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Dans le cadre du salon People 4 Health, les professionnels ont échangé sur la santé des soignants, leur épanouissement, mais aussi le sexisme dans la santé, mais aussi de réenchantement des métiers du soins, de formation ou santé des femmes... Voici l'essentiel des prises de paroles.
Alexis Bataille-Hembert, Infirmier et co-rapporteur de la mission ministérielle "Santé des soignants", a présenté la conférence inaugurale sur la santé des soignants. Alors, comment vont-ils ? Et comment améliorer leur santé ? Quelques pistes…
Pr Christian Pradier, Chef du Département de Santé Publique du CHU de Nice, a participé à la conférence "Viser ensemble l'épanouissement des professionnels de santé".
Dr Elsa Mhanna, neurologue et secrétaire générale de l’association donner des ELLES à la santé a participé à la conférence " Violence envers les soignants : prévenir, protéger, accompagner". Pourquoi les soignantes sont autant confrontées à de la violence et comment enrayer le phénomène ?
Guillaume Bailly, Interne en médecine cardiovasculaire, ancien président de l’ISNI a participé à la conférence "Ré-enchanter le secteur du Soin : comment ne plus raconter d'histoire aux jeunes générations". Alors, les jeunes médecins sont-ils désenchantés ?
Dr François Jaulin, médecin et président & co-fondateur de Facteurs Humains en Santé a participé la table ronde "Former les soignants : quels leviers ?". Quelques pistes sur pourquoi et comment mieux former les patients…
Dr Olivier Hoffman, cardiologue et administrateur pour Le Cœur des Femmes a participé à la conférence "Santé des soignantes : le cœur a ses raisons !". Il nous alerte : alors que les maladies cardio-vasculaire sont la première cause de mortalité chez les femmes, la prévention reste insuffisante.

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Transcription
00:00Ma conférence inaugurale portait sur un sujet majeur qui est celui de la santé des soignants,
00:12mais à travers une approche assez pertinente qui est celle de la salutogénie.
00:17C'est un concept apporté par la Suisse qui consiste seulement à regarder les sujets
00:22de santé publique à travers non pas ce qui fait maladie, donc la pathogénie, mais plutôt
00:27ce qui fait santé, donc la salutogénie.
00:29Alors, la santé des soignants ne va pas aussi bien qu'on l'espère parce que nos
00:40soignants, d'abord avant d'être des blouses blanches, sont d'abord des individus à part
00:44entière et connaissent donc des problèmes de santé relatifs à la population générale,
00:48mais ont des facteurs de risque supplémentaires qui ne font qu'optimiser, renforcer ces problèmes
00:53de santé en population générale.
00:55Aujourd'hui, nos soignants ne vont pas bien, ne vont pas forcément mieux que la population
00:59générale, mais ne vont pas forcément moins bien que la population générale.
01:02En revanche, un intérêt de se saisir de cette thématique, c'est de se dire qu'aujourd'hui,
01:07on doit garantir la stabilité, la pérennité, la qualité et la sécurité des soins, forcés
01:13de constater que ceux qui les administrent sont des soignants, au-delà de la robotique,
01:18de la domotique, du numérique, du digital, on ne pourra jamais se départir de la garantie
01:21humaine.
01:23On doit considérer l'amélioration et la préservation de la santé des soignants comme
01:27étant un des moyens d'agir sur cette qualité, cette sécurité des soins, avec, à moyen
01:32terme ou à long terme, une garantie de stabilité, de pérennité de notre système de santé.
01:42Alors, il y a plein de volets puisque, en fait, quand on parle de santé des soignants,
01:45il ne s'agit pas seulement de parler que de santé au travail.
01:48La plupart des études le démontrent.
01:49Quand on parle de santé des soignants, c'est effectivement un sujet de santé au travail,
01:53mais c'est aussi un sujet de santé publique, de sociologie, d'économie de la santé,
01:58de santé des femmes.
01:59Et donc, on a différents déterminants, différentes disciplines, différentes thématiques qui
02:04doivent être abordées lorsqu'on parle de la santé des soignants.
02:07Ce qui fait que ça complexifie d'autant plus l'approche et la façon d'agir sur
02:12ces sujets.
02:13Mais très concrètement, on a au moins deux grands volets que sont la santé physique et
02:17la santé mentale.
02:182025, année de la grande cause santé mentale, on doit peut-être faire le focus sur les
02:24moyens d'agir à la fois sur le taux de suicide, la prévention de l'épuisement professionnel
02:31et puis sur la manière avec laquelle on va permettre de libérer une forme de parole
02:35parce qu'il n'y a pas que les violences sexistes et sexuelles qui méritent d'être abordées
02:40même si elles sont majeures et importantes.
02:42Il y a aussi tous ces moyens de simplifier la charge émotionnelle que certains professionnels
02:49rencontrent et je pense notamment aux médecins dans le cadre d'un exercice salarié.
02:53On le voit, gérer seul, même en exercice coordonné des patients, ça suppose une charge
02:59mentale qui est importante.
03:00Et donc, à qui se confient ces professionnels de santé ?
