Cédric Klapisch, réalisateur de “La venue de l’avenir”, présenté hors compétition au Festival de Cannes, était l'invité de France Inter, lundi 12 mai.
Retrouvez « L'interview de 9h20 par Léa Salamé » L'interview de 9h20 avec Léa Salamé sur France Inter et sur : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-interview-de-9h20
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00:00Et Léa, ce matin vous recevez un réalisateur.
00:02Bonjour Cédric Lapiche.
00:04Bonjour.
00:04Merci d'être avec nous ce matin.
00:06Si vous étiez une ville, un photographe et une époque, vous seriez qui, vous seriez quoi ?
00:12Alors une ville, ça serait entre Rio et New York et peut-être Marseille, j'aime bien ce...
00:20Ah ok, entre Rio et New York et ce sera donc Marseille et pas Paris.
00:25Vous m'aidez parce que tout le film se passe dans Paris.
00:28Je sais, je suis très attaché à Paris.
00:30Donc ce sera Marseille, c'est comme ça.
00:32Très bien, on prend un photographe.
00:34Un photographe, alors j'aime beaucoup Harry Gruyert et Alex Webb.
00:38C'est deux photographes de chez Magnum qui sont des coloristes et j'adore ces photographes.
00:43Une époque ?
00:45Je vais dire 1975, c'est l'année du péril jeune et donc je m'attache à ce film-là.
00:53Et à votre enfance.
00:54Cédric Lapiche, ça fait 30 ans que vous marquez le cinéma français avec des films générationnels.
00:59Vous parlez du péril jeune qui a été le grand film de ma génération, le berge espagnol aussi évidemment.
01:04Chacun cherche son chat ou récemment le magnifique encore sur le monde de la danse.
01:08Mais vous n'aviez encore jamais été sélectionné à Cannes.
01:13Comment c'est possible ?
01:15Eh bien, posez la question aux gens de Cannes.
01:18Non, je ne sais pas.
01:21Je ne correspondais pas aux critères, mais je ne sais pas pourquoi.
01:25Oui, en tout cas, fautes réparer.
01:27Il faut toujours une première fois.
01:29Et là, dans quelques jours, la semaine prochaine, votre nouveau film, La venue de l'avenir, est en sélection officielle hors compétition.
01:36Ça vous a fait quoi quand Thierry Frémont vous a appelé en vous disant ton film vient à Cannes ?
01:40C'est forcément très plaisant, justement parce que ça fait longtemps, il y a dû y avoir cinq films que j'avais présentés en Festival de Cannes et ils n'ont jamais été sélectionnés.
01:49Donc le fait d'en faire partie, c'est très agréable.
01:53Il y a quand même une exposition qui est unique au monde et donc ça fait très plaisir.
01:58C'est vrai que quand vous aviez 23 ans, vous y alliez au Festival de Cannes avec vos potes.
02:03Vous logiez chez votre tante ou votre grand-mère, je ne sais pas, à Antibes.
02:06Mais vous étiez parmi les badauds qui regardaient les marches et à ce moment-là, vous vous êtes dit, j'enregistrais ou non ?
02:13Non, je ne me disais pas ça.
02:14J'étais étudiant en cinéma, donc je rêvais de faire du cinéma.
02:17Je n'étais pas sûr de devenir réalisateur, je pense, à cette époque-là.
02:22Mais en tout cas, je rêvais de faire du cinéma.
02:24Et donc, oui, le cinéma globalement me faisait rêver en tout cas.
02:28En tout cas, là, vous vous sentez comment avant cette montée de Cannes ?
02:31Vous avez envie ou vous avez envie que ça passe ?
02:34Oui, et puis j'ai envie de retrouver les gens du film.
02:36C'est un film avec beaucoup d'acteurs.
02:38Et donc, il y aura une sensation de troupe, certainement.
02:40Et donc, on va se retrouver.
02:41Ça fait longtemps qu'on ne s'est pas vus.
02:43Donc, là, ça va être très joyeux entre nous, je pense.
02:45Et le casting est absolument génial.
