droits de douane qui avaient été mis sur la Chine lors de son premier mandat
13:13étaient sur une base juridique assez solide et n'ont pas été contestés,
13:17les nouveaux droits de douane...
13:17C'était quoi, la sécurité nationale ?
13:19C'était la sécurité nationale qui était en jeu.
13:22Et là, il s'appuie sur un autre texte de loi plus général
13:26qui, selon lui, lui donne le droit de mettre ses droits de douane universels sur tous les pays.
13:32Il y a des procédures juridiques qui sont en cours,
13:36d'entreprises privées, d'États fédéraux qui ont attaqué ces droits de douane
13:43en disant que les droits de douane, ce sont des taxes, c'est un pouvoir qui vient du Congrès.
13:49Et le président Trump s'est un petit peu avancé pour mettre ses droits de douane.
13:53Il faut se rappeler que dans les années 70, le président Nixon avait fait une manœuvre très similaire
13:57en imposant des droits de douane de 10% sur l'ensemble des États,
14:01là aussi en arguant du fait qu'il y avait un déficit commercial et qu'il fallait le régler.
14:04Ça avait duré cinq mois et juste après cela, le Congrès avait passé une loi
14:09pour encadrer l'utilisation des droits de douane pour éviter de se retrouver dans ce cas de figure
14:14où un président décide unilatéralement de taxer l'ensemble des importations.
14:20Alors, le processus juridique est en cours, on ne va pas préjuger de son issue.
14:25Le gouvernement américain, les cours américains ont toujours beaucoup de respect pour le pouvoir exécutif,
14:30donc on verra exactement ce qu'il en ressortira.
14:32Mais on peut penser effectivement que le gouvernement Trump a aussi ça en tête,
14:35qu'il a une certaine incertitude juridique.
14:37Et ça le pousse peut-être aussi à mener cette guerre de façon rapide
14:40parce qu'il sait qu'il n'est pas forcément sûr de lui-même.
14:44Et s'il peut obtenir le plus de concessions assez rapidement,
14:49même si jamais finalement les cours le contredisent,
14:53il aura quand même gagné ça en contrepartie.
14:55Donc c'est quelque chose à suivre.
14:57C'est une incertitude de plus qui n'aide pas vraiment la situation,
15:03mais qui au moins va plutôt dans le bon sens.
15:05Si jamais les cours contredisent, ça nous rassurera plus tôt.
15:09Il y a peut-être un frein juridique aussi effectivement
15:11qui explique cette dynamique rapide de l'administration américaine.
15:16Voilà, il faut aller vite.
15:17Il faut aller vite.
15:18Quand on n'est pas sûr de soi, il vaut mieux essayer de prendre tout le monde de cours.
15:21Encore une fois, c'est une guerre commerciale, mais c'est une guerre éclair.
15:24Et le fait de mettre des deadlines de 90 jours qui sont beaucoup trop courtes
15:29pour obtenir des accords commerciaux importants,
15:32c'est aussi une manière pour le président Trump de marquer le coup.
15:35Et même si jamais il devra se servir d'autres outils dans le futur
15:40pour dire que voilà, c'est mon objectif.
15:43C'est mon objectif.
15:44Au pire, il faudra que je me serve d'autres outils,
15:46mais c'est ça que je veux obtenir.
15:48Et il dit à ses partenaires étrangers, voilà, c'est ça que vous devez mettre sur la table.
15:52Et en allant le plus rapidement possible, en essayant de prendre tout le monde de cours,
15:55il essaye de ne pas trop se poser la question de comment faire.
15:59Et puis advienne qu'on pourra.
16:01Alors maintenant, en parlant de la France, on a parlé d'économie fermée.
16:05Alors les Etats-Unis sont une économie fermée.
16:08La France, relativement, est aussi assez fermée comparé aux autres pays européens.
16:12Et c'est vrai qu'on abordait cette année dans une position assez compliquée.
16:16On avait nos propres problèmes d'incertitude politique.
16:19On avait une croissance qui est assez peu à lente.
16:23Ça fait trois trimestres qu'en moyenne, on est à 0,1% l'an.
16:26Donc c'est assez faiblard.
16:28Et ce qui est assez étonnant, c'est que ces derniers temps, les dernières nouvelles,
16:31on a eu par exemple une enquête par Grant Thornton pour Challenge auprès des dirigeants de PME.
