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La Commission européenne a présenté sa feuille de route pour l'agriculture et l'alimentation. Elle entend marquer une rupture avec les objectifs environnementaux issus du Pacte vert de 2019. On en débat cette semaine dans l'émission Ici l'Europe, sur France 24, Public Sénat et LCP. Année de Production :

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00:00France 24 LCP, Public Sénat présente
00:05Générique
00:25Bonjour à tous, merci de nous rejoindre pour un ICI l'Europe spécial agriculture
00:32du 22 février au 2 mars se tient à Paris le 61e salon international de l'agriculture
00:39et cela coïncide avec la nouvelle vision développée par l'Union Européenne
00:44pour façonner, je cite, ensemble une agriculture et un secteur agroalimentaire attractif pour les générations futures.
00:52Alors cette vision marque une rupture en termes d'approche et de contraintes comme d'objectifs avec les années précédentes
00:59et nous avons le plaisir pour en parler d'être aujourd'hui dans le building de la Commission Européenne
01:05au siège donc de cette commission avec le commissaire en charge de l'agriculture et de l'alimentation le luxembourgeois Christophe Hansen
01:12Bonjour Monsieur Hansen, je précise que vous étiez auparavant d'ailleurs député européen
01:17alors rappelons pour nos téléspectateurs un petit peu le contexte
01:20il y a cinq ans en 2020 la Commission Européenne présentait la stratégie de la ferme à la fourchette
01:26qui visait à verdir le système alimentaire européen avec des objectifs précis à l'horizon 2030
01:33le 19 février vous avez présenté votre vision plaidant pour davantage de flexibilité, moins de contraintes
01:40finalement moins d'objectifs aussi, est-ce qu'on est toujours dans cette idée d'un verdissement ?
01:45On est toujours dans l'idée d'un verdissement, je pense que les agriculteurs sont les premières victimes du changement climatique
01:52ils sont aussi notre meilleur rempart contre le changement climatique
01:55donc on doit les inciter à participer à la protection de l'eau, à la protection du climat
02:02je pense que c'est essentiel, il faut considérer les agriculteurs comme la partie de la solution
02:09et non pas la partie du problème, je pense que c'est essentiel à le souligner
02:13il faut aller plus sur des incitatives que sur des règlements et de la pression du haut vers le bas pour atteindre des objectifs
02:21mais je pense que le changement climatique est une réalité, il faut l'aborder d'une manière constructive et ensemble avec les agriculteurs
02:28Alors le maître mot de cette vision c'est la simplification
02:31c'est vrai que c'était véritablement le mot d'ordre aussi du PPE, le parti populaire européen
02:37c'est votre parti d'origine, c'est le parti de la présidente de la commission européenne Ursula von der Leyen
02:41et le parti maintenant de Friedrich Merz qui vient d'être désigné, porté à la chancellerie
02:47effectivement la simplification, promesse électorale de cette droite européenne
02:52mais est-ce que c'est véritablement quelque chose qui peut faire une différence pour les agriculteurs ?
02:56On a bien entendu les agriculteurs quand ils sont allés dans les rues il y a un an d'ici
03:01c'était quelque chose de très clair, trop de charges administratives
03:05et je pense que c'est juste parce qu'on n'a pas seulement la politique agricole qui s'abat sur la ferme
03:10mais il y a aussi toute une autre panoplie de lois nationales et européennes auxquelles ils doivent se tenir
03:17je pense qu'il est essentiel de réagir, la commission l'a déjà fait l'année dernière
03:21avec un premier paquet de simplification, on est en train de travailler pour le mot d'ordre
03:27Il y a effectivement celui de Christophe Hansen de votre collègue M. Séjourné
03:33qui lui s'occupe de simplifier l'industrie et qui a proposé son plan le 26 février
03:40C'est vrai que le secteur agricole, rappelons-le, est responsable de 11% des émissions de CO2
03:46et à la différence d'autres secteurs, il n'est pas soumis à une réduction de ces émissions en 2030
03:53est-ce que cela semble juste ?
