Le préfet de police de Paris, Laurent Nunez, était l'invité de BFMTV ce samedi 8 mars 2025.
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00:00Bonsoir Laurent Duniez, merci d'être avec nous dans Newsbox, vous êtes le préfet de police de Paris.
00:04Bilan de la manifestation parisienne d'abord qui s'achève en ce moment même ?
00:08Elle est encore en cours, elle s'achève, voilà j'ai quitté la préfecture de police,
00:13donc on avait les derniers carrés qui arrivaient sur la place de la Nation,
00:16puisque c'est une manifestation qui allait de la République à la Nation
00:20et qui a réuni selon le comptage de la préfecture de police 47 000 personnes
00:24pour cette manifestation consacrée à la journée internationale du droit des femmes.
00:28Les organisateurs eux estiment qu'il y avait 120 000 participants,
00:32vous annoncez vous 47 000 manifestants, marcheurs et marcheuses.
00:37La présence, monsieur Duniez, d'un collectif identitaire d'extrême droite, Némésie,
00:42ça a été unanimement dénoncé par les associations féministes,
00:46des tensions ont éclaté vers la fin de la manifestation, pouvez-vous nous expliquer ?
00:51En début de manifestation, il n'y a pas que...
00:56Donc il y a une déclaration de manifestation, il y a des organisateurs,
00:59il y avait de nombreux collectifs qui appelaient à cette manifestation
01:02et d'autres groupes peuvent évidemment venir s'y agréger,
01:06je crois qu'il y a effectivement un collectif d'extrême droite qui posait difficulté,
01:11le groupe des Némésies, mais attention, vous aviez aussi le collectif des Nous Vivrons,
01:17des femmes juives qui ont constitué un collectif...
01:20C'est un collectif qui est né au lendemain des massacres du 7 octobre 2023
01:23et qui se dit engagé dans une lutte contre l'antisémitisme.
01:26Je crois que ce n'était pas forcément souhaité, bienvenue dans ce cortège,
01:29de sorte que nous avons dû effectivement en début de manifestation
01:33assurer la protection de ces deux groupes pour qu'ils puissent ensuite rejoindre le cortège
01:39et pouvoir défiler normalement pour cette journée de manifestation
01:44et qu'ils ne soient pas attaqués, embêtés, empêchés,
01:47et donc c'est ce que les forces de sécurité intérieure ont réussi à faire aujourd'hui.
01:52Donc ces deux groupes ont pu également manifester.
01:54Ces deux collectifs ont pu manifester sous haute sécurité, encadrés par des forces de l'ordre.
02:00Oui, il a fallu les protéger parce que sinon il y aurait eu des incidents, des troubles à l'ordre public.
02:04Oui, effectivement, comme chaque fois qu'un groupe,
02:07quel que soit l'objet de la manifestation sur la voie publique,
02:09chaque fois qu'un groupe de manifestants est menacé d'être pris à partie par d'autres,
02:13évidemment nous intervenons et je vous rappelle que nous avions dans les jours qui précèdent
02:19cette manifestation des appels clairs qui ont été postés,
02:24notamment sur les réseaux sociaux, de collectifs comme Urgence Palestine,
02:27le groupe Samy Doud, qui appelaient à s'en prendre aux collectifs de femmes.
02:30Nous vivrons très directement à les empêcher de manifester.
02:33Évidemment, il était de ma responsabilité,
02:35sous l'autorité du ministre d'État et du ministre de l'Intérieur,
02:38de concevoir un dispositif qui permette à tous les groupes
02:40qui souhaitaient manifester aujourd'hui pour la journée internationale
02:43des droits des femmes de pouvoir le faire.
02:45Vous diriez que la manifestation parisienne s'est donc aujourd'hui bien passée ?
02:48Tous les groupes ont pu défiler.
02:50Il a fallu parfois qu'on s'interpose entre certains,
02:53notamment protéger certains groupes pour qu'ils ne soient pas attaqués.
02:56Mais la manifestation a pu se dérouler en ce sens qu'elle est arrivée à son terme
02:59et que toutes les personnes qui ont voulu souhaiter s'exprimer sur la voie publique
03:03ont pu le faire aujourd'hui.
03:04Parlons aussi, Laurent Nunez, de la manifestation d'hier soir
03:07que vous aviez interdite, qui a finalement été autorisée par la justice administrative.
03:12Plusieurs milliers de personnes ont participé hier soir
03:15à une marche féministe radicale selon les termes des organisateurs eux-mêmes.
03:19Est-ce que d'abord vous nous confirmez, monsieur le préfet de police de Paris,
03:23que des appels à l'intifada, ça veut dire soulèvement en arabe,
03:26ont été lancés pendant cette marche d'hier soir ?