02:47Vous aussi, entre des acteurs confirmés, des jeunes acteurs que vous mettez en avant.
02:52J'ai envie de tous les citer.
02:54Cécile Defrance, Vincent Mackayne, Zinedine Soalem, Julia Piaton, Suzanne Lindon, Paul Kircher, Vassili Schneider, Abraham Vapler.
03:01Il y a même des comédiennes...
03:03Sarah Giraudot, je crois.
03:04Sarah Giraudot, vous voyez, j'en oublie une.
03:05Pardon, Sarah Giraudot, qui a un magnifique rôle en plus.
03:08Il y a même des influenceuses que vous prenez.
03:10Cassandra Cano et Carla Poquin, qui jouent des influenceuses.
03:14Il y a Pomme aussi, qui joue dans le film.
03:16C'est toujours un bonheur de...
03:19J'imaginais, en regardant le film, je me disais, il doit prendre plaisir à ce moment où il choisit ses acteurs.
03:24Oui, parce que le cinéma, ça sert à ça.
03:25Ça sert à faire découvrir des nouveaux visages.
03:27Ça sert à...
03:29On parlait de voyage.
03:30Il y a une notion de voyage dans un film.
03:32Il faut laisser le spectateur partir en voyage, y compris avec la diversité des gens et des personnages qu'il va rencontrer.
03:38C'est un voyage, votre film.
03:39Il s'appelle La venue de l'avenir.
03:41Il raconte l'héritage inattendu d'une maison en Normandie.
03:44Pour quatre membres d'une même famille, cousins très, très, très éloignés, qui ne se connaissaient pas du tout.
03:49Et qui vont partir à la découverte de leur histoire familiale à travers cette baraque dont ils vont hériter.
03:54Ils vont ouvrir la maison.
03:55Elle n'avait jamais été ouverte depuis 1944.
03:58Et dans cette maison, ils vont découvrir des photos, des tableaux, des lettres.
04:04Et ils vont partir à la découverte de cette aïeule qui a vécu en 1875, Adèle, qui vivait là.
04:11Et à travers cette enquête, ce voyage initiatique dans le temps et dans l'histoire, c'est eux-mêmes, ces quatre personnes, ces quatre cousins de 2025,
04:19qui vont se trouver eux-mêmes à travers cette recherche dans le passé.
04:22Je ne sais pas si je le dis très bien, mais c'est un film joyeux.
04:26C'est un film emprunt d'une grande douceur qui pose des questions profondes sur ce qu'on laisse, sur les traces de nos vies et sur la transmission.
04:32C'est ça, un peu tout ça, ce film-là ?
04:35Complètement, oui. Vous l'avez très bien raconté.
04:39Il y a vraiment ce côté voyage généalogique, c'est-à-dire que ce qu'on est habitué à faire quand on regarde l'album de photos des grands-parents,
04:47où on voit non seulement des gens qu'on connaît vieux, mais on les voit jeunes et on voit ce qu'ils ont traversé.
04:54Il y a toujours quelque chose d'intéressant de se poser ces questions-là sur d'où vient ma famille, etc.
04:59Donc c'est ça qui est un voyage, en fait.
05:02Et c'est vrai que c'est assez génial, c'est-à-dire qu'on a tous des photos de famille de nos arrières-grands-parents qu'on voit comme ça, posant.
05:08Et on s'imagine quelle a été leur vie, qu'elles étaient leurs amours, qu'elle a été leurs doutes, leurs souffrances.
05:15Même chose pour Paris, parce que Paris est un des personnages du film.
05:18Vous avez toujours aimé filmer Paris, même si vous ne me l'avez pas sélectionné, Cédric Lafiche.
05:23Mais Paris, on se demande toujours, quand on est sur des lieux dans Paris, comment c'était au XIXe siècle.
05:28Et tout le film est un va-et-vient très heureux et très joliment fait.
05:32C'est-à-dire qu'on n'est pas pris dans des flashbacks un peu chiants.
05:34Vous avez très bien réussi le montage.
05:36Entre le Paris du XIXe siècle et le Paris d'aujourd'hui, où on voit ce qu'était la butte Montmartre.
