Chauffage, cuisson, production d'électricité, et même carburant pour nos véhicules : le gaz sert à tout ou presque. Pourtant, même s'il est naturel, il reste un combustible fossile, qui émet des gaz à effet de serre au même titre que le charbon ou le pétrole.
Qui nous fournit aujourd'hui le gaz dont nous avons besoin pour faire tourner l'économie ? Le Gaz naturel liquéfié américain est-il pire d'un point de vue climatique que le gaz russe ? Peut-on se passer du gaz naturel ? Réponse avec Patrice Geoffron, professeur à l'Université Paris-Dauphine.
Et puis, le gaz est-il vraiment une énergie de transition ? Peut-on le verdir et réduire son empreinte carbone ? Laurence Poirier-Dietz, la Directrice générale de GRDF nous dira pourquoi le développement du biogaz est prioritaire pour la France.
Enfin comment est fabriqué ce biogaz et en quoi est-il vertueux pour la planète et les agriculteurs ? Reportage en Mayenne qui a pris une longueur d'avance en matière de gaz vert. Année de Production :
Qui nous fournit aujourd'hui le gaz dont nous avons besoin pour faire tourner l'économie ? Le Gaz naturel liquéfié américain est-il pire d'un point de vue climatique que le gaz russe ? Peut-on se passer du gaz naturel ? Réponse avec Patrice Geoffron, professeur à l'Université Paris-Dauphine.
Et puis, le gaz est-il vraiment une énergie de transition ? Peut-on le verdir et réduire son empreinte carbone ? Laurence Poirier-Dietz, la Directrice générale de GRDF nous dira pourquoi le développement du biogaz est prioritaire pour la France.
Enfin comment est fabriqué ce biogaz et en quoi est-il vertueux pour la planète et les agriculteurs ? Reportage en Mayenne qui a pris une longueur d'avance en matière de gaz vert. Année de Production :
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TVTranscription
00:00Pourvu que ça dure, avec Bureau Veritas, leader des services d'essai, d'inspection et de certification qui aident ses clients à relever les défis de qualité, de santé, de sécurité et de durabilité.
00:10Bureau Veritas. Bâtir un monde de confiance.
00:13Générique
00:41Bonjour, nouveau numéro de Pourvu que ça dure, l'émission qui rend l'éco responsable sur Public Sénat.
00:46Aujourd'hui, on s'intéresse au gaz qui peut servir à tout ou presque chauffage, cuisson, production d'électricité et même carburant pour nos véhicules.
00:54Le gaz couvre ainsi 40% des besoins de chaleur de la France.
00:57Mais le gaz, même s'il est naturel, reste un combustible fossile qui émet des gaz à effet de serre et donc contribue au réchauffement climatique, au même titre que le charbon et le pétrole.
01:06Alors, qui nous fournit aujourd'hui le gaz dont nous avons besoin pour faire tourner l'économie française ?
01:10Le gaz naturel liquéfié américain est-il pire d'un point de vue climatique que le gaz russe ?
01:15Peut-on carrément se passer du gaz naturel ?
01:17Le gaz est-il vraiment l'énergie de transition ? Peut-on le verdir et réduire son empreinte carbone ?
01:22Réponse maintenant.
01:23Générique
01:26La France qui ne produit plus de gaz naturel depuis plus de 10 ans et qui donc importe tout le gaz qu'elle consomme.
01:32Patrice Joffron, bonjour.
01:33Bonjour.
01:34Vous êtes avec nous sur Public Sénat, membre du Saxe Economiste, professeur à l'Université Paris Dauphine.
01:39Des millions de Français sont abonnés évidemment au gaz pour se chauffer, pour faire cuire leurs plats de pâtes, pour prendre une douche.
01:47Un logement collectif sur deux est alimenté au gaz.
01:50Le gaz, il est omniprésent dans la vie des Français.
01:53Oui, il est présent, moins que l'électricité.
01:56Tous les ménages ont l'électricité à la maison.
01:58Ce n'est pas le cas pour ce qui est du gaz.
02:02Il faut qu'on ait à l'esprit qu'en France, on a 10 000 communes qui ont accès au gaz sur 35 000.
02:08Donc le gaz n'est pas ramifié, il ne va pas jusque dans l'ensemble de toutes les petites collectivités.
02:14Mais de fait, il est très présent et dans le quotidien des ménages, dans l'industrie également.
