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00:00Quand le père arrive au centre équestre et va dire, en regardant la copine de sa fille,
00:04si elle disait oui, je ne dirais pas non,
00:05cette phrase, je l'ai entendue mille fois dans la bouche de mon père,
00:08je l'ai entendue mille fois partout en fait, à la télé, dans les journaux,
00:11dans les bistrots, les mecs dans la rue.
00:13Un père rigide, une mère intrusive, un frère obsédé et convoiteux,
00:17le film Cassandre nous plonge dans une famille dysfonctionnelle, le temps d'un été.
00:21Ce que j'ai voulu peindre comme climat familial,
00:24c'est un climat familial qu'on dit incestuel,
00:26qui est emprunt, on va dire, d'une absence d'intimité,
00:30d'une confusion entre les identités, les générations.
00:34Tout le monde à un moment est victime, est bourreau et que la zone est très grise.
00:37Eh, mais ce n'est pas bien de dormir en culotte, il faut que ça respire.
00:41Moi, je ne mets jamais de culotte sous ma jupe.
00:43Ce climat-là qu'on dit incestuel va être le terreau d'un inceste entre le frère et la sœur.
00:50On voit souvent des histoires d'inceste entre un adulte et un enfant.
00:54C'est peut-être plus facile à recevoir parce qu'on sait tout de suite qui est le bourreau, qui est la victime.
00:57Entre deux enfants d'âge rapproché, comme un frère et une sœur, un cousin et une cousine,
01:02c'est plus confus parce qu'il y a de la complicité,
01:04il y a de l'affection qui sont inhérents aux relations familiales.
01:08Et en fait, le glissement va être très subtil.
01:10Mais il n'a jamais vu une fille en maillot ton frère ou quoi ?
01:12Mais tu sais, dans ma famille, on se baigne toute nuit normalement.
01:15Déjà, si on parle d'inceste, les chiffres sont clairs.
01:18C'est plus de 5,5 millions de victimes en France déclarées.
01:22Ça fait trois enfants par classe, c'est énorme.
01:24Donc c'est extrêmement banal.
01:25Et là, je parle d'inceste.
01:26Le climat incestuel, c'est encore plus banal.
01:29Dans plein de familles qui sont des micro-sociétés,
01:32des systèmes un peu refermés sur eux-mêmes,
01:35il y a plein de dérives éducatives, il y a plein de névroses.
01:39Ce film, il raconte une époque aussi.
01:41C'est l'époque où Mads Neff passait à la télé,
01:43racontait ses phrases que pédocriminels à Bernard Pivot et tout le monde en riait.
01:47C'est les années où PPDA régnait sur les plateaux de télévision.
01:50C'est les années où Depardieu régnait sur les plateaux de cinéma.
01:53Pour vendre un yaourt, on laissait couler une goutte de yaourt là.
01:56C'est toute la culture du vieil, toute la culture de l'inceste en fait,
02:00dont on est imprégné depuis des décennies,
02:02depuis des siècles de sexisme, de patriarcat, etc.
02:05J'ai la sensation que les journalistes et les gens ont tendance à résumer ce film
02:09comme un film sur l'inceste ou un film inspiré d'une histoire vraie,
02:12ce qui est extrêmement réducteur.
02:14Pour moi, ce n'est pas un film sur l'inceste,
02:15c'est un film sur la famille et sur un dysfonctionnement familial
02:18qui va être le terreau d'un inceste, mais c'est le haut de l'iceberg.
02:21J'ai nourri ça d'énormément de lectures, de conversations,
02:23que oui, j'ai une expertise, grâce à ce que j'ai pu vivre,
02:27mais en fait, il y a un récit universel qui sort de ça.
02:31D'un coup, dès ce mot-là, on va avoir une sorte de refus,
02:34c'est un drame, ça va être sordide, etc.
02:36Oui, on parle d'un sujet qui est inconfortable, ça c'est sûr,
02:39qui peut mettre mal à l'aise, ça c'est sûr,
02:41mais en vrai, il y a plein de moments où on en rit.
02:44Ce n'est pas un rire qui banalise,
02:45ce n'est pas un rire qui va cautionner la violence intra-familiale à laquelle on assiste,
02:49c'est un rire qui met à distance,
02:50qui permet de reprendre le pouvoir sur quelque chose.