Mardi 15 avril 2025, retrouvez Théodore Chastel (Cofondateur, KIDIBAM), Aurélien Baillon (Chercheur, emlyon business school et chaire de recherche sur la santé mentale des dirigeants, Malakoff-Humanis), Juliette François (Directrice des programmes, Ticket For Change) et Adrien Brun (cofondateur, Doxa) dans SMART IMPACT, une émission présentée par Thomas Hugues.
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00:00Générique
00:00Bonjour à toutes et à tous, bienvenue, c'est Smart Impact, l'émission des entreprises à impact positif.
00:12Et voici le sommaire. Mon invité, c'est Théodore Chastel, le cofondateur de Kidibam,
00:18qui donne une seconde vie aux jouets chaque année.
00:21100 000 tonnes finissent à la poubelle.
00:23Il nous dira pourquoi il crée une bibliothèque numérique des règles de jeux de société.
00:27Dans notre débat, on parlera du moral inquiétant, des dirigeants à impact en dévoilant les résultats d'une enquête qui vient d'être publiée.
00:344 sur 10 se déclarent en mauvaise santé mentale.
00:39Et puis dans notre rubrique consacrée aux startups éco-responsables, je vous présenterai Doxa et ses vêtements qui n'utilisent que des teintures naturelles.
00:483 thèmes, 30 minutes pour les explorer. C'est Smart Impact.
00:50L'invité de Smart Impact, c'est Théodore Chastel. Bonjour.
01:01Bonjour Thomas.
01:02Bienvenue. Vous êtes le cofondateur de Kidibam, créé en 2022 avec François Truong.
01:07On peut commencer en disant que c'est d'abord une belle histoire d'amitié, de longue amitié.
01:12Exactement. Avec François, on se connaît depuis très très longtemps. On s'est rencontrés sur les bandes de la maternelle.
01:17Donc ça fait un paquet d'années puisque maintenant on a la trentaine déjà bien passée.
01:21Et on s'est lancé du coup dans cette aventure entrepreneuriale en 2022.
01:25Alors ce n'est pas notre première aventure. On avait déjà lancé une société 10 ans auparavant.
01:30Mais cette fois-ci, c'est la bonne. Et on s'attaque au marché du jeu et jouet d'occasion.
01:34Alors effectivement, pourquoi vous avez décidé de créer Kidibam ? C'est quoi le déclic ?
01:39Alors le déclic, c'est la parentalité de François. François qui est devenu papa, qui a eu un petit Basile.
01:44Et qui s'est rendu compte que les jeux, les jouets s'accumulaient dans les placards de son fils.
01:48On a tous vécu ça.
01:49Énormément de cadeaux. Et puis forcément, un enfant n'a pas le temps de jouer avec les 40 articles qu'on lui offre pour son anniversaire.
01:57Et donc il s'est dit qu'il y avait quelque chose à faire pour faire en sorte que ce marché de l'occasion se démocratise encore davantage.
02:06On va expliquer comment marche Kidibam. Mais je veux bien qu'on fasse un constat pour commencer sur ce gâchis des jouets.
02:12Chaque année en France, 100 000 tonnes de jouets finissent à la poubelle.
02:17Et on peut rajouter à ça, Théodore Chastel, les jouets perdus, délaissés, qui traînent au fond d'un placard, au fond qui sait, d'une cave, d'un garage.
02:27Oui, c'est vrai que ce chiffre est assez énorme. En moyenne, la durée de vie d'un jouet est de 8 mois.
02:34Donc il faut bien se rendre compte que nos enfants, ils grandissent très rapidement. Ils ont envie de jouer à des nouveaux jeux.
02:40On leur offre de nouveaux jeux. Et donc forcément, derrière, les jouets finissent soit au placard, soit à la poubelle, soit dans le meilleur des cas, sur des plateformes de petites annonces ou sur Kidibam.
02:48Oui, parce que ces jouets, ils sont en grande partie réutilisables, fonctionnels, d'une certaine façon.
02:55Oui, tout à fait. La plupart des articles, au final, qui ne sont plus utilisés sont fonctionnels.
02:59Nous, c'est vrai qu'on récupère énormément d'articles en très bon état, même de temps en temps, encore avec le blister, encore neuf.
03:05Et donc c'est vraiment dommage de s'en débarrasser.
03:08Alors ça marche comment, Kidibam ?
03:09Alors Kidibam, c'est très simple. On a un parcours, si vous avez envie de nous vendre des articles, il y a un minimum de 10 articles.
03:14Et nous, on va collecter partout en France, via colis postaux. Donc vous remplissez un simple petit formulaire.
03:19Vous allez nous indiquer « j'ai 10 peluches à vendre », « 5 jeux de société », « 3 jouets en bois ».