02:20Assez peu substituable pour toute une série de ces usages à l'heure actuelle.
02:25Donc c'est un élément qui est extrêmement important.
02:27Évidemment, dans un contexte dans lequel on en subit encore les conséquences.
02:31Le choc de 2022 nous a conduit à prendre de la distance avec notre premier fournisseur,
02:37en tout cas, nous, Européens, de gaz naturel, à savoir la Russie.
02:41Les États-Unis, aujourd'hui, sont notre premier fournisseur de gaz, gaz naturel, Génel, gaz naturel liquéfié depuis 2022.
02:48Finalement, l'Amérique a remplacé la Russie.
02:51C'est ça, la réalité ?
02:52Oui, en large part, pas totalement. Au niveau européen, on importait à peu près 40% de nos consommations,
02:59de nos importations de gaz provenant de Russie.
03:04On est tombé sensiblement sous les 20%, aux alentours de 15% à l'heure actuelle.
03:08Ça peut fluctuer d'une année sur l'autre.
03:11Ce gaz, il n'est pas facile à remplacer, ce gaz qui venait de Russie.
03:15On l'importe assez massivement, notamment des États-Unis, c'est le gaz naturel liquéfié.
03:19Donc, il faut se figurer que ce gaz, il est extrait aux États-Unis.
03:23Il est liquéfié, c'est-à-dire descendu à moins 160 degrés.
03:27Pourquoi ?
03:28De telle manière à pouvoir le condenser, le concentrer.
03:31Donc, il faut le descendre à une température extrêmement basse.
03:35Et puis, on lui fait traverser l'Atlantique.
03:37Il arrive dans des ports métaniers.
03:38On a la chance, en France, d'avoir plusieurs ports métaniers,
03:41donc d'être une façade d'importation absolument essentielle,
03:45y compris avec du gaz qui va ailleurs, au plus fort de la crise.
03:48On s'est mis à exporter du gaz.
03:50On le transforme en gaz une fois qu'il arrive.
03:51On le regazéifie, naturellement, si on veut pouvoir l'utiliser à la maison ou dans l'industrie.
03:55Ce gaz américain, il n'a pas été vendu aux Européens à prix d'amis, c'est le moins qu'on puisse dire.
04:00Oui, on est passé...
04:03On parle d'administration, pour le coup, Biden.
04:07Voilà.
04:08Donc, sous l'ère Biden, une sorte de plan Marshall s'est organisé
04:11avec du gaz qu'on a fait venir des États-Unis,
04:14qui est venu également plus massivement de Norvège,
04:17par tuyaux, et nos amis nous ont vendu plus de gaz.
04:21Ils ne nous l'ont pas vendu à prix d'amis.
04:23Si on va avoir un moyen plus grand d'heure...
04:25Alors, le gaz, par moment, a été multiplié par 10 ou par 15 sur les marchés de gros.
04:29Donc, on a traversé une période d'hystérie.
04:33Le système a tenu globalement.
04:35Il a fallu faire des efforts, notamment de sobriété, à la maison, dans l'industrie.
04:38Ça a conduit également, et il y a encore des traces aujourd'hui,
04:41à de la destruction de demandes industrielles.
04:44Il y a des industries gazo-intensives dont le modèle économique s'est affaissé,
04:48voire effondré...
04:49Parce que ça a coûté trop cher.
04:50... au cours de la crise.
04:51Et c'est un phénomène dont on n'est pas totalement sorti.
04:55Et donc, il a fallu pallier ces difficultés.
04:58Si on va avoir un ordre de grandeur de ce que ce choc a coûté au niveau européen,
05:02selon des évaluations qui ont été faites à Bruxelles,
05:04de l'ordre de 700 milliards d'euros de boucliers tarifaires, d'amortisseurs.
05:09Donc, c'est la manière dont il a fallu compenser par de l'argent public, mécaniquement,
05:14le choc, de telle manière à déconnecter le prix de gros qui était devenu fou sur les marchés
05:19et le prix de détail, celui qu'on est conduit à payer à la maison ou dans les entreprises.
05:23D'autant que si on nous coupe l'approvisionnement, il faut le rappeler, en gaz ou en pétrole,
05:27enfin en énergie fossile au sens large,
05:29avant que tout s'arrête et que la France, enfin l'économie française, s'arrête,
05:32il se passe quelques mois, je veux dire.
05:34Oui, quelques mois. Dans le cas de l'OCDE, pour ce qui est du pétrole, on a...