05:42C'était les champs.
05:43Où on voit quand la tour Eiffel était rouge encore et pas noire.
05:47Vous nous montrez cet aller-retour.
05:49C'est ça aussi, vous jouez sur les époques, vous jouez sur ces moments.
05:53Et sur ce Paris est dingue.
05:54Oui, parce que moi je me suis beaucoup documenté avec mon scénariste Santiago Amigurena.
05:58On a passé beaucoup de temps à la fois dans des musées, au musée Carnavalet,
06:01qui est vraiment une espèce de documentation sur Paris qui est folle.
06:05Et puis tout ce qui circule, les archives à la Bibliothèque Nationale de France, etc.
06:10où quand on voit le Paris d'avant 1900, on voit à quel point c'est un autre pays.
06:16C'est vraiment une autre époque, mais c'est aussi un autre pays.
06:19Donc c'était vraiment intéressant de partir des photos qu'on a rassemblées
06:24et d'essayer d'être précis sur cette époque-là et de reconstituer le passé historique de Paris.
06:28À un moment, vraiment, ils sont sur la butte Montmartre et ils disent
06:31« Où est la rue Colin-Cours ? »
06:33Et la rue Colin-Cours, c'est un chant.
06:36C'est un chant, littéralement.
06:37Oui, bien sûr.
06:38Ce qui est assez fascinant.
06:40Mais avant tout, en fait, votre idée originale,
06:42avant même de trouver cette histoire de cette enquête entre les familles, etc. généalogique,
06:46c'est que vous aviez envie, vous n'aviez jamais fait un film,
06:48si, un court-métrage, un film en costume.
06:51C'était ça l'idée.
06:52Vous aviez envie de costumer, de partir, d'avoir...
06:55C'est Barry Lyndon, quoi, on a envie.
06:57Oui, c'est ça.
06:58En plus, Barry Lyndon était un exemple pour moi, même si ce n'est pas à la même époque.
07:02Mais c'est de voir à quel point...
07:04Enfin, moi, c'est mon 15e long-métrage.
07:06Et j'avais envie de faire autre chose que ce que je connaissais.
07:09Donc, c'était une bonne façon d'aller voir ailleurs.
07:12Et j'aime beaucoup cette époque-là, avant 1900, à la fois sur l'esthétique, les costumes, les décors.
07:17C'est vraiment une époque qui a une effervescence.
07:21Parce qu'il y a beaucoup d'inventions, avant 1900.
07:25C'est vraiment le démarrage de l'électricité, de la photographie, même si c'est 1850, le début de la photographie.
07:32Il y a beaucoup de choses qui se passent et qui vont vraiment créer la modernité.
07:35Et du coup, c'était intéressant de s'inscrire dans cette époque-là.
07:38Vous filmez notamment le premier jour où l'avenue de l'Opéra a été électrifiée.
07:44C'est la première avenue de Paris qui a été électrifiée.
07:47C'est-à-dire la nuit, avant, ça s'éclairait à la lanterne.
07:50Et là, pour la première fois, ils vont regarder, depuis la butte Montmartre, l'avenue de l'Opéra qui est électrifiée.
07:54C'est très très beau, ce moment-là.
07:57Suzanne Lindon, qui joue donc cette aïeule, qui joue donc cette Adèle, où les quatre vont essayer de comprendre sa vie, qui elle était.
08:04Elle était une jeune femme de 20 ans qui débarque à Paris de sa campagne normande.
08:09Et qui va être tiraillée entre deux garçons, Vassili Schneider, qui est photographe, au tout début de la photographie.
08:14Et un jeune peintre joué par Paul Kircher.
08:20Évidemment, vous n'avez pas choisi, les deux petites étoiles montantes du cinéma, vous les mettez entre Suzanne Lindon.
08:25Et le photographe dit au peintre que la peinture va évidemment disparaître grâce à cause de la photographie qui débarque.
08:33On écoute cet extrait.
08:35Et voilà, et donc, Anatole est peintre.
08:36Peinture.
08:37Et moi, voilà, je suis photographe.
