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00:00Europe 1 Soir Week-end, 19h21, Stéphanie Demureux.
00:05En compagnie de nos chroniqueurs de la deuxième heure, Philippe Guibert, Georges Fenech, rebonsoir messieurs.
00:11Bonsoir, rebonsoir.
00:12Alors je voulais qu'on revienne sur ce débat qui a en partie animé la semaine, la justice des mineurs.
00:18Le Sénat a adopté hier en première lecture une proposition de loi de Gabriel Attal pour durcir cette justice des mineurs.
00:24Avec tout d'abord Georges Fenech, ce sondage, 84% des français estiment que la justice des mineurs est inadaptée à la société actuelle.
00:32Etude Europe 1 Cnews et le JDD, vous en faites partie ?
00:36Ah oui, non seulement j'en fais partie mais je le dénonce depuis quelque temps, depuis longtemps même.
00:43En fait si vous voulez, on a toujours, s'agissant de la délinquance des mineurs, on la traite toujours avec le prisme de l'ordonnance de 45
00:51étant rappelé quand même que les mineurs de 45 ne sont plus tout à fait les mêmes que ceux de 2025.
00:59Alors certes, cette réforme, je le rappelle, c'était le primat de l'éducatif sur le répressif,
01:06ce que l'on peut comprendre et d'ailleurs adhérer à cette idée qu'il faut d'abord de l'éducatif.
01:12Sauf qu'aujourd'hui, on a affaire à une telle délinquance, une telle criminalité, d'une violence terrible
01:20qu'il faut rétablir les choses entre l'éducatif et réhabiliter la sanction des mineurs.
01:28C'est à mon sens un des plus grands défis de notre société aujourd'hui,
01:35c'est de faire reculer cette délinquance des mineurs qui passe par énormément de points d'entrée,
01:42l'éducation, les parents, l'école, la famille, tout ça.
01:45Mais il faut réhabiliter aussi la sanction, c'est ce qu'a fait le Sénat.
01:49Le Sénat a repris, malgré le détricotage en commission des lois,
01:54je n'ai pas bien compris pourquoi Francis Spiner s'est amusé à faire ça, pardon.
01:58Pour des raisons, je crois, d'anticonstitutionnalité, c'est ce qu'il traînait officiellement.
02:03Vous imaginez bien que ça avait été examiné par les deux ministères de la Justice et de l'Intérieur
02:08et je ne vois pas en quoi ce serait inconstitutionnel de faire de la comparution immédiate
02:12pour les mineurs de 15-16 ans, pour des affaires qui en valent la peine,
02:15et puis d'inverser la logique sur l'excuse de minorité de 16-18 ans,
02:21c'est-à-dire qu'on l'écarte, sauf si le juge veut l'appliquer,
02:26mais à ce moment-là il faut qu'il la motive.
02:28Donc ça me paraît, et les courtes peines aussi,
02:32ça me paraît aller dans le bon sens.
02:35C'est un petit pas, ça ne va pas tout régler ça.
02:39Philippe Guybert, Georges vient de rappeler un des dispositifs de cette loi,
02:44est-ce que ça va dans le bon sens pour vous aussi ?
02:46Oui, mais il serait temps, parce que je suis d'accord avec Georges,
02:50il faut réhabiliter la sanction et réadapter notre législation pénale à la réalité de la violence,
02:56notamment le fait d'hiver, ou le fait de société,
03:00qu'on commente avec ces deux jeunes de 13-14 ans,
03:05déjà connus les services de police,
03:07qui sont à deux doigts d'étrangler une professeure de sport.
03:11Je ne sais pas si vous imaginez.
03:13Donc évidemment qu'il faut réhabiliter la sanction,
03:17et qu'elle soit efficiente et réelle,
03:20et donc il faut changer, il faut faire évoluer notre législation pénale.
03:25C'est une certitude, pour moi il n'y a pas de doute là-dessus,
03:28donc ça va dans le bon sens.
03:29Mais je pense que ça ne suffira pas,
03:32vous savez on utilise beaucoup le terme de décivilisation,
03:35et donc on est sur un problème de civilisation,
03:38c'est-à-dire qu'à l'évidence, quand on dit perte de l'autorité,
03:41c'est qu'on ne s'est pu éduquer, transmettre aux jeunes,
03:46à la jeunesse, à une partie de la jeunesse,
03:48mais à une bonne partie, parce que ça touche un peu tous les milieux sociaux,
03:51un peu tous les territoires,
03:53l'éducation, la transmission, le respect minimum des autorités, des adultes, des professeurs.
04:00Mais est-ce que tout le monde n'est pas d'accord ?
04:02Georges Fenech, une ancienne magistrate,
04:04enfin même d'ailleurs, non, une toujours,
04:06vous l'ancienne magistrate,
04:07elle est présidente du tribunal pour enfants de Bobigny,
04:09vice-présidente de l'association française des magistrats de la jeunesse et de la famille,
04:13oui oui, mais quand même,
04:14elle, elle dit que cette réforme n'apporte aucune solution,
04:17et qu'il ne faut pas tout demander à la justice.