03:55Cela semble juste parce que si on regarde les progrès que l'agriculture fait et ils sont énormes
04:01on constate notamment de l'année 2023 à 2024, l'agriculture a baissé de 2% ses émissions
04:07ça peut paraître peu mais quand on compare au transport qui est un des objectifs chiffrés
04:12le transport a seulement fait moins 1% donc l'agriculture fait mieux
04:16ce qu'on doit faire maintenant c'est que les nouvelles technologies soient aussi employées par les agriculteurs
04:22on a un manque à l'investissement dans l'agriculture parce qu'on n'a pas suffisamment de prévisibilité
04:27et je suis convaincu que si on leur donne cette prévisibilité budgétaire mais aussi du point de vue réglementaire
04:35ils vont à nouveau investir plus dans l'agriculture, dans de nouvelles technologies qui seront moins ématrices
04:41et on sera capable de réduire davantage les émissions
04:44Vous misez beaucoup sur ces nouvelles technologies puisque votre commission Ursula von der Leyen 2
04:50a décidé de retirer de la table finalement le plan controversé pour réprimer, réduire de moitié les pesticides d'ici à 2030
04:59mais ça reste quand même toxique et pour les agriculteurs et pour les consommateurs
05:04Il y a ces 10 dernières années on a retiré plus de 100 matières actives utilisées avant dans l'agriculture
05:11je pense que c'est un grand pas mais ça contribue aussi à ce que nos agriculteurs subissent des pertes de récoltes
05:18c'est significatif, on a aussi vu avec la proposition qui a été retirée par la commission
05:24mais qui était aussi partie un peu à la mise aux enchères sur les pourcentages au Parlement européen
05:30ça n'a pas été constructif et finalement on n'a aucun progrès
05:33je pense qu'il faut le prendre d'un autre côté, il faut développer davantage les biopesticides par exemple
05:38qui peuvent représenter des alternatives aux pesticides classiques
05:42ça c'est le chemin à y aller et il faut aussi avant qu'on retire justement des produits
05:47qu'on ait l'alternative plus durable, ce sera très important
05:50il faut aussi accélérer les procédures d'autorisation pour cette nouvelle génération de biopesticides
05:56Les agriculteurs, rappelons-le, ont manifesté dans toute l'Europe il y a un an parmi les sujets d'inquiétude
06:03la fixation des prix par le marché mondial ou la grande distribution qui détermine le revenu des agriculteurs
06:09et le manque de soutien à l'agriculture biologique
06:12Jonathan Motsch est allé à la rencontre de trois agriculteurs français
06:23Je m'appelle Axelle, j'ai 25 ans, ça fait trois ans que je suis installée sur l'exploitation familiale
06:31Allez les filles, on y va !
06:35Je suis associée avec ma maman et ma grand-mère
06:38et avec une partie de notre lait on le transforme dans notre fromagerie sur la ferme en divers produits laitiers
06:46Le secteur laitier est en crise depuis des années
06:51Notre prix de vente du lait c'est pas nous qui le fixons, on dépense des cours mondiaux
06:55donc je pense que suivant les exploitations, les charges que nous avons, ce n'est pas suffisant pour en vivre
07:03Jean-Baptiste Giberme, je suis agriculteur depuis 2016, l'année où j'ai rejoint mon père sur l'exploitation familiale
07:11Je suis la neuvième génération, ici on est à Sainte-Juliette en Tarin-Garonne
07:17On transforme notre raisin de table en jus de raisin
07:21Après on a de l'ail et des oignons, donc on fait des soupes
07:24Toutes les productions qu'on fait, que ce soit en transformation ou en agricole, tout est bio
07:29En 2023 on a eu une grosse empête sur le secteur
07:33On a eu 43 millions de pertes sur le département de production
07:39Je vous laisse imaginer l'étape psychologique des agriculteurs du coin
07:44On a répondu à tous les appels pour monter en gamme, sauf qu'au moment de pépé économique, chute du marché
07:50On n'arrive plus à vendre nos productions, on n'en a pas beaucoup avec les aléas climatiques
07:56Depuis 40 ans que je raisonne un petit peu, ça fait longtemps qu'on dit que l'agriculture ne va pas bien, que ça n'avance pas
08:05Je pense que là on est au bout de quelque chose, on est au bout d'un système
08:10On est une des seules professions qui ne fixe pas nos prix de vente
08:14Et ça c'est quand même compliqué, parce que tout le reste, tous les industriels, les fournisseurs, les commerciaux divers et variés
08:23Eux ils appliquent leurs marges, ils font augmenter les prix, nous on ne peut pas
08:27Quand c'est pour dégager des bénéfices négatifs tous les ans, ça ne peut pas durer
08:33Voilà, Christophe Hansen, d'abord non fixation des prix par les agriculteurs
08:39On a renoncé à fixer les prix du lait par exemple, libéralisation de ce secteur laitier qui est en grande difficulté depuis
08:47Qui n'est pas rentable par rapport aux cours mondiaux, est-ce que ça c'était finalement l'Europe qui protège ?
