Découvrez le documentaire de L'Equipe Inside consacré à Emilien Jacquelin, l'homme derrière le biathlète.
Catégorie
🥇
SportTranscription
00:00Printemps 2024, Emilien Jacquelin a lâché sa carabine et ses montagnes
00:06pour accrocher ses clichés dans une galerie parisienne.
00:10Des photos qui racontent les deux ans de spleen d'un athlète
00:13qui n'arrive plus à s'exprimer par le sport et se réfugie derrière son appareil.
00:18Je trouve que dans chacune de ces photos, il y a pas mal soit de solitude
00:23ou de manque de liberté, de tristesse qui peut ressortir.
00:27Donc c'est des émotions qui sont certes négatives,
00:29mais c'est ce que je ressentais à ce moment-là.
00:31Et comme je le dis souvent, dans le sport, je n'arrivais plus forcément à m'exprimer
00:34et je le faisais au travers de la photo.
00:36Et à un moment donné, durant la saison, je prenais plus souvent mon appareil photo
00:40que j'étais concentré sur les courses.
00:42Et par exemple, cette photo de Tarier,
00:44elle est prise même pas quatre minutes après l'arrivée d'un sprint.
00:48Et l'objectif à ce moment-là, c'était vraiment de montrer un peu l'envers du décor,
00:51c'est-à-dire qu'on voit souvent des athlètes,
00:54leur performance et une feuille de résultat,
00:56mais on n'imagine pas la déception
00:58et à quel point l'athlète peut être sensible après une course
01:01parce qu'on s'entraîne pendant sept, huit mois,
01:03on y met beaucoup d'énergie, des sacrifices.
01:05Et quand ça ne paye pas, c'est beaucoup de remise en question.
01:07L'affiche de l'exposition, une photo qu'il a prise,
01:10mais dont il pourrait très bien être le sujet.
01:13Moi, je la lis comme une personne en pleine tempête,
01:16en train de gravir sa propre montagne.
01:19Et c'était un peu la tempête dans laquelle j'étais l'an dernier.
01:22Essayer de me recentrer sur moi-même
01:24avant de continuer à gravir ma propre montagne.
01:27Et c'était vraiment ça, l'idée de cette photo
01:31et puis aussi l'idée de l'exposition.
01:33La photographie a été une thérapie, on peut dire, pour moi.
01:36Et ça m'était important aussi de le partager
01:40pour aussi clôturer un peu cette mauvaise passe
01:43où vraiment je sens aujourd'hui que tout ça est derrière moi
01:46et la photographie, maintenant, c'est une passion
01:48sans être un exutoire.
01:50Dans le gymnase de Prémanon,
01:52l'exutoire est plus bruyant.
01:56Allez, c'est bien ça ! Allez, allez, allez !
01:58Objectif, mesurer sa VO2 max à condition
02:02de bien vouloir aller jusqu'au bout du bout de l'effort.
02:05C'est un exercice où il faut vraiment aller au plus profond de soi-même,
02:08surtout sur les dernières secondes de l'effort.
02:10Et ce n'est pas quelque chose qui me caractérise de base,
02:14mais ça peut m'aider aussi pour l'hiver
02:17à essayer de repousser mes limites.
02:19Le tapis va s'accélérer toutes les minutes.
02:21Et là, on ne s'arrête plus.
02:23Allez !
02:24Allez, Mignard, tu continues !
02:26Malheureusement, pas encore !
02:28Allez, Mignard, on se donne, là !
02:30Là, il est presque à la fin.
02:32Là, c'est dans la tête.
02:34Allez, Mignard !
02:36Il a bien fait mieux qu'au printemps.
02:39Allez, on remplit, là !
02:41C'est dans la tête, là ! Allez, allez !
02:51Super !
02:52Super test !
03:02C'est dur, mais il ne faut rien en faire mal.
03:05Même si ce soit 5 secondes, je n'y arrive pas.
03:09J'ai vu que tu regardais le moniteur et que tu t'es dit
03:11« Vas-y, à la fin du palier, j'arrête, ça me saoule. »
03:13J'ai regardé le temps et je me suis dit « Ah, c'est bon. »
03:1534 minutes de test, ça va.
03:18En stage, il valide des paliers physiques
03:21et retrouve même, petit à petit sur le pas de tir,
03:24l'efficacité perdue de son tir de bout.
03:37Je pense que ce sont des choses qui ne se ressentent pas de l'extérieur.
03:40C'est ce petit manque de lucidité calme.
03:43Le 3, je l'engage
03:45parce que j'ai cette appréhension du pied gauche, de machin.
03:49Au lieu de l'acceptation, c'est pas grave, ça peut arriver.
03:51Je vais me calmer et je vais bien viser et bloquer, tu vois.
03:54Et tout le reste, du coup...
03:55Merci, mon vieux.
