« Se retrouver seule c’est tellement dur ! »
Quand on s’élance dans la vie à deux, on n’imagine pas un seul instant que l’autre puisse disparaître. Et pourtant, c’est ce qu’il s’est passé pour Camille, devenue veuve à 26 ans.
Pour Lou, elle a accepté de revenir sur cette terrible épreuve et nous raconter comment elle a fait le deuil de son mari François mais aussi de la vie qu’elle avait projeté de vivre avec lui. 🕊🤍
Quand on s’élance dans la vie à deux, on n’imagine pas un seul instant que l’autre puisse disparaître. Et pourtant, c’est ce qu’il s’est passé pour Camille, devenue veuve à 26 ans.
Pour Lou, elle a accepté de revenir sur cette terrible épreuve et nous raconter comment elle a fait le deuil de son mari François mais aussi de la vie qu’elle avait projeté de vivre avec lui. 🕊🤍
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00:00Moi, je n'aurais jamais imaginé que j'aurais pu survivre à un truc comme ça.
00:02Si on me l'avait dit, j'aurais dit mais n'importe quoi.
00:04Bonjour Lou, je m'appelle Camille, j'ai été veuve à 26 ans
00:08et aujourd'hui, je viens vous raconter mon histoire.
00:10Ce lundi-là, on va faire du cake.
00:11François prépare gentiment mon aile
00:13et il y a eu, je pense, une grosse bourrasque devant.
00:17Il s'est fait embarquer et là, il s'est fracassé la tête et le côté
00:22contre un muret qui était le loin de la plage.
00:25Évidemment, je le rejoins en courant de toutes mes forces.
00:27Puis là, j'ai commencé à voir qu'il saignait un peu de la tête
00:29et là, je me suis dit, c'est très grave.
00:32Pendant trois semaines, il reste dans ce coma très profond.
00:35Je ne me projette pas.
00:36En fait, tant qu'il est vivant, on y croit.
00:39Donc au bout de trois semaines, ils ont essayé de diminuer les sédatifs
00:42et là, ils ont vu qu'il ne se passait rien.
00:45Ils nous ont dit, il ne va pas se réveiller.
00:49Ils lui ont mis une belle chemise, ils l'ont tout préparé.
00:51Nous, on était tous dehors, on attendait dehors.
00:53Ils ont enlevé tous les tuyaux, tous les trucs
00:55et puis là, on est rentré dans sa chambre
00:56et il était beau.
00:59Là, on le reconnaissait, il n'y avait plus de fil.
01:01C'était lui.
01:02Et juste, il dormait très profondément.
01:05Comme la chambre était trop petite pour accueillir tout le monde,
01:07les portes étaient ouvertes, il y avait du monde dans le couloir,
01:08donc il y avait tous les soignants.
01:10On a chanté, chanté et voilà, ils ont éteint la machine
01:13et ça a duré cinq minutes, le temps qu'on termine notre chant.
01:16Et là, il a vraiment expiré.
01:19Quand il expire, là, on sent qu'il ne reste que le corps.
01:23Et là, pour le coup, ce n'est plus le même.
01:25Il n'est plus là, en fait.
01:26Quand ce moment est arrivé, j'étais hyper paisible.
01:29Bien sûr que je me disais, mais mon Dieu,
01:30qu'est-ce que je vais faire de ma vie ?
01:32J'avais tout prévu avec lui.
01:34Et en même temps, je suis paisible, je suis paisible pour lui.
01:37Et ce que je ne peux pas m'empêcher de me dire à ce moment-là,
01:39lui, sa vie, à François, elle s'arrête ce soir.
01:43Mais moi, j'ai croisé sa vie, mais ce n'est pas ma vie.
01:47Même cette messe d'enterrement, c'était tellement beau.
01:50En fait, je crois que la beauté, ça console tellement
01:55que j'étais consolée pendant ces moments-là.
01:59Et c'est après, quand la vraie vie revient,
02:03que là, on se prend une claque et que là, ça fait mal.
02:06Je me souviendrai toute ma vie de ce dîner.
02:09Je vais dîner chez des super amis.
02:10Et là, il n'y a pas François.
02:12Et là, dans le trajet retour, je pleure, je pleure, je pleure,
02:16mais comme une madame.
02:17Et là, j'ai un déclic.
02:18Je me dis, je ne peux pas rester à Paris
02:20et je ne peux pas reprendre cette vie comme avant.
02:24Impossible.
02:26Je ne peux plus lui parler, je ne peux plus lui partager
02:28tout ce qu'on partageait.
02:30J'ai tout le temps envie de lui envoyer un texto.
02:33Non, en fait, n'importe quoi.
02:34Se retrouver seule, c'est tellement dur.
02:36Et ça, personne ne peut le remplacer.
02:38Il y a une injustice énorme, en fait.
