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Dans cet « Oeil de Moumou » version n°2, Mourad Guichard a reçu la journaliste Rokhaya Diallo à l’occasion de la sortie de son « Dictionnaire amoureux du féminisme », paru aux éditions Plon. Ils y ont abordé la présence et la question du féminisme au travers des médias. Parmi ses exemples vidéos, notre chroniqueur a fait réagir son invitée sur la dérive médiatique qui consiste à faire régresser la lutte féministe via les antennes des chaînes de la fachosphère. De la manifestation du 8 mars 2025, journée internationale des Droits des femmes, jusqu’à l’appropriation du combat féministe par les fers de lance du Printemps républicain et de personnalités telle Emmanuelle Ducros, nos deux intervenants ont tenté d’expliquer la lente dérive qui pousse vers un discrédit de la véritable lutte féministe.
Mourad Guichard s’est également appuyé sur plusieurs extraits de l’ouvrage de Rokhaya Diallo pour raconter ce putsch qui pourrait renvoyer la société française plusieurs décennies en arrière. Notre chroniqueur s’est enfin penché sur la haine qui vise sa consoeur et les motivations qui la pousse à être présente sur des plateaux et dans des studios aux lignes éditoriales pas forcément en phase avec ses positionnements politiques et idéologiques.
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Mourad Guichard s’est également appuyé sur plusieurs extraits de l’ouvrage de Rokhaya Diallo pour raconter ce putsch qui pourrait renvoyer la société française plusieurs décennies en arrière. Notre chroniqueur s’est enfin penché sur la haine qui vise sa consoeur et les motivations qui la pousse à être présente sur des plateaux et dans des studios aux lignes éditoriales pas forcément en phase avec ses positionnements politiques et idéologiques.
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NewsTranscription
00:00Salut à toutes et à tous, vous regardez l'invité de Moumou sur Le Média,
00:03Le Média qui grandit, qui innove, avec une deuxième chaîne YouTube,
00:06Le Média 24-7, à laquelle nous vous invitons à vous abonner.
00:10Une proposition un peu plus info chaude que la chaîne Le Média TV,
00:14avec également de nouveaux programmes, notamment la contre-matinale
00:17qui revient tous les matins du lundi au jeudi à 8h sur notre chaîne Le Média 24-7.
00:22Justement, le journal des luttes, tous les matins du lundi au vendredi à 13h
00:26sur la même chaîne, toujours sur cette chaîne Le Média 24-7,
00:29au cœur de l'actu, notre émission du soir à 19h et sur la chaîne historique Le Média TV.
00:34En plus de nos chroniqueurs et journalistes habituels,
00:36retrouvez le récap, un bulletin d'infos concis et denses,
00:40animé par Marion Lopez sur la chaîne Le Média TV.
00:43Générique
00:55Aujourd'hui, Moumout, ton invité, c'est Rokhaya Diallo,
00:59journaliste, autrice, réalisatrice, conférencière et podcasteuse.
01:03Rokhaya Diallo est une figure des médias français, oui,
01:05mais voilà, c'est une femme, une femme noire qui ose défendre ses combats,
01:09quitte à déplaire plutôt à ce qu'on pourrait appeler le bloc majoritaire.
01:13Et cela lui vaut détestation et harcèlement, mais elle continue de tracer son chemin
01:18et publie aux éditions Plon le dictionnaire amoureux du féminisme.
01:22Car oui, le féminisme et sa définition sont plus que jamais des enjeux,
01:27des terrains de bataille politique.
01:29Bonjour Mourad, bonjour Rokhaya.
01:31Bonjour, merci beaucoup.
01:33Alors, nous enregistrons cette émission le lendemain de la Journée internationale du droit des femmes,
01:37du 8 mars, qui cette année a été un moment de bataille entre le mouvement féministe et un ovni,
01:41Nemesis, qui incarnerait, selon ses promoteurs, un féminisme de droite
01:46ou un féminisme raciste, selon des observateurs.
01:50Un féminisme raciste dont l'influenceuse Mila est une des figures de Proulx,
01:55ce qui n'empêche pas qu'elle soit invitée sur BFM-RMC par Apolline Demalerbe
01:59pour expliquer en gros que l'ennemi du féminisme, c'est le jeune racisé,
02:03mal, mal élevé par ses parents.
02:06Au sein des établissements, moi j'ai l'impression qu'on a une véritable police des mœurs dans les lycées.
02:14Une police des mœurs de la part des autres jeunes ?
02:17De la part des élèves, qui sont d'ailleurs encouragés souvent par leurs parents vis-à-vis de leur éducation,
02:22qui se sentent, mais en totale impunité,
02:26on parle de jeunes, mais qui s'encouragent mutuellement.
02:31En général, c'est vraiment quand on est au sein de ma génération
02:35qu'on comprend comment ça se passe.
02:37C'est déjà des groupes Snapchat de personnes qui se menacent, c'est massif.
02:41Il y a des trentaines, des cinquantaines de personnes, ça ne s'arrête jamais.
02:45Je ne sais pas si les parents ferment les yeux ou s'ils n'en ont juste rien à foutre.
02:50Ne vous inquiétez pas, vous parlez avec votre vocabulaire et votre âge aussi Mila.
02:55Et donc, ce 8 mars, les némésistes et le mouvement féministe se sont affrontés symboliquement dans la rue,
03:00némésistes étant soutenus par le ministre de l'Intérieur Bruno Rotaio
03:04et bien entendu par les médias Bolloré.
03:06Il faut savoir qu'on a quand même, dans cette même manifestation,
03:09appelé à un féminicide dans une marche pour les femmes.
03:14Alice Cordier, on a menacé de la tuer,
03:17c'est écrit sur des murs, dans une manifestation pour le droit des femmes.
03:21Et elle a fait le suivre par Rima San.
03:24Alors Rokhaya, quel regard as-tu porté sur ce 8 mars, ce 8 mars 2025,
03:28sur cette bataille du sens qui s'est déroulée à cette occasion ?
03:32Quand je parle de bataille du sens, j'évoque le sens du mot, du concept féminisme.
03:38On a l'impression qu'il y a une sorte d'opéa qui a voulu se faire sur ce mot, sur ce concept.
03:47Oui, c'est très juste. Tout d'abord, merci de me recevoir.
03:50Merci de m'inviter. C'est très juste dans la mesure où, effectivement,
03:54le féminisme a toujours été un terrain de bataille idéologique,
03:58dans le sens où il y a des dynamiques, des dynamiques qui traversent la société,
04:01traversent aussi le féminisme, à savoir qu'il y a des personnes en situation de majorité,
04:05en position dominante, qui essayent d'utiliser ce vecteur pour asseoir une certaine position.
04:11Et puis d'autres qui font du féminisme le levier de la dénonciation de toutes les inégalités.
04:17Donc un collectif comme Nemesis n'a absolument pas vocation à défendre toutes les femmes.
04:22Leur seul intérêt, c'est d'utiliser la notion de féminisme pour faire avancer un agenda qui est raciste,
04:28qui ne fait que stigmatiser certaines personnes,
04:31comme si le patriarcat était le fait d'une seule partie de la population.
04:35Et dans cette entreprise, elle s'appuie sur des pouvoirs, le pouvoir politique,
04:39et une partie, pas tout le pouvoir médiatique, mais une petite partie du pouvoir médiatique,
04:43c'est-à-dire essentiellement la sphère des médias bollerés.
04:48Absolument. Et ce qui est assez fascinant, c'est de voir que finalement,
04:51dans une manifestation féministe, c'est un collectif identitaire d'extrême droite
04:55qui a pu marcher en dehors de la manifestation, mais protégée par les forces de l'ordre.
05:00Tandis qu'on a vu par le passé des manifestations féministes,
05:02notamment le 7 mars, qui ont eu lieu la veille au soir,
05:05être brutalisées par ces mêmes forces de l'ordre.