08:54Je suis d'avis, et on a récemment fait aussi une étude du marché, que le prix du lait actuellement est un prix assez stable et un bon prix
09:03Par contre on a évidemment le problème, et c'était documenté dans plusieurs des interventions des agriculteurs
09:09Que souvent ils ne savent déjà pas ce qu'ils vont recevoir, ils livrent leur lait et disons que la facture ça vient un mois plus tard avec le prix
09:19C'est pour ça qu'on a aussi mis ces deux propositions sur la table, notamment aussi pour qu'il y ait des contrats écrits obligatoires
09:27Et ça, pas seulement comme vous l'avez déjà en France avec la loi Egalim, il y a aussi évidemment le transfrontalier qui y joue
09:33Et là on a dû faire en sorte que ce soit le cas pour toute l'Union Européenne
09:40On a aussi encouragé, et on continue à le faire, que les agriculteurs se regroupent en organisation de producteurs
09:48Ça va être très important parce que s'ils sont à plusieurs, ils auront une position plus forte des négociations avec des prix qu'ils décident eux-mêmes
09:57On voit bien que la grande distribution c'est elle qui fixe les règles du jeu aujourd'hui pour l'ensemble des marchés agricoles
10:06Est-ce que l'Union Européenne a l'intention, les moyens de s'attaquer à cette grande distribution qui réalise des marges sur le dos des agriculteurs ?
10:14On a effectivement la proposition dont je viens de vous parler, ça va donner un prix juste parce que l'agriculteur sait exactement les heures de travail qu'il a
10:22Il sait les récoltes qu'il avait les années précédentes, il connaît aussi le produit des engrais, etc.
10:29Donc il saura dire j'ai besoin d'une telle marge pour que ça soit rentable sur ma ferme
10:34Si c'est écrit avec un contrat, un contrat peut être très simple, il aura la garantie qu'il aura le prix juste, je pense que ça c'est la première chose
10:43La deuxième chose, on a aussi mis sur pied un observatoire de la chaîne alimentaire pour justement déterminer et voir très clairement qui fait où les marges
10:52Le compte européen a estimé que l'UE pourrait manquer son objectif de 25% de terres cultivées en agriculture biologique en 2030
11:01On est pour l'instant à 11%, 15 milliards d'euros supplémentaires ont été prévus d'ici 2027 pour le bio
11:08Mais les exploitants bio disent que ça n'est pas assez, qu'ils ont fait des efforts et qu'ils ne sont pas récompensés
11:14Je pense que justement c'est un objectif qui est ambitieux mais il est réalisable
11:18Il faut maintenant vraiment mettre l'accent sur rendre cette agriculture biologique plus attractive aussi, je pense que c'est très important
11:27On pourrait par exemple parler aussi des marchés publics ou si vous avez une cantine publique qu'ils misent davantage sur les produits bio et les produits régionaux, ça va être très important
11:38Ensuite il faut aussi dire qu'on doit miser sur l'exportation de ces produits-là parce qu'effectivement notre label bio est reconnu mondialement donc il a d'énormes potentiels
11:50On est en train de travailler sur un paquet justement pour faciliter encore les démarches administratives aussi pour les subventions agricoles
11:59Mais on veut une agriculture biologique, on ne veut pas juste, comme on disait après la pandémie, il faut nourrir la planète, nourrir l'Europe, nourrir, nourrir, donc produire toujours plus, ça n'est plus cette logique-là
12:10Je pense que l'agriculture biologique est une partie de la solution, ça contribuera aussi à avoir moins d'impact sur l'environnement
12:18L'impact ne sera jamais zéro même avec l'agriculture biologique, ça c'est clair
12:22On doit pourtant manger tous les jours, donc il faut vraiment pousser surtout les pistons pour nous mettre dans cette direction-là, mais ce ne sera pas la seule option évidemment
12:31Vous étiez, Christophe Hansen, au Salon de l'agriculture, c'est un peu un passage obligé
12:36Emmanuel Macron y a redit que la France cherche une minorité de blocage pour bloquer un fameux texte
12:41Un accord avec quatre pays du Mercosur, un accord commercial qui fait aussi beaucoup débat parmi les agriculteurs très opposés à ces accords de libre-échange qu'ils jugent inéquitables par rapport à leur production interne
12:56Je pense que c'est un accord qui a été négocié sur base d'un mandat que les États membres, donc aussi la France, a donné à la Commission européenne
13:03Sur cette base-là, la Commission européenne a négocié
13:06Évidemment, je comprends tout à fait les craintes des agriculteurs, surtout qu'ils contestent certaines choses qui me semblent évidentes
13:14Des prix justes, on vient d'en parler, mais aussi la réciprocité dans les standards de production
13:19Et là, je pense qu'on a du travail à faire
13:21Moi, je trouve que c'est inacceptable qu'on prive nos agriculteurs de certains produits phytosanitaires
13:27Mais le produit concurrent est importé, qui a justement été traité avec ce pesticide
13:32Donc si c'est nocif pour une abeille ou pour la santé humaine au sein de l'Union européenne, ça le sera aussi à l'extérieur
13:40Donc il faut miser sur cette réciprocité des standards
13:44Vous avez mentionné tout à l'heure le secteur laitier
13:47C'est un secteur qui est susceptible de gagner énormément sur tous les produits
13:51Et la France est championne des produits sous indications géographiques protégées, le Roquefort, le Comté et j'en passe
13:58Ces produits-là, ainsi que le secteur vin, qui est en difficulté actuellement, vous le savez
14:03Vin vont être des potentiels bénéficiaires d'un tel accord
14:07Donc il faut maintenant faire notre travail à domicile
14:10La simplification, la réciprocité à une concurrence plus équilibrée à nos agriculteurs
14:15Alors une concurrence plus équilibrée, vous insistez beaucoup à l'intérêt de ce Mercosur
14:19Peut-être aussi parce qu'il se passe des choses de l'autre côté de l'Atlantique qui ne nous plaisent pas plus que ça
14:23Les organisations agricoles de l'Union Européenne ont tiré la sonnette d'alarme sur le protectionnisme américain
14:29Quel risque pour l'agriculture européenne ?
