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00:00Et je salue mes camarades du soir, bonsoir Raphaël Stainville, bonsoir Pierre, directeur adjoint de la rédaction du Journal du Dimanche,
00:05bonsoir Alexandre Malafaille, bonsoir Pierre De Villeneuve, fondateur du think-tank Synopia, et bonsoir à vous Thomas Cacillou,
00:11vous êtes en ligne avec nous, vous êtes député ensemble pour la République, dixième circonscription du Rhône,
00:16vous avez participé à cette réunion au ministère de la Défense avec François Bayrou, Sébastien Lecornu,
00:24des chefs d'état-major, des chefs de groupe et de parti, qu'est-ce qui s'est dit, sur quoi vous avez, qu'est-ce que vous avez retenu de cette réunion ?
00:31Alors, je n'y ai pas participé directement, puisque je ne suis plus président de commission, mais c'était une réunion effectivement initiée par Sébastien Lecornu
00:39avec ses autorités militaires, auxquelles a participé également le Premier ministre, et le but c'était que les grands chefs militaires
00:45présentent la situation telle qu'elle est au président des différents groupes parlementaires, donc à la fois le DGSE,
00:52donc sur la sécurité extérieure, sur les menaces qui pèsent sur la France, le chef d'état-major sur les garanties de sécurité,
00:58et puis également le directeur du renseignement militaire sur l'état du front ukrainien.
01:02Bon, alors il y a eu effectivement, d'après ce que j'ai compris, un grand panel de grands chefs à plume, mais qu'est-ce qui s'est dit et qu'est-ce qui en ressort ?
01:09Alors, je ne peux pas revenir malheureusement précisément sur le contenu en tant que...
01:14Si, bien sûr, bien sûr, mais ce qui s'est dit c'est simplement que ça a permis aux chefs politiques d'avoir accès à des informations qu'on appelle
01:21diffusions restreintes sur l'état de la menace, sur ce qu'on peut faire, et également d'avoir de l'interactivité avec les grands chefs militaires,
01:28donc c'est quelque chose d'extrêmement important que la représentation nationale soit totalement informée,
01:33puisqu'on aura à faire des choix importants dans les prochaines semaines et les prochains mois.
01:36Et est-ce que la situation est grave, moyennement grave, très grave, pas du tout grave ?
01:41Je pense que la situation est grave, puisqu'objectivement on a le retour de la guerre en Europe et le désengagement de l'allié américain
01:48sur lequel repose beaucoup la défense collective de l'Union Européenne, donc on est face à nos responsabilités,
01:54on est un ensemble de 450 millions d'habitants aujourd'hui qui doit assumer sa propre sécurité,
02:00mais moi pour ma part j'ai toute confiance sur la capacité des Européens à y parvenir ensemble.
02:05Alexandre Balafaille pour vous.
02:07La situation est quand même grave, pour le moins.
02:10La question que je me pose c'est, est-ce que toute cette assemblée parlementaire réunie devant nos chefs militaires et nos patrons de services de renseignement
02:18n'ont quand même pas un regret de voir qu'on est nulle part, actuellement, ni la France ni l'Europe,
02:24dans les négociations qui sont en train de se dérouler à Moscou et dans les négociations qui se sont déroulées la semaine dernière à Washington ?
02:30Qu'est-ce qu'ils en pensent, tous vos collègues parlementaires ?
02:32Écoutez, on a eu un débat, pas plus tard qu'hier, sur une résolution de soutien à l'Ukraine,
02:38il y a une forme d'unanimité, quand même quasi-unanimité, sur la nécessité de continuer à soutenir l'Ukraine.
02:43Aujourd'hui les Américains...
02:44Non mais pardonnez-moi, M. le député, c'est pas de moi de vous couper, c'est pas ma question.
02:47Ma question c'est, on est nulle part dans la négo, qu'on soutienne l'Ukraine,
02:50et que la posture soit de dire qu'on soutient de manière inconditionnelle très bien,
02:53mais le résultat c'est qu'on est nulle part dans la négo, vous en pensez quoi de ça ?