03:56Amen.
03:57Tu vois, ce que tu viens de dire là, mais putain,
03:59tu te le gardes au frais pour la saison.
04:03Tu me le répéteras parce que demain, je vais oublier.
04:05Si le double champion du monde est redevenu un biathlète à temps plein,
04:08entre les entraînements, il trouve parfois le temps long,
04:11loin de la maison.
04:12Je suis content d'être avec l'équipe,
04:14mais on va dire que, ouais, personnellement,
04:17être en stage, c'est un peu une sensation
04:19de se couper du monde pendant 2 semaines, 3 semaines.
04:24Et ça, quand on a 20, 22 ans, on est tout content.
04:27Puis au bout d'un moment, ne pas pouvoir profiter des siens
04:31et aussi, on va dire, d'autres passions à côté,
04:35c'est un petit peu frustrant.
04:37C'est donc chez lui, dans le Vercors, qu'il faut aller
04:39pour comprendre qui est vraiment Emilien.
04:42Et le rendez-vous est fixé au sceau du lit.
04:44Le programme du matin, ça va être une petite séance
04:47de ski-roue et de tir.
04:50Direction le stade, le stade de Corrençon-Vercors,
04:53qui est à 10 minutes de la maison.
04:55Donc, autant en été, je peux y aller en ski-roue,
04:57en vélo électrique aussi.
04:59C'est la chance de pouvoir habiter dans le plateau du Vercors
05:01où, finalement, il y a tout à proximité,
05:04pouvoir s'entraîner facilement.
05:06Facilement et au contact des meilleurs mondiaux.
05:08Lorsqu'Emilien a 14 ans, il scrute dès qu'il peut
05:11les entraînements des champions du plateau.
05:13Les Brunets, Dorin, Beatrix ou Fourcade.
05:16J'ai eu la chance de pouvoir m'entraîner
05:19avec Martin, avec Simon,
05:22depuis mes 17 ans, je pense.
05:25Je suis grandi avec des étoiles plein les yeux,
05:31plein la tête, l'envie de les rejoindre aussi.
05:35Je pense qu'une grosse motivation que j'avais
05:39plus jeune, c'était un jour de pouvoir courir
05:42avec Martin, avec Simon.
05:44C'était vraiment de les rejoindre dans l'équipe.
05:4810 ans plus tard,
05:50Emilien Jacquin est le seul athlète du groupe Coupe du Monde
05:53à vivre et s'entraîner dans le Vercors.
05:56Isolé, mais heureux.
06:09Tu arrives à analyser quand tu es seul comme ça,
06:11si c'est un problème de réglage ou si c'est une erreur de ta part ?
06:14Parfois, je préfère justement être seul qu'avec le coach.
06:17En fait, tout seul, je vais plus essayer de vraiment comprendre,
06:20prendre le temps d'analyser.
06:22Parfois, j'attends trop du coach,
06:25alors que quand je suis tout seul,
06:27bien la seule personne pour qui je dois quelque chose
06:30et où je dois essayer d'être meilleur, c'est moi-même.
06:34Son équilibre est ici.
06:36Lorsqu'il rentre chez lui entre deux stages ou deux compétitions,
06:39Emilien passe du temps en famille
06:41et dès qu'il peut aussi, reçoit ses amis.
06:44Quand je suis à la maison, c'est vrai que j'aime bien
06:46passer du temps avec les potes,
06:48parler d'autres choses simplement.
06:50Le biathlon, c'est ma vie,
06:52j'y mets tout mon cœur et mon énergie,
06:55mais en soi, ce n'est pas la vie.
06:58Maintenant, c'est comme ça que je vois les choses.
07:00Je me dédie à 100% à ce que je fais,
07:02mais j'ai besoin de ces moments-là aussi
07:05pour apprécier d'autres choses.
07:09Des fois, on oublie dans le haut niveau
07:10que le sport, c'est du partage
07:12et on se donne plaisir avant tout entre potes.
07:16Moi, je le vois comme quand j'avais 15 ans,
07:18je faisais du sport pour devenir un sportif de haut niveau,
07:20mais je faisais ça avec mes potes.
07:22Puis plus tu grimpes dans la pyramide,
07:24plus tu es auto-centré,
07:26plus tu es seul aussi à t'entraîner
07:28et d'avoir les moments de partage avec eux.
07:31Même en faisant du sport,
07:32ça me rappelle la base du sport.
07:34Aller dehors avec des potes et s'amuser.
07:41Là, je l'ai fouillé !
07:46Tu ne me fais pas !
07:48Tu vois, je n'ai pas que des potes sportifs de haut niveau.
07:51Au contraire !
08:00C'est des petits moments
08:02qu'on est entre nous,
08:04on peut tous dire, parler de tout.
08:06Il n'y a pas de stress,
08:08donc c'est cool !