14:32De droits de douane supplémentaires promis par Donald Trump, le gouvernement Trump II
14:37Qu'il veut nous imposer droits de douane, dit réciproque d'ailleurs
14:40On a l'expérience du fameux cas Airbus-Boeing
14:45Où justement les Etats-Unis ont frappé des taxes d'importation sur nos produits agricoles européens
14:50Donc on connaît ce qui potentiellement va se passer
14:54Donc il faut mieux se préparer, donner des alternatives d'exportation
14:58Et c'est justement aussi les secteurs offensifs aux Etats-Unis, c'est les vins spiritueux
15:03Mais c'est aussi les produits liqués, les produits français, les olives évidemment aussi, l'huile d'olive
15:10Donc il y a des marchés qui pourraient être affectés
15:15Donc maintenant il est important de trouver aussi des alternatives
15:18L'Ukraine a exporté chaque mois plus de 7 millions de tonnes de matières agricoles depuis la fin de l'année dernière
15:25Soit des niveaux similaires à l'avant-guerre en fait
15:28Pour les agriculteurs des pays de l'Est, la Pologne par exemple, ses céréales ukrainiennes cassent les prix de leurs marchés
15:35Comment résoudre ce différent qui risque de s'amplifier quand on parle de l'adhésion de l'Ukraine à l'Union Européenne ?
15:41On a actuellement une libéralisation de certains produits agricoles
15:44Qui ont justement causé un afflux accru de produits agricoles sur nos marchés européens
15:51Vous avez mentionné la Pologne, on peut en mentionner d'autres, la Roumanie, la Bulgarie, la Slovaquie
15:56Ça a eu un impact sur les prix et effectivement il faut mieux se préparer
16:00Maintenant avec ces mesures commerciales autonomes, comme on dit, elles expirent en juin
16:06Maintenant il est temps de se préparer à un partenariat plus stable sous forme d'un accord commercial
16:12On en a déjà un, mais ça doit être plus stable et on doit aussi miser sur l'alignement des standards de production, ça va être très clair
16:21De plus, on doit aussi aider l'Ukraine à retrouver les marchés tiers des pays tiers qu'ils avaient historiquement
16:28Qui ont été coupés par la guerre mais aussi par la prise de ces marchés par la Russie, donc on doit les aider
16:33On est aussi dépendant de beaucoup de produits qu'on a besoin pour l'élevage par exemple
16:37Le soja, on n'en produit pas suffisamment, l'Ukraine a la capacité pour le faire
16:44Il faut prendre les opportunités et aussi convaincre les Ukrainiens d'aller dans cette direction
16:49Christophe Hansen, merci de cet entretien, commissaire à l'agriculture et à l'alimentation
16:54L'émission continue justement avec un débat sur cette thématique au Parlement européen
16:59Vous allez le voir, un débat très vif sur l'avenir de cette agriculture
17:08Merci de nous rejoindre à Bruxelles pour prendre la clé des champs et parler donc agriculture
17:14La politique agricole commune est le principal poste de défense de l'Union européenne, plus d'un tiers de son budget
17:20Mais le secteur primaire ne représente que 1% de la richesse européenne et à peine 17 millions d'emplois
17:27Alors que le Salon international de l'agriculture s'est tenu à Paris, la Commission européenne a présenté le 19 février dernier
17:34sa vision, une feuille de route pour répondre à la colère des agriculteurs qui s'expriment depuis plus d'un an dans de nombreux pays européens
17:42Bruxelles voudrait assouplir les normes environnementales qu'elle a imposées par le passé
17:48Alors finies les obligations écologiques, il s'agit d'inciter les agriculteurs à avoir de bonnes pratiques pour la planète
17:55Oui, une forme de remise en cause de la stratégie précédente de la ferme à la fourchette
17:59issue du pacte vert dont à peine 11 textes sur 27 ont été adoptés avec des renoncements symboliques
18:06comme l'objectif de réduire de 50% l'utilisation des pesticides d'ici à 2030
18:11La Commission européenne promet aussi de mieux lutter contre la concurrence déloyale des produits importés
18:16alors que certains accords de libre-échange qu'elle défend, comme l'accord avec le Mercosur, sont très critiqués par les agriculteurs
