Regardez Le Grand Jury avec Olivier Bost du 16 mars 2025.
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00:10Le Grand Jury, présenté par Olivier Bost
00:13Bonjour à tous et bienvenue dans ce Grand Jury en direct sur RTL et en direct sur Public Sénat.
00:19Bonjour Jacques Attali.
00:20Bonjour.
00:21Vous êtes écrivain, essayiste, président également de France Positive, économiste.
00:26Votre livre le plus récent est « Histoire et avenir des villes » aux éditions Flammarion.
00:31La mondialisation heureuse, c'est fini.
00:34L'Occident se fissure.
00:36L'impérialisme, les dictateurs et apprentis dictateurs bousculent le monde.
00:40Le multilatéralisme s'écroule.
00:43Et l'Europe dans tout ça, tiraillée aussi par cette poussée populiste et nationaliste.
00:49Nous allons profiter de votre regard et de votre expérience sur cette tempête planétaire
00:54quand tous nos vieux repères sont en train de disparaître.
00:57Bienvenue dans ce Grand Jury, Jacques Attali.
01:00À mes côtés pour vous interroger aujourd'hui, Perrine Tarnot de Public Sénat et Claire Corvite du Fidiaro
01:06et nous serons rejoints par Geoffrey Marin-Joris de M6.
01:09Dans ce Grand Jury, Jacques Attali, nous aurons une séquence dédiée aussi également à la politique à 2027,
01:15la prochaine échéance présidentielle et puis vous répondrez aussi à nos questions expresses.
01:19Le Grand Jury, l'actualité de la semaine.
01:23Alors, Américains et Russes ont échangé encore cette nuit par téléphone.
01:27Croyez-vous, Jacques Attali, à cette démarche de paix, à la fois de la part de la Russie, de l'Ukraine et des Etats-Unis ?
01:35Non. Et je pense qu'il faut se dégager des anecdotes ou des événements quotidiens,
01:41même si c'est votre métier et qu'il faut le faire, pour regarder les tendances longues.
01:46Je ne veux pas dire que le président américain est un agent russe,
01:54ni que M. Poutine veut envahir l'Ukraine et la Pologne et l'ensemble de l'Europe de l'Est,
02:02mais tout se passe comme si.
02:04Et pour nous, le plus important n'est pas de savoir si c'est vrai, c'est de savoir ce qui se passe.
02:08Donc pour moi, les tendances longues, qui sont d'ailleurs antérieures à M. Trump,
02:13on peut les dater d'Obama, c'est un retrait à l'égard de l'Europe,
02:18qui s'accélère, et c'est tant mieux, parce que ça nous met face à nos responsabilités.
02:24C'est une évolution de la Russie vers une structure plus agressive,
02:33et aussi, d'une certaine façon, c'est tant mieux, parce que ça fonctionne comme un réveil pour nous,
02:38et c'est aussi une évolution qui peut être à la fois extraordinairement positive pour l'Europe,
02:45pour le monde, et aussi désastreuse.
02:47Le côté désastreux, on le voit, il y a quelque chose qui n'est pas beaucoup cité,
02:52mais aux Etats-Unis, le président Trump et son administration
02:56ont commencé à réduire des aides au système scientifique,
03:01et aux aides au développement, avec deux conséquences tragiques immédiates.
03:04La première, c'est qu'est en train de se rompre le grand réseau mondial d'observations du climat,
03:11qui dépend très largement des Américains,
03:13et c'est une sorte de toile d'araignée planétaire qui moudit le climat, la météorologie, etc.
03:18C'est une perte immense, si ça continue comme ça.
03:22Et sur l'affaire, le retrait de l'aide, c'est un vide qui est laissé en Afrique,
03:27avec beaucoup de morts de toute nature.
03:29On va revenir sur ces aspects-là, mais sur, effectivement,
03:32ce qui reste l'actualité très très récente, sur l'Ukraine, comment vous voyez les choses ?
03:38Je pense, pour ma part, que M. Poutine n'a pas renoncé à son ambition
03:46de mettre un gouvernement fantoche à Kiev,
03:50et ensuite de conquérir la Moldavie, de déstabiliser la Roumanie pour les prochaines élections.
03:55Ça veut dire qu'il ne peut pas arrêter la guerre ?
03:57Ça veut dire qu'il veut bien arrêter la guerre provisoirement.
04:01Je ne pense pas que ni M. Trump ni M. Poutine soient Hitler.
04:06Il ne faut pas faire des comparaisons historiques excessives,
04:09même si on peut y penser parfois d'une façon non déraisonnable.
04:14Mais nous, Européens, nous avons l'obligation de garder en mémoire
04:19qu'en 1936, nous aurions dû arrêter Adolf Hitler quand il a envahi la Roure,
04:25et qu'en 1938, on n'aurait jamais dû signer les accords de Munich.
04:29Donc nous sommes à un moment de bascule de l'histoire.
04:31Nous sommes à un moment d'accélération de l'histoire,
04:34où l'ambition d'un dictateur et d'un président américain
04:42reste celle qu'elles sont,
04:44c'est-à-dire lutter contre l'humiliation de la destruction de l'Union Soviétique,
04:49et j'y étais en première ligne à ce moment-là,
04:52et aux États-Unis, de se concentrer sur l'Amérique elle-même.
04:56Et pour se concentrer sur l'Amérique elle-même,
04:58la stratégie tout à fait compréhensible d'un point de vue américain,
05:01c'est de couper l'axe Russie-Chine,
05:04de faire une alliance avec la Russie contre la Chine,
05:08et d'oublier les Européens qui ne comptent pas dans cette histoire.
