Il faut "un budget en urgence" : voici les ambitions du nouveau président de la CPME (Confédération des petites et moyennes entreprises), deuxième organisation patronale de France, Amir Reza-Tofighi.
Regardez L'invité de RTL avec Thomas Sotto du 24 janvier 2025.
Regardez L'invité de RTL avec Thomas Sotto du 24 janvier 2025.
Catégorie
🗞
NewsTranscription
00:00RTL Matin
00:04L'invité d'RTL Matin et ce matin, Thomas, vous recevez le tout nouveau président de la Confédération des Petites et Moyennes Entreprises, Amir Reza Tofighi.
00:14Bonjour, bienvenue et merci d'avoir réservé à RTL Matin votre toute première interview de président de la CPME, la Confédération des Petites et Moyennes Entreprises.
00:22Bon, visiblement le style Amir Reza Tofighi, ça va dépoter. En une heure, avez-vous dit, Trump et Musk prennent des décisions qu'on prendrait en un an, ajoutant que vous êtes prêt à dire des choses que les politiques n'ont pas envie d'entendre.
00:34Alors allons-y, qu'est-ce qu'ils n'ont pas envie d'entendre ?
00:36Bonjour Thomas et merci beaucoup pour l'invitation. Qu'est-ce qu'ils n'ont pas envie d'entendre ? Plein de choses, mais demandez-moi, posez-moi des questions et je vais vous répondre.
00:45Ah bah je vais vous en poser des questions. Votre prédécesseur François Asselin, qu'on salue d'ailleurs, il venait souvent nous voir, avait coutume de dire que les patrons de PME étaient des risque-tout enquiquinés par des risque-rien.
00:55C'est qui les risque-rien aujourd'hui ? Où sont les blocages aujourd'hui pour les PME ?
00:59Les blocages ils sont dans la norme, ils sont dans les contraintes qu'on met chaque jour. Vous parliez juste avant des Etats-Unis.
01:05Aujourd'hui, on voit bien qu'on a face à nous un pays qui va investir 500 milliards dans l'intelligence artificielle, qui est en train de libérer les énergies avec son propre style.
01:16Et nous qu'est-ce qu'on fait en Europe ? On met des contraintes, on met des règles. En France, on met à chaque fois de nouveaux blocages pour les entreprises, alors qu'on devrait leur laisser faire leur travail, alors qu'on devrait libérer les énergies.
01:27Vous faites partie de ceux qui pensent que le code du travail devrait tenir en une page ?
01:31Je fais partie de ceux qui pensent qu'aujourd'hui on doit faire confiance à l'entreprise et aux salariés pour définir ensemble les bonnes conditions pour la contractualisation,
01:40et ne pas penser qu'un code du travail de 8000 pages peut être la solution à une petite entreprise qui recrute un salarié dans son territoire.
01:49Pour vous, le modèle américain, le modèle Trump, c'est celui qu'il faudrait suivre aujourd'hui ? Le modèle Musk également ?
01:54Non, je n'ai pas dit ça. Ce que je dis c'est qu'il faut aujourd'hui que l'Europe, face à un continent qui investit, face à un pays qui investit massivement dans les nouvelles technologies,
02:05on doit nous aussi être prêts à investir dans l'avenir, et ne pas toujours être dans une logique de contraintes et de blocages sur les entreprises.
02:13Je rappelle et je précise que vous êtes vous-même patron. Vous avez grandi à Grigny, en banlieue parisienne.
02:19Comment faire pour réduire la fracture économique, l'espèce de séparatisme qui fait qu'il y a deux francs, celle qui avance et celle qui est laissée de côté, parfois abandonnée ?
02:27Comment on fait pour réunifier tout ça ?
02:29Je pense que le travail est la meilleure façon de réunifier tout ça. Aujourd'hui, comment on fait pour s'élever dans la société, à part le travail ?
02:37C'est justement le travail, l'entrepreneuriat, l'entreprise qui permettent aujourd'hui de réconcilier la cité de la ville, de réconcilier toutes les classes sociales.
02:47J'espère pouvoir être un exemple qui prouve que c'est à travers le travail, à travers l'entreprise, à travers l'effort, qu'on peut répondre à cette promesse républicaine.
02:55Vous avez trouvé beaucoup d'urgence sur le bureau en arrivant, on va y venir.
02:58Mais juste avant, on parlait tout à l'heure de Bruno Rotailleau, qui vient d'envoyer une circulaire au préfet pour leur demander de resserrer l'avis sur la régularisation des sans-papiers.
03:06La précédente, c'était celle qu'on appelait la circulaire Valse, qui datait de 2012, et qui permettait notamment la régularisation pour ceux qui travaillaient, notamment dans les métiers en tension.