05:07Donc on voit effectivement que quand il s'agit de marcher pour protéger les droits des femmes,
05:12ce ne sont pas les droits des femmes qui sont protégées,
05:14mais au contraire celles qui menacent un féminisme inclusif et véritablement universaliste.
05:20Depuis le 7 octobre 2023, le féminisme est également présenté comme pro-hamas,
05:25pro-viol de famille israélienne.
05:27Et la mise de côté du collectif sioniste de gauche, selon sa propre définition,
05:32nous vivrons est instrumentalisée par l'extrême droite médiatique et politique.
05:36Une fois de plus, ça ne facilite pas les choses.
05:38Le 7 octobre a changé quelque chose, 7 octobre 2023.
05:41Je ne sais pas si le 7 octobre a changé véritablement quelque chose.
05:46Le fait est qu'il est important de dénoncer toutes les violences sexuelles,
05:49d'où qu'elles proviennent.
05:50Ce qui est important de dire, c'est qu'avant le 7 octobre,
05:52il y a aussi des personnes en Palestine qui étaient enfermées,
05:57notamment dans des prisons israéliennes,
05:58qui ont été victimes de violences sexuelles et sexistes.
06:02Et ce sont des violences sexuelles et sexistes qui ont fait l'objet de décisions judiciaires
06:06et sur lesquelles il est aussi important d'avoir une voix.
06:09Donc je pense que dans un contexte d'affrontement,
06:12lorsque des violences sexuelles surgissent, il faut les dénoncer d'où qu'elles viennent,
06:15mais il faut le faire de manière intègre et de manière honnête.
06:17Malheureusement, moi, je n'entends que rarement parler de ces violences.
06:21Ourad.
06:22Oui, alors je vais rebondir sur ce que tu viens de dire,
06:25parce qu'effectivement, ça n'a pas changé fondamentalement les choses.
06:29Ça a plutôt joué le rôle, le 7 octobre 2023,
06:32ça a joué un rôle pour moi de révélateur au grand public.
06:35C'est-à-dire qu'effectivement, il y a eu, et c'est pour ça,
06:36je pense que Théo te posait la question,
06:38il y a eu un certain nombre d'acteurs, de chroniqueuses notamment,
06:42c'est souvent des femmes, puisque ça donne une certaine légitimité,
06:44qu'en fait, elles n'ont pas,
06:45qui vont taxer les associations féministes de gauche en disant,
06:49comme par hasard, c'est un peu le comme par hasard complotiste,
06:51vous ne condamnez pas,
06:53vous ne parlez pas des viols dans telle partie du monde
06:55et évidemment, a fortiori en Israël.
06:58Et c'est dans ce sens-là qu'effectivement,
07:00comme on dit dans un langage populaire classique,
07:03les masques tombent à l'occasion de ça.
07:05Et alors, il y a toujours eu une espèce de frange de la population
07:10qui s'est ouvertement montrée anti-féministe, anti-progressiste,
07:14anti-progrès pour les femmes, notamment les droits des femmes.
07:16Il y a également toujours eu des femmes qui se sont mis de ranger
07:21dans ce camp-là, mais là, on a l'impression que ça se débride,
07:24ça se lâche.
07:25Je vais vous laisser regarder pour qu'on comprenne bien
07:27dans quelle situation on se trouve aujourd'hui dans les médias,
07:29notamment les médias dits de droite.
07:32Je vais vous laisser écouter Juliette Briance,
07:33qui est une chroniqueuse qui se qualifie elle-même de droite,
07:37voire moi, je la qualifie d'extrême droite et qui va expliquer
07:39que le féminisme, en fait, c'est de manière un peu pétiniste,
07:43c'est une forme dévoyée de ce que devrait être le regard
07:46sur la société, notamment sur la question des salaires.
07:48Je vous laisse écouter.
07:49Ça fait dix ans que tous les ans, à la journée de la femme,
07:52les médias nous ressortent les histoires...
07:54Ah non, Emmanuelle !
07:55C'est la journée internationale du droit des femmes.
07:57Mais je m'en fous !
07:58Mais c'est pas, je m'en fous, c'est hyper important !
08:00Ça devrait être la journée de la femme.
08:00C'est hyper important !
08:02Elle me laisse finir !
08:03Calmez-vous !
08:04Dis les bons mots, quand même !
08:05Je m'en fiche de cette journée !
08:06Ah ouais, d'accord.
08:07Je la reconnais pas, moi.
08:08Donc, tous les ans, à cette fameuse date qu'on ne citera pas,
08:11on nous ressort l'écart, le soi-disant écart salarial.
08:15Il n'est pas soi-disant, c'est des chiffres,
08:17ce n'est pas une opinion, Juliette.
08:18Mais les hommes, finalement, on se rend compte qu'en fait,
08:20à poste égal, études égales et temps de travail égales,
08:24il n'y a pratiquement aucun écart salarial.
08:27Même l'écart résiduel, il peut être expliqué par plein de choses,
08:30les différences de négociations, les différences de secteurs, etc.
08:34Donc bref, on n'est pas du tout moins payés que les hommes,
08:36n'importe quoi.
08:37Ensuite, pour ce qui est des tâches ménagères,
08:40je ne sais pas, mais gérez votre foyer comme vous voulez, non ?
08:43Vous ne venez pas mettre des caméras pour savoir qui sort les poubelles
08:46et qui fait la vaisselle ?
08:47Démerdez-vous, quoi !
08:48Je le précise bien, ce n'est pas nouveau,
08:52mais on sent que c'est de plus en plus présent sur les plateaux.
08:55Avant, on était un peu habitués à des plateaux de Pascal Praud.
08:58Souvent, on pointe Pascal Praud, on se retrouve avec plein de mecs.
09:00Tiens, d'ailleurs, j'aimerais bien avoir ton avis là-dessus.
09:02Les plateaux où on parle des femmes,
09:05notamment sur la question des congés menstruels,
09:08il y a toute une série de choses où il n'y a que des mecs.
09:11Non, mais c'est juste scandaleux.
09:13Et pour revenir à ce qui a été diffusé à l'instant,
09:15ce que je trouve assez fascinant,
09:16c'est l'absence de mention des violences sexistes et sexuelles.
09:19On est quand même un pays qui, l'année dernière,
09:22a fait l'objet d'une attention internationale
09:24suite au procès de Dominique Pellicot
09:26et de plus de 50 personnes accusées
09:28et reconnues comme coupables d'avoir violé Gisèle Pellicot.
09:32Aujourd'hui, Caroline Darrian, leur fille,
09:34a dit qu'elle est convaincue d'avoir été victime d'inceste
09:36et de violences sexistes répétées.
09:38Nous dire qu'aujourd'hui, il n'y a pas de sujet sur le 8 mars,
09:42alors qu'on sait qu'il y a un viol,
09:43une tentative de viol toutes les 7 minutes en France,
09:45que 96% des auteurs de viols sont des hommes,
09:49bien sûr qu'il y a un sujet.
09:50Et le sujet, ce n'est pas seulement l'inégalité économique,
09:52c'est aussi le fait que les femmes puissent disposer de leur corps librement
09:55et puissent protéger leur corps des agressions
09:57qui sont des agressions absolument quotidiennes.
10:00On est en plein, aujourd'hui, procès du chirurgien Le Squarnec,
10:04qui a porté atteinte effectivement à des corps d'enfants,
10:06parce que je pense que la question de l'enfance,
10:08c'est aussi une question patriarcale,
10:09parce que les enfants sont souvent considérés
10:11comme les possessions des adultes.
10:13Et donc, dire que le 8 mars, finalement,
10:16c'est qu'une question domestique,
10:17c'est vraiment méconnaître la question.