03:24Derrière, on va vous faire une estimation. Et si vous l'acceptez, puisque bien sûr, vous avez le droit de refuser ce prix,
03:29on va vous fournir une étiquette à coller sur un colis. Vous mettez tout à l'intérieur.
03:33Vous posez ça en bas de chez vous, chez un commerçant partenaire. Et derrière, ça arrive dans notre atelier.
03:38Nous, derrière, on va juste vérifier, contrôler. Et si ça correspond bien à ce que vous nous aviez mentionné sur votre formulaire,
03:43on va vous faire un règlement.
03:44Et donc, là, votre travail continue avec peut-être de quoi ? De l'évaluation, de la réparation, parfois ?
03:50Exactement. Beaucoup de tri, de vérifications, de contrôles. Le secteur du jeu du jouet est forcément soumis à de nombreuses règles.
03:58Et nous, en tant que...
03:58Et heureusement, d'ailleurs.
03:59Heureusement, bien sûr. En tant qu'acteurs professionnels du monde de la revalorisation,
04:03on se doit d'être vraiment parfait et très précis sur tous les contrôles qu'on effectue.
04:07Ça veut dire que vous devenez responsable de la sécurité du jouet que vous allez revendre ?
04:12Tout à fait, exactement. En tant qu'acteurs vraiment professionnels, on est responsable des produits que l'on vend.
04:18On a énormément de petits points de contrôle qu'on va faire sur l'ensemble des articles.
04:22Et c'est la raison pour laquelle, aujourd'hui, des distributeurs professionnels, comme Intermarché et les Galeries Affayette,
04:27nous font confiance pour la distribution de nos produits.
04:30D'accord. Et alors, tiens, ça m'inspire une question.
04:33Est-ce que vous récupérez aussi des invendus de grandes marques de jouets, par exemple ?
04:37Parce que là, moi, je réagis en particulier. En vous écoutant, je me disais, mais tiens, qu'est-ce que j'ai ?
04:41Parce que mes enfants, ils sont très, très grands. Mais est-ce que je n'ai pas des jouets qui dorment dans un placard ?
04:45Est-ce que vous récupérez des invendus aussi ?
04:47Alors, on l'a fait un peu au début de notre activité.
04:49D'accord.
04:50C'est vrai qu'aujourd'hui, on préfère se concentrer vraiment sur notre cœur de métier qui est la seconde main.
04:53D'accord.
04:53C'est sur ce secteur qu'on a le plus de valeurs ajoutées. Et il existe déjà beaucoup d'acteurs qui font de la revente d'invendus.
05:00D'accord.
05:00Donc, ce n'est pas forcément notre cœur de métier aujourd'hui.
05:01Votre modèle économique, c'est quoi ? Vous prenez une marge sur la revente ?
05:05Exactement. L'équation économique, voilà, c'est qu'on achète à un prix X, on revend à un prix Y.
05:10Bien sûr, entre les deux, on a des coûts. On a des coûts humains de vérification, de contrôle, du temps pour créer les fiches produits qu'on vend sur notre site Internet.
05:19Et entre les deux, on essaie de faire une belle marge.
05:21Et alors, pour les consommateurs, j'imagine que ça dépend du produit, ça dépend du jeu, etc. Mais on peut avoir quel montant d'économie ?
05:30Alors, en moyenne, on est quand même à moins 50% par rapport au prix neuf. Donc, c'est assez important. Et là, je parle d'articles en très bon état.
05:38Oui, votre enfant, il ne va pas faire la tronche en voyant arriver le cadeau.
05:41Voilà, exactement. Au contraire. Alors, je parle surtout des enfants entre 0 et 6 ans. La réalité, c'est qu'ils ne font vraiment pas la différence.
05:48Entre un article neuf et un article en très bon état. Donc oui, les enfants sont heureux et les parents sont contents.
05:53Ça permet de faire des petites économies et de faire un joli geste pour la planète.
05:58Vous venez de lancer une bibliothèque numérique des règles de jeu. On va expliquer pourquoi dans un instant.
06:03Mais je voudrais qu'on se concentre un peu sur les enjeux de logistique. Parce que vous créez cette entreprise, elle est jeune, elle a 2-3 ans, avec l'envie de promouvoir le réemploi, la seconde main.
06:16Mais forcément, ça crée beaucoup de transports, un modèle comme celui-là.
06:19Alors, il faut savoir que dans l'impact, quand on calcule l'impact carbone d'un jeu, d'un jouet, une grosse partie de cet impact...
06:27C'est sa fabrication.
06:28C'est sa fabrication, exactement.
06:30Donc en fait, nous, on a fait des calculs et on s'est dit qu'il vaut mieux faire 2 envois colis postaux où les jouets sont massifiés parce qu'on a un minimum de 10 articles.
06:39D'accord.