05:37Non, sans doute moins.
05:39Pour ce qui est du pétrole, il y a trois mois de réserve obligatoire au sein de l'OCDE.
05:45Et puis, par ailleurs, pour le gaz, alors ça fluctue selon la période de l'année,
05:49parce qu'évidemment, il y a une utilisation saisonnière du gaz.
05:53On en utilise bien plus en hiver, mais on n'a que quelques mois de réserve pour nos usages.
05:59On a compris que Trump était imprévisible.
06:01Est-ce qu'il y a un risque pour nos approvisionnements en gaz depuis, justement, les États-Unis ?
06:06Est-ce qu'il pourrait, le président américain, réduire les exportations de GNL,
06:10de gaz naturel liquéfié, à la France ou à l'Europe ?
06:13Parce qu'on dit que ce n'est pas dans l'intérêt, dans ses intérêts,
06:15dans l'intérêt de l'oncle Sam au sens large.
06:17Si on prend un peu de recul, il n'y a pas besoin d'être un expert du gaz ou de l'énergie pour ça.
06:21On est en train de voir qu'on a passé d'une descendance...
06:25Dépendance.
06:26Dépendance, oui.
06:27Une dépendance à l'égard de la Russie, avec laquelle on avait une relation commerciale,
06:32d'ailleurs de long terme et qui était plutôt stable, y compris au moment de la guerre froide.
06:35Bon, qui évidemment s'est distordue dans les conditions que l'on sait.
06:39Une dépendance vis-à-vis de l'Amérique qui, à l'évidence, n'est plus notre alliée.
06:43Donc, tous ces éléments doivent nous conduire à la vigilance.
06:45Et la vigilance dans le domaine, il y a deux leviers.
06:47Un levier de sobriété, les efforts de sobriété qu'on a faits en 2022
06:51doivent s'inscrire dans notre quotidien.
06:53En 2023 aussi, un petit peu moins en 2024.
06:55Un peu moins, oui, un peu moins parce qu'il y a un effet qui s'estompe
07:00à mesure qu'on s'éloigne du moment le plus fort du choc.
07:03Bon, la France, ça peut paraître surprenant, mais importe toujours du gaz russe.
07:07On a augmenté de 80% nos importations de GNL russe entre 2023 et 2024.
07:14Paris, c'est le premier importateur de GNL russe l'an dernier.
07:18On se dit, mais comment c'est possible ?
07:20Moi, j'avais cru comprendre qu'on devait se passer totalement du gaz russe.
07:23Vous me direz que c'était à l'horizon 2027.
07:252027, c'est le plan Repower EU de se débarrasser totalement du gaz russe à l'horizon 2027.
07:31On a fait beaucoup d'efforts les deux premières années.
07:34Vous avez tout à fait raison, il y a eu un rebond en 2024 qui est observable.
07:38Il paraît incompréhensible par rapport à nos engagements.
07:42Qui est observable, tout particulièrement compte tenu des infrastructures françaises d'importation.
07:47On le voit apparaître dans les statistiques.
07:49Nous avons anticipé à différents endroits en Europe le fait qu'à partir du 1er janvier 2025,
07:55le grand gazoduc traversant l'Ukraine et acheminant vers l'ouest de l'Europe du gaz russe,
08:02s'est interrompu.
08:04Le contrat est arrivé à son terme.
08:07L'Ukraine, assez logiquement, n'a pas souhaité le renouveler.
08:10Et donc, par anticipation, il y a sans doute des achats qui ont été réalisés en 2024
08:14pour tenir compte de cet élément nouveau.
08:18Avant la guerre en Ukraine, le gaz russe arrivait par des tuyaux, par des gazoducs.
08:23Le Génel américain, on l'a dit, gaz naturel liquéfié, arrive par bateau.
08:28Est-ce que c'est vrai ou pas que son empreinte carbone du Génel américain,
08:31il est pire que le gaz russe parce que ce gaz de schiste, il faut l'extraire.
08:37Il faut ensuite, vous l'avez dit, le liquéfier.
08:39Ça nécessite de l'énergie.
08:40Il faut le transporter.
08:41Re de l'énergie.
08:42Certains disent que l'empreinte carbone du Génel est mauvaise,
08:44voire même que c'est la pire des formes de gaz possible.