18:22Nous en parlons aujourd'hui avec deux eurodéputés, Benoît Cassart, bonjour
18:25Bonjour
18:26Eurodéputé belge du groupe Renew au centre de l'hémicycle, agriculteur de profession, éleveur de taureaux en Belgique
18:34Éleveur de pauvres
18:35Et puis avec nous aussi Tilly Metz, bienvenue, eurodéputée luxembourgeoise, membre du groupe Les Verts dans la commission agriculture
18:42vous plaidez pour des pratiques agricoles plus durables
18:45Benoît Cassart, cette feuille de route, cette nouvelle feuille de route de la Commission européenne pour l'agriculture et l'alimentation
18:51Quel est l'objectif ? En quoi ça consiste ? C'est de sortir, de marquer une rupture avec la précédente stratégie de la ferme à la fourchette ?
18:58Je dirais que ça marque une rupture par rapport aux deux visions précédentes
19:01On a eu une vision dans les années 80 très productiviste avec ses dérives environnementales, etc.
19:08Puis on a eu une fixation sur l'environnement lors de la précédente législature
19:14mais qui ne prenait pas en considération ni la réalité de terrain ni les objectifs d'autosuffisance alimentaire
19:19Aujourd'hui je crois qu'on a vraiment l'espoir, parce qu'on n'en est qu'au début, d'une politique agricole équilibrée
19:27qui remet l'agriculteur au centre du jeu avec des perspectives notamment pour l'élevage et avec une vision plus pragmatique
19:35Maintenant on attend de voir les textes législatifs qui suivront par rapport à cette lettre d'intention que l'on a pu voir ces jours-ci
19:43Thilimène, je vous ai vu lever les yeux au ciel, la vision nouvelle de la Commission européenne
19:49qui remet quelque peu en cause la stratégie précédente qui était beaucoup plus tournée vers les normes environnementales
19:57Est-ce que c'est vrai comme le disait M.Kassarg, c'est une bonne chose parce que c'est plus réaliste et pragmatique ?
20:02Juste pour dire, j'ai tourné les yeux vers le ciel parce que je trouvais déjà qu'avant la politique agricole commune
20:09il y avait des aspects de respect de l'environnement, on ne sait pas qu'elle était totalement lointaine de la réalité
20:16et que maintenant on est très très proche de la réalité
20:19Mais pour revenir à votre question sur cette nouvelle vision qui est exprimée, il y a des éléments positifs
20:25il y a un peu un changement de procédure aussi, M.Hansen insiste beaucoup sur le dialogue
20:31C'est le commissaire qui est comme vous luxembourgeois, Christophe Hansen, commissaire en charge de l'agriculture
20:36Tout à fait, donc il y a cette intention d'aller plus dans le dialogue et d'être à l'écoute de toutes les personnes concernées de la chaîne de production
20:45d'être à l'écoute aussi de la société civile, donc ce sont des éléments certes positifs dans la procédure
20:51Il y a aussi un objectif très clair qu'il a formulé de ne pas vendre en dessous du coût de production
21:00Donc ça, il le dit à plusieurs reprises, il énonce aussi le plafonnement des subsides de la politique agricole commune
21:09Voilà des éléments positifs, mais ça reste par moments un peu vague encore, mais c'est une vision générale
21:17Et de l'autre côté, il y a quand même aussi des éléments un peu paradoxaux
21:20Quand il dit par exemple, il faut davantage respecter ou il faut continuer davantage respecter l'air, le sol, les eaux
21:29Et de l'autre côté, il ne s'exprime pas clairement en vue d'objectifs ambitieux pour l'agriculture biologique
21:38Et il énonce même aussi qu'il faut plus aller dans le sens de l'élevage encore, donc du bétail, une augmentation du bétail, une augmentation des exports
21:47Donc il y a des éléments qui sont clairement paradoxaux
21:51L'élevage, notamment l'élevage bovin qui est émetteur de gaz à effet de serre
21:55On le rappelle, l'agriculture est responsable de 10% de nos émissions de gaz à effet de serre
21:59Cette nouvelle stratégie, elle vise à inciter plutôt que contraindre, Benoît Kassa
22:04Est-ce que ce n'est pas paradoxal pour respecter nos objectifs écologiques ?
