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00:00qui aurait pu vous coûter la vie, il y a eu ces fractures.
00:04Vous dites que vous avez vieilli précocement, en 10 secondes,
00:08lors de cette chute, et même peut-être moins de 10 secondes encore.
00:11Oui, techniquement, oui.
00:13Je me suis réveillé après plusieurs semaines de coma
00:15dans un corps qui n'était plus celui que ma conscience avait quitté
00:19un jour d'été 2014.
00:23C'est la première fois depuis qu'on se rend compte comme ça
00:25que je vous parle de ça.
00:26Est-ce que je lisais cette interview dans La Croix
00:28où vous parliez de cette blessure, de votre visage,
00:31en exprimant le fait que le visage est le reflet de l'intériorité
00:33et le siège de l'identité ?
00:36Vous avez découvert sur votre visage, je vous cite,
00:40que vous deveniez un autre, en partie ?
00:43Oui, c'est horrible de se réveiller un jour avec une disgrâce de visage
00:47et d'apercevoir que vous allez côtoyer toujours un monstre qui est vous-même.
00:52Voilà, je deviens cubiste, vous vous êtes réveillé avec la gueule de Picasso.
00:55Alors, je ne dis pas, heureusement, je n'étais pas endormi avec celle d'Apollon,
00:59mais je me suis quand même réveillé avec celle de Picasso.
01:02Alors, c'est difficile, il faut faire avec.
01:04Et j'ai trouvé quand même un remède à tous ces malheurs,
01:10c'est de me jeter ensuite à corps perdu dans la contemplation très simple
01:14de la beauté, par la marche, par l'alpinisme, par l'escalade, par le bivouac,
01:21par toutes sortes d'aventures.
01:26Je me suis jeté à corps perdu dans l'action.
01:28Ça ne vous a pas arrêté ?
01:28C'était un choc intérieur, et au contraire, ça a décuplé peut-être même quelque chose ?
01:32Bien sûr, ça m'a incité à continuer encore le plus possible ce que je pouvais vivre, bien entendu.
01:39Et j'y ai ajouté l'oubli.
01:42Il y a un moment où tous les malheurs qui vous incombent,
01:45il faut à un moment les chasser, les oublier,
01:48parce que si on n'oublie pas, on clapote.
01:50Et si on clapote, on s'amertume, et si on s'amertume, on devient une méduse.
01:54C'est affreux.
01:54Alors c'est pour ça que le malade a tout intérêt à un moment
01:57à ne pas constituer son identité propre par son malheur.
02:02Et c'est pour ça que j'ai recommencé à courir les falaises, les forêts.