02:56On n'y est nulle part pour l'instant,
02:57mais les Ukrainiens, on a une interaction constante avec eux,
03:01et bien entendu les échanges qu'on a avec eux sont de fait autour de la table des négociations,
03:07et comme vous l'avez vu cette semaine,
03:09il y a notamment eu une réunion autour du président de la République
03:13d'une trentaine de chefs d'État-majeur des armées européens,
03:16pour travailler ensemble sur les garanties de sécurité qui seront ensuite possibles en Ukraine.
03:20Donc de fait, on est bien présents,
03:23même si effectivement c'est une démarche initiée par le président américain.
03:27Vous êtes présents, mais vous êtes présents finalement à côté du motif,
03:31c'est-à-dire qu'aujourd'hui on a l'impression que vous cherchez à revenir,
03:37plutôt quand je dis vous, le président cherche à revenir au centre du jeu,
03:40sans que finalement, ni Donald Trump, ni Vladimir Poutine,
03:45n'aient beaucoup d'égard pour l'activisme de la France et de l'Europe.
03:50Nous on considère surtout que c'est aux Ukrainiens de déterminer eux-mêmes
03:55les conditions de fin de la guerre, les conditions pour arriver à la paix.
03:59Donc ce qui est totalement, les deux acteurs qui sont extrêmement importants,
04:02ce sont les Ukrainiens et les Russes,
04:05et au-delà des tables rondes officielles,
04:06vous vous doutez bien qu'il y a énormément d'échanges,
04:09à la fois pour appuyer les Ukrainiens pour obtenir les conditions d'une paix durable,
04:16et travailler sur ce qui se passera ensuite.
04:18Est-ce que vous ne craignez pas quand même,
04:20est-ce que vous ne craignez pas quand même qu'on retrouve sur le territoire ukrainien,
04:24ce risque d'avoir une zone grise de longue durée ?
04:26C'est-à-dire qu'on n'arrivera jamais à un accord complet sur la totalité des sujets,
04:31les Russes resteront en embuscade pour plein de raisons,
04:35et on aura finalement ce qu'on retrouve dans d'autres zones comme au Proche ou au Moyen-Orient,
04:40ça continuera à bas bruit et ça va polluer la vie des Européens
04:44pendant des dizaines d'années comme un cauchemar, qui n'arrête pas.
04:46Écoutez, malheureusement c'est une piste qui est possible.
04:48Regardez ce qui s'est passé quand l'Allemagne a été divisée.
04:52Effectivement, les Russes au travers du RSS ont été représentés en Allemagne de l'Est,
04:57mais vous savez, moi j'ai confiance dans la capacité de la démocratie
05:01à rassembler d'une certaine manière,
05:04puisque les Ukrainiens de l'Est, des territoires occupés,
05:07vont voir leur différence de vie en termes de liberté, en termes de niveau de vie,
05:11par rapport à ceux qui sont restés en Ukraine,
05:13et j'ai confiance qu'un jour l'Ukraine retrouve sa pleine intégrité,
05:18comme l'Allemagne a retrouvé sa pleine intégrité.
05:20Nous sommes toujours en ligne avec Thomas Gassiou,
05:23député Ensemble pour la République de la 10e circonscription du Rhône.
05:26La défense et les questions militaires sont votre domaine, M. le député.
05:32Est-ce qu'aujourd'hui, finalement, dans cette Europe de la défense
05:36qui longtemps a été une chimère,
05:38elle l'est peut-être d'ailleurs pour certains observateurs aujourd'hui,
05:41est-ce que finalement la France n'est pas bien seule ?
05:44Je prends pour exemple, puisqu'on vient de parler de l'Allemagne,
05:47le fait que les Allemands qui ont vu le parapluie américain se retirer,
05:53tout d'un coup se tournent vers la France en disant
05:56« Tiens, bonne pioche, finalement les Français vont pouvoir nous aider. »
05:59Est-ce que c'est comme ça qu'on construit une Europe de la défense ?