08:41Et Lucien fait de la photographie parce qu'il ne s'est pas dessiné.
08:43Mais n'importe quoi, mais j'ai très bien dessiné.
08:45Qu'est-ce que tu racontes ?
08:46Non, non, non, non, il dit ça parce que lui, il est peintre.
08:50Il n'a toujours pas compris que la peinture, dans quelques années, ça n'existera plus.
08:52La peinture, ça n'existera plus ?
08:53Évidemment que ça n'existera plus, ça ne sert plus à rien.
08:55Ça n'existera plus à rien.
08:57Ça existera toujours.
08:58Tu crois vraiment que la peinture, ça peut disparaître un jour ?
09:00Mais tout le monde le sait que ça va disparaître.
09:02La peinture, c'est pour ceux qui bossent.
09:04Et la photographie, c'est pour les fainéants.
09:06Non, non, non, tu ne veux pas dire ça.
09:09La peinture, c'est pour ceux qui bossent.
09:11Et la photographie, c'est pour les fainéants.
09:12Et l'autre lui répond, de toute manière, la peinture va disparaître, mon ami.
09:16Oui, c'est une question que les gens se sont souvent posées à l'époque.
09:18C'est-à-dire qu'à partir du moment où on peut représenter la réalité avec la photographie,
09:22qui est meilleure, c'est ce que dit ce personnage, pour représenter la réalité,
09:26forcément la peinture ne sert à rien.
09:28Il se trouve que 150 ans plus tard, on sait qu'il a perdu.
09:31Et surtout, c'était ça qu'on a remarqué, c'est qu'on parle des débuts de l'impressionnisme dans le film.
09:35Et l'impressionnisme, clairement, a certainement été poussé à faire autrement en peinture,
09:41parce que la photographie arrivait.
09:43Donc très souvent, dans les arts comme ça, il n'y a pas les choses qui disparaissent.
09:48Il y a des choses qui évoluent en fonction des nouvelles arrivées.
09:50Au cœur du film, il y a l'idée de la trace.
09:52Qu'est-ce qu'une trace dans une vie ?
09:54Qu'est-ce qu'on laisse de nos vies, chacun, nous tous ?
09:57Quelle est la trace et comment on laisse sa trace ?
09:59Et de ce point de vue-là, il y a deux traces.
10:03Il y a la photographie qui est une trace de vie et il y a la peinture.
10:07Et il y a les lettres aussi, il y a ce qu'on écrit.
10:08Et c'est vrai que tous vos personnages cherchent quelque chose.
10:14Il y a des enquêtes.
10:15Elle, Adèle, au XIXe siècle, elle cherche sa mère, qui l'a abandonnée.
10:20Et donc elle monte à Paris pour chercher sa mère et dire
10:22« Tant que je ne saurais pas qui sont mes parents, je ne pourrais pas vivre. »
10:25Et puis 150 ans plus tard, vous avez ces petits-petits-petits-enfants
10:29qui cherchent Adèle, qui cherchent sa vie, qui elle était vraiment
10:32et comment ils vont se trouver eux-mêmes.
10:34Et c'est ça qui est très beau, c'est-à-dire un voyage avec vous,
10:36ce voyage initiatique, les jeunes, ceux de 2025,
10:41les quatre cousins qui vont chercher Adèle,
10:45à un moment, ils vont poser leur portable,
10:48ils vont mettre leur vie respective en pause
10:51pour essayer d'aller voir dans le passé ce qu'ils peuvent comprendre d'eux-mêmes.
10:54Et c'est ça qui est très fort.
10:56Et j'ai envie de vous faire écouter Georges Pérec.
10:58Georges Pérec, dans une interview de 1978,
11:02qui parlait de la cécité contemporaine,
11:04comment on s'oublie nous-mêmes,
11:07qui fait que les gens ne sont plus attentifs à ce qui fait leur existence,
11:09leur histoire,
11:10jusqu'à ce qu'un incident vienne les percuter
11:13et la cécité se lève écouter.
11:15Il y a quelque chose qui est effectivement
11:19cette sorte de cécité devant le quotidien.