03:30Je vous le confirme, je ne suis pas vraiment surpris.
03:32C'est pour ça que je l'avais interdite. Je ne suis pas surpris.
03:34Aujourd'hui, c'était une manifestation déclarée par le collectif national des droits des femmes
03:39avec plusieurs dizaines de structures qui appelaient à cette manifestation.
03:43Hier, on était sur un appel qui était exprimé de manière un peu plus radicale.
03:49On était sur un appel qui a été exprimé de manière un peu plus radicale
03:52avec des groupes d'ultra-gauche, des groupes pro-palestiniens,
03:55Urgence Palestine, Sami Doun, qui avaient appelé cette manifestation
03:59avec des affiches qui étaient très explicites.
04:02Donc très explicites en termes de soutien à la cause pro-palestinienne et la cause radicale.
04:06Celle qui nie la négation des israéliens.
04:09Est-ce que le fait d'être pro-palestine est un problème en soi, au lieu des autorités ?
04:12Évidemment non, ce n'est pas un problème.
04:13Mais quand vous flirtez avec ou quand vous êtes dans l'apologie du terrorisme,
04:17ça en est un.
04:18Qu'est-ce qui constitue l'apologie du terrorisme ?
04:20Urgence Palestine, un collectif, par exemple, dont plusieurs des militants
04:23de nombreuses reprises ont salué le Hamas et ont considéré que
04:27l'attaque du 7 octobre 2023 était un acte de résistance.
04:30Ce qui n'est pas acceptable, ça, ça s'appelle de l'apologie du terrorisme.
04:34Et d'ailleurs, le juge judiciaire l'a déjà jugé, ce point est tranché.
04:37Hier soir, effectivement, l'appel à manifester pour cette manifestation du 7 mars
04:42comportait des slogans de la sorte.
04:45J'ai cru bon l'interdire parce qu'il me semblait qu'il y avait là un trouble
04:49à l'ordre public, au sens, une atteinte à la dignité humaine,
04:52parce qu'il y avait de l'incitation à la violence et de l'incitation à la haine.
04:55Malheureusement, je n'ai pas été suivi par le juge administratif.
04:58Moi, je prends acte des décisions, je les respecte.
05:00Et je vous confirme, effectivement, que pendant cette manifestation,
05:03à de nombreuses reprises, il y a eu des appels à l'intifada
05:07qui ont été prononcés, mais à de nombreuses reprises.
05:10Est-ce que des poursuites sont envisagées ?
05:12On va évidemment travailler à saisir le procureur de la République,
05:16procéder à faire des articles 40 du code de procédure pénale,
05:18comme on dit dans notre jargon.
05:20Vous dites, on va travailler, vous ne saisissez pas l'office du procureur ?
05:23Bien sûr, on va travailler sur la vidéo, essayer d'identifier les individus.
05:26Je lui préférais que cette manifestation soit interdite.
05:29J'ai été suspendu, je respecte la décision du tribunal administratif,
05:32mais elle s'est un peu déroulée, comme nous le prévoyons,
05:35et c'est pour ça, d'ailleurs, que j'avais pris cette décision.
05:37Encore une fois, elle a été suspendue, moi, je le respecte.
05:40Il a été considéré que l'atteinte que j'apportais
05:43à la liberté d'expression était disproportionnée.
05:46Voilà, moi, je suis droit dans mes bottes.
05:48Quand j'ai entendu ce que j'ai entendu hier,
05:50et quand j'ai vu aussi les nombreuses tentatives de dégradation
05:53qui ont empêché les forces de sécurité intérieure placées sous mon autorité,
05:57je me dis que c'est vrai que cette manifestation
06:01aurait pu aussi ne pas se dérouler.
06:02Elle s'est déroulée, c'est le cas, je le respecte, et tant mieux.
06:04Hier soir, également, des journalistes, de BFMTV notamment,
06:07ont été chassés de la manifestation après avoir été pris à partie,
06:10intimidés, finalement, exfiltrés.
06:13Votre réaction ?
06:15Ma réaction, c'est la même que celle que je viens d'avoir.
06:17Vous savez, quand je dis « tant mieux, cette manifestation s'est déroulée »,
06:21ce n'est pas par rapport au fait que la manifestation soit déroulée.
06:23C'est-à-dire qu'il y a eu une décision de justice
06:25qui a considéré que mon arrêté d'interdiction était illégal.
06:27Moi, je respecte l'État de droit, c'est comme ça.
06:30Que des journalistes soient exfiltrés de ce type de manifestation,
06:33ça ne m'étonne pas.
06:34C'est assez fréquent que des journalistes,
06:37des chaînes d'information continue ou des médias indépendants
06:40qui veulent couvrir un événement
06:42soient chassés par ceux qui considèrent
06:45qu'ils ne vont pas porter leur cause.
