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L'actrice de 91 ans, Françoise Fabian révèle l'origine de sa mèche blanche, après avoir accompagné son père dans ses derniers instants sur le plateau de Quelle époque sur France 2. Elle est apparue le lendemain de la mort de mon père…” avait, non sans émotion, révélé la vedette de Ma nuit chez Maud, avant d’assurer qu’elle avait longtemps peiné à l’assumer.

“Je l'ai teinte pendant des années, et puis un beau jour, comme j'avais mis une perruque blanche pour un rôle, je me suis dit : ‘Oh bah ma mèche blanche, je la laisse.’ Et puis voilà, je l'ai laissée” , a-t-elle expliqué. Quelques cheveux blanchis qui lui permettent aussi de ne pas oublier son père, ni son histoire. Il était en effet paralysé et ne pouvait bouger que ses mains. Par des signes, il lui a fait comprendre qu’il voulait mourir.

«Moi, ma mèche blanche, c'est l'euthanasie. J'ai euthanasié mon père et le lendemain, j'avais une mèche comme ça. J'ai dit aux infirmières: ‘Je vais m'occuper de lui.’ Et je ne lui ai plus donné de médicaments. On lui en donnait pour supporter les médicaments qui le faisaient durer. Quelques jours plus tard, mon père s’éteignait. Il a su ce que j'avais fait. Il m'a prise dans ses bras, il a fermé ses yeux, il m'a embrassée, et il est mort."

Depuis, Françoise Fabian milite pour l’autorisation de l’euthanasie active, toujours interdite en France.