08:48C'est un peu compliqué à comparer avec la Russie
08:51parce qu'on n'a pas nécessairement toutes les données
08:53sur les conditions dans lesquelles ce gaz est extrait en Sibérie.
08:57Mais néanmoins, il y a un point qui est tout à fait objectivable,
08:59et vous l'avez évoqué, c'est le fait que même s'il y a la maison,
09:03lorsqu'on ouvre le gaz, il y a la petite flamme bleue et c'est la même molécule.
09:06De fait, selon qu'il est acheminé ou qu'il était plutôt acheminé en Russie
09:10par des gazoducs, c'était les infrastructures
09:12dans lesquelles les investissements avaient été faits, etc.
09:14Des gros tuyaux dans lesquels la caractéristique essentielle,
09:17c'est que le gaz reste du gaz.
09:20Il n'a pas besoin d'être transformé,
09:22alors que celui qui vient des États-Unis doit être extrait.
09:25C'est du gaz de schiste.
09:26Il peut y avoir, selon les conditions d'exploitation,
09:30des fuites de méthane.
09:32Cette molécule, le gaz qu'on consomme à la maison, c'est du méthane,
09:37qui est un puissant gaz à effet de serre,
09:39avec un effet qui est plus important sensiblement
09:42que celui du CO2.
09:44Donc, il y a une empreinte qui est assez élevée.
09:48Par ailleurs, il y a tout le processus de transformation.
09:51Et puis, ne serait-ce que le fait de propulser les bateaux
09:54au travers de l'Atlantique, tout ça a une empreinte énergétique,
09:58une empreinte carbone mécaniquement.
09:59Donc, mieux vaut privilégier le gaz par gazoduc.
10:03Mais si ce n'est pas du gaz russe, dans ces cas-là,
10:05d'où pourrait venir ce gaz naturel par gazoduc ?
10:08Il y a quoi ? Il y a l'Algérie, la Norvège, qu'est-ce qu'il y a d'autre ?
10:11L'Algérie, la Norvèse, l'Azerbaïdjan,
10:14c'est-à-dire des gens dont la fréquentation
10:17n'est pas nécessairement la plus recommandable pour s'il y a de l'Azerbaïdjan.
10:22En quoi est-ce que le gaz est nécessaire dans notre transition énergétique ?
10:25On se dit que plus on aura de panneaux solaires, plus on aura d'éoliennes,
10:29moins on aura besoin de gaz.
10:30Ce n'est pas aussi simple que ça.
10:31La réalité, c'est que pour l'industrie, pour la mobilité surtout, évidemment,
10:36pour l'industrie, pour l'agriculture, pour la plupart des usages
10:39et pour la production de chaleur surtout,
10:41pour l'heure, on n'a pas une électrification.
10:44Et d'ailleurs, si on regarde les perspectives au milieu du siècle,
10:46celles qui ont été dressées par RTE,
10:49on devrait couvrir 60% à 2 tiers de nos consommations par de l'électricité,
10:56mais pas l'intégralité.
10:58Donc on va avoir besoin du gaz à la condition, ce gaz, de parvenir à le décarboner.
11:05C'est l'enjeu de la transition du gaz fossile vers le biomethane
11:09ou vers d'autres types de gaz vert.
11:12C'est l'enjeu également du remplacement de l'hydrogène
11:15qui aujourd'hui est produit assez largement à base de fossiles
11:18et notamment de gaz, remplacement par de l'hydrogène décarboné.
11:22Donc c'est la même molécule, mais qui est issue d'un processus
11:25de production différente, notamment à partir d'électrolyseurs.
11:28Les énergies renouvelables sont intermittentes.
11:31On sait que cet hiver, il a fait froid et il n'y a pas eu assez de vent
11:34pour alimenter les éoliennes.
11:35Et c'est là où le gaz, parce que c'est une énergie qui est pilotable,
11:38le gaz se stocke et on peut s'en servir pour pallier à une déficience,
11:43à une carence de soleil ou de vent.
11:45C'est ça qu'il faut expliquer.
11:46La notion de flexibilité, on la comprend aisément.
11:49Pour de l'éolien du photovoltaïque, il faut respectivement du vent
11:53et du soleil et notamment du soleil, on a à peu près la garantie
11:57de ne pas en avoir durant la nuit.
11:58Donc tous ces éléments doivent conduire à trouver des sources
12:02de flexibilité.