11:27Ce fait que les gens ne sont plus attentifs
11:32à ce qui est leur propre existence,
11:37ce qu'on appelle le bruit de fond de la vie.
11:41Vous pensez que c'est de l'indifférence ?
11:43C'est de l'anesthésie.
11:44Ou de l'ignorance ?
11:44C'est de l'anesthésie.
11:45Anesthésie.
11:47Si vous voulez,
11:48quand un métro circule,
11:50les gens sont dans le métro,
11:52ne se regardent pas,
11:52ne se parlent pas,
11:54sont des espèces de petites entités presque hostiles.
11:58Et si le métro s'arrête,
12:00s'il y a un incident,
12:01quelque chose qui déchire le quotidien,
12:05à ce moment-là,
12:05les gens vont commencer à se parler.
12:09Mais le reste du temps,
12:10on ne fait pas attention.
12:10La plupart des gestes,
12:12on les fait d'une manière machinale.
12:14Ça m'a fait penser à votre film.
12:16Oui, mais j'adore Pérec.
12:17Ça me fait plaisir d'entendre ça.
12:18Je ne connaissais pas cette interview.
12:20Non, mais il a raison.
12:21Il parle beaucoup de ça.
12:22Il y a un chapitre qu'il a écrit
12:24qui s'appelle l'infraordinaire.
12:25Je me réfère beaucoup à ça,
12:26où il parle effectivement de cette cécité,
12:28du fait qu'on ne regarde pas attentivement
12:31l'ordinaire, le banal,
12:33et qu'on s'intéresse surtout à l'extraordinaire,
12:35ce qu'il vient de dire avec le métro.
12:37Et c'est vrai que quand on s'intéresse à l'ordinaire,
12:40il y a beaucoup de choses intéressantes.
12:42Oui, et vous,
12:43ce n'est pas le métro qui va s'arrêter,
12:45mais c'est cet héritage de cette maison
12:46qui va faire que leur vie aujourd'hui va changer.
12:49Oui, c'est ça.
12:50C'est cet élément,
12:51et qu'ils vont se parler,
12:52et qu'ils vont poser le portable,
12:54et qu'ils vont,
12:54à un moment,
12:55il y a un des jeunes,
12:56Abraham Vapler,
12:57qui dit,
12:58avant,
12:58je ne regardais que le présent et l'avenir,
13:01et en fait,
13:01regarder le passé m'a fait du bien.
13:03Oui, c'est ça,
13:04ça la nourrit.
13:05C'est-à-dire que,
13:06et ça,
13:07c'est fou,
13:08parce qu'on le sait,
13:09on sait que l'éducation et la culture
13:10servent à quelque chose,
13:12et notamment quand on est artiste,
13:14on ne peut pas être artiste
13:15sans connaître l'histoire de l'art,
13:16c'est-à-dire ceux qui nous ont précédés,
13:18et de s'intéresser un peu
13:19à ce qui a précédé.
13:21Mais on oublie ça,
13:22c'est-à-dire qu'on oublie que c'est important.
13:24Moi, je sais que j'ai participé
13:26au site lacinetech.com,
13:28et que depuis que je travaille sur ce site
13:31et que je m'intéresse donc
13:32aux réalisateurs et réalisatrices du passé,
13:36en fait,
13:36ça nourrit beaucoup mon travail
13:37en tant que créateur aujourd'hui.
13:39La confrontation des générations,
13:41le passé et le présent,
13:42c'est l'histoire de votre vie,
13:43Cédric Clapiche,
13:44c'est-à-dire tous vos films,
13:45que ce soit Le Péril jeune,
13:46L'Auberge espagnole,
13:46La Salade grecque,
13:48Chacun cherche son chat,
13:49vous avez aimé,
13:51et aussi ce film-là,
13:52filmer les jeunes adultes,
13:55le passage,
13:56passer dans l'âge adulte
13:58et la confrontation
13:58avec les générations d'au-dessus.
