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Avec Christopher Dembik, Économiste et conseiller en stratégie d’investissement chez Pictet AM

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##C_EST_DANS_L_ACTU_5-2025-04-05##

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Transcription
00:00Tous les produits étrangers qui entrent aux Etats-Unis écopent désormais d'une surtaxe de 10%.
00:10Alors là, c'est le même tarif pour tout le monde.
00:13L'escalade de la guerre commerciale déclenchée par Donald Trump qui continue.
00:16Jusqu'où ira-t-elle et comment réagissent les marchés ?
00:20On en parle avec notre invité Christopher Dembik.
00:22Bonjour.
00:23Bonjour.
00:24Bienvenue sur Sud Radio, économiste et conseiller en stratégie d'investissement chez Pickett AM.
00:31Tous les produits qui entrent aux Etats-Unis déjà surtaxés de 10%.
00:35Est-ce qu'on peut percevoir un début de panique sur les marchés ou pas ?
00:39Alors oui, très clairement.
00:41On a eu jeudi et vendredi deux sessions de marché qui étaient extrêmement négatives
00:46avec des baisses pour vous donner un ordre de grandeur qu'on avait connues
00:49notamment lorsqu'on a eu le confinement mondial
00:51et que tout le monde était bien sûr surpris par le coronavirus.
00:54Donc ça vous montre l'ampleur quand même de l'inquiétude.
00:56Trump finalement n'a pas complètement pris au dépourvu les marchés
01:01puisqu'évidemment dans sa campagne il évoquait aussi Paris le douanier.
01:04Simplement lorsqu'on entre dans le détail, c'est bien plus mauvais que prévu
01:08et comme vous l'évoquiez juste précédemment,
01:10vous avez déjà eu des Etats qui ont mis en place des mesures de représailles,
01:13en l'occurrence la Chine.
01:14Donc il y a vraiment cette crainte de renouer avec une guerre commerciale assez brutale
01:19qui ne peut qu'à court terme en tout cas avoir des effets négatifs.
01:23On sait que la guerre commerciale c'est à minima inflationniste,
01:25ça veut dire un ralentissement de la croissance.
01:27Après peut-être le point qui est important,
01:29c'est qu'il faut aussi se garder,
01:31on est dans une période de panique et d'hystérie sur les marchés,
01:33il faut en revanche se garder de tomber dans certains écueils un peu faciles.
01:38Il n'y a pas de risque de récession à l'instant T,
01:40on n'est pas sur un risque d'emballement de l'inflation,
01:42donc il faut aussi garder raison.
01:44Pour une raison toute simple,
01:45c'est que pour l'instant l'Union européenne n'a pas encore décidé des mesures de rétorsion,
01:51ce qui signifie qu'on ne sait pas encore quels sont les produits américains
01:55qui vont nous coûter plus cher,
01:56parce qu'on va riposter en les taxant aussi.
01:58Complètement, vous avez deux aspects.
02:00Le premier, c'est que l'Union européenne se laisse le temps d'éventuellement négocier.
02:03Sur les tarifs qui ont été annoncés le 2 avril,
02:06l'Union européenne prévoit des mesures de représailles simplement à la fin du mois.
02:09Donc ça laisse concrètement quasiment un mois complet pour commencer à négocier si c'est le cas.
02:14Le deuxième point, c'est que l'Union européenne,
02:16systématiquement lorsqu'elle met en place des mesures de représailles,
02:19pense aux consommateurs européens.
02:21Concrètement, ça veut dire quoi ?
02:22Ça veut dire qu'elle va toujours mettre en place plutôt des représailles commerciales
02:26sur des produits où on va trouver des produits de substitution.
02:29Je vous donne un exemple très concret.
02:31Lorsqu'on avait eu le premier mandat de Trump,
02:33vous aviez eu en mesure de représailles sur le jus d'orange de Floride.
02:36Concrètement, ça n'a pas impacté le consommateur
02:39parce qu'on a finalement importé davantage de jus d'orange d'Espagne.
02:42Et ça veut dire aussi, si je vous écoute,
02:45que dès lors que Donald Trump a décidé de nous taxer, nous on taxera moins ?
