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  • 06/05/2025
Budget limité, demandes de soins accrues, engorgement des services d’urgences, crise de l’hôpital public... Les dysfonctionnements du système de santé alimentent les discriminations dans le parcours de soins des patients. C'est ce que révèle un rapport du Défenseur des droits "Prévenir les discriminations dans les parcours de soins: un enjeu d’égalité", publié ce mardi 6 mai.

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Transcription
00:00C'est vrai qu'on a des résultats assez efférents, ça montre qu'aussi on est un homme blanc,
00:03on aurait 50% de chances supplémentaires qu'une femme noire d'être considérée comme une urgence vitale
00:09quand on souffre d'une douleur thoracique aux urgences.
00:12C'est l'une des illustrations de ce rapport qui est très fourni, une soixantaine de pages,
00:16qui compile plus de 1500 témoignages de patients, de professionnels de santé
00:20et aussi l'état de la jurisprudence existante.
00:23Et ce rapport cite en effet cette étude qui remonte à 2023,
00:27qui a été menée dans plusieurs services d'urgence français et de trois autres pays européens,
00:31à savoir la Suisse, Monaco et la Belgique.
00:33En gros, on a soumis un même cas clinique d'un patient à des soignants.
00:37C'était un patient ou une patiente de 50 ans avec une douleur thoracique qui exprime de l'anxiété
00:42et qui a subi un épisode dépressif majeur deux ans avant.
00:46Et puis on a mis une photo à côté de ce patient.
00:48Et il en ressort en effet qu'un homme blanc a 50% de chances de plus qu'une femme noire
00:53d'être considérée comme une urgence vitale quand il se présente à un service d'urgence
00:57avec une douleur thoracique.
00:59La question de la discrimination des femmes, elle est très présente dans ce document
01:02avec des témoignages adressés, encore plus lorsqu'elles sont jeunes, je cite,
01:07d'origine étrangère ou perçue comme telle.
01:09Il y a un exemple aussi qui concerne les mères célibataires
01:11qui sont à la croisée de plusieurs discriminations,
01:15à la fois pour leur sexe et leur situation familiale,
01:17avec cet exemple d'une patiente qui consulte aux urgences après une overdose médicamenteuse
01:21parce qu'elle a pris plusieurs traitements pour plusieurs maladies chroniques.
01:25Elle est reçue par un médecin qui refuse de lui faire une prise de sang
01:28et qui lui dit, je cite,
01:29« L'hôpital n'est pas un hôtel pour mères célibataires épuisées ».
01:32Il y a aussi la mention d'un syndrome, syndrome méditerranéen,
01:36un préjugé raciste sans aucun fondement médical
01:38selon lequel les personnes d'origine maghrébine ou noire
01:42exagèreraient leurs symptômes ou leurs douleurs,
01:45avec des conséquences, Roselyne,
01:46puisque ça peut aller jusqu'à une non prise en compte des douleurs
01:50et un refus de prise en charge dans les cas les plus graves.
01:52Alors, Aurel, on est content d'avoir un urgentiste sur le plateau
01:54pour savoir comment ça se passe en coulisses.
01:56Non, non, c'est pas pour stigmatiser.
01:57De toute façon, là, il y a des chiffres, c'est été,
01:59c'est juste comment ça se passe ?
02:01On imagine qu'il y a des contrôles.
02:02Sur le rapport, je vais juste le nuancer sur un truc.
02:04Il y a énormément de témoignages.
02:06C'est-à-dire que la partie qui est réellement scientifique
02:09basée sur des statistiques, il y en a peu.
02:11C'est-à-dire que quand on lit,
02:12il y a énormément de citations de témoignages.
02:14Donc c'est quand même à nuancer
02:15puisqu'en fait, vous n'avez que la perception qu'a un patient.
02:18Ce qui est parfois, ça remet en question même notre mode de communication,
02:22mais c'est quand même à prendre avec des pincettes.
02:24Mais vous, de ce que vous voyez aux urgences ?
02:27Alors, de ce que je vois aux urgences,
02:28c'est important d'expliquer comment ça fonctionne
02:29quand vous arrivez aux urgences.
02:31Quand vous arrivez aux urgences, déjà, il va y avoir le motif.
02:33Le motif pour lequel vous venez.
02:34Il y a des motifs qu'on va considérer plus graves.
02:35On va reprendre la douleur thoracique.