04:20C'est cette idéologie que je combats depuis toujours,
04:22qui est à l'origine de tant de mots cités,
04:25c'est l'idéologie du syndicat de la magistrature.
04:27Mais enfin, elle est présidente du tribunal pour enfants de Bobigny,
04:29donc elle n'a pas le déposte.
04:31Oui, moi j'ai très bien connu son prédécesseur,
04:32M. Rosenweg, qui était sur la même ligne,
04:34et Bobigny, ça a toujours été cette ligne-là,
04:36on le sait très bien, on ne veut pas punir les mineurs, voyez-vous.
04:39Il manque une mesure, en tout cas,
04:41qui me paraît essentielle dans ce que vient de faire le Sénat,
04:44M. Attal,
04:45c'est de revenir sur cette erreur monumentale
04:48qui a été faite en 2021,
04:50c'est-à-dire d'inventer la césure du procès pénal.
04:56Qu'est-ce que c'est pour nos auditeurs ?
04:58On a inventé, devant le tribunal pour enfants,
04:59la césure du procès pénal.
05:01Donc, il y a, pour un même mineur,
05:03il va y avoir deux audiences,
05:05pour le prix du prix.
05:06Donc, première audience,
05:08on examine la culpabilité.
05:11Si on le déclare coupable,
05:13on renvoie à une seconde audience,
05:15à six, neuf fois, voire plus.
05:17C'est l'éternel problème de l'industrie.
05:19Mais non, ça a été introduit en 2021,
05:20ça n'existait pas avant.
05:22Donc ça, c'est sorti d'imagination, Mme Belloubet,
05:24et mise en oeuvre par M. Dupond-Moretti.
05:26Il faut prendre tout son temps,
05:28voire évoluer le mineur,
05:29avant de prononcer une sanction.
05:30Ça n'a pas de sens.
05:32Un mineur a besoin d'une sanction
05:33proche de la commission des faits.
05:35Philippe Guibert.
05:36Mais je reviens, je ne suis pas d'accord
05:37avec la juge de Bobigny,
05:40parce qu'il faut réhabiter la sanction.
05:43En revanche, là où elle a raison,
05:44c'est qu'on ne peut pas uniquement
05:46demander à la justice pénale
05:47de résoudre le problème.
05:48Il va falloir qu'on réfléchisse bien,
05:51et c'est un problème urgent.
05:54Pourquoi de cette violence chez les jeunes ?
05:57Alors, il y a des problèmes
05:58de responsabilité parentale.
06:00Ce n'est quand même pas tout à fait nouveau.
06:02On se parlait des réseaux sociaux.
06:05Oui, mais les réseaux sociaux,
06:07le problème des écrans, de manière générale.
06:10Enfin, on a construit, on laisse.
06:12Moi, je vis avec des enfants
06:15qui sont 10 ans ou 15 ans.
06:17On a laissé s'instaurer un système
06:21où, finalement,
06:22la principale occupation en dehors de l'école
06:24de nos gamins d'aujourd'hui,
06:26c'est d'être sur des écrans.
06:28Et je peux vous assurer,
06:29tous les psychologues le disent.
06:30Mais il y a toujours un côté moralisateur à ça.
06:32Si vous les avez à côté de vous,
06:34comment vous faites ?
06:36Je les ai à côté de moi, chère Stéphanie.
06:38Vous faites comment ?
06:39Je suis quand même frappé
06:42par la déculturation que ça produit.
06:44Excusez-moi.
06:45On est bien d'accord.
06:47Ça produit des effets désastreux.
06:49Ça produit une intolérance totale à la frustration.
06:52C'est-à-dire que la notion d'effort...
06:55On a construit une machine
06:57où la notion d'effort est devenue
06:59complètement répulsive pour des gamins.
07:02En même temps, la lecture des livres
07:04est devenue complètement répulsive.
07:06Et donc, je termine juste d'un mot.
07:08Bien sûr, oui, la justice pénale.
07:11Mais on ne résoudra pas le problème
07:13qu'avec la justice pénale,
07:15même si ça en fait partie.
07:16Et donc, il faut qu'on se dise
07:19est-ce qu'on est capable...
07:20Moi, j'ai une proposition.
07:21Est-ce qu'on est capable de réguler
07:23de façon un peu autoritaire,
07:24puisqu'on n'a pas le choix,
07:26l'usage d'Internet et des écrans ?
07:29C'est ça la solution.
07:32Mais, j'ai toujours la principale cause,
07:35j'en démore pas là-dessus,
07:37c'est le sentiment, voire même l'impunité.
07:40Quand le gamin de 13 ans vient devant le tribunal
07:43pour un vol d'autoradio,
07:44le tribunal lui dit
07:45bon, c'est la première fois,
07:47c'est une manifestation.
07:48Oui, alors ?
07:49Ben oui, je rentre chez moi.
07:50Oui, il revient, il a volé une voiture,
07:52ou un scooter,
07:53le tribunal lui dit
07:54en fait, t'avais prévenu.
07:55Non, plaisant plus.
07:56Donc, on te condamne à une remise à parents.
07:58Bon, ah bon, qu'est-ce que je fais ?
07:59Ben, tu rentres chez toi.