10:19Puis encore une fois, naturaliser le fait que les femmes
10:24soient en majorité en charge des travaux domestiques
10:28a un prétendu instinct maternel.
10:31Déjà, c'est oublier que toutes les femmes
10:33n'ont pas vocation à être mère.
10:34Il n'y a absolument aucune obligation dans ça.
10:36Il n'y a rien d'instinctif dans le fait de passer l'aspirateur
10:38ou de récurer les toilettes.
10:40Si elle considère que son instinct la pousse vers le nettoyage
10:44des parties humides de son appartement,
10:48c'est son problème.
10:48Mais la véritable question, c'est pourquoi cette personne,
10:51en fait, aujourd'hui, se retrouve dans une position
10:52à parler d'un sujet que manifestement, elle ne maîtrise pas.
10:55Absolument.
10:57On peut parler d'une forme de grossièreté,
10:59voire même, c'est marrant, parce que ça vient de gens
11:01qui te parlent de cancel culture et compagnie.
11:02Alors, en fait, ils sont en train d'effacer un point complet
11:05de cette histoire du féminisme et des revendications féministes
11:08en ne faisant effectivement qu'un focus qui les arrange,
11:10évidemment, pour leur narratif.
11:12Alors, ça, c'est une militante, Juliette Briand, d'extrême droite.
11:17Donc, je voulais montrer, c'est d'une évidence,
11:19j'ai envie de dire, c'est une caution qui sert
11:21le narratif autour du féminisme, mais manque de bol
11:24depuis quelques années.
11:25On se retrouve, et tu es bien placé pour le constater, le vérifier,
11:29on se retrouve avec des positions de gens
11:30qui sont prétendument de gauche.
11:32Je pense, évidemment, au printemps républicain,
11:33je pense à Raphaël Enthoven, je pense à Caroline Fourest,
11:36par exemple, qui vont afficher une espèce de défiance
11:39vis-à-vis du féminisme, notamment sur MeToo,
11:42bien évidemment, qui a été remis en question par Caroline Fourest
11:47dans son récent ouvrage, qui a fait le tour
11:49de tous les plateaux télé, on se demande à quel point.
11:51Je n'ai toujours pas la mécanique de ça.
11:52Je ne sais toujours pas pourquoi on les voit partout, tout le temps.
11:55Est-ce que tu as un avis sur ça ?
11:56Je pense qu'ils ont de bonnes connexions.
11:57Je pense que c'est une question tout simplement de réseau
12:00et qu'effectivement, ils sont considérés comme étant des personnes
12:03qui doivent être présentes dans l'espace médiatique,
12:06mais ça repose vraiment sur des relations interpersonnelles.
12:08C'est mon opinion, je n'ai absolument aucune preuve de ce que j'avance,
12:11mais je suis convaincue du fait que ça ne tient pas au talent
12:13ou à l'intérêt supérieur de leur cause.
12:16Convergences idéologiques aussi ?
12:18Sans aucun doute.
12:19Je pense que les relations interpersonnelles,
12:21elles sont nourries par une approbation idéologique.
12:24Je pense que quand ces personnes déroulent leurs argumentaires sur les plateaux,
12:28il y a quand même, parmi les gens qui les ont programmées,
12:31des gens qui ne sont pas choqués d'entendre ce qu'elles ont à raconter,
12:33et que d'une certaine manière, ça sert effectivement à un discours.
12:36J'en suis convaincue.
12:36Oui, je pense que ça, on parle souvent ici de l'entre-soi,
12:38mais c'est vrai que c'est à la fois idéologique, c'est à la fois...
12:41Le fait que ces personnes-là puissent se fréquenter en dehors des plateaux,
12:44c'est quelque chose qui a été documenté aussi.
12:47Comment tu vis le fait que, toi en tant que féministe,
12:49comment tu vis le fait qu'ils s'accaparent les notions féministes
12:52pour les discréditer au maximum, un peu comme Emmanuel Ducrot, il y en a également ?
12:56Comment tu vis ça personnellement ?
12:58Alors moi, la chance que j'ai, c'est que je travaille beaucoup à l'extérieur de la France,
13:01et que la France, en fait, les Français, c'est 1% de l'humanité.
13:04Donc quand on travaille un peu à l'international sur les questions de féminisme,
13:07on voit que tout ce qui se passe sur le terrain idéologique français, c'est tout petit.
13:10C'est tout petit, et effectivement,
13:13souvent, ça se restreint à quelques arrondissements parisiens.
13:15Même à l'échelle de la France, en fait, ça reste des batailles idéologiques
13:20qui concernent un petit groupe de personnes.
13:24Parce que même à l'échelle de la France,
13:26je ne sais pas, quand je vais en Martinique ou en Guadeloupe,
13:27je pense que les personnes que je rencontre n'ont absolument que faire
13:30de savoir ce que pense Caroline Fourest ou ce que pense Emmanuel Ducrot.
13:32Donc je pense qu'il faut aussi qu'on se rende compte
13:34à quel point ces débats ont beaucoup lieu sur les réseaux sociaux,
13:38mais finalement n'intéressent pas
13:40tant de personnes que ça en dehors de ce petit cercle.
13:43Même si je dois reconnaître quand même que les livres de Caroline Fourest
13:47se vendent bien, mais dans un pays qui vote autant à l'extrême droite,
13:49ça fait aussi sens.
13:51Donc moi, oui, je le ressens comme juste une forme de conservatisme
13:55qui gagne la population française.
13:56Ce qui me satisfait aujourd'hui, c'est qu'il est clair pour tout le monde
13:59que l'agenda qui est défendu par Caroline Fourest,
14:01c'est un agenda de droite.
14:03À l'époque où nous l'avions critiqué avec Les Indivisibles,
14:05qui est une association antiraciste que j'avais confondée à la fin des années 2000,
14:09on lui avait décerné, enfin le jury qui avait été convoqué par l'association
14:13avait décerné ce qu'on appelait à l'époque un Yabon Award.
14:16Ce sont des trophées qui étaient décernés aux personnes
14:18qui avaient tenu les propos les plus racistes de l'année.
14:20Il avait été décerné à Caroline Fourest à l'époque.
14:23On avait été extrêmement critiqués par la gauche qui nous disait
14:25que c'était scandaleux de s'en prendre à une féministe qui était antiraciste, etc.
14:29Ce qui est très bien en 2025, c'est que ce qu'on avait vu à l'époque
14:32est aujourd'hui très clair pour tout le monde et que parmi les féministes,
14:35les gens ont très bien compris que son agenda consistait à essayer
14:38de réprimer la parole des personnes qui sont exprimées.
14:41Dans son livre, elle s'en prend quand même à Judith Gaudrech, à Adèle Haenel
14:45en révélant des informations personnelles sur sa vie privée.
14:48Vraiment en tapant sous la ceinture de manière extrêmement malhonnête.
14:51Il y a quand même une tribune qui a été signée par énormément de féministes,
14:55non seulement du monde du cinéma, mais d'ailleurs pour contester
14:57et pour fact-checker son livre qui est constellé d'erreurs et de mensonges.
15:02Je crois qu'aujourd'hui, en tout cas, tout le monde sait que ces gens-là
15:06ne sont pas de gauche.
15:07Oui, tout à fait. On en avait parlé ici.
15:08Je crois qu'il y avait un très bon article de notre consoeur,
15:11en l'occurrence, des IROC, qui avait pointé tout ce que tu nous rappelles ici.
15:17Puisqu'on parle de féminisme, je vais me tourner vers le dictionnaire
15:21amoureux du féminisme dont tout à l'heure Théo parlait,
15:23qu'on va voir évidemment à l'écran.
15:24Donc, c'est paru aux éditions Plon, c'est incroyable la somme de travail
15:30que ça a dû te demander.
