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Stéphane Séjourné, vice-président exécutif de la Commission européenne à la Prospérité et à la Stratégie industrielle, était l'invité de Sonia Devillers ce lundi, pour évoquer les négociations commerciales avec les États-Unis. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-7h50/l-invite-de-7h50-du-lundi-07-avril-2025-4829429

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Transcription
00:00Sonia Devillers, à 7h49, votre invité, vice-président de la Commission européenne à la prospérité
00:05et à la stratégie industrielle.
00:07Voilà, il est LE commissaire français ! Bonjour Stéphane, c'est journée !
00:11Bonjour, bonjour à tous !
00:12Le message malin !
00:13Le message est… en tout cas la transition est bien trouvée !
00:16Voilà, alors on y va ! Justement, Donald Trump crée la stupeur avec l'annonce fracassante
00:20des droits de douane imposés par les Etats-Unis… Dans la foulée, la Chine riposte de manière
00:26non moins spectaculaire, pas l'Europe.
00:28Est-ce que c'est un aveu de faiblesse ? Est-ce que c'est un aveu de tétanie ?
00:32Alors d'abord, non ! Nous allons évidemment riposter, il y a une riposte qui est en préparation
00:37et je voulais être très clair ce matin, y compris sur la doctrine que nous allons travailler,
00:45la méthode que nous allons employer, y compris dans le travail et l'unité européenne.
00:49Notre riposte aura trois mots d'ordre, d'abord la proportionnalité, puisqu'il y aura des
00:53impacts économiques sur notre économie et sur l'économie européenne.
00:57Il faut pouvoir en tenir compte, notre économie est très imbriquée avec celle des Etats-Unis.
01:03Il y a 60% des investissements étrangers aux Etats-Unis qui sont des investissements européens,
01:0840% des investissements étrangers en Europe sont des investissements américains.
01:13Donc on voit bien, dans cette dynamique, comment des droits de douane et des tarifs peuvent
01:21impacter à la fois les entreprises américaines et à la fois les entreprises européennes.
01:26Et puis, il y a l'unité européenne à construire, puisque nous sommes forts à 450 millions
01:32de consommateurs et donc il faut continuer à négocier ensemble, à 27, pour l'instant
01:36ça a tenu, et pour avoir cette négociation à 27, pour l'instant ça tient, nous avons
01:42une réunion aujourd'hui à Luxembourg avec notamment les ministres des affaires commerciales
01:48et donc du commerce extérieur.
01:50Je serai d'ailleurs vendredi et samedi avec Eric Lombard, le ministre de l'économie
01:54française et l'ensemble des ministres européens en Pologne pour pouvoir affiner cette discussion.
02:01Et l'ensemble des Européens ont la volonté de négocier ensemble et je pense que ça
02:06c'est un élément en tout cas de force que l'Europe peut mettre sur la table.
02:10Mais proportionnalité, ça signifie quoi ? Ça signifie réciprocité ? Parce que vous
02:14comprenez, nos auditeurs entendent beaucoup beaucoup de mots, qu'est-ce que ça signifie
02:17concrètement ?
02:18Il y a deux leviers dans la riposte, d'abord le tarifaire, la réciprocité absolue.
02:22Donc ils nous collent 20%, on leur colle 20% ?
02:25On met 20%, cette liste de réciprocité sera déjà en oeuvre dès cette semaine puisque
02:34les premiers droits tarifaires qui ont été annoncés par Donald Trump, notamment sur
02:38l'acier et l'aluminium, seront en réciprocité et seront annoncés dans les jours qui viennent.
02:44Alors on va expliquer, mi-mars, en effet, les Etats-Unis annoncent des droits de douane
02:49sur l'aluminium et sur l'acier, nous avons préparé une liste, cette liste a été validée
02:53et dans les prochains jours, nous validerons cette liste, pour ce qui est du bourbon, j'ai
03:01un espoir pour que cet élément soit sorti de la liste et on verra dans les prochaines
03:07heures puisque les discussions se termineront cette semaine.