12:04Le gaz en offre, des centrales à gaz, mais avec quand même
12:07comme caractéristique que plus on va aller vers une Europe
12:10qui aura développé des modes de production d'électricité décarbonée,
12:14moins on aura besoin de gaz.
12:16Donc il faudra garder du gaz en réserve, en backup,
12:21c'est-à-dire en soutien dans les périodes durant lesquelles
12:24la production des renouvelables sera insuffisante.
12:28Donc ce sera un modèle économique assez différent.
12:31Et puis, par ailleurs, la vocation, c'est que de plus en plus,
12:34ce gaz devra être lui-même décarboné.
12:37Donc ça nous renvoie à la question du biogaz, du biomethane,
12:40de l'hydrogène également pour certains des usages.
12:43Merci pour cette explication avec vous, Patrice Joffron,
12:45professeur à l'Université Paris-Dauphine et membre du Cercle des économistes.
12:48Merci à vous.
12:49Merci beaucoup.
12:50Eh bien oui, mieux que le gaz naturel, justement le biogaz,
12:52car oui, le gaz se verdit à l'image du biomethane,
12:55un gaz renouvelable produit en France à partir de déchets,
12:58notamment agricoles.
12:59Reportage signé Manuel Nègre.
13:02Le gaz est une énergie fossile qui tend à se verdir.
13:06Peu à peu, il est remplacé par du biogaz.
13:095 à 6 fois moins émetteur de CO2 est conçu en France
13:13grâce à des procédés parfois surprenants.
13:18À Chalons-d'Humaine, en Mayenne,
13:20David Paumier est éleveur depuis plus de 20 ans.
13:25On produit du cochon, une production laitière.
13:28On a environ 140 vaches laitières.
13:30Et on a pour objectif de produire 1 400 000 litres de lait.
13:34Bien que les chiffres donnent le tournis,
13:36David est inquiet pour son exploitation.
13:38Il voit ses revenus diminuer chaque année.
13:41On voit bien que les marches se resserrent.
13:43Dans 15 ans, je pense qu'il y aura beaucoup d'exploitation laitière
13:46quand on met la clé sous la porte.
13:48David a longtemps réfléchi à diversifier son activité
13:52pour éviter lui aussi de mettre la clé sous la porte.
13:55Et depuis quelques semaines, il pense avoir trouvé la solution.
13:59Eh bien, c'est notre dernier investissement.
14:02Un robot qui récolte les effluents d'élevage
14:05produits par les vaches laitières.
14:07Et qui va nous permettre de produire du carburant vert
14:10pour demain via la méthanisation.
14:12Juste à côté de la ferme,
14:14David a fait construire un méthaniseur,
14:16ou plutôt une usine à biogaz,
14:18qui fonctionne grâce aux effluents des animaux.
14:21Tu m'en charges 2-3 godets pour faire la ration de la journée ?
14:25J'aurais jamais pensé être à la fois producteur
14:28de denrées alimentaires et producteur d'énergie.
14:31Avant, il ne savait pas vraiment
14:33comment gérer les effluents des vaches et des cochons.
14:36Aujourd'hui, il leur donne une seconde vie
14:38grâce à cette installation à 7 millions d'euros,
14:41financée en partie grâce à des subventions.
14:44On récupère les effluents d'élevage.
14:46Ils sont stockés dans la trémie.
14:48De la trémie, ça va automatiquement dans les dômes.
14:51Dans les dômes, les micro-organismes dégradent la matière
14:54et transforment ça en biogaz.
14:57David injecte directement dans le réseau
15:00suffisamment de biogaz pour faire vivre 3 000 foyers
15:03ou alimenter les véhicules de la région.
15:06Là, c'est un véhicule de tourisme,
15:08mais il est plutôt utilisé à la fois
15:10pour les bains d'ordures ménagères,
15:12les bus et tout le transport routier.
15:14Richard Chamaret, président de Territoires d'énergie,
15:17est un acteur majeur du développement du biogaz en Mayenne.
15:21D'ici 2026, il aura contribué
15:23à la création de 9 méthaniseurs dans le département
15:26et vise un total de 30 d'ici 2040.
15:30L'objectif, c'est une autonomie énergétique à l'horizon 2040.
15:33On sait qu'on peut le faire, on sait que c'est possible.
15:36Dans le contexte géopolitique que tout le monde connaît aujourd'hui,
15:39on pense que c'est une des solutions à adopter rapidement.