02:37La douleur thoracique, par définition,
02:38vous allez avoir un électrocardiogramme à votre admission.
02:40C'est-à-dire qu'on va essayer de voir,
02:41puisque vous avez une douleur en regard du thorax,
02:43on se dit soit c'est une atteinte pulmonaire,
02:45soit c'est une atteinte cardiaque à éliminer rapidement,
02:47sans avoir autre information qu'une douleur thoracique.
02:49Donc, on va rapidement évaluer l'activité électrique du cœur
02:53pour voir s'il y a un événement aigu.
02:54En général, ce qu'on fait dans toutes les urgences,
02:56c'est que vous arrivez, l'infirmière d'accueil vous voit,
02:57ou l'infirmier d'accueil vous fait un électrocardiogramme,
02:59et puis le médecin senior, dans le cas présent,
03:01moi, je vais voir quasiment tout de suite l'électrocardiogramme
03:04pour regarder s'il y a vraiment une urgence immédiate.
03:06S'il n'y en a pas, on va vous mettre, entre guillemets,
03:08sur le côté, on va vous réévaluer après,
03:10et puis on va prendre vos paramètres vitaux,
03:12votre tension artérielle, votre fréquence cardiaque,
03:14votre saturation, et on va chercher une défaillance d'organes.
03:16Tout ça, c'est des paramètres objectifs.
03:18C'est des paramètres qui ont été listés.
03:21Donc, c'est important de rappeler qu'à aucun moment,
03:22dans ce genre de cas,
03:24le genre où l'origine ethnique est prise en compte,
03:28sur ces paramètres de tri initiaux.
03:30Mais est-ce qu'il y a des contrôles ?
03:32Sur ?
03:33Sur la façon dont les prises en charge sont faites,
03:35entre médecins, je ne sais pas,
03:37jamais vous n'avez été heurté, vous,
03:38par un comportement d'un collègue aux urgences ?
03:41Parce que ça existe.
03:42Pour être très sérieusement,
03:43en plus, je suis dans un hôpital où on a un hôpital
03:45qui est cosmopolite,
03:46donc on a un recrutement qui est différent.
03:48Moi, jamais.
03:49C'est-à-dire que réellement,
03:50les motifs sont traités de la même façon.
03:52On évalue des paramètres vitaux.
03:53En plus, en tant qu'urgentiste,
03:54c'est extrêmement objectif.
03:56Par contre, il est vrai,
03:58quand on parlait du syndrome méditerranéen,
04:00que parfois, ça peut biaiser
04:02le jugement de certains confrères.
04:05Mais c'est important de rappeler que,
04:06tout comme le deuil qui est une expérience
04:08et l'expérience de deuil,
04:10elle est différente en fonction des cultures,
04:12c'est aussi important de rappeler
04:13que la douleur, c'est une expérience vécue,
04:15que l'expression de la douleur va varier.
04:17Cependant, ça ne doit pas influencer
04:19notre prise en charge.
04:20Mais dire que le mode d'expression des patients
04:23est le même quel qu'il soit,
04:24c'est faux.
04:25C'est dur de dire ça, je sais,
04:27mais c'est faux.
04:27C'est-à-dire que c'est des gens
04:28qui n'ont pas vu de patients.
04:30Sachant que les préjugés liés au genre,
04:32ça remonte à l'antiquité,
04:33c'est le même noté dans le rapport.
04:34Sur la douleur des femmes.
04:36Est-ce que vous avez vraiment mal ?
04:37Est-ce que vous savez vraiment
04:38ce que c'est qu'un rhume ?
04:39Ça, par contre, en plus, justement,
04:41moi, j'aurais tendance à dire dans ma pratique
04:42que c'est plutôt les femmes
04:43qui se plaignent le moins.
04:45Donc, c'est justement, au contraire,
04:47là où il faut être le plus précautionneux.
04:49Par contre, la chose qui est importante à rappeler,
04:51et ça, c'est vrai,
04:52parce qu'il y a quand même des choses
04:52sur lesquelles on peut faire
04:53des progrès en médecine,
04:54c'est par exemple sur l'apprentissage.
04:55C'est vrai que, par exemple,
04:56les peaux noires,
04:57c'est des choses qu'on n'étudie pas.
04:58Sur la dermatologie,
04:59on n'étudie pas les peaux noires, par exemple.