22:07On peut toujours le faire à moitié vide ou à moitié plein
22:10Les émissions de CO2, elles ont diminué depuis quelques années de 39% au niveau du méthane
22:15Il y a des normes de plus en plus strictes par rapport à ça
22:19Et on se rend compte aujourd'hui que l'élevage a une place vraiment essentielle dans la durabilité
22:25Parce que par exemple, si on prend les engrais, que l'on veut diminuer, les engrais chimiques
22:29Le meilleur engrais naturel, c'est le fumier bovin
22:32Les prairies, ce sont des puits à carbone, ce sont des sources énormes de biodiversité
22:37Donc ça, le commissaire Hansen l'a bien compris, il remet l'élevage au centre du jeu
22:41Pour ce qui est de la stratégie générale, je trouve qu'il y a un élément très positif
22:47Sur lequel le commissaire a insisté, c'est la réciprocité
22:50Parce qu'une des choses que les agriculteurs dénoncent avec force
22:55C'est le manque de réciprocité dans le commerce international
22:58On en parlera au chapitre du Bercos
23:00Oui mais c'est un élément internaissant de sa vision
23:02Mais juste sur cette nouvelle logique, inciter plutôt que contraindre les agriculteurs
23:05Pour avoir de bonnes pratiques pour la planète
23:07Est-ce que ce n'est pas un manque d'ambition ?
23:08Ce n'est pas du tout un manque d'ambition
23:10Parce qu'aujourd'hui, la première chose qu'il ne faut plus faire, c'est décourager les agriculteurs
23:15Il y a aujourd'hui 6% des agriculteurs qui ont moins de 35 ans en Europe
23:20Ça veut dire qu'on va être confronté à un défi alimentaire à l'avenir
23:25Pour notre autosuffisance alimentaire
23:27S'il n'y a pas d'agriculteurs, il n'y a pas de nourriture dans nos assiettes
23:30Et ça, le commissaire l'a compris, il veut revenir avec des messages positifs
23:34Vis-à-vis du monde agricole
23:35Et c'est bien nécessaire parce que le découragement est total
23:38Vous parliez de messages quand même contrastés, voire inquiétants
23:42Il y a un an, Ursula von der Leyen, sous la pression de la droite
23:46A abandonné l'objectif de réduire de 50% le recours aux pesticides d'ici 2030
23:51Un objectif qui était chiffré, un cap
23:54Et aujourd'hui, est-ce que vous avez l'impression que la nouvelle commission
23:57Paradoxalement, est peut-être en train de mettre le frein sur des choses aussi importantes
24:01Que les pesticides pour les 5 prochaines années ?
24:04Exactement, c'est un passage que j'ai lu très en détail
24:08Parce qu'en fait, monsieur Hansen, il dit clairement qu'il faut plus de biopesticides
24:13Mais il dit de l'autre côté, il dit oui, mais si on n'a pas vraiment d'alternative
24:17On continue tel quel avec les pesticides actuels
24:21Et là, je trouve effectivement qu'il manque d'ambition
24:24Lui, il est le commissaire, il pourrait dire très clairement
24:27Mais on pousse la recherche vers ces biopesticides
24:30Vers cette biotechnologie qui est là
24:34Où on peut aller vers que ce soit des bactéries
24:38Ou des prédateurs insectes, etc
24:41Donc il y aurait eu une volonté plus claire vraiment de réduire ces pesticides
24:46Parce que c'est ça où je dis, comment veut-on protéger les sols, les eaux
24:50Si on n'a pas une réduction claire des pesticides ?
24:53Et les agriculteurs et les consommateurs par la même occasion ?
24:56Les premiers qui en souffrent, ce sont bel et bien les agriculteurs et les agricultistes
25:00Oui, de nouveau, 25% en moins depuis 10 ans des pesticides dangereux
25:06Ont été éliminés du marché au niveau européen
25:09Donc la tendance est bonne et l'objectif est le même qu'auparavant
25:12Simplement aujourd'hui, la nuance, c'est que par pragmatisme
25:16Ou par lobbying de l'industrie chimique ?
25:19Non, non, pas du tout, par pragmatisme
25:22Pour atteindre, pas diminuer la production
25:25Parce que si on diminue la production et qu'on délocalise la production
25:27Dans d'autres continents qui ne respectent aucune norme, on a tout perdu
25:32Donc ici, la différence, c'est qu'on investit dans des produits de substitution
25:36Et au fur et à mesure, on élimine les produits les plus dangereux
25:39Et donc, c'est une évolution pragmatique et positive
25:42Mais l'objectif reste le même et on avance comme le terrain le permet
25:47Réaction ?