15:42En France, la réglementation prévoit que d'ici 2028,
15:464 % des volumes de gaz soient du biogaz,
15:49un objectif largement dépassé en Mayenne
15:52qui s'élève déjà à 12 %.
15:59Plus propre et donc meilleur pour la planète,
16:01produit en France, créateur d'emplois,
16:03supplément de revenus pour nos agriculteurs,
16:06le biogaz présente bien des atouts.
16:08Laurence Poirier-Dietz, bonjour.
16:09Bonjour.
16:10Merci d'être avec nous sur Public Système.
16:11Avec plaisir.
16:12Vous êtes la directrice générale de GRDF,
16:14c'est le gestionnaire du réseau gazier,
16:16il faut expliquer un petit peu.
16:17Vous faites fonctionner le réseau de distribution du gaz,
16:20les tuyaux, proches des villes, c'est ça ?
16:23Le réseau de distribution, c'est 206 000 km
16:27et donc GRDF a le rôle de l'exploiter,
16:29d'avoir la relation avec l'ensemble des fournisseurs de gaz
16:33qui vendent du gaz à leurs clients,
16:35c'est 11 millions de clients partout en France.
16:38Et donc nous, nous sommes là pour évidemment assurer
16:41cette relation entre les fournisseurs et les clients,
16:43pour entretenir le réseau, pour l'exploiter,
16:45pour répondre à la streinte et à l'urgence gaz,
16:5024 heures sur 24, 365 jours par an.
16:53Alors depuis 10 ans, vous alimentez vos tuyaux
16:55avec du biométhane à partir des déchets des agriculteurs,
16:59des déchets organiques, comme on l'a vu dans le reportage.
17:01Pour vous, ce développement du biogaz,
17:03c'est vraiment la mère des priorités ?
17:05Oui, c'est le pilier premier de notre projet d'entreprise
17:09qui s'appelle Mission Décarbonation.
17:11C'est l'essentiel pour nous de demain,
17:14aider nos clients à mieux consommer,
17:17moins consommer et consommer vert.
17:19Et pour ça, il faut produire du gaz vert.
17:21Et ce gaz vert, vous l'avez dit,
17:23on le trouve issu des déchets agricoles,
17:26mais aussi des bouts des stations d'épuration,
17:29des stations d'épuration d'eau,
17:32de l'eau potable qu'on trouve à la sortie des villes,
17:35puisqu'on méthanise les bouts
17:37et qu'on est capable d'en faire du biométhane.
17:39Ce qu'il faut expliquer, c'est que le bilan carbone du biogaz,
17:41il est remarquable.
17:43Il est cinq fois meilleur que celui du gaz naturel.
17:48Il émet cinq fois moins de CO2.
17:52C'est ça.
17:54Et en plus, c'est de l'économie circulaire.
17:56On l'a compris, puisqu'on récupère des déchets.
17:58Oui, c'est une économie circulaire,
18:00parce que vraiment, sur un territoire,
18:02on peut à la fois collecter les déchets agricoles
18:05ou biodéchets ou déchets de l'agroalimentaire.
18:10On peut produire du biogaz,
18:12on peut l'injecter dans les réseaux,
18:14on peut le consommer pour faire rouler
18:16les bus qui vont au ramassage scolaire
18:18ou les bennes à ordures,
18:20on peut chauffer la piscine
18:22ou on peut chauffer les logements
18:24ou les offices HLM.
18:26Effectivement, c'est une économie circulaire
18:28qui procure des emplois locaux
18:30pour faire vivre tout ce...
18:32Ça stimule, c'est vrai, la création d'emplois
18:34sur le sol français.
18:35Des emplois qui sont non délocalisables.
18:37C'est important, ça.
18:39On peut le chiffrer, d'ailleurs.
18:40On a des chiffres là-dessus.
18:41Aujourd'hui, on a à peu près la connaissance
18:43de 8000 emplois non délocalisables
18:47qui sont générés, emplois directs,
18:49qui sont générés par l'utilisation
18:51et le fonctionnement des méthaniseurs.
18:54Mais ça va monter en puissance, évidemment.
18:55Oui, ça va monter en puissance
18:56parce qu'on croit à une roadmap
18:58qui nous permettrait d'avoir
19:00beaucoup de gaz renouvelables
19:02en 2030 et en 2050.
19:04Quand est-ce qu'on pourra,
19:05je ne sais pas si on peut répondre à cette question,
19:06remplacer nos importations de gaz naturel
19:08carbonés depuis l'étranger
19:10par du gaz vert français ?