03:10On s'arrête un instant sur le bourbon Stéphane Séjourné parce que ce n'est pas du tout
03:13anecdotique, c'est-à-dire qu'à partir du moment où l'Europe a dit « si vous taxez
03:18notre acier et notre aluminium, on va taxer votre bourbon », Donald Trump l'a très
03:22très mal pris, il a dit « si vous faites ça, je taxe à 200% les vins et les champagnes
03:27français ». C'est toute la filière viticole qui attend de savoir si le bourbon va être
03:32sur cette liste.
03:33Oui, tout à fait.
03:34On a réouvert la liste à la discussion à la fois avec les Etats-membres, l'ensemble
03:40des 27, des ministres, et puis aussi à consultation des industriels pour voir l'impact économique
03:45pour éviter l'escalade avec les Etats-Unis et a priori, on devrait avoir des bonnes
03:51nouvelles dans les prochaines heures.
03:52Donc on a des bonnes chances de faire sortir le bourbon de cette liste.
03:56Mais en tout cas, le message a été bien pris et l'impact économique pourrait être
04:00majeur.
04:01Ça ne veut pas dire que sur les autres secteurs et sur la riposte européenne, nous ne ferons
04:07rien.
04:08Là, il y a eu 10% qui se seront appliqués dès le 5 avril à l'ensemble du monde entier.
04:1420% pour les Européens à partir du 9 avril.
04:18Et donc les Européens sont en train de construire la riposte dans l'unité, dans la proportionnalité
04:22pour éviter d'avoir des impacts économiques sur leur secteur.
04:25Et entre le tarifaire et le non-tarifaire, et je vais peut-être expliquer ce qu'est
04:30le non-tarifaire pour vos auditeurs, c'est l'idée d'utiliser des instruments d'anticoercition,
04:37qu'on appelle en Europe.
04:38C'est des instruments qui ont été notamment créés à la base contre les Chinois.
04:42Et que finalement, on va appliquer probablement aux Américains.
04:46On peut éventuellement appliquer, on a les cartes.
04:49Soyons très concrets.
04:50Soyons très concrets.
04:51Ça veut dire que nous pourrions décider de retirer l'ensemble des entreprises américaines
04:59des marchés publics, par exemple, européens.
05:01Alors c'est le bazooka économique, puisque un certain nombre de services sur lesquels
05:07nous n'avons pas d'autres options que de choisir les Américains, notamment les services
05:11numériques.
05:12Et donc ça a des implications sur les entreprises européennes.
05:16Il faut regarder dans quel secteur exactement et pourquoi nous pouvons le faire, mais ça
05:21fait partie des sujets qui sont sur la table et en discussion aujourd'hui avec l'administration
05:26américaine.
05:27Évidemment, ça a des impacts majeurs pour les entreprises américaines.
05:30Et dans ce cadre-là, le rapport de force, en tout cas, il est sur la table.
05:34Pour reprendre le vocabulaire de Donald Trump, nous avons également les cartes.
05:40Et donc nous avons des outils pour aussi faire plier les Américains.
05:43Il faut les utiliser dans des conditions de négociations avec eux.
05:49Et donc on ne peut pas aujourd'hui faire des annonces, puisqu'il y a des négociations
05:52qui sont en cours.
05:53Il faut garantir l'unité européenne, parce que c'est quand même notre force.
05:57Et puis, il faut éviter les impacts sur nos secteurs économiques, parce que notre
06:02intention, c'est quand même de défendre le pouvoir d'achat et défendre les entreprises
06:05européennes.
06:06Qu'un Elon Musk, par exemple, prenne d'un seul coup le contre-pied de Donald Trump.
06:10Et ce week-end, décrète, il participait au congrès italien des partis anti-migrants,
06:16et décrète d'un seul coup, comme ça, sans prévenir, que lui, il voudrait une zone de
06:21libre-échange avec l'Europe, entre l'Amérique du Nord et l'Europe, avec des tarifs douaniers
06:25quasi nuls.
06:26Ça veut dire quoi ? Que l'unité se fissure autour de Donald Trump ?
06:29On n'a pas encore compris exactement la nature de cette intervention.
06:33Soit c'était une annonce de l'administration américaine, soit c'était un conseil au
06:39président américain.