06:39Plutôt que de continuer à acheter des articles neufs qui sont fabriqués à l'autre bout du monde. Et aujourd'hui, plus de 90% des articles qui sont achetés viennent de très très loin.
06:48Oui. Donc le ratio avantage-désavantage est favorable. Cette bibliothèque, vous l'avez lancée avec des éditeurs de jeux de société. Donc vous lancez une bibliothèque numérique et gratuite.
07:00On va y trouver quoi ? Des règles, c'est ça ? Des règles du jeu ?
07:02Exactement. Nous, en fait, c'est parti d'un problème qu'on a au quotidien. Nous, nos opérateurs, ils ont besoin régulièrement de réimprimer des règles pour les insérer dans les jeux de société avant de les revendre.
07:11Parce que la plupart du temps, quand on collecte des jeux de société, la règle a disparu, forcément.
07:18Et c'est d'ailleurs peut-être parfois une des raisons pour lesquelles on ne joue plus aux jeux, quoi.
07:21Exactement. Et donc nous, en fait, le fait de fournir à la fois aux acteurs du réemploi, mais aussi aux particuliers, cette bibliothèque gratuite va permettre de rallonger la durée de vie des jeux.
07:32Et c'est vraiment une initiative pour améliorer l'impact du secteur.
07:39Mais c'est vraiment un frein au réemploi, ça ?
07:42Alors c'est un frein dans le sens où on perd énormément de temps au quotidien.
07:45Vous, au quotidien, dans votre travail.
07:47Nous, et donc forcément tous les acteurs du réemploi.
07:49Donc c'est un frein dans le sens où l'équation économique du réemploi n'est pas celle du neuf.
07:53On a forcément plus de coûts.
07:54Et donc toutes les initiatives qu'on va pouvoir mettre en place pour améliorer cette équation et gagner du temps,
07:59c'est ce qu'on appelle nous l'industrialisation d'un métier qui autrefois était artisanal,
08:03va nous permettre demain de réussir à créer une belle entreprise rentable.
08:06Oui, mais est-ce que finalement c'est compliqué de créer une bibliothèque numérique des règles du jeu
08:10ou alors ça prend trois clics aux éditeurs ?
08:12Vous voyez ce que je veux dire ?
08:13Oui, alors là l'intérêt, c'est qu'on a mis autour d'une table la plupart des éditeurs français et même européens
08:19et nous ont tous envoyé leurs règles du jeu.
08:23Donc des belles règles du jeu, format PDF,
08:25pas des règles scannées, etc. qu'on peut retrouver sur Internet à droite à gauche.
08:29Et donc là l'idée c'est d'avoir vraiment toutes les règles réunies au même endroit.
08:33Et donc ça veut dire quoi ? Vous les réimprimez et vous les réinsérez dans le jeu
08:38ou alors vous proposez aux gens finalement d'aller les chercher sur la bibliothèque ?
08:42Alors on peut proposer les deux choses en fonction de l'article,
08:46mais régulièrement on imprime parce que les personnes et que nos clients aiment bien avoir les règles dans les jeux.
08:51C'est drôle parce que j'imagine autour de la table tous ces éditeurs, ils sont concurrents.
08:55Oui, tout à fait.
08:56Dans 95% de leur vie professionnelle.
09:00Donc ça devait être assez intéressant de les voir collaborer sur une initiative comme celle-là.
09:06En fait tous ces acteurs aujourd'hui, ils sentent que la seconde main est un marché en pleine expansion.
09:10Ils ont du mal à se positionner sur ce secteur parce qu'en tant qu'acteurs du neuf,
09:14ce n'est pas leur métier d'aller faire du seconde main.
09:16Donc toutes les initiatives intéressantes qui ne les engagent pas trop d'un point de vue opérationnel,
09:21ils sont toujours partants.
09:22Ils ont envie de montrer aussi à leurs clients qu'ils agissent à leur échelle pour ce secteur.
09:28Il y a d'autres idées comme ça, d'autres projets collaboratifs que vous avez en tête avec Kidibam ?
09:33Oui, on a pas mal de choses dans le pipe aujourd'hui, notamment sur la partie pièces détachées.
09:40Donc on a envie de continuer à travailler avec ces éditeurs pour mettre en place des choses et les aider.
09:46Ah oui, quand il manque juste une pièce pour qu'un jouet continue de fonctionner.
09:49Voilà, pareil, nous c'est notre quotidien à l'atelier.
09:51Donc on a un stock de pièces détachées, on a un stock de dés, de jetons, de sabliers.
09:55Donc régulièrement, on vient compléter des jeux avec des petites pièces manquantes.
09:59Mais c'est vrai que pour encore un grand nombre d'articles, on n'a pas forcément toujours la bonne pièce.
10:03Et donc le fait de mettre en place des partenariats avec ces acteurs
10:05pourrait nous permettre à l'avenir d'être beaucoup plus efficaces
10:08et d'être en mesure de remettre en état un maximum d'articles.