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Transcription
00:00Vous répondez rapidement aux questions sur votre vie.
00:04Vous êtes né à Alger, donc du temps où l'Algérie était française,
00:07d'une mère polonaise et d'un père catalan.
00:09Qu'avez-vous d'oriental en vous ?
00:13Tout.
00:16Est-ce que c'est vrai que votre mère vous donnait des compas
00:19pour piquer les hommes qui venaient vous embrasser,
00:22soit dans les tramways, qui se frottaient à vos goûts,
00:25soit même dans votre famille, vous racontez votre grand-oncle
00:27qui a essayé de vous embrasser.
00:28Parce que la semaine dernière, on avait Chantal Goya,
00:31dont la mère donnait des petites aiguilles pour qu'elle pique les hommes.
00:35Vous, c'était des compas.
00:36Oui, parce que j'avais des jupes un peu souillées dans l'autobus,
00:41où on était comme ça, avec les mains en l'air.
00:44Évidemment, il y avait pas mal de gens qui frottaient les jeunes filles.
00:48Et quand je rentrais...
00:50C'est pas très intéressant.
00:52Si, mais si !
00:54Tu ne vois pas à quel point tout le monde t'écoute.
00:57Alors, je rentrais, ma mère disait
00:59« Oh les salauds, les salauds, enlève ta jupe ! »
01:01J'avais pas du tout de quoi il s'agissait.
01:03Elle lavait les jupes, etc.
01:05Elle me disait « La prochaine fois, tu gardes le compas dans ta main.
01:08Dès que tu sens un frôlement, bang ! »
01:12Et vous l'avez fait ?
01:13Oui.
01:14Vous l'avez fait ?
01:18C'était pas mal comme manière.
01:20Comme manière de se défendre.
01:22Le connard... Pardon, Madame, quelle heure est-il ?
01:28C'est vrai qu'un jour, un de vos professeurs de théâtre vous a balancé.
01:33Il y a un truc ennuyeux avec toi, Françoise.
01:35Tu as une voix musicale légère, tes yeux sont clairs, tu es belle.
01:38Mais tu as un physique plutôt grec-latin.
01:41Tu aurais dû avoir les yeux noirs avec la voix de Greco.
01:45Ça va être très difficile pour toi de faire carrière.
01:47Oui.
01:48Quel est l'imbécile qui m'a dit ça ?
01:50Je me souviens pas.
01:51Bah oui, d'autant que vous avez gagné le premier prix du conservatoire.
01:54Vous l'avez un peu... Voilà.
01:56Quant à la mèche blanche, est-ce que c'est vrai qu'elle vous est poussée à l'âge de 30 ans
02:01le lendemain de la mort de votre père ?
02:04Oui.
02:05Mon père est tombé malade le jour où je devais avoir un prix à Taormina,
02:10avec Ventura.
02:15Et on me dit que mon père est hospitalisé.
02:19Donc j'ai pris un bateau, je suis allée à Gênes.
02:22J'étais avec mon mari Bosufi.
02:25On est allés en voiture jusqu'à Nice.
02:27Il était là.
02:28Je me suis installée avec lui dans la chambre.
02:30Et ça a duré.
02:32J'ai apporté des disques, des choses comme ça.
02:34Je soignais.
02:36Et il était totalement paralysé.
02:39Sauf les bras et le cerveau.
02:42Tout le reste est mort.
02:45Et il me suppliait de lui donner quelque chose.
02:47Et en fait, ma mèche est arrivée le jour où mon père est mort
02:52parce que je l'ai aidée à mourir.
02:56Vous avez aidé votre père à mourir ?
02:57Oui.
03:00Alors je l'ai teinte pendant très très longtemps.
03:03Et puis un beau jour, j'étais malade,
03:05alors je n'allais pas chez le coiffeur.
03:07Elle est restée et je l'ai gardée.
03:10Elle est arrivée le jour de la mort de votre père ?
03:12Oui.
03:13Vous y voyez un signe ?
03:15Le choc, le choc.
03:17Je ne sais pas.
03:18Tout d'un coup, j'ai eu une mèche blanche.
03:21Je l'ai teinte, évidemment,
03:22parce que c'était juste au moment de la bonne année.
03:25C'était un moment où j'ai fait beaucoup de cinéma,
03:28beaucoup de théâtre.
03:29Évidemment, je l'ai teinte.
03:31Et un beau jour, je me suis dit
03:32pourquoi je vais teindre cette mèche ?
03:35Je la laisse.
03:36Et comme je milite beaucoup pour l'euthanasie choisie...
03:38Mais c'est ça, c'est-à-dire que...
03:40C'est ce que j'allais vous demander.
03:42Est-ce que je peux vous demander
03:44pourquoi est-ce que vous militez aujourd'hui pour l'euthanasie ?
03:47Parce que j'ai aidé mon père à mourir.
03:50Il me l'a demandé.
03:51Je l'ai fait.
03:53Et j'étais très, très contente de ça.
03:55Il m'a remercié.
03:56Il m'a embrassé.
03:57Parce qu'il s'est senti mourir.
03:59Il était...
04:00J'ai supprimé les médicaments.
04:02En trois jours, il était mort.
04:03Bon.
04:04Terminé.
04:06Il n'avait que l'intelligence
04:08et les mains qui étaient vivantes.
04:10Et vous aviez 30 ans à peine
04:11et c'est vous qui avez géré ça.
04:12Oui.
04:13Ma mèche est devenue blanche
04:15et puis je l'ai teinte pendant des années.
04:17Et puis un beau jour, je me suis dit
04:18non, je vais la garder.
04:21C'est ma façon de militer.
04:24Et c'est ta façon d'avoir ton père à côté de toi.
04:30Non mais c'est vrai que sur ce sujet,
04:32on sent que c'est extrêmement délicat.
04:34C'est un sujet...
04:35C'est très délicat.
04:36Le gouvernement avance, il recule.
04:38Il avance, il recule.
04:39C'est très difficile.
04:40Enfin, on peut prendre la décision seul.
04:42On peut prendre la décision seul.
04:44Mais qu'on soit obligé d'aller dans des pays
04:47limite off pour aller.
04:49Je trouve ça...
04:50Il y a des gens qui n'ont pas les moyens d'aller en Suisse.
04:52Je cautionne.
04:53Pour ça.
04:54Vous en pensez quoi, Pierre ?
04:55J'en pense que je ferai comme ça si ça ne va pas.
04:57Absolument.
04:58Si ça se dégrade à un point...
04:59Oui.
05:00Il y a dans ma famille,
05:01enfin mon père en particulier,
05:02qui est mort.
05:03Ils n'aimaient rien.
05:04Et je me suis juré
05:05que je ne me laisserai pas aller jusque-là.
05:07Moi aussi.
05:08Allez savoir, peut-être que ma volonté
05:09ne tiendra pas le coup en face de la mort.
05:11Mais si je sens que c'est comme ça,
05:13je ferai très exactement cette chose-là.
05:14Moi aussi.
05:15Mais on peut ne pas le vouloir.
05:17On n'oblige personne.
05:18Je ne demanderai l'autorisation à personne.

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