Nathan Devers : «La mort d'un enfant, c'est l'incarnation du mal dans ce qu'il a de plus inexplicable. [...] Qu'est-ce qui fait qu'un fait tragique peut devenir une affaire nationale ? C'est aussi ça. Il y a aussi parfois une part de voyeurisme qui peut être morbide.»
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00:00La question est de savoir ce que veut dire le mot «intéressé».
00:02La mort d'un enfant, c'est bien connu, Dostoevsky, les frères Karamazov,
00:07c'est l'incarnation du mal dans ce qu'il y a de plus inexplicable, de plus insupportable,
00:14c'est le symbole même de ce qu'il y a d'absurde, d'insensé dans l'existence
00:20et dans la structuration d'une société.
00:22Ça a été le cas avec l'affaire Grégory, ça a été le cas avec la disparition d'Émile.
00:26Ensuite, la question est de savoir ce que ça veut dire «intéressé».
00:28Si c'est l'indignation, si c'est l'empathie vis-à-vis des parents.
00:32Et moi, ce soir, je ne peux pas m'empêcher de penser aux parents en état.
00:37Pour le moment, évidemment, ce ne sont que des suspicions.
00:41Mais on imagine le drame de perdre un enfant, un tout petit.
00:46Vous ajoutez ça potentiellement au mensonge familial, à la dissimulation.
00:51C'est une horreur absolue, si c'est confirmé.
00:53Si c'est confirmé, en effet, pour l'instant, c'est simplement des soupçons.
00:56Mais de perdre potentiellement ses parents, en tout cas en se disant,
00:59ces gens-là m'ont menti, ils étaient avec nous, ils ont fait les recherches du corps.
01:04Et là, ça rappelle l'affaire Daval, où Jonathan Daval a menti jusqu'au bout
01:08devant ses beaux-parents en faisant la marche blanche pour sa femme qu'il avait lui-même tuée.
01:11Vous avez totalement raison.
01:12Et c'est peut-être aussi une des clés de la fascination.
01:14Qu'est-ce qui fait qu'un fait tragique, j'aime pas le mot fait divers,
01:17peut devenir comme ça une sorte d'affaire nationale ?
01:19C'est aussi ça, la recherche de quelqu'un qu'on croyait du bon côté
01:22et qui finalement, comme dans une série policière, se retrouve être un méchant.
01:25Mais vous avez raison, quand on dit intéressé,
01:28il y a aussi parfois une part de voyeurisme qui peut être morbide.
01:32Et je le dis d'autant plus sereinement que ce n'était pas le cas ici,
01:34mais on a vu dans certains médias, au moment de la découverte du corps notamment,
01:37avoir des détails morbides, des détails qui n'avaient pas nécessairement leur place,
01:41qui n'apportaient rien à l'information.
01:43Savoir quelle taille faisait le crâne, dans quelles conditions il a été retrouvé,
01:47dans quel sac plastique, avec quoi comme matière autour, etc.
01:50Et là, en effet, il y a une forme de voyeurisme
01:54où la cruauté ou le sensationnalisme se déguisent en pitié, se déguisent en empathie.
01:59Et je crois que c'est un des effets aussi vraiment pervers
02:03qui se cachent dans ce genre de faits tragiques.
02:06Et il faut faire très attention toujours, même quand on ressent de la pitié,
02:09même quand on ressent de l'empathie,
02:11à se demander avec quel affect on va lire ce genre d'informations.