15:31Tu vas nous en parler, bien évidemment.
15:32Alors, j'ai cru comprendre dans la préface, enfin le préambule,
15:35j'ai cru comprendre que c'était une commande.
15:37C'était pas spontanément, que c'est pas toi qui avais proposé ça.
15:39Au départ, j'avais pensé ça quand j'ai entendu parler de ce livre.
15:41Je me suis dit, tiens, c'est une bonne idée qu'a eue Rokhaya,
15:42mais finalement, c'est une commande, c'est bien ça.
15:43C'était absolument pas mon idée.
15:45Effectivement, c'est Grégory Berthier-Saudray qui dirige la collection
15:48des dictionnaires amoureux, qui m'a approchée il y a quelques années
15:51pour me proposer ce dictionnaire amoureux, ce qui, je dois l'avouer,
15:53m'a beaucoup surprise parce que c'est une collection qui est portée
15:57par des figures assez éminentes du paysage littéraire ou médiatique
16:00de France, mais qui ne sont pas vraiment, pour beaucoup d'entre elles,
16:03en tout cas dans la même ligne, on va dire idéologique que moi.
16:06Donc, me proposer ce dictionnaire amoureux,
16:08je trouve que c'était une démarche quand même assez audacieuse,
16:11d'autant plus que je défends un féminisme qui, pour beaucoup,
16:14est considéré comme sulfureux ou radical.
16:17Moi, je pense qu'il n'y a rien de mal à être radical,
16:18donc je n'ai absolument aucun problème avec ça.
16:20Après, sulfureux, je pense que c'est juste que ça décoiffe
16:22des personnes qui sont promotrices de la protection de l'ordre dominant.
16:27Donc, oui, j'étais super agréablement surprise de cette sollicitation.
16:31Et en fait, c'est un exercice effectivement extrêmement fastidieux.
16:34C'est très, très long parce que...
16:37Alors, c'est un dictionnaire amoureux et moi, je me suis confiée
16:39à la mission d'être à la fois dans la pédagogie,
16:41mais aussi à la notion d'amour, d'amoureux,
16:44donc de mettre en avant des notions qui m'étaient chères.
16:47Donc, beaucoup de pop culture, par exemple,
16:48mais ça demande quand même beaucoup de travail parce qu'effectivement,
16:50pour chaque notion, il faut faire des recherches, recouper, etc.
16:53S'assurer que même si on a des choses en tête,
16:56que les choses dont on parle sont exactes.
16:58Je n'ai pas envie de me retrouver avec une tribune de 150 féministes
17:01qui fact-check mon dictionnaire amoureux en disant que j'ai n'importe quoi.
17:04Donc, effectivement, je travaille quand je fais mes livres,
17:06quand je les écris. Et voilà.
17:08Une question assez basique, c'est, tu connaissais...
17:11Alors, je précise que ce dictionnaire,
17:12qui est dans l'ordre alphabétique classique,
17:15ce dictionnaire, en fait, va à la fois balayer des concepts,
17:17va balayer, va présenter ou représenter des personnages,
17:20des personnalités au travers de l'histoire.
17:22Il y a même des personnes qui sont toujours de ce monde, fort heureusement.
17:25Est-ce que tu avais en tête déjà des idées
17:30ou tu allais chercher en fouillant et tu as fait des découvertes
17:33ou c'est des choses que tu connaissais déjà majoritairement ?
17:37Il est quand même composé très majoritairement de choses que je connaissais.
17:41J'ai fait des listes de mots parmi les notions
17:44dont j'estimais qu'elles devaient être expliquées,
17:47comme l'intersectionnalité, comme la charge mentale,
17:50comme la misogynoir, d'autres qui se sont débattues
17:53dans le champ politique et sur lesquels je souhaitais faire des rappels,
17:56comme l'universalisme, comme la laïcité.
17:58Mais après, c'est vrai que j'avais ma liste.
18:00Les personnages morts, les personnalités mortes ou vivantes,
18:03ce sont des personnalités que j'admire.
18:05Donc, c'est vraiment ça qui a été le prisme.
18:07Il y a des femmes auxquelles j'ai pensé.
18:09Puis finalement, je me suis dit bon,
18:10peut-être qu'on va essayer de faire des équilibres internationaux.
18:12Et puis, effectivement, je me suis vraiment essayé de parler des femmes
18:15de tous les continents.
18:17Donc, effectivement, c'était toutes des personnes que je connaissais,
18:22mais certaines sur lesquelles il a fallu que je fasse plus de recherches.
18:24Par exemple, Katharina Tycone, je la connaissais de nom.
18:27J'avais déjà lu des choses sur elle.
18:29C'est une femme qui est d'origine romanie et suédoise,
18:32qui est considérée comme la Martin Luther King de Suède.
18:36Après, moi, je trouve qu'elle est sa propre personne.
18:39Je ne connaissais pas très, très bien sa vie, par exemple.
18:41Donc là, j'ai dû effectivement faire des recherches pour en savoir davantage.
18:44Et il y en a d'autres dont je connais bien la vie pour avoir travaillé dessus.
18:47Donc là, j'ai eu besoin de faire moins de recherches.
18:49Mais dans tous les cas, même quand on parle de Simone Veil,
18:51il faut quand même vérifier les dates, les étapes, etc.
18:53Parce que je ne connais pas par cœur.
18:54De toute façon, tu n'as pas de travail de plusieurs années, c'est ça ?
18:57Oui, en tout cas, j'ai passé l'essence.
18:58C'est surtout l'année dernière que j'ai passé beaucoup de temps à travailler.
19:01Donc le travail de collecte s'est opéré avant,
19:04mais le travail de rédaction a surtout eu lieu l'année dernière, en 2024.
19:07Je précise que pour chaque définition, chaque mot,
19:09il y a un renvoi vers d'autres mots.
19:12C'est assez interactif.
19:15Alors justement, je parlais des personnalités.
19:17Alors si c'est comme une évidence de voir le mot sororité apparaître
19:21dans ce dictionnaire amoureux du féminisme,
19:23il y a aussi des personnalités comme par exemple Tarana Burke.
19:25Alors, je ne sais pas si je prononce bien Burke.
19:27Je pense qu'on dit Burke, mais je ne sais pas dire.
19:30C'est vrai qu'en français, ce n'est pas très beau.
19:32Mais Tarana Burke, comment tu l'as découverte ?
19:35Je l'ai découverte assez tôt.
19:37C'est une femme qui est éducatrice à Harlem, à New York et qui est une femme noire
19:43qui est originaire de New York également
19:45et qui est la véritable créatrice du mouvement Me Too.
19:48Elle l'a lancé lors d'ateliers qu'elle avait créé justement pour créer de l'empathie
19:52auprès des jeunes femmes, majoritairement noires,
19:55qu'elle recevait dans ses différents ateliers
19:59pour justement faire en sorte que ces jeunes femmes puissent sur un petit papier dire
20:02« moi aussi » et en fait faire écho aux violences qu'elles avaient pu subir.
20:05Et en fait, quand Alissa Milano a lancé ce hashtag,
20:08effectivement, je l'ai attribué comme tout le monde au départ.
20:10Et puis, quelques mois plus tard, j'ai découvert l'existence de Tarana Burke.
20:12Voilà, j'en suis revenue.
20:13Et puis, il a fallu quand même quelques années avant qu'elle soit considérée,
20:16qu'elle soit interviewée dans les médias.
20:17Et aujourd'hui encore, la plupart des gens ne la connaissent pas.
20:19Oui, très honnêtement, je l'ai appris par ton biais et je t'en remercie.
20:23Je suis très honorée. Merci à toi.
20:25On trouve aussi des personnes, des personnalités,
20:27je ne vais pas dire ambiguës, mais sur lesquelles tu portes un regard contradictoire,
20:30comme par exemple Joséphine Baker.