06:02Vous savez, j'en menais déjà, il y a fort longtemps,
06:05l'Europe ne progresse que dans la nécessité
06:07et ne voit la nécessité que dans la crise.
06:09Et donc effectivement, malheureusement, l'Europe, souvent, elle progresse
06:13parce qu'elle a un mur devant elle et qu'elle doit le franchir.
06:15Ça a été le cas pendant la crise sanitaire,
06:17c'est aujourd'hui le cas pour les questions de défense.
06:20Vous savez, les Européens, hormis la France,
06:22étaient tous très tranquilles avec la sécurité douillette des Américains.
06:26Aujourd'hui, le vrai fait marquant, au-delà de l'agression russe en Ukraine,
06:29c'est les Américains qui sont là et qui nous disent
06:31« Nous ne viendrons plus vous protéger. »
06:33Et donc effectivement, ce que disent les Français depuis les années 60,
06:35qu'on peut être allié des Américains
06:37mais qu'on ne peut pas miser toute notre sécurité sur eux,
06:40les Européens nous disent un peu
06:41« Vous aviez peut-être raison avant les autres. »
06:43Et donc maintenant, effectivement, ils se retournent vers la France,
06:46seule puissance nucléaire de l'Union Européenne.
06:47Alors, deux choses par rapport à ce que vous venez de dire.
06:49La première, c'est que les Américains, ils disent
06:51« Oui, le lundi. Non, le mardi. »
06:54« Oui, le mercredi. Et non, le jeudi. »
06:56Donc ça, c'est quand même assez difficile à suivre,
06:57vous l'avez remarqué comme moi.
06:58La deuxième chose, c'est que n'importe quel chef d'état-major
07:01vous dira aujourd'hui que dans un combat de haute intensité,
07:04on tient une semaine, peut-être dix jours.
07:06Donc moi, je veux bien qu'on fasse le parapluie de la dissuasion
07:10également pour les autres pays européens,
07:12commençant par l'Allemagne.
07:13Mais ça ne va pas tenir très longtemps, cher monsieur.
07:16Alors, les échanges avec les Américains
07:20laisseront durablement des traces.
07:21D'une part parce qu'il y a eu des annonces extrêmement fortes
07:24qui ont été faites par Trump
07:25qui remet en cause l'OTAN et l'article 5,
07:27parce qu'ils se livrent à une guerre commerciale extrêmement importante,
07:30parce qu'ils menacent même d'annexer des territoires européens,
07:32je pense au Groenland.
07:34Et par ailleurs, je vous propose de reprendre confiance
07:37sur la capacité des 450 millions d'Européens
07:40à se défendre face à 150 millions de Russes.
07:43Nous avons, quand nous cumulons les dépenses militaires européennes,
07:46la deuxième armée potentiellement du monde.
07:48Et donc oui, nous avons des lacunes
07:49puisque la plupart des pays européens
07:52se sont appuyés sur les Américains.
07:54Mais je peux vous dire qu'un pays comme la France,
07:56qui n'a jamais baissé la garde,
07:57a aujourd'hui une base industrielle et technologique de défense
07:59qui est parmi la meilleure au monde.
08:01Je vous rappelle que juste la France,
08:02on est les deuxièmes exportateurs mondiaux d'armement.
08:05C'est que nos rafales, nos sous-marins,
08:07nos équipements de défense sont au meilleur niveau.
08:10Et donc effectivement, aujourd'hui,
08:11il faut cette prise de conscience européenne
08:12et là, en train d'avoir lieu,
08:13qu'on est capables de se défendre tout seuls.
08:15Sur l'équipement, je vous suis,
08:16mais sur les munitions, c'est quand même autre chose.
08:17Alexandre Malafaye.
08:18Oui, puis sur la question des moyens
08:19qui reste absolument fondamentale.