02:50Nous on taxera effectivement moins parce que l'Union européenne,
02:53à conscience, ne veut pas déjà aller dans un bras de fer.
02:56Elle n'a pas la même approche radicale que l'administration de Trump, c'est très clair.
02:59Et elle a surtout conscience qu'à la toute fin, tout le monde y perd.
03:02Alors certes, vous pouvez mettre en place des mesures de représailles
03:04à l'égard de certains produits américains.
03:06Typiquement, je ne sais pas, les Gene Leavis ou encore les Harley-Davidson, c'est symbolique.
03:10Mais l'objectif, c'est aussi d'éviter que votre consommateur national,
03:14le consommateur français, ne soit vivement impacté dans un contexte
03:17où il faut être bien clair, la croissance en Europe est plutôt faible,
03:20vous n'avez pas de pouvoir d'achat énorme,
03:22donc il faut à tout prix préserver le consommateur français européen.
03:25Mais quand je vous écoute, ça veut dire quand même qu'on préfère négocier,
03:29on ne veut pas riposter trop fort pour ne pas brusquer qui que ce soit
03:32et pour ne pas aggraver l'inflation.
03:34Ça veut dire qu'en plus, on sait que notre croissance n'est pas terrible
03:37contrairement à celle des États-Unis.
03:39Ça veut dire qu'en gros, on va négocier en position de faiblesse.
03:42Oui, mais la réalité, c'est que l'administration de Trump a conscience
03:45de cette position de faiblesse, d'où le fait qu'ils mettent en place
03:48des tarifs douaniers qui sont objectivement très prohibitifs.
03:51Alors nous, les Européens, on est un peu plus préservés,
03:54mais vous avez des États en Asie qui font face à une représaille tarifaire
03:57de plus de 60-70 %, ce qui est juste impossible à gérer.
04:00Simplement, l'administration de Trump a parfaitement conscience
04:03que les autres États sont plus faibles que les États-Unis,
04:06parfois beaucoup plus, et qu'ils n'ont pas d'autre choix finalement
04:09qu'à un certain stade de négocier.
04:10Alors oui, il y aura des mesures symboliques de rétorsion
04:12qui seront mises en avant par les Européens,
04:14c'est le jeu politique, j'oserais dire, le jeu diplomatique.
04:17Mais la réalité, c'est que la Commission européenne qui travaille
04:19sur ces mesures-là, elle va être extrêmement attentive
04:22pour éviter que ça entraîne très durablement la baisse
04:25de la croissance en zone euro.
04:26On est sur une croissance autour de 1 %, c'est quand même très très faible.
04:29Et surtout, à part l'Allemagne, il n'y a quasiment pas de pouvoir d'achat
04:32au niveau européen.
04:33Donc cet objectif-là, c'est vraiment d'éviter une boucle infernale
04:37qui, vous pouvez riposter, mais à la toute fin,
04:39vous serez tout aussi victime que le pays que vous visez.
04:42Mais revenons maintenant sur la France.
04:44Le secteur des vins et spiritueux est très inquiet
04:48parce qu'il exportait beaucoup vers les États-Unis.
04:50L'industrie laitière également est inquiète.
04:54Ceux-là, comment on peut les aider ?
04:57Alors très clairement, c'est sûr que c'est des secteurs
04:59qui vont être longtemps impactés par l'épargne douanière
05:02puisque c'est des secteurs soit symboliques,
05:04soit du côté de la production laitière.
05:07Donald Trump a plutôt avantagé tout simplement
05:10les agriculteurs américains.
05:11Donc ça va être durable.
05:12Ça va être très dur de faire marche arrière sur cela.
05:14Ce qui veut dire que si on ne peut pas avoir
05:16des concessions américaines à ce niveau,
05:18il faudra à un certain stade envisager des mesures d'urgence.
05:20Donc concrètement, ça veut dire compenser les pertes éventuelles.
05:23Il faudra que la Commission européenne et les États membres,
05:25y compris la France, mesurent l'impact.
05:28Dans quelques mois, ce sera assez perceptible, je pense,
05:30sur les entreprises.