05:01Le paramétrage de certains appareils,
05:03que ce soit pour mesurer la saturation,
05:05ça va être paramétré plutôt
05:07pour des peaux blanches.
05:08Le fait que, sur les planches d'anatomie,
05:10le référentiel, ça reste l'homme
05:12et pas la femme,
05:13alors que vous avez 50% de la population
05:14qui est représentée par des femmes,
05:15ça n'a pas de sens.
05:17Donc, c'est vrai qu'il y a
05:18une amélioration à faire.
05:19Oui, qu'est-ce qu'on fait ?
05:20C'est ça qui est intéressant,
05:20parce que dans ce rapport,
05:21il y a le constat, Margot,
05:22mais il y a aussi les solutions,
05:24la défenseur des droits
05:24qui préconisent des mesures urgentes.
05:26Déjà, le rapport, il dit
05:26qu'il faut mieux connaître
05:27de quoi on parle
05:28avec la nécessité
05:29d'avoir des études précises
05:31sur ce que sont ces discriminations.
05:33Il y a vraiment cette volonté
05:35de développer la statistique publique
05:36et les travaux de recherche
05:37pour mieux savoir ce qui se passe
05:39dans le service de santé.
05:41Mieux informer aussi les patients.
05:42Est-ce que vous savez, par exemple,
05:43ce que vous pouvez faire
05:44si vous êtes victime d'une discrimination ?
05:45Il y a très peu de gens
05:46qui savent qu'ils peuvent faire un recours
05:47auprès de l'ordre professionnel,
05:50auprès de l'assurance maladie.
05:51Ça représente à peu près
05:52224 plaintes en 2022.
05:55Il y a un recours aussi
05:56au défenseur des droits
05:57qui va atterrir dans ce rapport.
05:59Il y a plusieurs initiatives
06:00qui sont assez méconnues
06:01du grand public.
06:02Et puis, il y a aussi
06:03des initiatives locales
06:05qui sont saluées, je pense,
06:07au CHU de Montpellier
06:08qui lutte contre les inégalités
06:09avec un état des lieux,
06:11une mobilisation des soignants
06:13et des outils standardisés
06:14justement pour éviter
06:16les biais dans l'évaluation médicale.
06:18Donc, il y a des choses qui existent
06:19et qui méritent d'être répliquées.
06:21Et la communication, Aurel,
06:22que vous évoquiez à l'instant ?
06:23Les médecins,
06:24on ne vous comprend pas toujours.
06:25Mais vous avez raison,
06:26sauf que là,
06:27le problème qu'il y a,
06:28et c'est une réalité,
06:29d'ailleurs j'essaie de défendre ça
06:30tous les jours,
06:31c'est qu'on parle d'expérience,
06:33vous savez,
06:33alors que ça fait très mercantile
06:35de dire ça,
06:35mais on parle d'expérience utilisateur.
06:37D'ailleurs,
06:37quand on récupère les témoignages,
06:38ça revient à l'expérience utilisateur.
06:40Et finalement,
06:40le seul critère aux urgences
06:42qui est évalué
06:42et qui est pertinent,
06:43c'est le principal critère
06:44qu'on évalue,
06:44selon vous,
06:51Le temps d'attente,
06:52exactement.
06:52Alors que finalement,
06:53le temps d'attente,
06:54dedans,
06:54il n'y a pas la communication.
06:56Moi, vous savez,
06:56je vais vous donner un exemple tout bête,
06:57j'adore donner cet exemple-là
06:58parce que c'est bénin,
06:59mais une entorse,
07:00finalement une entorse,
07:01c'est très rapide à diagnostiquer
07:02quand c'est une entorse bénisse,
07:03très rapide à traiter,
07:04sauf que derrière,
07:05il faut expliquer aux patients
07:06pourquoi il faut porter
07:08une attelle
07:09et pourquoi il faut mettre son pied
07:11dans telle position,
07:12etc.
07:12Et c'est des choses
07:13où la communication,
07:14on n'a pas le temps.
07:15Et malheureusement,
07:15c'est quelque chose
07:15qu'on ne fait pas
07:16et on le voit,
07:17parfois le manque de communication
07:18aboutit à des désastres médicaux
07:20et finalement,
07:21même pour certaines personnes,
07:22à une errance thérapeutique
07:23et je considère,
07:24c'est vrai qu'on a aussi
07:25une part de responsabilité là-dedans.

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