16:37Alors ça a été conduit autour de l'annonce des droits de douane, donc une partie avant, une partie après.
16:42Mais ils montrent que leur niveau de confiance dans l'économie française était en avril au plus haut depuis trois ans.
16:49Alors c'est assez étonnant.
16:51C'est contre-intuitif, oui.
16:52C'est très contre-intuitif parce que déjà qu'on n'allait pas bien et on a eu toutes ces nouvelles de guerre commerciale.
16:58Et finalement, les dirigeants de PME sont assez optimistes.
17:01On a eu l'indice de PME manufacturier en avril.
17:04Donc lui conduit après l'annonce des droits de douane.
17:07La composante de production est en zone d'expansion en avril pour la première fois depuis trois ans.
17:14C'est un signal confirmé par l'indice de confiance de l'INSEE qui montre lui aussi des perspectives personnelles de production en hausse.
17:21Alors on peut penser qu'il y a des effets d'anticipation que les industriels vont produire pour envoyer aux Etats-Unis le plus possible.
17:26Alors je veux bien.
17:27Mais les exportations vers les Etats-Unis de la France, c'est quand même assez faible.
17:32Et en plus, n'ont pas forcément explosé dans les données de Mars.
17:36Elles montrent une hausse vers les Etats-Unis, mais rien d'exceptionnel.
17:39On voit quelques effets sectoriels, mais rien de vraiment massif.
17:44D'où provient cette résilience ?
17:47Il faut regarder la France, mais l'Europe toujours en ayant en tête les biais ou le biais un peu pessimiste qu'on peut avoir quand on parle de la France au sein de la zone euro.
17:58Mais en essayant de gommer ça, justement, d'où vient la résilience de l'économie française à ce stade ?
18:03Alors il y a quelque chose qu'il faut avoir en tête.
18:05C'est que ça fait quand même trois ans, voire même quatre ans, qu'en France et en Europe en général, on a subi quand même un choc monétaire assez important.
18:14Et la France qui avait un secteur de la construction qui avait beaucoup profité de la période de taux zéro, il y a eu un coup d'arrêt, un coup d'arrêt très fort.
18:22Et pendant plusieurs mois, depuis 2-3 ans, l'activité de la construction a fortement chuté en France.
18:30Il y a eu un très fort ralentissement.
18:31Tous ceux qui s'intéressent au secteur immobilier, les Français en sont très friands, bien entendu, des nouvelles immobilières, le savent que le marché a nettement ralenti.
18:39Et ce qu'on observe, c'est que le marché a quand même digéré en grande partie ce choc de taux.
18:44Et on commence à voir des indices avancés de stabilisation dans le secteur.
18:49Les ventes se sont stabilisées à des niveaux finalement pas si bas que ça dans l'ancien.
18:55La confiance des promoteurs immobiliers se redresse assez lentement.
18:59Les autorisations de chantier se sont stabilisées aussi.
19:03Alors la construction, c'est un paquebot.
19:05Il y a un point en bas là, vous dites quand même, Fabien.
19:07On a plusieurs signaux qui ont effectivement, après une forte phase de baisse en 2023-2024, depuis plusieurs mois, se stabilisent.
19:14Et ce qui colle assez bien avec la stabilisation des taux d'intérêt.
19:17Il y a un délai entre la stabilisation, entre les taux, les ventes, l'activité.
19:24Et c'est ce qu'on observe jusque-là.
19:25Et la construction, alors il y a un article de recherche économique fameux sorti en 2007 américain qui dit que le logement c'est le cycle des affaires.
19:35En France, on a une citation d'un député au milieu du 19e siècle.
19:38C'est que quand le bâtiment va, tout va.
19:39Alors le bâtiment est loin de bien aller, mais il va moins mal peut-être qu'avant.
19:44En tout cas, la dynamique, la seconde dérivée s'améliore.
19:48On n'est pas encore forcément tiré d'affaires.
19:50On a les élections municipales qui arrivent en début d'année prochaine et qui sont généralement, la période juste avant les élections, juste après, n'est pas la plus favorable à la construction.
19:58Donc un peu de prudence avant de parler vraiment de reprise.
20:01Mais le cycle domestique français montre des signes d'amélioration.