10:12Merci beaucoup Théodore Chassel et bon vent à Kidibam.
10:16On passe tout de suite à notre débat.
10:17On va parler de la santé mentale des dirigeants d'entreprises à impact positif.
10:23Le débat de ce Smart Impact, on parle de la santé mentale des dirigeants et dirigeantes d'entreprises à impact
10:36avec Juliette François, bonjour.
10:38Bonjour.
10:39Bienvenue, vous êtes directrice des programmes de Ticket for Change.
10:42Et puis on est en duplex avec Aurélien Bayon.
10:44Bonjour, vous êtes chercheur à l'école M Lyon Business School,
10:48chair de recherche Malakoff Humanis sur la santé mentale des dirigeants.
10:53On va démarrer, avant de parler de cette étude, par une question de présentation.
10:57Ticket for Change, c'est une association, c'est ça ?
11:00Oui, exactement.
11:01Ticket for Change, c'est une association qui a été créée en 2014.
11:05Ticket for Change, c'est l'école des pionniers d'un monde plus juste et plus durable.
11:10Ces pionniers, ce sont des jeunes en pleine orientation professionnelle.
11:14Ce sont des salariés, des dirigeants qui ont l'envie d'agir et de transformer leur entreprise de l'intérieur.
11:20Où ce sont notre cible historique, des entrepreneurs qui portent un projet à impact
11:24pour inventer des solutions, pour dessiner ce monde plus juste, plus durable.
11:29Nous, notre métier chez Ticket for Change, c'est de les outiller, d'accompagner ces pionniers-là
11:33pour justement dessiner ce monde plus juste, plus durable et de les mettre en lumière
11:37pour initier un changement à plus grande échelle.
11:40On utilise l'innovation, l'entreprenariat pour dessiner, imaginer ce monde.
11:45On en reçoit pas mal et souvent ici dans cette émission de ces pionnières et de ces pionniers.
11:51Et vous avez donc lancé cette étude sur la santé mentale de ces dirigeants et dirigeantes à impact.
11:56Pourquoi ? Il y a eu des remontées de terrain en fait ?
11:59Exactement.
12:00Vous êtes rendu compte qu'il y a quelque chose ?
12:01C'est exactement ça, des remontées de terrain.
12:03On est Ticket for Change, on accompagne ces pionniers-pionniers depuis plus de 10 ans.
12:06On a accompagné plus de 800 entrepreneurs à impact notamment.
12:10On a créé du lien avec eux, on discute avec eux des années et des années durant, après leur lancement de projet.
12:16Et on a remarqué année après année qu'à chaque fois qu'on demande des nouvelles,
12:21alors il y a des super nouvelles et des super réussites,
12:24mais souvent aussi des enjeux qui sont partagés, des enjeux humains, des enjeux RH, des enjeux économiques,
12:29des enjeux d'alignement, bref, c'est souvent un quotidien qui est difficile.
12:33Et au fur et à mesure des années, on s'est rendu compte que ce n'était pas un sujet individuel et ponctuel,
12:39c'était plutôt un sujet structurel et récurrent chez nos alumnis-entrepreneurs.
12:45Et on a eu besoin de le chiffrer en fait cet enjeu-là pour montrer,
12:50on était convaincus que c'était un enjeu avec une ampleur énorme.
12:54On a trouvé peu d'études, peu de chiffres sur le sujet.
12:57Et donc on s'est dit qu'il fallait poser des chiffres avant de s'attaquer à ce sujet-là,
13:02trouver, poser des chiffres et donc on a contacté la chaire de l'EM Lyon.
13:06Et donc on arrive à ces résultats.
13:08Je vais donner le principal sur la santé mentale des dirigeants à impact.
13:1140%, 40% des dirigeants et dirigeantes interrogées déclarent ne pas être en bonne santé mentale.
13:18C'est 24% si on va chercher d'autres études sur des dirigeants, on va dire,
13:23d'entreprises traditionnelles qui répondent à une question similaire.
13:26Aurélien Bayon, qu'est-ce que vous vous retenez au-delà de ces chiffres ?
13:32L'histoire peut-être d'un tabou à lever ? Comment vous avez réagi face à cette étude ?
13:37Alors ce qui nous a permis enfin de collaborer avec Ticket for Change,
13:43c'est en parallèle nous avons aussi étudié les dirigeants plus classiques.
13:45On a pu ainsi un peu comparer ce qui se passait chez les dirigeants à impact
13:50avec ce qui se passe dans la population en général et dans les dirigeants plus traditionnels, on va dire.
13:56Et donc là, quand on voit ce chiffre de 40%, on le voit, il est beaucoup plus élevé.