14:00Oui, c'est ça,
14:01c'est beaucoup la confrontation
14:02avec les générations,
14:03parce que Chacun cherche son chat,
14:04par exemple,
14:05c'est vraiment l'histoire
14:05d'une fille de 23 ans
14:06qui va côtoyer une femme de 80 ans
14:08et comment chacune
14:10va apporter quelque chose
14:11à l'autre, quoi.
14:12C'est le cas aussi
14:12dans ce film-là,
14:13dans l'Avenue de l'Avenir,
14:14où le jeune de 25 ans
14:16vit avec son grand-père,
14:17parce que ses parents sont morts,
14:18et c'est son grand-père
14:19qui l'a élevée
14:20et comment le grand-père
14:21et le jeune
14:21vont s'apporter des choses aussi.
14:22Oui, c'est ça.
14:23Et c'est vraiment très sensible
14:25de voir comment les enfants,
14:26quand les enfants vont voir
14:27leurs grands-parents
14:28le mercredi ou le week-end,
14:31il y a un goût de ça.
14:32C'est-à-dire qu'en fait,
14:33dans toutes les familles,
14:34les enfants, en général,
14:36aiment bien les grands-parents,
14:37justement parce que ça les appelle
14:38vers une autre vie
14:40et ils savent qu'il y a quelque chose
14:41qu'ils ont raté
14:42et qui est assez agréable
14:43à transmettre et à vivre.
14:45Vous qui avez filmé
14:46le péril jeune,
14:47qui avez filmé la jeunesse,
14:49l'auberge espagnole aussi,
14:50évidemment,
14:51comment vous regardez
14:51la jeunesse d'aujourd'hui
14:53parfois on la regarde
14:54un peu durement,
14:55un peu sévèrement.
14:56J'ai l'impression que
14:57les 20-25 ans,
14:57il y a eu une enquête récente
14:58il y a deux semaines,
14:59on avait parlé,
15:00on avait fait Marc Lazare
15:01notamment sur cette enquête
15:03qui disait que
15:04toutes nos idées
15:05reçues de boomers
15:07ou de quarantenaires
15:08sur la jeunesse
15:08sur les 20 ans
15:09qui ne travailleraient pas,
15:10qui seraient mous,
15:11etc.
15:11arriver aux écrans,
15:12vous me trouvez dur
15:14avec les jeunes aujourd'hui ?
15:15Je me trouve dur
15:17avec les jeunes
15:17et je trouve que ça c'est faux,
15:18c'est-à-dire que
15:19je trouve qu'ils sont mieux que nous.
15:20Je trouve que
15:21les jeunes d'une certaine façon
15:23sont toujours mieux
15:24que les gens plus âgés.
15:26C'est-à-dire que
15:26quand on vieillit,
15:27moi j'ai 63 ans
15:28et quand on vieillit,
15:29clairement,
15:29on commence à marcher
15:31par idées reçues,
15:32on n'est plus adepte
15:34de la remise en question.
15:35Les jeunes,
15:36ils sont forcément
15:36dans une remise en question
15:38tout le temps
15:39et donc ils sont en train
15:40d'inventer une vie,
15:41d'inventer leur époque,
15:42etc.
15:42et donc cette effervescence-là,
15:45cette stimulation,
15:46elle est forcément positive.
15:47Votre goût pour la jeunesse
15:48et pour les jeunes,
15:49on l'entend aussi
15:49dans la musique du film,
15:51il y a plein d'influences,
15:52il y a de la modernité,
15:53il y a des chansons
15:54qui cartonnent
15:54sur TikTok aujourd'hui
15:55et puis il y a Pomme
15:56qui est une de vos actrices
15:57dans le film
15:58et qui chante une chanson.
15:59Pourquoi Pomme ?
16:24Elle vient de répondre,
16:25il suffit de l'écouter.
16:27C'est la voix de Pomme
16:28avec une guitare
16:29et il n'y a pas besoin
16:30de parler après.
16:31Et il y a Paris aussi.
16:33Quand elle va le chanter,
16:34c'est sur les quais,
16:35il faut aller voir ça.