20:05Et on peut avoir quelques motifs d'espoir pour l'année à venir avec des prévisions de croissance par le consensus qui montrent un rebond de la croissance en 2020.
20:16Et c'est quoi ? Merci la BCE en l'occurrence, là, quand on parle du secteur immobilier, de la construction en particulier.
20:21Ce sont déjà aussi... Enfin, ce point bas, il est accompagné des premiers effets de baisse de taux avec un décalage, une inertie liée à la diffusion de la politique monétaire.
20:31Mais on est dans ce moment-là ?
20:33Alors c'est effectivement le secteur... C'est l'effet diffus et avec délai de la baisse des taux d'intérêt.
20:43Après, on parle de baisse des taux d'intérêt. La BCE, on ne les voit pas passer dans une zone vraiment accommodante.
20:49Et ce qui compte pour l'immobilier, pour l'investissement en général, ce sont les taux longs, les taux longs qui, quand même, ont baissé, mais pas dans des proportions massives.
20:59C'est vraiment une histoire plus de stabilisation. On a changé de niveau. On était à des taux extrêmement bas en 2021.
21:07On a changé de palier. Maintenant, on se stabilise à ces nouveaux taux. Et le marché s'est habitué progressivement.
21:14On a digéré ce changement. On n'a pas besoin de baisse de taux maintenant pour espérer que ça se reprend.
21:21Il faut juste espérer qu'on nous laisse un peu tranquille.
21:25Que la stabilité perdure.
21:28Mais le cas de la France, c'est toujours intéressant, évidemment. Mais le cas de l'Europe dans son ensemble.
21:32L'idée d'une reprise graduelle de l'économie en zone euro, malgré un choc de tarifs qu'il faudra encaisser à un moment ou à un autre,
21:44c'est une histoire qui continue, qui court encore aujourd'hui, Hervé ?
21:49J'aimerais avoir l'optimisme de Fabien.
21:53Il n'a pas quantifié. Je n'ai pas demandé de quantifier les choses, mais on pourra le faire.
21:58Moi, j'ai quand même l'impression que le monde vacille un peu sur ses bases économiques.
22:05Et spécialement en Europe.
22:06L'Europe, c'était quand même un modèle économique qui, via l'Allemagne, était quand même bien centré sur un tempo qui venait du reste du monde.
22:21La grande exportation allemande, pour partie la grande exportation italienne et irlandaise, avait tendance à irriguer l'économie européenne.
22:30Là, l'économie allemande reste en panne. On est déjà à deux années de récession. On ne sait pas si cette année, ça sera mieux.
22:39Alors, le premier trimestre a été une petite bonne surprise.
22:42Mais les histoires de Donald Trump des États-Unis et donc les anticipations sur les ventes expliquent au moins en partie cette bonne surprise.
22:53Combien de temps va mettre l'Allemagne pour se recentrer ?
22:58Combien de temps va-t-il falloir aux Européens pour comprendre que dans ce monde nouveau, il faut moins compter sur la grande exportation
23:07et plus sur les échanges internes à l'Europe, internes à la zone euro, avec toutes les questions que ça pose en termes de réglementation, en termes de financement ?
23:19Pour le coup, là, les questions sont sur la table. Enfin, tout est sur la table aujourd'hui, Hervé.
23:25Il y a une rationalité économique qui ferait dire qu'il est urgent d'unifier nos marchés intérieurs
23:33parce que c'est sans doute l'un des moyens que l'on a de redonner un surcroît de croissance.
23:40L'autre moyen étant plus compliqué, ça va être l'investissement dans la transition énergétique, ça va être l'investissement dans la défense.
23:47Tout ça, ça demande de l'argent et ce n'est pas toujours facile. Donc je pense que l'unification, enfin, des marchés européens est une vraie nécessité.
23:56Économiquement, tout le monde le comprend, tout le monde l'accepte. Politiquement, c'est quand même assez compliqué.
24:02On est quand même face à des rapports de force avec un poids important des partis plus nationalistes, plutôt timides en termes européens.
24:13Donc on est face à cette contradiction entre la nécessité économique et la contrainte plus politique que l'on a.
24:21Combien de temps cela va-t-il prendre pour vraiment aller au bout de l'unification des marchés qui serait un des moteurs ?