06:46Donc, c'est évidemment déplorable.
06:49Et, encore une fois, c'est pour ça que nous sommes très attentifs.
06:51Vous respectez la décision de la justice administrative ?
06:54Je respecte la décision de la justice administrative,
06:58mais il faut aussi comprendre que quand un préfet de la République
07:00prend un arrêté d'interdiction,
07:01il a conscience qu'il va empêcher, quelque part,
07:04de s'exprimer la liberté d'expression et de manifestation.
07:07Et s'il le fait,
07:08c'est parce qu'il a des éléments graves et concordants,
07:11des indices graves et concordants,
07:12qui le laissent à penser que la manifestation
07:14ne va pas bien se dérouler.
07:16Je crois que ce qui s'est passé hier soir
07:18ne me donne pas tout à fait tort.
07:19Est-ce que vous avez des informations, des éléments précis
07:21sur les personnes qui ont scandé ?
07:23Oui, bien sûr.
07:24J'appelle à l'INSIFADA.
07:26C'est pour ça que j'avais interdit cette manifestation.
07:29Elle était déclarée par un collectif,
07:31mais ceux qui appelaient réellement à cette manifestation
07:35étaient le collectif Urgence Palestine,
07:38le groupe Samidoun,
07:40considéré comme une organisation terroriste dans certains États,
07:43qui, dans les slogans, dans les appels à cette manifestation,
07:48comportait des propos qui, à mes yeux,
07:50étaient clairement apologiques.
07:51Je rappelle que nous avons interpellé le 8 février dernier
07:54lors d'une manifestation manifestante d'Urgence Palestine,
07:57qui a demandé très clairement,
08:00se demander qui n'avait pas pleuré de joie
08:03le soir du 7 octobre 2023.
08:05Donc voilà, Urgence Palestine, c'est ça,
08:08c'est un collectif qui flirte
08:10et qui est même dans l'apologie du terrorisme,
08:12et donc il me semblait normal d'interdire cette manifestation.
08:15Mais je vous rassure, cet individu qui se demandait
08:17qu'il n'avait pas pleuré de joie le soir du 7 octobre,
08:19nous l'avons évidemment poursuivi en justice
08:21et d'ailleurs il a été interpellé, il est placé sous contrôle judiciaire.
08:24Autre sujet important, Laurent Nunes,
08:26cette semaine Emmanuel Macron a explicitement présenté la Russie
08:29comme une menace, en employant le terme.
08:33Se matérialise-t-elle actuellement en Ile-de-France notamment,
08:37puisque vous êtes préfet de police de Paris,
08:39mais une bonne partie de l'Ile-de-France,
08:40et si oui, de quelle manière ?
08:42Comme préfet de police, je suis assez mal placé
08:46pour parler de cette question.
08:47Vous savez, le Président faisait allusion au théâtre géopolitique,
08:50à la relation entre la France et la Russie,
08:53mais comme vous le savez, cette menace,
08:56elle s'est aussi matérialisée,
08:58elle se matérialisait aussi par des formes d'ingérence,
09:00que nous connaissons bien, la désinformation, etc.
09:03Des opérations de déstabilisation aussi ?
09:06C'est plutôt comme ça qu'elle se manifeste,
09:09à Paris et en région Ile-de-France,
09:11mais pas de menace physique directe bien évidemment.
09:14La guerre, elle peut prendre plusieurs formes,
09:16elle peut être hybride, numérique,
09:18mais vous, en tant que préfet de police de Paris,
09:20au regard de cette menace explicitement présentée comme telle
09:24par le Président de la République, il y a de cela trois jours,
09:27vous êtes inquiet, vigilant ?
09:29Je suis préfet de police, donc je ne suis plus,
09:32j'ai été à la tête de service de renseignement,
09:34j'ai eu à traiter ces sujets très directement,
09:36je ne le suis plus.
09:37Je ne dirais ni inquiet, ni vigilant,
09:40nous sommes vigilants sur les tentatives de déstabilisation.
09:44Vous savez que nous avons eu au moment,
09:47il y a encore quelques mois,
09:50des campagnes qui ont été menées dans les rues de Paris,
09:53des campagnes de tags,
09:54on avait la position de toutes ces mains rouges
09:56sur de nombreuses façades de la capitale,
09:59puis ensuite ça a été l'étoile de David
10:01qui a été reproduite à de nombreux endroits,
10:03on a pu interpeller les auteurs,
10:04on soupçonne évidemment des actions d'ingérence de pays étrangers,
10:08ce sont les services spécialisés qui sont en charge de ça,
10:10et puisque vous me demandez si je suis vigilant,
10:12oui, on est très vigilant quand il y a ce type d'action,
10:14on essaie tout de suite de retrouver les auteurs
10:16pour pouvoir ensuite informer les services de renseignement spécialisés
10:20et, le cas échéant, détecter des ingérences étrangères.