03:04Au même titre qu'on le fait dans le monde de la psychologie avec des superviseurs et
03:08des tuteurs en santé, on se doit d'accompagner des professionnels et de leur permettre de
03:13libérer la parole.
03:14Parce que déjà, libérer la parole, c'est leur permettre d'avancer et d'évoluer dans
03:19leur parcours de santé mentale.
03:28Il y a une dizaine d'années, on a monté sur le CHNIS un groupe qui s'appelait le
03:31groupe Promotion de la Santé au Travail et qui a réuni des agents de l'hôpital Pasteur,
03:38l'un des hôpitaux de Nice, et ce groupe-là a proposé des actions qui allaient dans le
03:43sens d'une amélioration de la qualité de vie des professionnels de santé.
03:46Donc, c'était des actions qui étaient proposées par des agents pour des agents.
03:51Donc, ils ne demandaient pas de budget particulier et tout a été réalisé sur les ressources
03:57propres de l'établissement et de ces agents hospitaliers de toutes catégories, de toutes
04:01catégories confondues, qui ont proposé et mis en œuvre toutes ces actions-là.
04:07Donc, le département de santé publique, dans ce cadre-là, il est venu apporter un
04:10soutien, il a favorisé l'émergence des idées et ensuite la mise en œuvre des actions
04:17et c'est ça qui a amené à la création, à un moment donné, de l'unité des professionnels
04:22de santé.
04:27Alors, cette unité, elle a pour vocation de venir soutenir justement les agents qui
04:31ont des idées, donc favoriser d'abord l'émergence des idées, permettre aux agents de s'exprimer
04:38ensuite de les aider à mettre en œuvre les idées qu'ils ont eues parce qu'ils ont
04:44un travail, ils ont des patients à suivre et donc ils n'ont pas de temps pour travailler
04:49à la mise en œuvre logistique des choses.
04:51Donc, là, c'est le département de santé publique et en particulier l'unité qui vient
04:54le faire.
04:55Puis, il y a un troisième élément qui est très important, c'est de rajouter à ça
04:59une dimension recherche puisque sur le questionnement de l'amélioration de la qualité de vie
05:05ou de la santé des professionnels de santé, il y a des dimensions recherche qu'il faut
05:08pouvoir engager et donc on essaie de le faire avec eux.
05:17Alors, je pense que ce serait intéressant, oui, de généraliser ce type d'unité-là.
05:20Je pense que le modèle qu'on propose au CHU Nice est très intéressant et donc mériterait
05:25aussi certainement d'être exporté dans d'autres établissements en France.
05:36Les violences envers les soignants sont déjà à un niveau très élevé.
05:39Aujourd'hui, dans les professions comme chez les médecins, on est à 8 femmes sur
05:4310 qui déclarent avoir été victimes de violences sexistes ou sexuelles et une infirmière
05:49sur 2 voire sur 3 et une directrice sur 2 déclare avoir été soit témoin, soit victime
05:56elle-même.
05:58Il y a clairement un milieu de la santé qui est assez violent par le fait qu'on côtoie
06:07le tragique au quotidien, qu'il y a un milieu qui est déjà sous tension aujourd'hui
06:11et un milieu dans lequel il y a un rapport à l'intimité et au corps humain qui est
06:16particulier.
06:17En plus de ça, aujourd'hui, les sanctions ne suivent pas lorsqu'il y a un signalement.
06:24Il y a une omerta qui est en partie levée depuis le Mito-Hôpital, ce qui explique qu'aujourd'hui
06:30il y a encore beaucoup de violence dans ce milieu-là.
06:36Ça commence par le signalement et la formation.
06:39Identifier la violence, la signaler, être sûr que lorsqu'on signale, on va avoir une
06:46démarche qui va être enclenchée et si le coupable est reconnu, qu'il y ait des sanctions
06:53claires derrière et que notre carrière ne soit pas en danger lorsqu'on signale.
06:58Donc, pouvoir bénéficier d'un accompagnement pour justement avoir le courage de signaler
07:04et derrière suivre la procédure pour qu'il y ait une tolérance zéro.
07:18Non, les jeunes soignants ou médecins ne sont pas désenchantés.
07:21Ils se posent des questions sur l'évolution du système de santé et c'est légitime.
07:25Tout évolue à grande vitesse, les pensées, les attentes et à nous de nous en saisir
07:30pour être à la hauteur.
07:37Alors, vastes questions parce que réenchanter, ça nous prendrait probablement quelques décennies
07:41à faire mais toutefois, on a quelques jalons qu'on a posés au cours de la conférence
07:46avec trois idées, trois piliers assez novateurs.
07:49En premier lieu, on ne peut pas ne pas en parler puisque l'actualité ne pousse à
07:53le faire, c'est l'intelligence artificielle, le numérique en santé.
07:56Plus qu'un remplaçant du soignant, ça va être cette aide utile pour lui dégager
08:02du temps soignant et pour qu'il retrouve l'essence de son métier au sein même de
08:07son activité de soignant et au contact de ses patients.
08:10Primo.
08:11Deuxièmement, plus de démocratie en santé.