24:28Vous n'êtes pas convaincu que cette fois, c'est la bonne, quoi ?
24:30Non, je ne suis pas convaincu.
24:31Non, mais c'est la première tentative d'aller à un étage supplémentaire en matière de fédéralisme ou d'unification.
24:38On a eu les démonstrations. Le FMI le démontrait depuis longtemps, mais on s'en moquait un peu.
24:43Il a fallu attendre l'État et Draghi, merci à nos amis italiens, pour nous dire, oui, il faut vraiment qu'on y aille.
24:51On l'a. Les Européens les plus fervents, je ne sais pas, les Macron, les Mers vont dans ce sens-là.
24:58N'empêche qu'il faut tirer les autres et politiquement tirer les autres avec en plus des...
25:05Alors, l'Allemagne a passé son tour au niveau des élections. L'Italie, ce n'est pas pour tout de suite.
25:10Mais en France, il y a quand même beaucoup d'incertitudes, une fois encore.
25:16Et donc, tirer l'Europe dans ce contexte-là, durablement, ça ne va pas être simple.
25:22Donc, moi, je pense que l'Europe, c'est bien qu'il faut qu'elle change.
25:27Est-ce qu'aujourd'hui, on a un poids politique, un consensus politique qui permette de le faire ?
25:34Pas évident.
25:35Question du capital politique.
25:37Sur l'Europe, la France aussi, je veux bien qu'on parle de la France.
25:40C'est quand même intéressant de se focaliser un peu sur notre économie de temps en temps.
25:43Oui, oui. En fait, ce qui s'est passé ces derniers mois, finalement, il y a trois choses, il me semble, qui aident un peu l'Europe à avoir quelque chose d'un peu positif.
25:51Oui.
25:52Parce que les problèmes structurels, évidemment, sont là. On les connaît, les rapports.
25:55Bon. Mais disons à plus court terme.
25:58Il y a trois choses. Bon, évidemment, c'est le plan allemand.
26:01Donc, c'est quand même un changement important qui prendra du temps.
26:03Il y a sûrement une discussion sur à quelle vitesse ça arrive dans l'économie, probablement.
26:07Mais bon, on sait qu'on a devant nous, quand même, sur plusieurs années, une impulsion budgétaire en provenance d'Allemagne.
26:15Deuxième chose, la Banque Centrale Européenne, qui est dans cette phase de baisse de taux et qui, selon nous, va continuer ces baisses de taux.
26:24Un peu, beaucoup ?
26:25Ça, c'est favorable.
26:26Ce qui a été pricé à un moment, on disait, voilà, des taux qui vont à 1,5 d'ici la fin de l'année.
26:31On reste sur cette idée-là.
26:33Bon, après, on ne va pas se battre avec deux ou trois baisses.
26:35À la limite, ce n'est pas ça qui change radicalement la question.
26:39Mais quand même, une Banque Centrale Européenne qui participe, qui prend aussi son responsabilité, ça part de cet effort-là.
26:49Et puis, troisième chose, c'est les prix de l'énergie qui baissent globalement, le pétrole, le gaz.
26:54Et ça, c'est aussi quelque chose de positif, sans même parler éventuellement de quelque chose qui...
27:00Voilà, ça serait un cessez-le-feu en Ukraine, qui est là, encore plus spéculatif.
27:04Je n'ai évidemment aucune information et aucune idée.
27:06Mais qui permettrait de retirer encore une prime de risque ou d'incertitude.
27:08Exactement, qui sera plutôt aussi dans le bon sens.
27:10En tout cas, il y a trois éléments qui sont certains, le quatrième étant beaucoup plus spéculatif.
27:14Mais il y a trois éléments qui nous semblent quand même assez clairs et qui sont plutôt favorables.
27:19Est-ce que c'est un changement de paradigme ? Non, évidemment.
27:21Mais c'est comme ça que, peu à peu, la croissance européenne peut...
27:25Et c'est un argument de marché aussi pour vous, Gustavo ?
27:27Dans une approche un peu globale macro, ce que vous décrivez de l'Europe, c'est aussi un argument pour, je ne sais pas,
27:34surpondérer des actifs européens aujourd'hui dans des stratégies.