16:37À un moment,
16:38Sarah Giraudot
16:38dit à sa fille,
16:39Suzanne Linnon,
16:41au 19e siècle,
16:42elle lui dit ce conseil
16:43« Prends ce qu'il y a à prendre,
16:45fais des bêtises,
16:46je pense qu'il vaut mieux
16:47regretter des choses
16:48qu'on a faites
16:48plutôt que de regretter
16:49des choses qu'on n'a pas faites. »
16:51Vous l'avez appliqué,
16:52ce conseil,
16:52dans votre vie ?
16:52C'est donc la piche ?
16:54C'est justement
16:55parce que je ne l'ai pas
16:56forcément appliqué
16:56que je le dis
16:57à travers ce personnage.
16:59Moi, j'adore ce qu'elle dit.
17:00Je suis super d'accord
17:01avec ce qu'elle dit.
17:03C'est-à-dire que
17:04les regrets,
17:06ça ne sert à rien.
17:07Il vaut mieux
17:07faire des choses
17:10et se planter.
17:11C'est ça que ça veut dire.
17:12On termine par les impromptus.
17:14Vous répondez rapidement
17:14sans trop réfléchir.
17:15Barry Lyndon
17:16ou Orange Mécanique ?
17:18Barry Lyndon.
17:19Milos Forman
17:20ou Fellini ?
17:21Ah, ça c'est dur.
17:22Ah oui, je sais.
17:22Non, les deux,
17:25je les aime.
17:26Je dirais Fellini
17:27mais à contre-coeur.
17:29Scorsese ou Coppola ?
17:31Scorsese.
17:32Auberge espagnole
17:33ou appartement parisien ?
17:35Auberge espagnole.
17:37Y aura-t-il un nouveau volet
17:38un jour de l'auberge espagnole
17:39ou c'est fini fini ?
17:40Avant, je disais non
17:41et maintenant,
17:41je dis peut-être.
17:42C'est-à-dire qu'après Salade grecque,
17:45après avoir continué
17:46avec les enfants
17:47de Xavier
17:48et toute cette famille,
17:51je me disais finalement
17:53en vieillissant,
17:54peut-être qu'il n'y a rien à dire
17:55et puis là maintenant
17:55que j'ai toujours
17:5712 ans d'avance
17:57sur Romain Duris
17:58parce que j'ai 12 ans
17:59de plus que lui
18:00donc je lui ai souvent dit
18:01j'ai 12 ans pour réfléchir.
18:02C'est l'effet Romain Duris
18:03à l'Epad.
18:04C'est ça, voilà.
18:05Ça donne à réfléchir.
18:06L'argent fait-il le bonheur ?
18:09Un peu.
18:10Parce que
18:11il n'y a pas que
18:12mais en tout cas,
18:14ça aide.
18:15La dernière fois
18:15que vous avez pleuré ?
18:17La dernière fois
18:18que j'ai pleuré ?
18:20C'est con
18:23mais c'est possiblement
18:23en finissant
18:25le film que je viens de faire
18:26parce que ça fait 3 ans
18:27que je travaille sur ce film
18:28et donc à la fin du film
18:30d'une part,
18:31il y a des choses
18:31qui font pleurer dans ce film
18:32mais le fait de terminer
18:34un travail comme ça
18:35aussi immense,
18:36ça fait des émotions.
18:37Vous avez eu l'alarme.
18:39Liberté, égalité, fraternité,
18:40vous choisissez quoi ?
18:42Je crois que c'est
18:42un concept global.
18:44Il ne faut pas choisir
18:45entre les trois.
18:45C'est une utopie
18:49parce qu'on sait bien
18:50qu'on n'est ni libre
18:50ni ego
18:51ni fraternel
18:52mais on essaye de l'être.
18:53Vous prenez les trois.
18:55Le film s'appelle
18:56La venue de l'avenir.
18:58Ça sort dans 10 jours.
19:00Vous montez les marches
19:00jeudi 22 mai
19:02avec toute l'équipe,
19:03avec tout ce casting formidable
19:04et ça sort le même jour
19:06en salle.
19:08Allez-y,
19:08c'est un très joli film.
19:09Merci Cédric Lapiche.
19:10Merci beaucoup.
19:11Merci.
19:12Merci.