20:32Oui, alors ce n'est pas tant elle qui est ambiguë que l'époque dans laquelle
20:34elle a navigué et le regard qu'on a porté sur son corps,
20:37c'est-à-dire que j'admire beaucoup la femme qu'elle était,
20:39que ce soit en tant qu'artiste et performeuse, parce que vraiment,
20:41en termes d'art scénique, je pense qu'elle a apporté beaucoup de choses.
20:44J'admire aussi, évidemment, la résistante,
20:47le fait qu'elle ait pu collecter des secrets pour nourrir la résistance
20:50en utilisant justement l'image d'artiste un petit peu ingénieux qu'elle pouvait avoir.
20:54Mais après, en même temps, j'ai tout à fait conscience du fait des projections
20:58qu'on avait pu avoir sur elle en tant que femme noire,
21:01l'exotisation qui a été faite de son corps, le fait qu'on la célèbre aussi
21:04parce que justement, c'est une femme qui était très reconnaissante
21:07à l'égard de la France et qui, lorsqu'elle a pris position contre le racisme,
21:11c'était surtout contre le racisme aux États-Unis.
21:14Et si on a peut-être que si on lui a préféré,
21:17on l'a préféré à Gisèle Halimi pour la panthéonisation,
21:20c'est peut-être aussi parce que Gisèle Halimi, qui figure aussi dans
21:22« Lictionnaire amoureux », était une figure explicitement anticoloniale
21:25et beaucoup plus critique des actions de la France et de la République.
21:29Donc voilà, Joséphine Baker, pour moi, elle incarne...
21:31Ce n'est pas tant elle qui est ambiguë que l'incarnation qu'elle peut avoir d'ambiguïté.
21:35Puis les rôles qu'elle a eus dans des films n'étaient pas des rôles super.
21:37C'était des rôles où souvent, c'était la pauvre femme qui a parfois été tunisienne,
21:41parfois de je ne sais quelle île, caribéenne,
21:44puis souvent amoureuse d'un homme blanc qui ne l'aimait pas en retour.
21:46Donc il y avait un petit peu ce qui ne correspondait en rien à sa vie réelle.
21:50Mais voilà, ce n'était pas forcément des images très valorisantes
21:52qui étaient faites d'elle dans le cinéma.
21:54D'accord, merci pour cette précision.
21:56Alors, je précise pour nos amis qu'il y a également Annie Ernaud, par exemple.
22:00Il n'y a pas que des femmes noires, parce qu'on pourrait avoir l'impression avec ce que je vais dire.
22:03Oui, il y a Gisèle Halimi que j'ai évoqué à l'instant.
22:05Oui, absolument. Je me l'étais noté quand même pour qu'on sache.
22:08Absolument, il y a Wonder Woman. Pourquoi Wonder Woman ?
22:12Parce que pour moi, c'est la super-héroïne par excellence.
22:14Déjà, j'adore les comics pour commencer à dire les choses.
22:18J'aime beaucoup les séries.
22:19Moi, j'ai découvert Wonder Woman quand j'étais petite grâce à la série télévisée des années 70,
22:22où elle a été incarnée par Linda Carter.
22:25Et puis parce que c'est la première super-héroïne.
22:27Et je trouvais ça intéressant de raconter un peu la genèse dans un contexte
22:30où c'était plutôt Superman et Capitaine America, comment elle est née,
22:34comment elle a intégré la Justice League,
22:36donc qui est l'agrégation de tous les super-héros de DC Comics,
22:40avec d'abord un rôle très, très en retrait,
22:41puis pour devenir vraiment une puissante et super-héroïne comme les hommes.
22:46Donc moi, je trouvais ça intéressant.
22:48C'est aussi très personnel, puisque c'est un dictionnaire amoureux.
22:51Est-ce que tu peux nous préciser la différence que tu fais entre féminisme,
22:55puisque c'est quand même le terme générique, et féminité ?
22:57Je me rappelle d'un collectif, un sombre collectif qui s'appelait les Antigones.
23:00C'était des femmes habillées en blanc et qui interpellaient notamment les fémenes.
23:04Et qui, alors c'était une grande tauge, un peu comme des femmes grecques.
23:08C'était en 2013, si mes souvenirs sont bons, ça date un petit peu.
23:10Et elles disaient, nous opposons à votre féminisme, nous opposons à votre féminité.
23:14Ils disaient pour le retour des femmes à la maison,
23:15que la femme est complémentaire de l'homme, il n'y a pas d'opposition.
23:18Enfin, c'était que des clichés comme ça.
23:20Qu'est-ce que tu leur réponds à cette histoire d'opposer la féminité au féminisme ?
23:25Déjà, pour moi, la féminité, c'est une construction sociale, en fait.
23:28C'est justement une idée à laquelle doivent se conformer les femmes par tous les moyens possibles.
23:35Donc pour moi, il n'y a pas une manière d'être femme, il y en a plein.
23:39Simplement, il y a une féminité à laquelle on rattache tout un tas de critères,
23:43une forme de fragilité, une forme de minceur, de délicatesse, de gentillesse,
23:46de fait d'être aimable, agréable, etc.
23:48Donc une quête, en fait, qui n'est jamais vraiment acquise,
23:51parce que le propre d'une femme, c'est qu'elle vieillit.
23:54Et donc, du coup, on s'éloigne chaque jour de ce qui correspond à,
23:57soi-disant, le pic de notre féminité.
23:59Et donc, dans la féminité, à la féminité, on associe une forme de désirabilité,
24:04mais au bénéfice des hommes et du patriarcat.
24:07Donc pour moi, la féminité, c'est un mythe, en fait.
24:09C'est un mythe qui fragilise en permanence les femmes.
24:12Et en fait, qu'on ne peut jamais véritablement atteindre.
24:15En revanche, dont on est toujours menacé d'être destitué.
24:18Je comprends tout à fait.
24:18Alors, j'avais aussi noté, mais je laisserai les personnes
24:22qui vont acquérir ton ouvrage le découvrir.
24:25Il y avait pervers, narcissiques.
24:26Je trouvais ça presque amusant, parce que ça fait partie des mots
24:28comme ça qui ont débarqué maintenant, qui envahissent complètement l'espace.
24:31Donc, ce sera intéressant de le voir.
24:33J'avais également noté des expressions idem,
24:38comme la bien-pensance ou le politiquement correct,
24:40qui viennent évidemment se confronter à cette question progressiste du féminisme.
24:45Et je voulais terminer par une notion qui est très débattue dans la société,
24:51et notamment sur les plateaux de télé.
24:52C'est la question de la compatibilité entre la religion,
24:55quelle qu'elle soit, et le féminisme.
24:58Oui, en fait, pour moi, il n'y a pas vraiment de question.
24:59On peut être féministe et religieuse.
25:01Par exemple, on a ordonné des pasteurs avant que les femmes aient le droit de vote en France.
25:06Effectivement, parfois, l'Église protestante a pu être plus progressiste que la République française.
25:11Donc, il n'y a pas vraiment deux sens.
25:13Il y a des femmes qui sont féministes au nom de leur religion
25:15et des femmes qui sont féministes parce qu'elles essaient de s'émanciper d'injonctions religieuses.
25:19Et donc, le fait de considérer mécaniquement la religion comme une source d'oppression sexiste,
25:24alors que c'est surtout son interprétation par des hommes qui est source d'oppression,
25:29pour moi, c'est plutôt ça la question.
25:30Effectivement, je ne pense pas qu'il faille la spiritualité,
25:33quelque chose qui est propre à l'humain et qui est souvent assez répandu.
25:36Et je pense que ce n'est pas dans la spiritualité qu'il faut chercher le problème,
25:38mais vraiment dans la lecture qu'en font les hommes.