03:15Est-ce que ça peut être un problème de durcir la situation pour les travailleurs sans-papiers, pour les PME aujourd'hui ? Est-ce que ça vous inquiète ?
03:22On a aujourd'hui des secteurs qui sont sous tension, et pour ces secteurs-là, aujourd'hui, bien évidemment, il y a besoin d'avoir une population étrangère, et ces secteurs-là sont, sauf à ma part, protégés par la circulaire.
03:33Après, sur le sujet plus global de la régularisation des sans-papiers, c'est pour moi pas un sujet sur lequel la CPME doit se positionner.
03:41D'accord. Les urgences, je les ai évoquées. La France se cherche désespérément un budget depuis plusieurs mois, alors que le Sénat a adopté hier le projet de loi de finances 2025.
03:50On comprend que chacun va devoir faire un effort. Amir Reza Tofighi, quelle est la part que peuvent encaisser les PME ?
03:57Moi, ce que je peux déjà vous dire aujourd'hui, c'est qu'au quatrième trimestre, on n'a jamais autant de défaillances d'entreprises.
04:02Combien ?
04:03On a 18 000 défaillances au quatrième trimestre, on est à 68 000 sur tout 2024.
04:07Par rapport à l'année précédente, c'est beaucoup plus ?
04:09Oui, par exemple, si on prend les PME de plus de 50 salariés, c'est plus que 30% d'augmentation. Et c'est beaucoup plus que le rattrapage de la période Covid.
04:16Donc, la question, elle est, est-ce qu'aujourd'hui, les entreprises, dans un contexte économique difficile, avec un taux de chômage qui risque de monter à 8% l'année prochaine,
04:25est-ce qu'on est prêt à augmenter encore les impôts et donc risquer d'avoir un effet récessif ?
04:29Ou alors, s'il faut plutôt investir sur les entreprises, pour justement relancer la croissance ?
04:33Juste sur le chômage, la semaine dernière, Michel Picon de l'U2P était l'invité d'Amandine Bégault, il parlait de 1500 emplois détruits par semaine dans les petites entreprises.
04:42Ça vous paraît un chiffre crédible ? On en est là aujourd'hui, une vague de chômage qui arrive ?
04:45En tout cas, on a 250 000 emplois qui sont menacés dans les entreprises dont je vous parlais, qui sont en défaillance.
04:51Donc oui, on est face à une situation, 2025 risque d'être très compliqué.
04:54Et si on accentue l'effet récessif ?
04:56Prenons un exemple, par exemple, sur le bâtiment.
04:58Aujourd'hui, ma prime rénov' est complètement bloquée, par l'effet qu'il n'y a pas de budget.
05:01Et donc c'est de l'activité qui n'a pas lieu, et donc des emplois qui disparaissent.
05:05Ça veut dire qu'aujourd'hui, il vaut mieux un mauvais budget que pas de budget du tout ?
05:09L'urgence, c'est d'avoir enfin un budget pour 2025 ?
05:11L'urgence, en effet, c'est d'avoir un budget.
05:13Maintenant, regardons aujourd'hui.
05:15On est en train d'avoir un budget, par exemple, sur la sécurité sociale, avec un déficit de 25 milliards.
05:2040% d'augmentation sur le budget de la sécurité sociale.
05:24Et apparemment, ça ne choque personne.
05:27Ah bah si, quand même !
05:29Il y a notamment une ministre, la ministre du Travail, qui a dit
05:31tiens, et si on travaillait 7 heures de plus gratuitement par an,
05:34ce qui est une façon habile de dire on va travailler une journée sans être payé,
05:37une journée de bus, parce que 7 heures, c'est quasiment une journée de travail,
05:39c'est une bonne idée, ça, ou pas, pour les PME ?
05:41Alors, le sujet des 7 heures de travail, c'est pour le financement de la dépendance.
05:46C'est un sujet, pour le coup, que je connais bien.
05:48C'est une branche de la Sécu.
05:49C'est un sujet que je connais bien, parce que mon activité principale, c'est de l'aide à domicile.
05:52En fait, ça fait des années.
05:54Depuis 10 ans que la filière du grand âge demande une grande loi d'orientation pour le financement de la dépendance.
06:00A chaque fois, ça est repoussé.
06:02Maintenant, sur un budget, d'un coup, on nous parle de ça.
06:04Bien évidemment que, si demain, il faut qu'il y ait un vrai débat public,
06:08un vrai débat de société sur comment on finance le grand âge,
06:10la deuxième journée de solidarité,
06:12ou d'autres mesures peuvent être évoquées.