06:40En tout cas, pour les deux, que ce soit d'ailleurs l'option 1 ou l'option 2, c'est plutôt
06:44une bonne nouvelle.
06:45Parce que si c'est un conseil, c'est-à-dire que c'est une brèche, et si c'est une brèche
06:50dans une négociation, c'est toujours utile pour les Européens.
06:52Ursula von der Leyen disait jeudi « Il y a encore moyen de négocier ». L'administration
06:56Trump a dit cette nuit « Il y a 50 pays qui ont pris contact avec nous pour commencer
07:01les négociations ». Donc en réalité, tout va se renégocier, après ces annonces fracassantes
07:06là.
07:07Oui, les contacts sont en cours, déjà, aujourd'hui, avec l'administration américaine, on aura
07:13un certain nombre de discussions et d'aller-retours sur les conséquences économiques de ce que
07:17nous envisageons.
07:18Ça veut dire faire aussi tourner les ordinateurs du côté américain et du côté européen
07:23pour voir les conséquences économiques.
07:25Qu'on puisse avoir des éléments qui soient aussi dissuasifs dans cette discussion.
07:30On les a, je vous les ai évoqués, j'en ai évoqués quelques-uns.
07:34L'intérêt pour nous, c'est évidemment de limiter l'impact économique, encore
07:38une fois.
07:39Tout ce qui peut permettre de renforcer le rapport de force européen, l'unité européenne,
07:46nos outils anti-coercition, l'arrêt sur les tarifs sont des éléments qui nous permettent
07:50en tout cas d'avoir la main dans cette négociation.
07:54Vous venez de publier dans Le Monde une tribune, vous ne mâchez pas vos mots, « l'industrie
07:58automobile européenne est en danger de mort ». Écrivez-vous, c'est le constat de l'industrie
08:03elle-même.
08:04Ça concerne directement ou indirectement 13 millions de travailleurs.
08:08Vous vous dites en substance « on attaque notre industrie à coup de droit de douane
08:12et bien nous on va la protéger, on va la renforcer plus que jamais ». L'industrie
08:16automobile, il y a d'abord un éléphant dans la pièce, c'est la fin de la vente
08:21des voitures à essence neuve, des voitures à moteur Terni, 2035, le fameux coup près.
08:27Pour beaucoup, ce coup près, c'est la mise à mort, c'est le coup de grâce.
08:31D'abord, pour faire le lien avec le sujet précédent, nous avons un agenda également
08:38de réindustrialisation européenne.
08:40D'ailleurs, nous n'avons pas les mêmes méthodes que les Américains, mais nous avons
08:45cet agenda de réindustrialisation, de « made in Europe ». Nous prévoyons également une
08:49révision des marchés publics européens pour permettre également de pouvoir acheter
08:53européens dans un certain nombre de marchés publics.
08:55Et l'industrie de l'automobile est une industrie stratégique pour nous.
09:00Et donc, nous devons préserver nos capacités de production, que ce soit pour le social,
09:06pour l'économie.
09:08Pour cela, nous avons pris des mesures rapides pour pouvoir booster le carnet de commandes
09:15des constructeurs.
09:16On va notamment verdir plus rapidement les flottes professionnelles.
09:19Les flottes professionnelles, c'est 60% des voitures neuves en Europe achetées.
09:24Et donc, ça veut dire plus de voitures également dans le marché secondaire.
09:27Ça nous permettra également de booster les commandes.
09:31Répondez sur 2035, c'est la fin de l'interview.
09:332035, c'est assez simple.
09:34La commission restera sur ses bases, c'est-à-dire les objectifs resteront.
09:37Nous garderons les objectifs de transition.
09:39Par contre, nous adapterons le chemin et les flexibilités.
09:42On l'a fait sur les amendes, de manière pragmatique, on le refera.
09:45Mais en tout cas, les objectifs resteront fixés et d'ailleurs sont dans la loi européenne.
09:51Aujourd'hui, il faudrait presque même changer la loi européenne et avoir un nouveau consensus
09:55européen pour pouvoir changer ses objectifs.
09:57Ce n'est pas notre intention.

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