25:40Et je ne parle vraiment pas des hommes au sens humain,
25:42puisque je n'aime pas dire homme pour humain, mais vraiment des hommes au sens masculin.
25:46Très bien. Merci infiniment pour cette précision.
25:48Donc, c'est Rokhaya Diallo, c'est dictionnaire amoureux du féminisme et c'est aux éditions Plon.
25:54Alors, justement, Rokhaya, si tu le permets,
25:56je voudrais qu'on évoque maintenant le paysage audiovisuel et médiatique français en 2025.
26:01Un PAF dont tu es une des figures, tu interviens dans de nombreux médias.
26:05Alors, on a discuté avant cette émission et ce tournage.
26:10Et tu m'as dit que tu n'intervenais plus sur RTL parce que je voulais te dire,
26:13tu interviens sur RTL et tu as dû suivre les mésaventures de Jean-Michel Apathie.
26:19Alors, non, tu n'interviens plus sur RTL.
26:20Non, je n'interviens plus sur RTL depuis quelques mois.
26:22J'y étais effectivement de manière abdominale depuis 2009.
26:25Mais pour des raisons qu'on m'a fait, on m'a dit que pour des raisons éditoriales,
26:29je n'avais plus vraiment ma place. Je n'y suis plus.
26:32Et effectivement, j'ai suivi avec beaucoup d'intérêt ce qui s'est passé autour de Jean-Michel Apathie.
26:37Et en fait, ce que ça me dit énormément, c'est déjà l'inculture que l'on a de l'histoire coloniale.
26:41Parce que le fait de ne pas comprendre que c'est absolument légitime de comparer
26:45les exactions qui ont été commises par les nazis,
26:49en tout cas de les inscrire dans une filiation idéologique, ça fait sens.
26:53Et c'est quelque chose qui n'est pas nouveau.
26:55On peut citer Hannah Arendt, mais on peut aussi y citer le discours sur le colonialisme d'Aimé Césaire,
26:59qui fait un lien et qui date effectivement de l'époque de l'après-guerre.
27:03– Une petite parenthèse, le discours sur le colonialisme a été retiré du programme des lycées en France
27:10au moment où François Bayrou, qui est notre actuel Premier ministre,
27:13était ministre de l'Éducation nationale à la fin des années 90.
27:16– Ah oui, je ne le savais pas du tout, parce que moi je l'ai étudié, j'ai été au lycée avant…
27:20– C'était à la fin des années 90, je pense vers 97 ou 97.
27:26– Je crois qu'il était en 94. – Oui, moi j'avais déjà le bac, je l'ai eu en 94.
27:31– Je pense que j'ai échappé d'un an, parce que moi je l'ai étudié effectivement au lycée,
27:34mais je pense que j'aurais pu ne pas l'étudier si j'avais été…
27:37– Mais ce n'était pas un horrible droitard, c'était François Bayrou qui était vu comme un homme du centre,
27:41qui a retiré ce livre.
27:42– Qui était quand même un homme de droite, manifestement.
27:45Donc voilà les techniques d'enfumade qui ont été perpétrées contre les Algériens,
27:51ont aussi été perpétrées contre les Haïtiens dans des bateaux.
27:54Et l'historien Claude Ribes parle de chambres à gaz flottantes pour ces bateaux.
27:59Donc évidemment, la pratique des exactions contre des populations dominées,
28:04elle a connu un terrain d'entraînement qui était le terrain colonial.
28:07Les Allemands ont quand même commencé à réfléchir à ces techniques d'extermination en Namibie,
28:12et donc ce n'est absolument pas problématique que d'imaginer qu'il y a une filiation idéologique
28:17en termes de pratiques d'extermination dans tous ces phénomènes coloniaux et nazis.
28:21Et donc moi, dans la réaction, j'ai vu beaucoup d'inculture en fait,
28:25et puis j'ai vu vraiment le fait qu'on comprend le nazisme comme le crime absolu,
28:28mais qu'on ne comprend pas le colonialisme comme quelque chose qui est aussi un crime absolu.
28:32Parce qu'on va toujours considérer qu'il y a des bonnes choses au colonialisme.
28:35Donc oui, c'est un vrai problème, et je tire mon chapeau d'être allé au bout de sa logique
28:42et de dire qu'effectivement, il avait besoin de montrer que ce n'était pas un problème
28:46d'évoquer le colonialisme comme il l'a fait.
28:48– Justement, est-ce qu'on peut aussi parler d'une inflexion idéologique ?
28:52Parce que tu n'es plus à RTL après de très nombreuses années
28:56où tu y as été éditorialiste chroniqueuse, Jean-Michel Apathy s'en va,
28:59parce qu'il y a eu quand même des actes d'hostilité dont il a tiré les conséquences,
29:04et le groupe RTL, c'est également le groupe M6,
29:07où Cyril Hanouna arrive de manière assez fracassante, ça veut peut-être dire quelque chose ?
29:14– Je ne sais pas si je peux faire le lien, parce qu'en même temps,
29:15c'est vrai que moi, je n'y suis plus, mais je sais que dans l'émission où je suis,
29:17il y a des personnes qui défendent des idées similaires aux miennes,
29:19je vois qu'il y a Jonathan Boucher-Peterson qui est pas de temps en temps, ou Pablo Piovivien,
29:23donc pour ce qui me concerne, je pense que c'est plus lié à ma personne que vraiment,
29:27aux idées que je défends peut-être, mais de la manière dont je les défends à titre personnel.
29:31Après, il y a une inflexion idéologique partout en France,
29:34c'est-à-dire que dans tous les espaces médiatiques,
29:35quand on voit la manière dont aujourd'hui les élus de l'extrême droite sont reçus,
29:40on voit bien qu'ils sont reçus dans une forme de confort,
29:43et dans l'absence de rappel de leurs racines,
29:45qui pour moi, effectivement, correspond à une inflexion générale.
29:49– Mouane ?
29:50– Oui, je précise que dans l'œil de Moumou de cette semaine,
29:53qui a été diffusé à partir de mercredi dernier,
29:56on avait traité justement la question de Thomas Soto qui parlait de…
30:00il accusait Jean-Michel Abati de manière tout à fait confraternelle,
30:03de faire, je cite, du relativisme en comparant la colonisation de l'Algérie à Horadour-sur-Glane,
30:08c'est-à-dire qu'il y avait cette supposition qui est née,
30:11dans la tête qui a été observée par un certain nombre d'internautes,
30:14que quand c'est des Blancs, ce n'est pas exactement la même chose que quand c'est des Noirs,
30:18et que ce relativisme vient, peut-être même de manière inconsciente chez Thomas Soto et d'autres,
30:22vient les amener à avoir ce genre de comportement que je trouve complètement étonnant.
30:26Et je pense que, tu as employé le mot inculture, je pense que c'est le mot juste,
30:30puisqu'en fait, on ne sent même pas une volonté politique de révisionnisme,
30:33on sent vraiment quelque chose de l'ordre de la espèce de crasse intellectuelle.
30:39– Alors, moi j'ai travaillé plusieurs années avec Thomas Soto justement dans cette émission,
30:42où ça se passait plutôt très bien,
30:44et j'ai entendu Thomas Soto le dire dans cette émission, je crois que c'est dans ses médiatiques,
30:48il me semble, qu'il a dit lui-même qu'il reconnaissait qu'il n'avait absolument rien appris
30:51sur la colonisation et sur ce qui s'était passé en Algérie.
30:53Il disait qu'il n'avait pas les connaissances qui lui permettaient
30:55d'évaluer la pertinence du propos de Jean-Michel Apathy.
30:59Moi je crois qu'effectivement, il est choqué,
31:00parce qu'en fait, on n'a pas appris à être choqué des crimes coloniaux.