27:37Ou en tout cas, se dire que la performance des actifs européens peut être au moins équivalente,
27:44voire supérieure à ce qu'on peut observer sur la performance des actifs américains.
27:48C'est pour arrêter de sous-pondérer, ce qui a été le cas de beaucoup d'investisseurs pendant très très longtemps.
27:52Donc au minimum, effectivement, d'être bien investi sur les marchés européens
27:58et mieux équilibré entre les Etats-Unis et l'Europe.
28:01Après, dans nos fonds internationaux, on n'est pas dans une sorte de course à l'exclusivité.
28:06Diversifier est toujours une bonne idée.
28:07Donc on a des deux marchés, mais bon, moins que ce que ça représente, évidemment, capitalisation dans l'ensemble.
28:14Parce que les Etats-Unis restent quand même dominants en termes de poids, forcément.
28:17Je reviens à la France spécifiquement.
28:20Fabien, oui, si on peut quantifier un peu les choses.
28:22Donc point bas dans la construction, partie importante et plutôt signal positif pour le cycle des affaires, comme vous dites.
28:29Mais qu'est-ce qu'on peut attendre en termes de quantité de croissance cette année en France ?
28:33Et comment cette croissance se décompose ?
28:36Alors le consensus cette année est à 0,5% pour la croissance en 2025.
28:41C'est bien que c'est bas, c'est plus bas que les années précédentes.
28:44Après, il faut avoir en tête que la croissance d'une année, c'est généralement la croissance des derniers trimestres de l'année précédente du début d'année.
28:50Ça reste un chiffre qui, en fait, nous informe plus sur le passé que sur les choses qui se passent vraiment en ce moment.
28:58Et le chiffre 2026, par contre, pointe à une croissance plutôt proche de 1%, plus proche du potentiel.
29:05Mais ce qui est plus intéressant, c'est moins le chiffre lui-même parce que 1% de croissance, on l'a fait en 2024, on l'a fait en 2023, on l'a fait en 2022.
29:11Il n'a rien d'exceptionnel.
29:12Ce qui va être plus intéressant, c'est la composition de cette croissance parce que ça fait 3 ans que la croissance française, c'est largement de la demande extérieure et de la demande publique
29:20avec une demande domestique privée à tonnes, une légère hausse de la consommation et des dépenses d'investissement qui baissent.
29:28Et ce qu'on espère, c'est justement de changer de braquet, de revenir à une composition plus naturelle de la croissance avec un peu plus de consommation
29:35et surtout une stabilisation des dépenses d'investissement.
29:37Alors là encore, c'est quelque chose qui prend du temps, notamment dans la construction, lorsque les ventes se stabilisent à l'instant T.
29:44C'est un signal sur l'activité à T plus 12 mois, T plus 18 mois.
29:48Ça prend du temps, mais les choses allant dans le bon sens.
29:51On peut espérer une croissance qui va rebondir en 2026 et qui aura une meilleure composition et qui pourrait revenir à la normale en termes de composition d'ici 2027.
30:00Là encore, au gré des incertitudes politiques internationales comme domestiques notamment,
30:05mais si on regarde de loin le cycle, on observe des cycles plutôt un peu meilleurs que ce qu'on a connu les années précédentes.
30:15Est-ce que tout ça facilite alors ce qu'on appelle l'exécution budgétaire, sans même parler du débat à venir sur où trouver des économies en France,
30:22qui est un débat qui appartient à la sphère politique, on va le dire comme ça aujourd'hui,
30:26mais est-ce que cet environnement permet à la France de maîtriser son éducation budgétaire, dépenser ce qu'on a dit qu'on dépenserait,
30:35percevoir ce qu'on a dit qu'on percevrait, au regard des dérapages qu'on a pu observer justement sur les derniers exercices ?
30:41Alors c'est vrai que cette mauvaise composition de la croissance avec beaucoup plus d'exportations,
30:44beaucoup plus de demandes publiques que ce qu'on espérait,
30:47c'est un facteur qui a été mentionné comme pouvant expliquer un petit peu les prévisions un peu trop optimistes sur les recettes publiques,
30:57on peut espérer qu'effectivement on sera un peu plus en ligne avec les anticipations dans les années à venir,
31:06après ça reste un facteur de second ordre sur le déficit français qui reste un problème largement structurel plus que cyclique.