10:23Il peut y avoir aussi des opérations de déstabilisation,
10:25on en parlait, et des cyberattaques,
10:27Paris peut apparaître comme étant une cible prioritaire
10:29de pays comme la Russie, de hackers russes,
10:32des attaques informatiques par exemple,
10:35la préfecture de police de Paris,
10:36est-ce qu'elle renforce sa sécurité très concrètement ?
10:38Tous les services, toutes les grandes administrations d'État
10:41ont renforcé leur système de sécurité informatique,
10:43leur système d'information,
10:45ça a été fait, ça a été lancé avant les Jeux Olympiques,
10:47puisque nous craignons, à juste titre d'ailleurs,
10:49qu'il y ait de nombreuses attaques cyber,
10:52et donc toutes les grandes administrations
10:54ont renforcé leur système d'information,
10:56et la préfecture de police, évidemment,
10:58n'a pas échappé à cela.
11:00Marine Le Pen, après François Fillon,
11:03cette semaine estime que le fondamentalisme islamiste
11:05reste la première des menaces,
11:07niant le fait que la Russie en soit une,
11:09en tout cas soit la principale.
11:11Quel est l'état des lieux actuels
11:13sur ce point précis du fondamentalisme islamiste
11:16et de la menace, surtout, Laurent Mignèze ?
11:18Oui, l'état de la menace,
11:20on reste évidemment très concentré
11:22sur le terrorisme islamiste,
11:25évidemment, donc ça c'est une chose.
11:27Il y a le séparatisme aussi,
11:29qui est important, c'est-à-dire
11:31tous ceux qui prônent, qui prêchent
11:33le fait que la loi de Dieu
11:35puisse être supérieure aux lois de la République,
11:37et qui en déduisent un certain nombre
11:39d'illégalités,
11:41de non-respect des règles françaises,
11:43et puis il y a
11:45ce qu'on a appelé,
11:47ce qu'on appelle aussi
11:49ce que le ministre de l'Intérieur
11:51a appelé l'entrisme,
11:53c'est cette diffusion progressive
11:55dans la société française de cette idée
11:57qu'on pourrait aussi un jour appliquer la charia.
11:59C'est ce qu'il faut combattre,
12:01c'est un entrisme qui est moins visible,
12:03qui nous préoccupe et qui mobilise l'ensemble des services,
12:05et notamment des services de renseignement, mais pas que.
12:07Qui les mobilise au quotidien,
12:09tous les jours,
12:11la sphère médiatique n'en fait pas état
12:13tous les jours, mais vous,
12:15vous restez très concentré sur cette mission
12:17notamment qui est la sécurité des français,
12:19des franciliens, en l'espèce, du point de vue
12:21du danger, de la menace
12:23majeure que représente le terrorisme islamique.
12:25Comme l'ensemble des services
12:27de sécurité français,
12:29la préfecture de police a une direction
12:31du renseignement
12:33à la préfecture de police,
12:35et puis il y a l'ensemble des services de renseignement,
12:37par la direction générale de la sécurité intérieure,
12:39la direction générale de la sécurité extérieure,
12:41on reste très concentré sur l'ensemble
12:43de ce champ de menaces
12:45qui va finalement du terrorisme
12:47au séparatisme.
12:49On reste très attentif, et tout en ayant
12:51évidemment à l'esprit que ça
12:53ne concerne qu'une minorité
12:55de nos compatriotes et des musulmans
12:57qui vivent sur le territoire national.
12:59Évidemment.
13:01Préoccupation numéro 1 au quotidien pour les franciliens,
13:03les parisiens.
13:05C'est le terrorisme, évidemment.
13:07Ça reste le terrorisme, évidemment.
13:09Merci Laurent Mignèze.
13:11Merci d'avoir accepté l'invitation de Newsbox.
13:13J'en profite évidemment pour remercier l'ensemble des forces
13:15de sécurité intérieure qui étaient très mobilisées hier
13:17sur les manifs dont nous avons parlé
13:19et qui ont réussi à faire en sorte
13:21qu'il n'y ait pas de débordement
13:23et que tout le monde puisse exprimer son opinion
13:25notamment aujourd'hui.
13:27C'est la grandeur et la force des services
13:29du ministère de l'Intérieur et de la préfecture de police
13:31de faire en sorte que tout le monde puisse s'exprimer.
13:33On est dans un pays de liberté
13:35et il faut admettre que pour des causes aussi importantes
13:37que celles des droits des femmes,
13:39tout le monde puisse avoir le droit à la parole.