31:03Et que du coup, dans notre inconscient collectif,
31:06ce qui s'est passé à Horadour-sur-Glane, c'est inqualifiable,
31:09mais ce qui s'est passé dans les colonies françaises, ça ne l'est pas tant que ça.
31:14Quels sont les films qui racontent ça ?
31:16Quel film peut-on citer qui raconte la manière
31:18dont les Algériens ont été massacrés par dizaines de milliers ?
31:22On ne peut pas en citer, en fait. Et c'est ça le problème.
31:24C'est vraiment ça le problème.
31:25Oui, il y a eu une époque très riche cinématographiquement parlant,
31:29notamment de la dénonciation, de la torture en Algérie,
31:31de la dénonciation de l'armée française et ainsi de suite,
31:34par des courageux réalisateurs qui se classaient plutôt à gauche,
31:39dans les années 70 notamment.
31:40C'était vraiment peu de temps après.
31:42Là, c'est vrai que là-dessus, on n'a pas avancé sur ces histoires de crime.
31:44Espérons peut-être que ça va permettre de faire avancer
31:47ce qui s'est passé malgré tout pour lui.
31:49Mais ce qui s'est passé avec Jean-Michel Apathie
31:50va peut-être faire avancer la société française sur ces questions-là.
31:53Tu interviens, toi, tu l'as effleurée tout à l'heure
31:56dans de nombreux médias, notamment Anglo-Saxon.
31:58Tu te vaux, je pense, c'est un avis personnel, un peu de jalousie.
32:02Je ne sais pas, mais recrutez-moi en France.
32:04Moi, j'écris très bien en français, donc je n'ai pas de soucis.
32:06Je pense un tout petit peu.
32:08Je pense aux Guardian, notamment, et le Washington Post.
32:10Du coup, on a l'impression que c'est à cause de ça,
32:12tu as une nuance, c'est à ce sentiment-là,
32:14la principale concernée, que tu es accusée d'apporter
32:17le wokisme d'Amérique vers la France et vers l'Europe.
32:20Il y a plusieurs choses.
32:22Le fait d'écrire pour des médias internationaux reconnus,
32:25vraiment, qui sont considérés comme ayant une certaine assise
32:27et une certaine légitimité.
32:30Je pense que ça me vaut quand même, malgré tout,
32:33de ne pas avoir complètement disparu de la sphère publique en France.
32:35Je pense que ça m'a maintenue dans une forme de légitimité
32:39parce que cette reconnaissance a empêché certaines critiques.
32:43Moi, je pense que finalement, quand j'ai été recrutée
32:46au Washington Post, j'étais quand même pas mal critiquée en France.
32:49Et pour le dire très familièrement, ça a fermé des bouches, en fait.
32:52Je pense que c'est ça qui se passe.
32:53C'est que quand j'écris pour le Guardian ou pour le Post,
32:55on est obligé de reconnaître que, en tout cas,
32:57des médias de qualité considèrent que mon travail est digne d'intérêt.
33:00Quoi qu'on pense de ce travail.
33:02Après, les accusations d'importer la lecture américaine
33:06sur la société française, elles précèdent ces recrutements.
33:09Ça fait très longtemps que l'on m'accuse de ça
33:11parce que j'ai fait un programme du département d'État
33:14qui s'appelle le programme des visiteurs internationaux.
33:16Je me suis rendue aux États-Unis en 2010.
33:18C'est un programme qui a été fait par plein de personnalités
33:19politiques françaises qu'on n'accuse absolument de rien.
33:22Et parce qu'on vit dans un déni en France
33:24selon lequel on n'aurait pas d'histoire raciale.
33:26Et donc, toute lecture raciale de la société française
33:28serait liée à une importation du continent américain.
33:30Je rappelle quand même, pour mémoire,
33:32que la France existe sur le continent américain.
33:34Et elle existe notamment en Guadeloupe et en Martinique
33:36parce que justement, elle est coloniale.
33:38Et elle l'est encore toujours aujourd'hui.
33:39D'accord. Alors, je précise, juste pour compléter ce que dit Rokhaya,
33:43que tu as aussi été accusée inversement
33:45d'aller dire du mal de la France dans les médias anglo-saxons,
33:48en l'occurrence sur la question des violences policières,
33:50surtout sur la question du racisme systémique.
33:52Et que tu étais là, tu utilises ça pour taper sur la France.
33:56C'est parce que tu es anti-France et ainsi de suite.
33:58Mais je dis du mal de la France en France et à l'étranger.
34:00Mon discours est constant.
34:02Et en fait, dire du mal, effectivement, je critique mon pays
34:05de manière, je pense, légitime puisque je suis française
34:08et j'ai toujours vécu en France.
34:09Donc, ce que je dis en France, je le dis à l'étranger.
34:10Et moi, je ne suis pas diplomate, en fait.
34:11Je n'ai absolument pas le rôle de soigner la réputation de la France.
34:14Et si les gens veulent que j'arrête de critiquer
34:16ce qui ne va pas dans mon pays,
34:17eh bien, peut-être qu'il faudrait que ces choses que je dénonce cessent.
34:19Tout simplement. Et si elles cessaient,
34:21moi, j'aurais plein de choses à dire merveilleuses sur ma ville,
34:23qui est Paris, que j'adore.
34:25Alors, plus généralement dans les industries créatives et culturelles,
34:29on a l'impression que les Noirs français
34:33ont besoin de la validation américaine
34:36pour s'imposer dans leur propre pays et de manière systémique.
34:41On va le dire, par exemple,
34:44Omar Sy, qui est dans un tout autre domaine,
34:46dans l'entertainment et dans le cinéma.
34:48En fait, le fait qu'il soit allé aux Etats-Unis,
34:51qu'il ait signé avec Netflix, ça lui donne de la force.
34:55Pareil pour Saïd Takmawi.
34:57Ça veut dire quand même quelque chose.
34:58C'est à dire que si vous allez aux Etats-Unis
35:02pour finalement vous imposer aux vôtres,
35:04vous êtes un traître.
35:06Mais si vous n'allez pas aux Etats-Unis,
35:08votre valeur n'est pas reconnue.
35:09Il faut qu'une puissance supérieure vous reconnaisse
35:12pour que les vôtres vous reconnaissent.
35:13C'est très ambigu.
35:14C'est tout à fait ambigu.
35:15C'est d'autant plus ambigu que j'ai conscience aussi
35:17du sort des Noirs aux Etats-Unis.
35:19Donc, je ne peux pas dire ici que les Etats-Unis sont un Eldorado.
35:22J'ai bien conscience du fait que quand je suis aux Etats-Unis,
35:24je suis Noir exotique avec un accent français.
35:26Donc, la reconnaissance que j'ai, elle est aussi liée au prestige
35:30qui est associé à mon identité française.
35:31Donc, je veux être très claire là-dessus.
35:33De la même manière, quand on reçoit les Afro-Américains ici,
35:35on les adore parce qu'ils incarnent quelque chose de différent.
35:38Et je rebondis sur ce que je disais tout à l'heure
35:40quand tu me disais que j'écris pour des médias anglophones.
35:43Moi, j'adorerais écrire pour des grands médias français.
35:45Et la réalité, c'est que ces opportunités n'existent pas.
35:47Et que si on se place de mon seul point de vue,
35:50ce n'est pas normal que je travaille plus aux Etats-Unis qu'en France,
35:52alors que j'habite à Paris.
35:53J'habite en France.
35:54Et donc, j'enseigne aussi aux Etats-Unis dans une université américaine
35:57qu'est l'Université catholique, qui d'ailleurs, en ce moment,
35:59est en train d'engager un bras de fer contre Trump très intéressant.
36:03Ce n'est pas normal, en fait.
36:04C'est-à-dire que moi, je...