06:14Mais là, sur le budget...
06:15Vous n'êtes pas contre par principe ?
06:17Dans un budget comme ça, au dernier moment,
06:19je pense que c'est compliqué
06:21d'embarquer la population
06:23en disant qu'il y a un vrai débat de société,
06:25en disant comment on finance demain le grand âge.
06:27Et dans ce débat, avec la société,
06:29ce sont des mesures qui peuvent bien évidemment,
06:31à un moment donné, être anticipées.
06:33Par contre, la question c'est, au final,
06:35est-ce que pour les entreprises, c'est un coût supplémentaire ou pas ?
06:37Amir Reza Tofighi,
06:39vous avez participé au conclave,
06:41qui est censé régler enfin le problème de la réforme des retraites.
06:43Est-ce que vous êtes, vous aussi,
06:45frappé par la rougeole ?
06:47Est-ce que vous avez des lignes rouges partout ?
06:49Vous dites ça on ne fait pas, ça on ne fera pas faire.
06:51Comment vous êtes par rapport à ça ?
06:53Si on arrive tous avec nos lignes rouges,
06:55en fait, c'est impossible de négocier.
06:57Donc on a des exigences, mais pas de lignes rouges.
06:59La CPME n'a pas de lignes rouges ?
07:01On a des exigences, mais pas de lignes rouges.
07:03Est-ce que ça veut dire que tout est sur la table ?
07:05Tout est bien évidemment sur la table.
07:07Si on ne met pas tout sur la table, à chaque fois, c'est compliqué de négocier.
07:09Y compris une hausse des cotisations patronales ?
07:11Nos exigences, c'est préserver la compétitivité des entreprises
07:13et ne pas aggraver le déficit public.
07:15Parce qu'aujourd'hui, c'est quand même immoral
07:17de faire payer les générations futures
07:19nos pensions de retraite actuelles.
07:21Parce que c'est une double punition.
07:23Un, ils devront rembourser la dette.
07:25Et ils hériteront de cette dette.
07:27Et deuxièmement, ils ne pourront pas bénéficier
07:29des investissements qu'on doit faire aujourd'hui.
07:31Des investissements pour notre société.
07:33Tout à l'heure, on parlait des 500 milliards de l'IA
07:35sur l'intelligence artificielle de Donald Trump.
07:37Et nous, en France, qu'est-ce qu'on fait ?
07:39On emprunte pour rembourser nos pensions de retraite.
07:41Donc, il y a un vrai sujet aujourd'hui
07:43sur où est-ce que doivent aller les investissements de la société.
07:45Mais pardon, je vous repose ma question.
07:47Est-ce qu'une éventuelle hausse des cotisations patronales
07:49serait acceptable en fonction de
07:51sa proportion ?
07:53Nos exigences, c'est de
07:55préserver la compétitivité
07:57des entreprises.
07:59Ça veut dire que pour moi,
08:01la négociation, elle se passe avec nos partenaires autour de la table.
08:03Elle ne se passe pas dans le grand public.
08:05Sinon, si on commence comme ça,
08:07et si chacun va dire, nous, on refuse toute discussion,
08:09qu'est-ce qui se passe à la fin ?
08:11On arrive, et en fait, les jeux sont déjà faits.
08:13Par contre, aujourd'hui,
08:15vous n'excluez pas
08:17une hausse des cotisations patronales.
08:19La compétitivité
08:21des entreprises, dans le contexte économique
08:23actuel, est cruciale.
08:25D'accord. J'ai l'impression d'être face à George Marchais.
08:27Mes questions, vous n'avez que vos réponses, mais en tout cas,
08:29on entend ce que vous ne dites pas.
08:31Vous regrettez que l'idée de taxer les retraités
08:33les plus aisés ait été abandonnée, ou pas,
08:35par rapport à ce que vous disiez sur les retraites, là ?
08:37Écoute, dans une société
08:39aujourd'hui, où
08:41on a moins d'actifs
08:43qui travaillent, plus de retraités,
08:45et on a un niveau de vie des retraités
08:47qui est plus élevé que les salariés,
08:49nous, on considère que ce n'est pas toujours aux salariés
08:51et aux entreprises de payer.
08:53Donc, si on prend, par exemple,
08:55les différentes mesures qui ont pu être évoquées,
08:57on considère que c'est des mesures
08:59qui peuvent être intéressantes
09:01dans la discussion budgétaire.
09:03Eh bien, merci beaucoup à vous, Amir Reza Taufiq,
09:05d'être venu ce matin sur RTL.
09:07Première interview à la radio, c'est fait.
09:09Mais le plus dur arrive, avec votre baptême de...