14:00Et ça va dans le sens qu'en partie, ça vient du fait que c'est un peu moins un tabou
14:04pour des gens qui sont déjà dans l'économie à impact.
14:08En général, c'est des personnes qui vont être déjà peut-être plus prêtes à révéler leur santé mentale.
14:16Donc il y a une partie de la différence que l'on voit entre 24 et 40%,
14:19ça vient du fait que ce soit légèrement moins un tabou pour cette population-là.
14:22Ils osent le dire ou elles osent le dire, effectivement.
14:25Et après, si on essaye d'analyser les explications, il y a quoi ?
14:32Il y a une notion de surengagement, de se sentir investi d'une mission
14:38qui va au-delà de la mission entrepreneuriale ?
14:42Oui, c'est fortement le cas.
14:43Un des facteurs, par exemple, que l'on voit, qu'on a vu dans l'étude,
14:46c'est ce qu'on appelle le workaholisme, c'est-à-dire cette tendance à ne pas pouvoir déconnecter.
14:51Et ça, tous les entrepreneurs ont un peu cette tendance, ça, il faut être bien clair.
14:55Mais peut-être que la mission, justement, vient renforcer cette tendance-là.
15:00C'est-à-dire qu'on ne fait ça pas simplement pour soi.
15:02En général, c'est un engagement qui va un peu au-delà.
15:04Et ça peut juste renforcer, d'un côté, avoir l'impression d'avoir une mission plus forte,
15:09et de l'autre côté, s'ajouter des contraintes.
15:13Parce qu'être entrepreneur à impact, dans les faits, c'est s'ajouter des contraintes par rapport à d'autres.
15:17Effectivement, Juliette François, il y a ces contraintes.
15:20Il y a peut-être aussi le fait d'être, alors ce n'est pas vrai de tous les entrepreneurs à impact,
15:24mais au contact de populations un peu plus fragiles.
15:28Ça existe aussi, ça, dans les raisons, dans les explications ?
15:31Exactement. Je rejoins Aurélien.
15:32Le monde de l'entrepreneuriat, être entrepreneur et dirigeant, déjà de base, c'est complexe, c'est compliqué.
15:37Oui, il y a un côté Shiva, de toute façon.
15:39Et on s'ajoute des contraintes et des spécificités dans l'économie à impact,
15:43notamment exactement ça, être au quotidien, en tout cas agir au quotidien pour un public plus vulnérable que soi.
15:50C'est difficile d'écouter ses propres vulnérabilités quand il n'y a plus vulnérable en face.
15:56Je ne vais pas commencer à pleurer sur mon soi et je ne vais pas me plaindre.
15:59Donc c'est difficile ça. Il y a l'urgence, on parle d'urgence écologique et sociale en permanence partout.
16:04Donc c'est difficile de se dire, je prends le temps de prendre de la hauteur, de reprendre mon souffle face à une urgence d'enjeu qui ne fait que grandir.
16:13Le mot urgence, il empêche de s'arrêter.
16:15Il y a aussi parfois du découragement quand on a l'impression que notre impact, nos actions,
16:20elles ont parfois un effet qui est moins à la hauteur des ambitions qu'on imaginait pour notre projet.
16:25Et en même temps, c'est normal vu les enjeux auxquels on s'attaque.
16:27Parfois un peu de découragement qui sont ajoutés à tout le cadre de l'écosystème à impact.
16:33Inventer des nouveaux modèles économiques, les recherches de financement qui sont quand même un peu plus difficiles.
16:39Donc tout ça, c'est des enjeux existentiels et émotionnels qui viennent s'ajouter à la complexité de l'entrepreneuriat.
16:45Est-ce qu'il y a l'entrepreneuriat féminin à impact encore plus ?
16:50Je ne sais pas si vous êtes rentrée dans le détail des genres,
16:54mais est-ce que les femmes sont encore plus touchées par cette faiblesse ou fragilité
16:59ou le fait de déclarer se sentir en fragilité mentale ?
17:05Alors les femmes, c'est un vaste sujet dans l'économie à impact notamment.
17:10Il y a un chiffre dans l'étude qui dit que les femmes sont plus atteintes sur le sujet d'une mauvaise santé mentale.
17:19Il y a une étude qui a été faite par une association qui s'appelle Wila,
17:24pareil, sur la santé mentale des femmes en général.
17:27Donc c'est un public qu'on va adresser.
17:33Je ne crois pas que ce soit forcément plus difficile vu les enjeux que je viens de présenter.
17:40En fait, l'urgence écologique et sociale, les nouveaux modèles économiques,
17:44cette économie à impact a inventé.
17:46On va peut-être ajouter de la charge mentale qui est déjà parfois plus forte pour les femmes.
17:49Et il y a un truc historique sur le soin en général dans la société
17:53qui est quelque chose qu'on n'apprend pas à l'école.