25:49Ce qui est vrai, on a une réduction de certains pesticides, ça c'est vrai
25:53Mais quand on regarde l'état de nos sols, l'état de nos eaux, l'état de nos forêts
25:59La situation est désastreuse
26:01Donc il faut bel et bien réagir par rapport à ça
26:05Parce que sans agriculture, pas de nourriture
26:08Mais sans nature, pas d'agriculteurs non plus
26:11Mais l'évolution est quand même largement positive
26:14Depuis 1992, on a quand même intégré pas mal de choses
26:17Et si on compare les politiques européennes avec ce qui se passe ailleurs
26:19Nous sommes des leaders mondiaux en matière d'environnement
26:23Donc on va quand même le reconnaître aussi, les efforts qui ont été faits
26:27Alors on va parler de ce qui se passe ailleurs
26:29On va parler d'un traité de libre-échange qui met en colère les agriculteurs
26:33Le traité du libre-échange entre l'Union Européenne et les pays du Mercosur en Amérique Latine
26:39On va écouter les avis contrastés du commissaire européen en charge du commerce
26:43Et du groupe La Gauche au Parlement Européen
26:45Nous avons atteint l'équilibre des résultats sur l'agriculture
26:50Nous avons obtenu un accord équilibré sur l'agroalimentaire
26:53En ouvrant largement le marché aux produits européens
26:56Tout en restant prudent sur certains secteurs sensibles
26:59Et en négociant des taux d'importation
27:01Qui représentent un faible pourcentage de la consommation européenne
27:04Par exemple, pas plus de 1,5% de bœuf importé
27:07Par exemple, pas plus de 1,5% de bœuf importé
27:38Benoît Cassard, en tant qu'éleveur bovin
27:42Quand le commissaire affirme que l'accord est équilibré
27:45Et que ça n'affecte pas la filière bovine à moins de 2%
27:48Est-ce que vous le croyez ?
27:50Je ne suis pas du tout d'accord avec la commission sur ce dossier Mercosur
27:54D'abord comme citoyen
27:56Parce que comme citoyen, on a des normes qui protègent notre santé
27:59Si on importe des produits qui sont produits dans d'autres conditions
28:03Ce n'est pas réglo
28:04Deuxièmement, comme consommateur
28:07Si, par exemple, on a une volonté d'éviter la déforestation
28:12Par la manière dont on mange chez nous
28:14Ce n'est pas pour la provoquer
28:16En provoquant l'exploitation de plus d'un million d'hectares
28:19De l'autre côté de l'Atlantique
28:21Troisièmement, comme agriculteur
28:23Il y a une concurrence déloyale
28:25Et d'autre part, sur un marché en équilibre
28:27On sait très bien que de petites quantités
28:29Peuvent déséquilibrer complètement le marché
28:31Quatrièmement, comme débuté européen
28:32Je suis offusqué
28:34Parce qu'on nous avait promis de la transparence dans les négociations
28:37On nous avait promis d'avoir les textes avant la signature
28:40Ce n'a pas été le cas
28:42Donc je suis quatre fois offusqué par rapport à ce dossier
28:45Et c'est clairement un grand problème pour moi
28:48Beaucoup d'arguments contre ce traité de libre-échange avec le Mercosur
28:51Tillimès, pourtant, la Commission européenne le dit
28:54On va lutter contre la concurrence déloyale
28:56Dans cet accord, il y a des clauses
28:58Pour protéger nos engagements pour le climat
29:00Pour contrôler les normes de production en Amérique latine
29:02Il faut croire ces garanties ?
29:04Non
29:06Pour une fois, là, monsieur Kassar et moi
29:08On a du même avis
29:10Cet accord Mercosur
29:12Il est mauvais pour l'environnement
29:14Il est mauvais pour la transition écologique
29:16Comment vous expliquez que la France est un des rares pays à s'y opposer
29:20Avec une poignée de pays qui ne constituent pas une minorité de blocage ?