31:13Bon, on n'en parle plus trop, je regardais quand même le spread, oui, ça tourne toujours autour de 70 points de base, c'est ça ?
31:19C'est un new normal maintenant pour la France ?
31:21C'est un new normal, on garde un niveau d'incertitude politique relativement élevé,
31:26et en l'absence de majorité à l'Assemblée, c'est quelque chose qui risque de durer,
31:31les investisseurs étaient habitués à une forte stabilité politique en France,
31:36c'est quelque chose qui est parti pour le moment, et ça va mettre, on va mettre, ça se regagne lentement.
31:44Un point aussi sur le marché du travail pour être complet, capacité de résilience du marché du travail,
31:51alors il y a des enjeux démographiques, conjoncturels qui se mélangent dans tout ça,
31:55mais est-ce qu'il faut s'attendre à une remontée forte du taux de chômage ?
31:58Alors là aussi c'est un point qui a quand même surpris ces derniers temps,
32:01c'est la résilience du marché du travail français, malgré ces mauvaises nouvelles,
32:05le taux de chômage reste très bas, et derrière ce taux de chômage bas,
32:09alors on a un emploi privé qui en net baisse récemment,
32:13mais cet emploi net qui baisse, ça cache des flux bruts toujours très élevés,
32:18avec des embauches plus importantes que ce qu'elles n'étaient en 2019,
32:21des démissions toujours très importantes, montrant que les gens sont quand même relativement confiants
32:25dans l'état du marché du travail, alors le chômage il est attendu en hausse
32:29dans les trimestres à venir quand même, avec les effets un peu décalés du ralentissement
32:33qu'on a vu ces derniers trimestres, mais dans une mesure assez modeste,
32:37alors on aura le chiffre du t1 du chômage qui sortira vendredi,
32:40il est attendu en légère hausse, alors il y a un risque haussier qui est lié à des changements méthodologiques,
32:46maintenant de nombreux allocataires sociaux vont être inscrits automatiquement à France Travail,
32:50alors en théorie ça ne devrait pas affecter la mesure du chômage,
32:53qui est basée sur des enquêtes où on demande aux ménages s'ils cherchent du travail,
32:57qu'ils soient ou non inscrits à France Travail, cependant être inscrit à France Travail
33:02ça peut changer la façon dont les gens répondent, et donc il y a un risque haussier sur le marché du chômage
33:07qui n'aurait pas d'impact économique, mais l'effet d'affichage pourrait être un peu négatif,
33:12mais à voir vendredi, et l'INSEE devrait nous expliquer ça en détail,
33:16si jamais il y a un impact un peu hors du commun.
33:18– Oui, bon, sur le cas de la France, la trajectoire de consolidation budgétaire,
33:24comment est-ce que vous la regardez Hervé ?
33:28C'est une chance que la France ait cet effort à faire au moment où l'Allemagne prévoit quand même
33:33de se recentrer ou de pivoter avec une appétence nouvelle pour la dépense budgétaire,
33:40c'est une opportunité pour la France de le faire au moment où les pays périphériques
33:45ont remis beaucoup d'ordre dans leurs finances publiques
33:50et avec, pour certains d'entre eux, des croissances économiques aussi impressionnantes sur les dernières années.
33:57– Alors, il y a deux questions, il y a la réalité française,
34:01et puis après, quel accompagnement européen on aurait de la réalité française ?
34:07– En fait, ce n'est pas l'amélioration de la conjoncture qui va nous créer
34:12beaucoup de marge de manœuvre pour l'amélioration,
34:15parce que si j'écoute Fabien, en gros, le solde conjoncturel lié à la croissance,
34:21bon, il ne va pas s'améliorer, il va se stabiliser.
34:25Donc en fait, tout l'effort que l'on doit faire,
34:27et je rappelle que le gouvernement français nous parle, je crois,
34:31d'une amélioration de 0,8 point de PIB,
34:33et bien on passe de 5,4 à 4,6 entre 25 et 26.
34:37Donc ça, c'est du structurel.
34:39C'est donc soit moins de dépenses, soit plus de prélèvements.
34:44Faire 0,8 point d'effort, alors que la croissance est de 1 point,
34:50c'est quelque chose qui ne marche pas.
34:52Soit on n'aura pas les 0,8 point, soit on n'aura pas le 1 point.