17:56Prendre soin des autres, prendre soin de soi, c'est vital comme respirer.
17:59Pour autant, on ne l'apprend pas à l'école.
18:02Et il y a beaucoup d'études et de médias qui disent que justement,
18:07ce soin-là, il est donné aux femmes de manière de base.
18:12C'est aux femmes de prendre soin.
18:15Aurélien Bayon, si on commence, il nous reste cinq minutes,
18:17à essayer de positiver, à aller vers des solutions.
18:22Quelles solutions, vous, vous préconisez ou vous proposez
18:26quand vous êtes en contact avec des dirigeants, dirigeantes d'entreprises ?
18:30Alors, les choses toutes bêtes, enfin, qu'on connaît tous,
18:35c'est tout simplement être capable de déconnecter.
18:38Ça, c'est quelque chose de prévoir du temps pour soi.
18:41C'est vraiment le genre de choses toutes bêtes.
18:46Et qui, au bout d'un moment, on oublie.
18:48C'est-à-dire que parfois, il faut être capable de mettre dans son agenda
18:51temps pour moi.
18:52Ça, c'est quelque chose...
18:54Et on en entend partout.
18:55Je n'ai rien inventé.
18:57Mais peu de gens le font.
18:59Donc ça, ça peut être vraiment quelque chose de tout simple.
19:01Après, dans le cadre de l'entreprise,
19:04il y a parfois l'oubli de célébrer.
19:07Alors ça, c'est...
19:08Donc, pour l'étude, j'ai travaillé aussi avec l'Observatoire à Maroc,
19:11qui est à Montpellier.
19:12C'est un observatoire qui étudie depuis une bonne dizaine d'années
19:15les dirigeants, en général.
19:16Et eux, dans leurs recommandations, c'est vraiment aussi de dire...
19:21Ce n'est pas simplement ce qu'on appelle les facteurs pathogènes,
19:24de regarder ce qui est négatif.
19:25Mais donc, Olivier Torres, qui est le directeur de l'Observatoire à Maroc,
19:28va nous dire souvent, il faut penser à ce qui est salutogène,
19:31c'est-à-dire qu'est-ce qui peut amener des choses positives.
19:33Par exemple, célébrer les succès.
19:36Souvent, on va dire, on a un succès, mais on passe à la suite
19:39sans prendre le temps de faire une pause.
19:41Et c'est ces choses-là qui peuvent aussi aider.
19:43C'est-à-dire qu'on n'est pas simplement à limiter le négatif,
19:45mais parfois, il y a à faire des choses positives à soi aussi.
19:48Est-ce qu'on peut aussi, Juliette François, changer la vision du stress, en fait ?
19:53Parce que c'est vrai qu'on le reçoit négativement.
19:57Est-ce qu'on peut avoir une vision positive du stress ?
20:00Je ne dis pas que c'est facile et que c'est toujours possible.
20:02Oui, ça s'apprend dans l'étude.
20:03C'est un des facteurs clés qui pourraient réduire une mauvaise santé mentale.
20:07Moi, je trouve qu'il faut faire surtout attention
20:08à ne pas dire que la seule réponse, c'est l'entrepreneur lui-même.
20:14Pas culpabiliser l'entrepreneur en lui disant « prends soin de toi, prends du temps, arrête de stresser ».
20:19C'est rajouter une injonction.
20:21Et donc, ça fait plutôt partie du problème que de la solution.
20:25Moi, je dirais que c'est plutôt une solution collective qu'il faut trouver.
20:28Aux structures d'accompagnement comme nous, de créer des parcours.
20:31On crée le parcours Oasis, justement, pour apprendre aux entrepreneurs dirigeants impact,
20:34les accompagner dans le soin de soi et de leurs équipes.
20:38Aux structures financeurs, d'ajouter ces indicateurs clés à un suivi de projet,
20:43que ce soit aussi important qu'une rentabilité économique et que des objectifs d'impact.
20:47Et aux systèmes culturels, aux médias, aux systèmes éducatifs,
20:51de véhiculer des nouveaux modèles de réussite,
20:53d'arrêter de mettre la performance chiffrée, le résultat, le savoir-faire en avant
20:57et les histoires un peu héroïques d'entrepreneurs super héros,
21:01plutôt de, pour nous, parler de santé mentale,
21:05ce n'est pas un signe de faiblesse, mais une composante essentielle de leadership.
21:08Et donc, c'est ça qu'il faut changer un peu dans les schémas mentaux d'aujourd'hui.
21:12Aujourd'hui, ces soutiens, ils n'existent pas vraiment ?
21:16Ils existent peu.
21:17Ils sont embryonnaires ?
21:18Ils sont embryonnaires.
21:19On commence à en parler vachement.
21:21La santé mentale a été nommée grande cause nationale 2025.