02:40Pourquoi moi ?
02:42Pourquoi maintenant ?
02:43Pourquoi François ?
02:44Enfin, pourquoi ça nous arrive ?
02:45On a tout fait bien.
02:46Voilà, j'ai récriminé contre la vie, contre Dieu, contre tout.
02:50Et ça m'a fait du bien.
02:52Le matin, en fait, quand tu te réveilles toute seule dans ton lit,
02:54tu te dis, est-ce que je me lève ?
02:55Est-ce que je ne me lève pas ?
02:56Est-ce que je me lève et je vais bosser ?
02:58Est-ce que je reste couchée ?
03:01Et je dis non, en fait, à cette vie dont je ne veux pas,
03:03parce que François n'est plus là.
03:05Et ça, c'est vraiment un choix de tous les instants.
03:07Mais vraiment, il y a des matins où je ne suis pas sortie, je te l'avoue.
03:10Mais en fait, j'avais cet élan-là qui me disait,
03:14mais tu veux quoi, en fait ?
03:15Tu veux quoi de ta vie ?
03:17J'ai envie de vivre, en fait.
03:17J'ai envie d'être heureuse.
03:18Donc, je me lève, en fait, j'y vais.
03:20Quand on fait le chemin du deuil, on n'a pas envie que ça se termine.
03:23La souffrance, ça a un côté...
03:25On s'y fait.
03:26On a le droit de pleurer tout le temps.
03:28On a le droit de ne pas se lever le matin parce qu'on ne va pas bien.
03:30On a perdu son mari, quand même.
03:32On a des excuses, un peu pour tout.
03:35Et ça, on s'y attache.
03:36Moi, vraiment, j'ai senti à un moment
03:38qu'il allait falloir que je...
03:39que je m'arrache à ça.
03:41Et c'est pas facile.
03:43On a beau partager tout ça,
03:45je suis la seule à vivre la perte de mon mari.
03:47Les autres, ils avaient perdu un copain, un frère, un enfant.
03:49Mais moi, c'était mon mari.
03:51Et donc, il y avait un certain truc que je devais vivre toute seule.
03:54J'allais me mettre face à la mer.
03:56Et là, je sentais que les tissus de mon cœur se travaillaient, mais tout seul.
04:03En fait, ça, c'est un truc qu'on n'aime pas trop entendre
04:04quand on vient de perdre quelqu'un.
04:06Moi, la première, c'est le temps fait les choses.
04:09T'inquiète pas et tout.
04:10Mais en fait, c'est une vraie réalité.
04:12Et c'est qu'en le vivant qu'on se rend compte
04:15à quel point le temps répare.
04:16À un moment, je ne saurais pour le coup pas tellement raconter
04:20ce qui s'est passé parce que c'est très subtil.
04:22Mais à un moment, mon cœur s'est un peu remis à battre.
04:26Et je me suis dit, c'est trop bizarre.
04:28Et c'est là qu'on se dit, qu'est-ce que je fais ?
04:32Est-ce que je prends le risque à nouveau de souffrir,
04:36de perdre quelqu'un, de autant m'attacher ?
04:39Mais l'amour, c'est hyper risqué en fait.
04:40On a des ressources en nous qui sont dingues.
04:43Moi, je n'aurais jamais imaginé que j'aurais pu survivre
04:46à un truc comme ça.
04:46Si on me l'avait dit, j'aurais dit, mais n'importe quoi.
04:48En fait, on est tellement riches, on a tellement de choses en nous.
04:52Mais il faut les mobiliser, il faut bien s'entourer.
04:54Je dirais que le premier truc qui est énorme,
04:56c'est que je crois qu'il y a une vie après la mort.
04:58Et donc, je suis certaine que je vais retrouver François.
05:02Et je suis certaine qu'il n'est pas juste en train de se décomposer
05:06dans un cercueil.
05:08Je crois que c'est ça dans ma foi qui m'a portée,
05:09c'est que la vie sur Terre, c'est un instant.
05:13Et en fait, on est fait pour le ciel.
05:15Cet instant, il a été une demi-seconde pour François.
05:17Pour moi, ça sera une seconde.
05:18Mais au final, on se retrouvera là-haut.
05:20Et ça, heureusement que j'avais ça.
05:24Je crois que sinon, j'aurais sombré vraiment.
05:25En tout cas, oui, j'ai hâte de le retrouver.
05:29Moi, je n'ai pas du tout peur de la mort, par exemple.
05:32Tu as hâte ?
05:33Non, mais j'ai hâte.
05:34Non, je n'ai pas hâte de mourir.
05:35J'ai hâte de retrouver François.
05:37Non, mais en fait, je n'ai pas peur.
05:39Je me dis, en fait, quand je sais ce qui m'attend,
05:41moi, là-haut, je suis trop contente.