34:55Ça, je pense qu'il faut juste en avoir bonne conscience,
34:57et donc le 0,8 point, il va se transformer en 0,2, 0,3,
35:02parce que c'est sans doute le maximum que l'on puisse faire
35:05sans étouffer notre malheureuse croissance.
35:08Donc en fait, les difficultés, elles sont là pour durer,
35:13parce que le rythme de réduction du déficit,
35:16il ne peut pas être extrêmement rapide,
35:18sauf un risque avec un environnement économique
35:21qui est déjà moyen, même s'il est en train de s'améliorer.
35:24Donc ça, c'est la difficulté française,
35:27et donc il va falloir que, dans ce cadre-là,
35:31on arrive à intégrer les surcroît de dépenses,
35:34les engagements européens que l'on va prendre,
35:37et c'est là où tout ce qui se passe au niveau européen est important.
35:42Si on peut enlever du calcul de ce déficit
35:47le surcroît d'efforts, de défenses que l'on a, tant mieux.
35:51Si on a un regard sur la dette publique un peu distancié, tant mieux.
35:56Et là, on a peut-être une chance du côté allemand,
35:58parce que l'Allemagne, elle a dit,
36:00« Scrogne mieux, je vais faire plus de déficit,
36:03et voilà, c'est bien, et tout le monde a applaudi. »
36:05Mais en fait, ce plus de déficit, en s'accumulant,
36:10ça fait plus de dette,
36:11et là, elle va vite passer en dehors des clous européens.
36:15Donc, est-ce qu'en matière de gestion de dette publique...
36:19Vous avez peur pour le niveau d'endettement en Allemagne ?
36:21Ben, à force, oui.
36:22Si on fait du 3 points de déficit en plus par an
36:26sur une période un peu longue,
36:29enfin, voilà, quoi.
36:30Oui, oui.
36:31Ça fera plus de dette,
36:32et donc, elle ne sera plus dans les clous européens.
36:36Et l'Allemagne pèse beaucoup,
36:38et elle le fait pour de bonnes raisons.
36:39Donc, peut-être qu'on va moins nous embêter sur cet élément-là.
36:45Demain, il y a toujours des bons prétextes pour gagner du temps,
36:50mais on va peut-être continuer de gagner du temps.
36:52Donc, le cadre européen va peut-être nous contraindre
36:54moins qu'on ne l'imagine,
36:56mais je pense tout de même que la gestion des niveaux de déficit
37:02va rester quelque chose de préoccupant pour un certain temps.
37:06parce que le couple croissance-État de nos finances publiques
37:10est un couple qui ne marche pas, quoi.
37:13Net, net, ce qui se passe en Allemagne,
37:15c'est quand même bon pour la France, Fabien ?
37:17Ah ben, on ne va pas s'en plaindre.
37:18Non, oui.
37:18Ça fait 10 ans, 15 ans qu'on demande aux Allemands
37:21de dépenser plus.
37:22Finalement, ils nous entendent...
37:23Et ça fait autant qu'ils nous demandent de dépenser moins, mais bon.
37:25Ça fait autant qu'ils nous demandent de dépenser moins.
37:28On leur répondra, entendez-vous.
37:30Pour l'instant, c'est quelque chose qui va dans le bon sens
37:33pour l'équilibre de la zone euro.
37:34Après, c'est vrai qu'idéalement,
37:37il aurait peut-être mieux fallu pour la zone euro
37:40qu'ils dépensent plus il y a 15 ans,
37:41lorsque le potentiel de la zone euro
37:42et notamment le potentiel de la croissance allemande
37:45était plus élevé.
37:46Là, le potentiel allemand est plus bas.
37:48Ils ont une force de travail domestique qui en net baisse.
37:52Ils ont une situation démographique assez dégradée.
37:55Donc, un potentiel de croissance plus bas.
37:57Et donc, plus de dépenses publiques
37:58lorsque le potentiel de croissance est déjà assez bas.
38:01Ce n'est pas la meilleure des combinaisons.
38:03Ce n'est pas le meilleur timing, quoi.
38:04Pour l'équilibre de la zone euro, on ne va pas s'en plaindre.
38:07Bon, il nous reste deux minutes pour dire un mot des marchés
38:09et redire un mot des marchés avec vous, Gustavo.