05:32Il faudra certainement plus miser quand même, malgré tout,
05:34sur le secteur agricole qui est déjà en difficulté.
05:37Donc il n'y a pas de surprise à cet égard.
05:39Mais il faut avoir conscience qu'on devra avoir
05:41des mesures d'urgence pour certains secteurs,
05:43des subventions qui peuvent être d'ailleurs durables.
05:46Puisque si les tarifs douanés, ce qui est probable,
05:48ne disparaissent pas du jour au lendemain,
05:49on parle certainement de plusieurs années d'aide.
05:51J'ai une autre question pour vous,
05:53parce que c'est une petite musique qui recommence à monter.
05:55C'est un débat explosif en France.
05:57On a de plus en plus de mal à exporter vers les États-Unis,
06:00qui était un gros marché,
06:01puisque c'est taxé, donc ça coûte plus cher, on vendra moins.
06:04Le patron du Medef a appelé à ce qu'on se donne la chance
06:08d'exporter dans d'autres régions du monde,
06:10et pourquoi pas en Amérique du Sud,
06:12où l'Union européenne avait négocié un accord de libre-échange
06:15avec les pays du Mercosur.
06:16Est-ce que la guerre commerciale lancée par Donald Trump
06:19va nous pousser, nous Français, à notre corps défendant,
06:22à accepter les accords de libre-échange avec le Mercosur,
06:25pour au moins arriver à écouler ce qu'on peut,
06:28en spiritueux et en lait, par exemple,
06:31du côté de l'Amérique latine ?
06:33Je comprends la position du patronat, qui est assez logique.
06:36Ensuite, ce qu'il faut bien comprendre,
06:37c'est que vous avez une opposition politique
06:39qui, à mon avis, ne va pas être levée du jour au lendemain.
06:41Les accords commerciaux de ce type-là, de libre-échange,
06:44il y a beaucoup d'effets d'annonce.
06:46Mais ensuite, il faut avoir conscience qu'il y a des négociations.
06:48Sur le Mercosur, c'était déjà depuis plusieurs dizaines d'années.
06:51Ça ne va pas changer, à mon avis, du jour au lendemain,
06:53et c'est illusoire de dire qu'on va pouvoir conquérir
06:56de nouvelles parts de marché, notamment en Amérique latine,
06:58ou éventuellement, par exemple, en Asie.
07:01Je pense qu'il faut être très réaliste.
07:02Aujourd'hui, les entreprises françaises doivent peut-être regarder,
07:05et d'ailleurs, c'est plutôt ce qu'elles font habituellement,
07:07sur les marchés européens.
07:09Donc là où, déjà, on a une capacité,
07:11on n'a pas de problème avec le taux de change, c'est l'euro,
07:14et on n'a pas de problème avec les barrières douanières.
07:16Vous avez un pays aujourd'hui pour une entreprise française,
07:18notamment plutôt une PME, on va dire,
07:20qui peut être intéressant, c'est l'Allemagne.
07:22Finalement, les PME françaises sont très peu présentes en Allemagne.
07:25Vous avez un marché de 89 millions de consommateurs
07:27où vous avez du pouvoir d'achat.
07:29Alors, certes, c'est des consommateurs exigeants,
07:31mais qui ont l'avantage d'être fidèles, c'est la qualité au rendez-vous.
07:34Très généralement, il faut bien rappeler que nos PME
07:36commercent surtout en France,
07:38ou un peu au niveau de l'Union européenne.
07:40Regardons du côté de l'Allemagne,
07:42c'est moins risqué, c'est plus réaliste.
07:44L'Amérique latine, c'est très bien,
07:46mais ça ne sera pas du jour au lendemain,
07:47donc c'est un processus de très long terme
07:49qui ne compensera pas les tarifs douaniers actuels.
07:51Merci beaucoup pour cet éclairage.
07:53Toujours passionnant, Christopher Dembik,
07:55économiste et conseiller en stratégie d'investissement
07:57chez Pickett AM.
07:59Mon petit doigt me dit qu'on sera amené à se reparler
08:01dans les semaines qui viennent, je pense.
08:03Très bien, bien entendu.

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