19:12Ce n'est pas pour tout de suite, évidemment.
19:14Ce n'est pas pour tout de suite,
19:15mais on progresse tous les jours.
19:17Aujourd'hui, c'est 4% de gaz vert
19:18qui est injecté dans le réseau.
19:19C'est ça.
19:20J'ai les chiffres.
19:21C'est 14 TWh de capacité injectée
19:22à la fin de l'année.
19:23Ça ne me parle pas, ça.
19:243,5 millions de logements neufs au chauffage.
19:27Je pense que c'est plus facile
19:28à comprendre comme ça.
19:30Ce qu'on vise, c'est d'avoir
19:3220% de gaz renouvelables à l'horizon 2030
19:36et 100% de la consommation de gaz en 2050.
19:41Toute notre consommation de gaz en 2050.
19:44Oui, c'est loin 2050, pardon.
19:45C'est loin 2050, mais 2030,
19:47c'est assez proche maintenant.
19:48Et 20%, c'est plus.
19:50On y sera ?
19:51Oui, on y sera.
19:52C'est un objectif ambitieux,
19:54mais en tout cas, toute la filière y croit.
19:56Et nous y croyons aussi beaucoup chez GRDF
19:58parce qu'on y voit une dynamique.
20:00On voit une dynamique.
20:01Le Salon de l'agriculture vient de se terminer.
20:04Nous y avons rencontré
20:05beaucoup d'agriculteurs,
20:06des coopératives agricoles
20:08et je dirais un ensemble de partenaires
20:11qui sont investis dans la méthanisation.
20:14Et on voit à quel point
20:15ça rentre dans les process agricoles,
20:17tel que je le disais.
20:18Et le bénéfice que ça apporte en local,
20:20c'est l'économie circulaire.
20:22Donc oui, il y a beaucoup de projets
20:24qui sont en cours,
20:25qui vont se réaliser.
20:26On a à peu près la connaissance
20:28de 650 projets
20:29qui sont en cours
20:30de préparer finalement leurs projets
20:33pour essayer d'investir
20:36et à construire leur site de méthanisation.
20:39Donc ça veut dire qu'on en raccordera beaucoup.
20:42On en raccorde une centaine tous les ans
20:44pour GRDF.
20:45Donc voilà,
20:46c'est maintenant plus de 730 méthaniseurs
20:49en France
20:50qui injectent sur les réseaux.
20:52Il en faudrait combien
20:53pour arriver à 20% de gaz à l'air ?
20:55À 20%, il y en aura à peu près 2 000.
20:58Pour ça, il faut investir.
20:59Combien ça coûte d'argent,
21:00public, privé ?
21:01Ça reste raisonnable ?
21:02Aujourd'hui...
21:03Parce que quand on parle nucléaire,
21:04on est en centaines de milliards d'euros.
21:06Oui, c'est vrai.
21:07Quand on parle de la transition
21:10et en particulier
21:11des investissements nécessaires
21:12sur les réseaux,
21:13c'est plusieurs centaines de milliards d'euros
21:15d'ici 2040.
21:16La Commission de régulation de l'énergie,
21:19c'est finalement celle qui regarde
21:21comment fonctionnent
21:22les distributeurs transporteurs.
21:24Elle a regardé
21:25quel serait cet investissement
21:28pour aller vers une transition
21:29à 100% de gaz vert sur les réseaux.
21:31On estime que c'est de l'ordre
21:33de 7 à 9 milliards d'euros
21:34d'investissement d'ici 2050.
21:36Ce n'est pas une broutille,
21:37mais ça ne semble pas non plus...
21:38Non, ce n'est pas très important
21:40parce que les réseaux sont là.
21:41C'est ça.
21:42Les réseaux sont là,
21:43les stockages sont là,
21:44les réseaux de transport,
21:45les réseaux de distribution.
21:46Donc, bien sûr,
21:47il faut faire des réseaux
21:48pour aller connecter
21:49l'ensemble de ces nouvelles productions.
21:51Mais on a un réseau déjà capillaire,
21:53je vous l'ai dit,
21:54il fait 206 000 kilomètres.
21:55Donc, on a la capacité
21:56à faire les choses finalement
21:58d'une manière assez abordable
22:00pour cette transition
22:01et ça, c'est très important.