08:20Mais au-delà de ça,
08:21les Américains et Donald Trump sont des négociateurs.
08:24À part tout le monde, ils vont claquer des doigts
08:26et revenir voir chacun des pays européens
08:27pour dire, bon écoutez,
08:28maintenant, on a réglé le problème en Ukraine,
08:30on va reprendre nos relations as usual
08:32et vous allez continuer à venir manger dans notre main.
08:34Il y a un vrai risque.
08:35Ils ont quand même une capacité de nous diviser
08:37et en plus, on n'a pas beaucoup de moyens,
08:38y compris financiers,
08:39et en plus, on est totalement endettés les uns et les autres.
08:44Donc là, la possibilité qu'ils reprennent la main sur l'Europe
08:47et qu'ils continuent comme avant
08:48est quand même très forte.
08:49Il faut 15 ans pour faire une base européenne de défense.
08:53Réponse de Thomas Gassillou.
08:55C'est possible et on espère que les Européens
08:57seront instruits par l'expérience
08:59de ce qu'ils ont vécu
09:01et je pense que réellement, pour ma part,
09:03au-delà de Trump,
09:04il y a un vrai pivot asiatique des Américains
09:07et j'allais même vous dire,
09:08je pense que Trump ou Kamala Harris,
09:09au fond, ça n'aurait pas changé grand-chose.
09:11Ça fait 15 ans que les Américains nous disent
09:13qu'on doit assurer nous-mêmes notre propre défense.
09:15Trump le fait avec sans doute plus de brutalité
09:18que l'aurait fait Kamala Harris,
09:19mais ce mouvement, il est bien engagé.
09:21Et concernant nos capacités de défense,
09:22effectivement, aujourd'hui, il nous manque de la masse militaire,
09:25mais nous avons gardé une dissuasion totalement crédible,
09:27nous avons gardé une technologie de nos industries de défense
09:30et nous avons gardé des capacités expéditionnaires.
09:32Aujourd'hui, collectivement, il faut qu'on arrive
09:34à retrouver cette masse nécessaire
09:37pour nous défendre intégralement.
09:38Dernière question.
09:39Raphaël Stainville pour vous.
09:40Oui, vous parlez de cette Europe de la défense
09:43que vous voulez voir progresser.
09:45Si l'AFD l'avait emportée en Allemagne,
09:49est-ce que vous tiendriez le même discours en d'autres termes ?
09:52Est-ce que finalement la défense ne peut être
09:54d'abord et uniquement que nationale ?
09:58Il y a une partie qui doit rester nationale.
10:00La dissuasion est et restera totalement nationale.
10:03Elle est conçue en France, elle est pilotée en France,
10:05elle est armée par les militaires français
10:07et c'est le président de la République française qui décide.
10:10Pour autant, au niveau industriel,
10:12on peut avoir des coopérations,
10:14même en gardant chacun nos armées.
10:15Et d'ailleurs, vous savez, j'ai présidé la Commission de la défense,
10:17j'avais notamment le groupe Rassemblement National dans la Commission.
10:21Le Rassemblement National est le premier à dire, me semble-t-il,
10:23que compte tenu des investissements à faire
10:25pour rester au niveau technologique,
10:27on a besoin de coopérations entre les Etats.
10:30Donc vous voyez, le consensus n'est pas loin sur ces sujets.
10:34Et encore une fois, gardons conscience,
10:36nous pouvons avoir conscience sur la capacité des Européens
10:39à se défendre et la France en a un rôle singulier à jouer
10:42pour les accompagner dans cette voyage.
10:44Merci Thomas Gassilou d'avoir été avec nous,
10:46député Ensemble pour la République du Rhône
10:49et spécialiste de la défense.
10:5020h26 et nous on revient dans un instant
10:52avec Raphaël Stainville et Alexandre Malafaille.
10:55Bienvenue sur Europe, ainsi vous nous rejoignez.