21:24Donc, forcément, là, on commence à se rendre compte de l'ampleur de l'enjeu, je crois.
21:27Et donc, à créer un peu des solutions, c'est important que ça devienne une responsabilité collective.
21:33Donc, nous, on lance avec Ticket for Change notre programme Oasis en juillet.
21:36C'est un programme de six mois pour permettre aux dirigeants, dirigeantes à impact
21:40de retrouver du souffle, du sens, de la clarté,
21:44de s'outiller pour apprendre à prendre soin de soi et prendre soin de ses équipes
21:47et de retrouver la flamme, l'alignement dans leurs projets.
21:51Et aussi, c'est un groupe de soutien.
21:52On sent qu'il y a un besoin, la solitude de l'entrepreneur, elle est forte,
21:56et notamment sur ces sujets-là, vu que c'est perçu comme un aveu de faiblesse
21:59de dire qu'on a des enjeux ou qu'on est un peu fatigué
22:03et que c'est difficile de le dire à ses équipes ou ses financeurs
22:06pour ne pas, eux, leur mettre une charge, décaler la charge,
22:11créer un groupe de soutien de paire pour pouvoir en parler
22:13et résoudre ses problèmes.
22:16Donc, ça, c'est le programme Oasis.
22:17Mais je pense qu'il y a besoin que ça devienne quelque chose de plus grand
22:20et que ce soit qu'on initie des actions dans l'économie à impact
22:27avec les autres acteurs de l'économie à impact
22:28pour faire un sujet plus collectif
22:31et qu'on informe, on sensibilise,
22:33que voilà, on soit capable de parler de santé mentale et de vulnérabilité.
22:37Merci beaucoup à tous les deux.
22:39Merci Juliette, François et Aurélien.
22:42Bayon, on passe tout de suite à notre rubrique Startup et Innovation.
22:45Smart Ideas avec Adrien Brun, bonjour.
22:55Bonjour.
22:55Bienvenue, vous êtes le co-fondateur de Doxa, marque de vêtements
22:58que vous avez créée à Clermont-Ferrand,
23:00octobre 2021 avec Rémi Descamps et Guillaume Marques.
23:04Et avec quelle idée ?
23:05Tiens, on revient à octobre ou au mois qui précède.
23:08Qu'est-ce qui vous donne envie de créer cette marque ?
23:10Le but, c'est de créer une solution écologique dans le secteur du textile.
23:15On sait que le secteur du textile est le deuxième secteur le plus polluant au monde.
23:19Donc aujourd'hui, nous, on a voulu essayer de créer la solution
23:22qui pourrait répondre à cette problématique, à cette pollution textile.
23:27Et donc, on a créé la marque.
23:30Le but, c'était vraiment d'aller à la mode et l'écologie.
23:32Alors, avec quel choix ?
23:35C'est-à-dire, il y a les choix des matériaux et puis on va parler des teintures.
23:40Mais peut-être un mot des matériaux.
23:42Le but, oui, c'est d'utiliser des bonnes matières.
23:44On part sur une basique de coton bio, 100% bio.
23:50Nous, on fabrique au Portugal, au nord du Portugal.
23:52Donc, le but, c'est d'avoir une très bonne matière
23:54qui permet d'une grande durabilité.
23:57Et après, on agrémente ça d'une teinture naturelle dessus.
24:00Alors, justement, les teintures naturelles, est-ce que c'est facile à trouver ?
24:04Parce que c'est bien d'avoir l'idée et puis après, on commence à voir les obstacles.
24:08C'est ça.
24:08Au début, on a commencé par la teinture à base de végétaux,
24:11à base d'écorces de châtaigniers.
24:13C'est l'un des premiers t-shirts qu'on a sortis.
24:16Et en fait, là, on travaille avec une usine au Portugal
24:19qui a 30 ans d'expérience dans la teinture naturelle.
24:21Donc maintenant, en fait, on utilise les minéraux.
24:24Donc, on a utilisé la magnétite, qui est une pierre des Alpes françaises.
24:27Plusieurs les squelettes, qui est une pierre qui est plutôt nordique.
24:32Et alors, chaque pierre a sa couleur, d'une certaine façon ?
24:37Donne une teinture, donne une couleur ?
24:38Alors, ça donne une couleur, mais après, le but, c'est de les mélanger
24:42pour créer d'autres mélanges de couleurs.
24:44Et on peut avoir, aujourd'hui, sur notre panel de couleurs,
24:48on a à peu près 200 couleurs qu'on peut faire en teinture.
24:50Ça donne beaucoup de variétés.
24:52Exactement.
24:53Après, on fait des mélanges.
24:54On utilise 20% de la magnétite et 30% de l'escolette
24:58pour donner une autre couleur.
25:00Voilà, on fait des mélanges.