22:02On va assez vite en France
22:04pour s'assurer de la réussite
22:05du développement du biogaz.
22:07On a des mesures incitatives
22:09et finalement,
22:10quand on regarde les choses,
22:11beaucoup de pays européens,
22:12en tout cas,
22:13beaucoup de mes confrères européens
22:14que je connais
22:15de distributeurs de gaz européens
22:17nous envient
22:18ce qui a été fait en France.
22:20La France a,
22:21sur le sujet du biogaz
22:22et des gaz verts,
22:23plus d'une dizaine d'années d'avance
22:25par rapport aux autres,
22:27les Italiens, les Espagnols,
22:28les Portugais et d'autres.
22:30Pourquoi ?
22:31Parce qu'on a créé
22:32à la fois le droit à l'injection,
22:33ça veut dire qu'on a...
22:36Finalement,
22:37on mutualise les investissements
22:38pour que ce ne soit pas
22:39chaque producteur
22:40qui se paie son raccordement
22:42au tuyau,
22:43mais qu'on ait plutôt
22:44une capacité
22:45à mutualiser les investissements.
22:46Et ça, c'est très important.
22:47Il y a aussi des tarifs de rachat
22:49du biométhane.
22:50Pour un agriculteur,
22:51c'est important de produire,
22:52mais lui,
22:54il a besoin d'avoir de la visibilité,
22:55de savoir à quel prix
22:56il va vendre le biogaz
22:57qu'il produit.
22:58Et donc,
22:59il y a des tarifs de rachat
23:00qui ont été installés.
23:01Et puis,
23:02il y a d'autres modalités
23:03un peu plus spécifiques
23:04qui sont arrivées récemment.
23:05Et tout ça,
23:06ça crée un cadre,
23:07finalement,
23:08un cadre réglementaire
23:09qui permet à la filière
23:10de se développer.
23:11C'est évidemment très important
23:12et c'est ça qu'on nous envie.
23:13Puisqu'on parle du prix,
23:14il faut en parler aussi.
23:15Évidemment,
23:16le coût du biogaz aujourd'hui,
23:17il est quoi ?
23:18Deux fois,
23:19trois fois supérieur
23:20au coût du gaz naturel classique
23:21qui est plus polluant.
23:22On se dit que c'est un sujet, ça.
23:23Ce n'est pas un écueil
23:24à son développement ?
23:25Toutes les énergies...
23:26On se parle.
23:27Toutes les énergies renouvelables,
23:28à leur démarrage,
23:29ont des prix
23:30qui vont s'améliorer
23:31au fur et à mesure
23:32que la filière s'intensifie,
23:33qu'on a peut-être
23:34des installations
23:35de plus grande taille.
23:36On le sait.
23:37Clairement,
23:38c'est justement aussi
23:39la valeur
23:40de la décarbonation
23:41qu'il faut considérer,
23:42la valeur décarbonante,
23:43finalement,
23:44du biomethane
23:45qu'il faut considérer
23:46dans ce prix d'achat.
23:47Et c'est aussi pour ça
23:48qu'on voit déjà
23:49un certain nombre d'industriels
23:50qui sont intéressés
23:51par acheter du biomethane
23:52pour décarboner leur production
23:53tout en gardant les mêmes process,
23:54qui a beaucoup d'intérêt.
23:55C'est-à-dire
23:56qu'il y a beaucoup
23:57d'industriels qui sont intéressés
23:58par acheter du biomethane
23:59pour décarboner leur production
24:00tout en gardant les mêmes process,
24:01qui a beaucoup d'intérêt.
24:02Donc, son coût va baisser
24:03à mesure qu'il va se développer
24:04le biogaz.
24:05Oui, la filière va grandir
24:06et forcément,
24:07on a un coût qui baissera.
24:08Merci pour cet échange
24:09avec vous,
24:10Laurence Poirier-Dietz.
24:11C'est la directrice générale
24:12de GRDF.
24:13Merci.
24:14Merci beaucoup à vous.
24:15Voilà, c'est la fin
24:16de Pourvu que ça dure,
24:17l'émission qui rend
24:18les co-responsables
24:19sur Public Sénat.
24:20Émission tournée
24:21depuis l'atelier Covivio
24:22à Paris.
24:23Pourvu que ça dure,
24:24c'est aussi du replay
24:25sur publicsenat.fr.
24:26À très vite.
24:32Sous-titrage Société Radio-Canada