08:13On est convaincus que les métiers évoluant, les attentes autour du soin évoluent à la
08:18même vitesse et qu'il faut qu'on inclue à travers ces décisions davantage d'acteurs
08:23et ça commence par les patients dont la prise en charge.
08:26On a des patients experts qui viennent et qui apportent une vraie plus-value dans la
08:31prise en charge de leur maladie et ça, il faut qu'on avance dans cette direction.
08:35Évidemment, c'est une concertation.
08:37Le médecin reste dans son rôle de médecin, l'infirmière également, l'aide soignant
08:42tout autant mais plus de démocratie en santé, plus d'empowerment fait qu'on sera plus
08:46efficace au final.
08:47Et enfin, tertio, plus de collaboration.
08:51Ça, typiquement, ça passe par le berceau, ça passe par la formation.
08:55Quand on est jeune professionnel de santé et qu'on est amené à l'heure actuelle
08:59à ne pas réellement se rencontrer, à ne pas tellement évoluer quand on est amené
09:05à se former, on pense sincèrement qu'il faut plus de collaboration entre les métiers
09:09et ça commence par plus de connaissances, des formations en commun, des stages, l'évolution
09:15des métiers fait qu'on arrivera à être plus efficace, plus efficient et qu'à
09:20bon sens, on ne regardera plus notre collègue comme étant un collègue qui évolue en parallèle
09:25de nous, en marge, mais bien comme un confrère, comme quelqu'un avec qui on a une seule
09:30mission, c'est de soigner le patient et être efficace à nous.
09:37Je pense que si on parle des études de santé, c'est probablement les plus longues qui
09:40existent.
09:41Donc, ils sont suffisamment formés.
09:43La question, c'est est-ce qu'ils sont bien formés ?
09:44Et là, on peut se poser la question de, est-ce que les sujets sont les bons ?
09:47Par exemple, à titre personnel, moi, je n'ai reçu qu'une heure de cours sur les six années
09:50d'études de médecine sur l'autisme.
09:52L'autisme, c'est 700 000 personnes en France.
09:54Sur la sécurité des soins, je n'ai rien reçu.
09:57Il a fallu attendre que je me spécialise en anesthésie-réanimation et parce que c'est
10:01l'anesthésie qui est une spécialité intéressée par ces questions, j'ai découvert les choses.
10:09Première chose, il y a énormément d'accidents aujourd'hui en santé.
10:12En France, il y a eu des études, des enquêtes nationales sur les événements indésirables
10:16graves associés aux soins qui laissent penser qu'on serait peut-être autour de 60 000
10:20par an d'essais évitables.
10:22Deuxième réponse, c'est la qualité de vie au travail.
10:25Et puis bien sûr, pour la société.
10:30Il n'y a plus beaucoup de soignants, il y a beaucoup de gens à soigner.
10:33Et si on les envoie en formation, comment on fait ?
10:36Donc ça, c'est un des arbitrages sur lesquels il faut vraiment prendre le temps de réfléchir.
10:40C'est-à-dire qu'il faut pouvoir permettre aux soignants d'aller se former.
10:43Mais il faut aussi développer des nouvelles stratégies avec des modalités nouvelles
10:47au sein des organisations.
10:49Faire des micro-temps de formation, on parle de micro-learning.
10:53Faire du e-learning, faire de la simulation.
10:55Profiter de temps comme les réunions de mort et mortalité pour aussi faire des formations.
10:59Donc essayer d'utiliser tous les temps possibles pour former les gens sur place.
11:10Oui, effectivement, les maladies cardiovasculaires sont devenues la première cause de mortalité chez la femme.
11:16Avec 200 décès par jour, six fois plus que le cancer du sein.
11:21Il n'y a pas assez de dépistage des maladies cardiovasculaires chez la femme.
11:26La femme est suivie par son gynécologue qui doit prendre la tension artérielle,
11:31lui faire un dépistage de la glycémie du cholestérol,
11:35voir s'il y a des antécédents familiaux, si elle fume.
11:38Et en fonction, l'adresser à son médecin traitant, voire au cardiologue,
11:43si les facteurs de risque sont nombreux.
11:49Les femmes s'occupent de leur famille, de leurs amis, de leur travail,
11:55mais ne s'occupent pas d'elles, n'ont pas assez de temps pour faire un dépistage,
12:02ont une charge mentale souvent qui est très importante par tout ce qu'elles ont à faire au quotidien.
12:07Et malheureusement, ne font pas assez de dépistages cardiovasculaires,
12:12en particulier si elles ont des facteurs de risque comme l'hypertension artérielle,
12:17l'hérédité, le tabagisme, le stress qui est un facteur majeur.
12:26Faire de la prévention comme le fait agir pour le cœur des femmes,
12:30avec le professeur Claire Mounier-Veillé,
12:32qui parle des maladies cardiovasculaires de la femme depuis plus de 20 ans,
12:36dans le grand public, dans des salons comme ici,
12:40où on va parler aux soignants des problèmes cardiovasculaires chez la femme,
12:44pour qu'ils fassent passer le message,
12:46chez les médecins tout simplement,
12:48qui eux aussi ne sont pas aussi assez sensibilisés aux maladies cardiovasculaires des femmes.

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