08:00Et quand il revient la dixième fois,
08:02on lui dit, ben là,
08:03franchement, on t'exagère,
08:04t'as jamais tenu compte de nos avertissements.
08:06Cette fois-ci, on te condamne à,
08:08attention,
08:09six mois d'emprisonnement avec sursis,
08:12et il rentre chez lui, etc.
08:13Il n'aura jamais eu le sentiment
08:15d'avoir fait une seule journée de sanction.
08:17Alors, monsieur, il y a quelque chose
08:18dont on n'a pas encore parlé.
08:19Pardonnez-moi, Philippe Guybert,
08:20c'est l'extension de responsabilité des parents
08:22pour les dégâts causés par l'enfant.
08:24Ça ne sert à rien.
08:25Ils n'ont pas d'argent.
08:26Oui, justement.
08:27Ils sont insolvables.
08:28Je voudrais faire réagir,
08:30écoutez, en tout cas,
08:31Alexandre Brugère,
08:32le préfet des Hauts-de-Seine,
08:33qui pose la question
08:34de la responsabilité parentale,
08:35justement,
08:36après cette agression
08:37de cette professeure à Fontenay-aux-Roses.
08:39Mais je veux poser une question.
08:41C'est la question de la responsabilité parentale.
08:43Parce que quand on a 13 ans,
08:44quand on a 14 ans,
08:45qu'on part à la dérive,
08:47le premier qui doit vous rattraper,
08:48les premiers qui doivent vous rattraper,
08:50ce sont vos parents.
08:51Et la responsabilité parentale,
08:53dans ce cas très précis,
08:55nous parlons de jeunes de 13 et 14 ans,
08:57doit être posée impérativement.
08:59Oui.
09:00Alors, Philippe Guybert,
09:01qu'est-ce qu'on fait de ces familles ?
09:02Parce que la plupart, vous le savez très bien,
09:03ce sont des familles monoparentales,
09:05souvent les mères, évidemment.
09:06Pas uniquement, mais oui, souvent.
09:08C'est vrai qu'on l'a vu lors des émeutes.
09:10L'absence des pères est une catastrophe.
09:11Comment on fait ?
09:12On les punit alors qu'elles travaillent ?
09:14Je suis partagé sur cette solution.
09:17Je trouve qu'il faut regarder au cas par cas
09:19et que ça ne doit pas être une mesure automatique.
09:21Parce que de sanctionner une mère de famille
09:23qui a cinq enfants,
09:25qui n'arrive pas tout à fait à s'en sortir
09:27et qui en plus a parfois des problèmes financiers,
09:29je ne suis pas sûr du tout que ça soit la bonne solution.
09:32Donc je préférerais, dans certains cas,
09:35il doit y avoir des sanctions,
09:36mais ça existe déjà,
09:37dans le code pénal,
09:38c'est rarement appliqué.
09:41Mais je préférerais qu'on mette en place
09:43des accompagnements pour les parents
09:45et on connaît les situations familiales difficiles,
09:47plutôt que de se dire qu'on va taper sur les parents.
09:50Dans certains cas, oui.
09:51Dans d'autres cas, non.
09:52Cette proposition de loi de M. Attal
09:55était consécutive aux émeutes de l'été 2023.
09:58Nous sommes d'accord.
09:59Il avait dit à la tribune,
10:00tu casses, tu payes et tu répares, etc.
10:03Vous savez combien ça a coûté,
10:04les émeutes de 2023 ?
10:05Ça a coûté plus d'un milliard.
10:07Vous croyez que les parents ont remboursé
10:09les écoles qui ont brûlé ?
10:11Ils ont été incapables de rembourser un milliard.
10:13C'est ce qu'on nous dit.
10:14Les parents vont payer.
10:15On nous a dit que les parents vont payer.
10:17Georges Fenech, vous le magistrat,
10:19vous qui êtes magistrat,
10:21vous connaissez la loi.
10:22Pourquoi on ne les met pas au travail ?
10:23Pourquoi on ne leur dit pas de reconstruire ?
10:25Moi, je suis alsacienne, par exemple.
10:27Non, mais vous riez.
10:28Il y a des élus alsaciens,
10:30le gamin saccage le stade,
10:33il repeint, quoi.
10:34Non, mais alors, c'est quoi ?
10:35Ça vous paraît naïf ?
10:36Vous avez pas l'intérêt d'en faire un autre.
10:38C'est le bon sens.
10:39Mais ça ne se fait pas.
10:40Ça ne se pratique pas.
10:41Pourquoi pas ?
10:44Gros silence de Georges Fenech.
10:45Mais le gros silence,
10:46c'est parce qu'on ne peut pas obliger quelqu'un
10:48à faire des travaux.
10:49Si, on peut l'obliger.
10:50Comment fais-tu pour l'obliger ?
10:52Si le juge le décide.
10:53Ah oui, et s'il ne veut pas ?
10:54Le juge ?
10:55Non, le gamin.
10:56Bon, messieurs, vous restez avec nous.
11:00On se retrouve dans quelques instants sur Europe 1.
11:02On vous répondra à cette question, j'espère.

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