38:13Ce qu'on vient de traverser,
38:14le choc de Liberation Day,
38:16la séquence 2 avril, 9 avril,
38:18et puis ces quatre ou cinq semaines de rebond,
38:22qu'est-ce que ça offre comme perspective ?
38:24Est-ce que c'est un nouveau cycle haussier qui reprend ses droits ?
38:28Ou est-ce qu'on est dans des marchés qui risquent d'être encore chaotiques,
38:35voire baissiers peut-être, sur un horizon de quelques mois ?
38:38Oui, en chaotique, certainement.
38:40Je ne vais pas faire une réponse différente de celle de Morgan,
38:42quand on peut lui poser la question.
38:43Le marché va fluctuer, c'est sûr.
38:46On sera toujours surpris.
38:47Mais bon, ce qui est clair...
38:48Il y a des jours où ça fluctue un peu plus que d'autres.
38:49C'est vrai.
38:50Bon, enfin, la période, c'est effectivement...
38:52Je veux bien qu'elle soit favorable à quelques surprises.
38:56Mais bon, on a quand même appris des choses.
38:57Ce que je veux dire, c'est qu'on a appris des choses.
38:59On a appris qu'il y avait une limite, effectivement,
39:00à la douleur que le gouvernement américain était prêt à s'auto-infliger.
39:04Ce qui a quand même...
39:05Voilà, on peut en déduire quelques...
39:07Aucune certitude.
39:08Mais enfin, disons que la probabilité d'avoir des annonces
39:12sur la partie guerre commerciale,
39:14enfin, cette droite de douane,
39:14qui soit absolument terrifiant,
39:17a quand même beaucoup diminué.
39:18Et ça, bon, ça accompagne cette baisse de la prime de risque.
39:22Et du coup, hausse, en règle générale, des marchés.
39:25Ce qui avait plus baissé,
39:26tant a plus rebondi.
39:27On a vu ces derniers jours le luxe, l'auto, etc.
39:30Donc ça, c'est assez logique.
39:32Ça va assez vite sur les marchés.
39:33Donc ça ne va pas durer éteintement.
39:34Mais bon, pour l'instant, on est encore peut-être
39:36dans quelques jours ou semaines...
39:39A profiter de ce soulagement.
39:40Voilà, donc profiter, ça c'est une chose.
39:42Après, pour le reste,
39:44il va falloir effectivement suivre le reste de la politique américaine.
39:47Donc les débats budgétaires américains.
39:49Parce que les questions budgétaires...
39:50Prochaine séquence.
39:51Ce sont compliquées en France.
39:51Aux Etats-Unis, ce n'est pas mieux.
39:54C'est même pire en certains sens.
39:56Et voilà, voir comment les contrefeux qu'on a vus,
40:02effectivement, jusque-là, se déroulent.
40:05Et puis voir les chiffres économiques,
40:07concrètement, effectivement, aux Etats-Unis.
40:09C'est un peu difficile de voir.
40:10On sait que...
40:11L'impact pourrait être beaucoup plus diffus
40:12que ce qu'on a pu imaginer à un moment.
40:14Oui, oui, je pense que le pire est quelque part écarté.
40:17Mais il y aura forcément un impact.
40:19Mais de combien exactement ?
40:20Bon, ça peut être des questionnements,
40:22notamment sur la partie obligataire
40:23et notamment sur, évidemment,
40:24ce que veut faire la Réserve fédérale américaine
40:26dans les prochaines semaines.
40:28Bon, on verra.
40:29Ce rapport sur l'inflation en avril
40:31ne nous a pas beaucoup éclairé, effectivement,
40:32sur les impacts qu'on pourrait attendre
40:34de la guerre commerciale
40:36ou en tout cas des tarifs qui resteront en place.
40:39On verra pour les prochains rapports
40:40et prochains meetings de la FED.
40:41Ça va être court en juin.
40:43Merci beaucoup, messieurs.
40:43Merci d'avoir été les invités de Planète Marché.
40:45Ce soir, Gustave Orenstein,
40:47Dorval Asset Management,
40:48Hervé Gouletker, Accuracy
40:50et Fabien Bossy, Société Générale CIB,
40:52étaient avec nous en plateau.
40:53Merci.

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