36:06Alors, j'adore travailler pour ces médias et j'en suis absolument heureuse
36:08parce que ce sont des médias où on apprend beaucoup en tant que journaliste
36:11et en termes d'exigence journalistique.
36:15Mais il y a quand même une petite amertume de me dire que,
36:18finalement, j'ai les coudées franches en dehors de mon pays.
36:20Et ici, c'est beaucoup plus compliqué.
36:23La reconnaissance de mon travail est moindre, en fait.
36:25Elle est tout à fait moindre.
36:27Donc oui, c'est malheureux.
36:28Et effectivement, les Etats-Unis ont une forme d'impérialisme
36:31et de domination culturelle qui fait que quand on...
36:34Mais le Guardian, ce n'est pas américain.
36:35C'est l'autre côté de la Manche.
36:36C'est vraiment le Royaume-Uni.
36:37Anglo-saxon.
36:38Oui, c'est ça.
36:39Mais d'ailleurs, c'est marrant parce que j'ai fait une conférence
36:41il n'y a pas longtemps à Boston.
36:43Et donc, je leur ai montré une vidéo.
36:44J'ai fait une compil vidéo, en fait,
36:46de justement la manière dont on parle de l'universalisme en France
36:48et opposé aux anglo-saxons.
36:50Et les Américains, ils ont dit mais c'est quoi les anglo-saxons ?
36:52Parce que pour eux, ils n'ont rien à voir évidemment avec les Britanniques.
36:56Et ils disaient mais comment en fait, vous pouvez penser qu'on est les mêmes
36:58alors que déjà, on est séparés par un océan
37:00et que physiquement, c'est vrai qu'on est plus proches du Royaume-Uni
37:02qu'eux ne le sont des Etats-Unis.
37:03Donc pour eux, c'était intéressant cet amalgame
37:05qu'on pouvait faire entre leurs deux pays parce que...
37:07Voilà, c'est très, très différent, quoi.
37:09Est-ce que je peux entendre ?
37:10Alors justement, ce sera ma dernière question, Jean-Pierre.
37:12Sur cette histoire de médias français, tu as travaillé pour...
37:16Enfin, on t'a vu énormément.
37:17Tu as notamment été courageusement sur des chaînes
37:22ou des antennes qui ne sont pas forcément...
37:24Qui n'ont pas une visée éditoriale ou inéditoriale
37:27proche de celle qui pourrait être la tienne si tu possédais un média.
37:32Donc ça, c'est déjà une première difficulté.
37:34Et puis, tu fais régulièrement l'objet d'attaques.
37:38On va voir l'une des plus célèbres, j'ai envie de dire, l'une des plus grossières.
37:43Et je vais t'interroger juste après qu'on l'ait vue.
37:47Madiame Diallo se plaint de la France.
37:49Elle se plaint des Blancs.
37:51Mais si aujourd'hui, elle est journaliste,
37:53je vous rappelle qu'elle a été aussi Young Leader, c'est pas rien.
37:58Elle a bénéficié, elle a des awards, tout un tas de choses.
38:01Elle est pourvue d'un master qui est à son honneur.
38:05Ça veut dire qu'elle a été capable d'étudier.
38:07Mais elle le doit à l'ouverture d'esprit de notre éducation et de notre pays.
38:12Parce que Mme Diallo, elle n'aurait pas bénéficié de tout ce que donne la France.
38:17Je crois qu'il y a tant de chances qu'elle serait en Afrique,
38:20avec 30 kilos de puce, 15 gosses en train de piler le Nil par terre,
38:25et d'attendre que M. lui donne son tour entre les quatre autres épouses.
38:28Attention, Agnello Bono va vous tomber dessus.
38:31Non mais il suffit de dire que Rocaille Diallo,
38:34et comme vous l'avez dit, a eu de la chance quand même d'être en France
38:37et d'avoir une vraie liberté d'expression.
38:39Elle est la preuve que la France n'est pas raciste.
38:40Voilà, exactement, elle ne devrait pas cracher.
38:42À l'instar d'élus, à l'instar d'acteurs politiques, je pense par exemple,
38:46à Emmerick Caron, je pense à Agnello Bono ou Ursula Söder,
38:51ça fait un petit moment, tu as décidé de ne plus le laisser passer.
38:55Donc tu vas en justice régulièrement pour ces choses-là.
38:58Je te pose une question un peu personnelle et en même temps pratique.
39:01Comment tu vis ça ?
39:02Comment tu comprends qu'on en vienne à des termes comme ceux-ci ?
39:06En tout cas, ce que je comprends précisément dans cette interaction,
39:09c'est qu'on a face à nous une femme pour laquelle une personne africaine
39:13ne peut pas lui être socialement, socio-économiquement supérieure.
39:17Et donc, elle essaie de rétablir sa domination blanche
39:20en essayant de m'humilier et en essayant finalement de ridiculiser
39:23tout ce qu'elle associe de moi à l'Afrique et en évanouissant des clichés,
39:26parce que ce qu'elle dit de l'Afrique n'a absolument rien à voir avec la réalité.
39:29Donc, je pense que quand on est une personne noire
39:31et qu'on accède à une certaine place sociale,
39:34il y a des personnes blanches que ça indispose
39:36parce qu'elles ont été socialisées pour nous dominer.
39:38D'une certaine manière, qu'on accède à certains espaces,
39:39pour eux, c'est insupportable.
39:41Et voilà, tu parles des procès.
39:44J'ai attenté un procès contre Pascal Brockner
39:46parce qu'il m'avait, je veux dire, très clairement qualifiée d'influence,
39:52d'avoir influencé des terroristes.
39:53Après avoir rappelé que j'étais musulmane,
39:56je l'ai attaqué. Il a été relaxé.
39:58Apparemment, on a le droit de dire à une femme musulmane
40:00qu'elle a armé le bras de terroristes qui ont tué les gens de Charlie Hebdo,
40:04même si on sait que ce n'est absolument pas vrai.
40:06Et en fait, dans le cadre de ce procès,
40:08on m'a reproché plusieurs fois d'être allée au Festival de Cannes
40:11avec des belles robes.
40:12Je veux dire, à un moment donné, ça n'a plus de sens.
40:14C'est-à-dire que ce qu'on me reproche, en fait, c'est d'exister,
40:18d'exister à un endroit où je ne suis pas censée être,
40:20à une place où les personnes qui me ressemblent sont rares
40:22et de le faire sans, justement, avoir cette position préalable
40:25qui est de dire ma gratitude à l'égard d'une République
40:27qui m'aurait tout donné, ce que je considère comme étant faux.
40:31Donc, je pense que c'est ça qu'on me reproche
40:32et que cette femme, comme d'autres, finalement,
40:34ne supporte pas que j'ai accès à ces tribunes internationales.
40:37Alors que si j'ai accès à ces tribunes internationales,
40:39c'est justement parce qu'on m'a fermé des portes en France
40:41et que, finalement, je navigue à l'endroit où je peux naviguer.
40:46Merci infiniment, Rokhaya.
40:47Merci beaucoup.
40:48Merci, Rokhaya. Merci, Moumou.
40:49Et merci à vous d'avoir regardé l'œil de Moumou,
40:51l'invité sur la chaîne YouTube Le Média,
40:53sur notre site Internet, sur le canal 165 de la Freebox,
40:56sur Molotov. On rappelle que Le Média, votre média,
40:59ne vit que des abonnements et des dons de celles et ceux
41:01qui le regardent et qui l'aiment.
41:02Abonnez-vous donc à nos deux chaînes YouTube,
41:06Le Média TV et Le Média 24-7 et activez la cloche.
41:09Mettez des petits pouces en l'air.
41:10Et si vous le pouvez, allez sur lemediatv.fr
41:12et donnez-nous de la force.
41:14Donnez-vous de la force.
41:14Restez connectés au Média.