29:24Oui, justement
29:26Il faudrait plus de pays s'opposent
29:28Et puis, il y a le vote aussi au Parlement européen
29:31Même si on a été un peu mis à l'écart de tout cela
29:35On a eu un débat lors de la dernière plénière à Strasbourg
29:39Sur le Mercosur
29:41Mais il est clair que cet accord qui a commencé
29:44C'est un accord de libre-échange qui date d'il y a 20 ans
29:48Mais ne me comprenez pas
29:50Ce n'est pas qu'on soit contre tout accord commercial
29:54Avec les pays de l'Amérique latine
29:57Mais je pense qu'on est dans une période
29:58Où il faut vraiment avoir une réflexion
30:01Sur quels produits on est prêt à importer
30:04Que ce soit par exemple, je ne sais pas, du café, des bananes
30:08Ce n'est pas demain qu'on aura de grosses productions
30:10De café et de bananes au sein de l'Union européenne
30:13Mais cet accord-là, il est, comme je l'ai dit
30:16Néfaste pour l'environnement
30:18Surtout très néfaste pour les agriculteurs, les agricultrices
30:21Et aussi pour la transparence
30:23Ce qu'il y a vraiment à l'intérieur de ces produits
30:25Et on continue à contribuer à la déforestation
30:29Où même, en plus maintenant, il y a un système de rebalancing
30:33Donc si on a dû à des règles environnementales
30:37Ou des règles pour atteindre nos objectifs climatiques
30:40Des pertes en bénéfices
30:43On peut demander une compensation financière
30:47Voilà où est-ce qu'on en est
30:49C'est de la folie ce qu'on essaie de faire avaler
30:51Alors Benoît Kassar, il y a quand même deux faits géopolitiques
30:53Qui inquiètent aussi beaucoup les agriculteurs, les éleveurs
30:57Un, Donald Trump au pouvoir
30:59Qui promet des taxations supplémentaires
31:02Sur des droits de douane sur les produits agricoles éventuellement
31:05Ça, ça vous inquiète
31:07Deuxièmement, à cause de la guerre en Ukraine
31:09Des céréales moins chères ukrainiennes
31:11Et des pays de l'Est très remontés
31:13Deux éléments par rapport à ça
31:15Cela doit nous centrer de nouveau sur notre autonomie stratégique
31:19On se rend compte qu'une des dérives du libre-échange exagéré
31:21Moi je suis pour le commerce, mais de manière équilibrée
31:25Une des dérives, c'est une hyper-spécialisation
31:28Qui nous rend très dépendants
31:30On voit aujourd'hui des dirigeants politiques complètement fous
31:33Qui émergent à gauche et à droite
31:35Et se rendre dépendant d'un Millet en Argentine
31:38Puisqu'on parlait du Mercosur ou d'un Trump
31:41C'est quelque chose de dangereux
31:43Deuxièmement, au niveau de l'Ukraine
31:45Je crois que c'est encore un élément dans la réflexion
31:48Puisque l'arrivée de l'Ukraine en Europe
31:49Contribuerait à augmenter fortement les productions agricoles
31:53Donc on aurait une pression très négative
31:55Sur les prix au niveau européen
31:57C'est une raison supplémentaire
31:59Pour laquelle il faut vraiment faire attention
32:01Avec le Mercosur
32:03Et quand on défend le débat sur le Mercosur
32:05En disant, c'est des petites quantités qui arrivent
32:08Mais si on cumule les accords de libre-échange dans leur ensemble
32:11Et qu'on y ajoute l'Ukraine
32:13Ce n'est plus une question de petites quantités
32:15C'est un déséquilibre complet
32:17Qui découragerait totalement nos agriculteurs
32:19Et on le rappelle, l'Ukraine c'est une grande puissance agricole
32:22Notamment céréalière, Thilimes
32:24Est-ce que l'adhésion future de l'Ukraine à l'Union Européenne
32:26Ce serait une mauvaise nouvelle pour nos agriculteurs
32:29Et ça bouleverserait les marchés agricoles ?
32:31Non, je pense que l'élargissement en général
32:34De l'Union Européenne par exemple
32:36Avec l'Ukraine
32:38Ce serait l'occasion de vraiment repenser
32:41Notre politique agricole commune
32:44Et d'enfin, parce que ça c'est aussi une critique
32:47Que j'ai par rapport à la vision de Monsieur Hansen
32:49Vraiment de repenser cette politique agricole commune
32:52Et d'enfin faire un changement de paradigme
32:55De ne plus déterminer les subsides
32:57Par rapport à la surface agricole
33:00Donc ça permettrait justement
33:02D'avoir ce changement de paradigme
33:05Dans notre politique agricole commune
33:07Mais plutôt par le revenu des agriculteurs
33:09Dans les plus petites fermes familiales
33:11Par exemple, par rapport au nombre d'employés
33:14Par exemple, par rapport à la qualité des jobs
33:16Et des produits fournis
33:19Donc il faut vraiment repenser
33:21On a une alternative, un modèle alternatif
33:24Qui est prêt, qui est là
33:26Et qui respecterait aussi beaucoup plus
33:29Les limites naturelles
33:31Pour la production agricole
33:34Merci à tous les deux d'avoir très bien illustré
33:36Ce débat sur l'agriculture du futur
33:39Dans l'Union Européenne
33:41Et très bonne suite des programmes sur notre frontière

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