25:01Avec une nouvelle teinture naturelle dont vous parlez,
25:04qui s'appelle la Pouzzoulane.
25:05Alors, j'ai découvert la Pouzzoulane.
25:06De quoi il s'agit ?
25:07On est très fiers de ça, en plus.
25:09Parce que nous, le projet, on est clairement toi.
25:11Donc, on est vraiment à deux pas des volcans d'Auvergne.
25:14Et c'est lors d'une petite randonnée sur le Puy-de-Dôme.
25:21Et en fait, on marchait depuis le début
25:22sur notre prochaine innovation, la Pouzzoulane.
25:25Donc, on s'est dit qu'on allait l'utiliser.
25:28Et en fait, on a une carrière qui est à Saint-Ours,
25:31qui est à côté de Clermont.
25:32Et on récupère la poudre de Pouzzoulane.
25:34Et on la travaille pour faire une teinture exclusive
25:38qui a été brevetée en collaboration.
25:39Alors, c'était la question que j'allais vous poser.
25:40Est-ce que ça demande de la recherche et développement,
25:42des brevets,
25:43quand on crée d'une certaine façon
25:45une nouvelle couleur, une nouvelle teinture ?
25:46C'est réellement, oui.
25:47C'est beaucoup de travail,
25:48beaucoup de recherche et développement.
25:50Aujourd'hui, on est à peu près
25:51sur une petite année de recherche et développement
25:53à tester, à être validé par des laboratoires aussi en Espagne.
25:57Parce que nos produits sont testés à la lumière du jour,
26:00à la machine à laver, au sèche-linge,
26:02à beaucoup de choses pour pouvoir être commercialisé.
26:05Donc, oui, c'est beaucoup de travail.
26:06Et alors, ça donne quelle couleur, la Pouzzoulane ?
26:07Eh bien, c'est la couleur que j'ai sur moi.
26:09C'est une couleur rouge un peu grise.
26:12C'est joli, oui.
26:12C'est une belle couleur.
26:13Bah, merci.
26:14Une belle trouvaille.
26:15Ouais, ouais, ouais.
26:16C'est vrai qu'on n'a pas l'habitude de voir cette couleur.
26:18Nous, on a l'habitude parce qu'on la voit
26:19autour de chez nous, autour de Clermont-Ferrand.
26:21Mais je trouve qu'on l'a très bien retranscrit sur le produit.
26:24Vous l'avez dit, votre usine,
26:26elle est basée au Portugal.
26:29Alors, évidemment,
26:30puisque vous êtes dans une démarche environnementale,
26:33vous ne l'avez pas choisie par hasard ?
26:34C'est-à-dire que...
26:35Non.
26:36Comment elle fonctionne ?
26:37Enfin, voilà, c'est quoi son énergie ?
26:39Gestion des déchets, etc.
26:40En fait, on appelle ça une usine zéro déchet.
26:44Le but, c'est que le projet,
26:45il soit géré de A à Z
26:47pour que ce soit vraiment le plus logique dans la démarche.
26:50Donc, on a évidemment cette usine
26:52qui a des panneaux solaires sur le toit,
26:54qui récupère l'énergie solaire pour ces machines,
26:56mais aussi qui récupère l'eau de la pluie
26:57pour la réinsérer dans son processus de teinture.
26:59Aujourd'hui, nos nosos, elles ne sont pas sales,
27:02dû parce que c'est de la teinture naturelle
27:03et pas de la teinture chimique.
27:05Donc, on peut la réutiliser dans notre processus
27:07et la réinsérer et la retravailler en interne.
27:12Donc, en fait, on n'a rien qui sort de l'usine,
27:15à part nos produits.
27:16Mais vraiment, on a zéro déchet.
27:18Et alors, dernier, il reste 40 secondes,
27:20Poudzoulane, Clermont-Ferrand,
27:22on est dans un tissu local.
27:24On pourrait dupliquer ça dans d'autres régions ?
27:26Le but, c'est ça, c'est qu'on fait un peu un appel
27:29à toutes les autres régions.
27:31Aujourd'hui, si, évidemment, il y a des minéraux
27:33qui sont intéressants dans d'autres régions,
27:35on est capable de travailler le minéral de la région
27:38et faire des couleurs très régionales.
27:41Et donc, d'éditer, d'une certaine façon,
27:43des vêtements régionaux.
27:45Exactement.
27:45Qui vont s'intégrer à une fierté locale.
27:48Merci beaucoup, Adrien Brun,
27:50d'être venu nous présenter votre marque Doxa.
27:53Voilà, c'est la fin de ce numéro de Smart Impact.
27:55Merci à toutes et à tous de votre fidélité
27:57à la chaîne des audacieuses et des audacieux.
28:01Salut !
28:01Sous-titrage Société Radio-Canada
28:08Sous-titrage Société Radio-Canada