05:12Oublions que nous sommes, nous, et on y reviendra tout à l'heure,
05:15une immense puissance.
05:16Éric Tarnot.
05:17S'il y a un cessez-le-feu demain,
05:19est-ce que selon vous l'Europe est en capacité aujourd'hui
05:22d'apporter la sécurité à l'Ukraine,
05:25sachant que nous avons deux fers au feu, si on vous suit bien,
05:28d'un côté Donald Trump aux États-Unis,
05:30et de l'autre Vladimir Poutine en Russie ?
05:32Alors, s'il y a un cessez-le-feu qui nous interdirait,
05:36mais je ne vois pas comment on nous interdirait,
05:39d'aller mettre des gardiens de la paix,
05:43au sens de l'ONU, en Ukraine.
05:45Des hommes sur le terrain ?
05:46Des hommes sur le terrain, mais des hommes sur le terrain
05:48pour protéger la paix,
05:49ce que M. Poutine ne veut pas entendre,
05:51et ne veut pas,
05:52et pour lui c'est un cagis belli,
05:54donc ça ne serait pas un cessez-le-feu.
05:55Et il faut voir si tous les Européens seraient d'accord ?
05:57Il suffit que quelques-uns le soient,
05:59on n'a pas besoin de tous.
06:01S'il n'y a pas de gardiens de la paix,
06:04en anglais peacekeeper,
06:06s'il n'y a pas de gardiens de la paix,
06:07ce ne sera pas un cessez-le-feu.
06:08Ce sera juste un moment pour reconstituer des forces
06:12et continuer les attaques là où c'est possible,
06:15puisqu'il n'y aura pas d'observateurs.
06:16Donc, je ne pense pas qu'un armistice de ce genre
06:20soit tenable.
06:22Maintenant, il y a beaucoup de questions qui vont se poser,
06:25d'ailleurs M. Poutine l'a dit très justement
06:27dans une de ses interventions,
06:29quid des soldats ukrainiens
06:32qui sont considérés comme terroristes
06:35et donc non couverts par les législations
06:37de la prisonnière de guerre en Russie,
06:40quid des étrangers, il y en a,
06:43quid des régions occupées,
06:46et en sachant que M. Poutine ne renonce pas
06:49à une partie de l'Ukraine,
06:50à mon avis il ne renonce pas à rien de l'Ukraine.
06:54Donc, je pense qu'un cessez-le-feu aujourd'hui
06:57qui ne soit pas véritablement garanti,
06:59qui ne soit pas le préparatoire d'un accord
07:01sur lequel M. Poutine reconnaîtrait
07:05que la Russie a admis l'existence d'une Ukraine indépendante
07:10n'est pas stable ni durable.
07:12Mais vous pensez que l'Europe peut assurer
07:14la sécurité d'une trêve ?
07:16Il le faudra.
07:17Parce qu'il y a quand même énormément,
07:19plusieurs centaines de kilomètres de frontières.
07:21Il le faudra.
07:23Et la meilleure façon de savoir si on peut le faire,
07:25c'est de le faire.
07:26Il le faudra.
07:27Comment vous avez perçu la réponse française
07:31en la personne du Président de la République, Emmanuel Macron,
07:35qu'on a, selon les oppositions,
07:37tout à tour parfois défini comme un va-t'en-guerre ?
07:41Est-ce que son discours était à la hauteur
07:44du moment historique que vous observez ?
07:46Je pense que son discours était à la hauteur du moment,
07:49même si parfois on l'a interprété comme une provocation.
07:52Je l'ai dit en commençant,
07:53il ne faut surtout ni résignation, ni provocation.
07:57Donc il ne faut pas créer une prophétie autoréalisatrice
08:02en disant qu'ils vont nous attaquer,
08:04créant les conditions pour qu'ils se sentent en situation de le faire.
08:08Donc je pense qu'il faut alerter sur les risques,
08:11mais ne pas être provocateur.
08:13Certains des opposants à Emmanuel Macron disent
08:16que les chars russes ne sont pas encore aux portes de Paris,
08:18qu'ils exagèrent, qu'ils veulent se refaire une santé politique
08:22sur le dos de la guerre.
08:23Qu'est-ce que vous leur répondez ?
08:24Je pense que c'est de la petite politique politicienne,
08:26l'important c'est de savoir regarder avec un peu de distance.
08:31Tout se passe comme si l'Europe est gravement menacée
08:35dans son existence.
08:37Donc peu importe que le président soit lui-même
08:41en situation de l'utiliser ou pas.
08:43Tout se passe comme si, et donc il est très important
08:45de nous réarmer, de se mettre en économie de guerre,
08:49ce que moi je dis depuis de longues années,
08:51je n'ai pas changé de discours,
08:53et de le faire avec toutes les forces du pays.
08:56Et quand on voit les manipulations électorales,
08:58notamment en Roumanie, les cyberattaques en France,
09:01est-ce que vous pensez qu'on est déjà en guerre
09:03contre la Russie aujourd'hui ?
09:04Non, on n'est pas en guerre contre la Russie,
09:06il ne faut pas créer l'événement quand il n'existe pas.
09:10Nous ne sommes pas en guerre contre la Russie.
09:13D'ailleurs, moi-même depuis très longtemps,
09:16je pense que la Russie a sa place dans l'Union Européenne.
09:18Je le dis, toute mon action pendant des années a toujours été cela.
09:22La Russie a sa place dans l'Union Européenne.
09:24Le jour venu.
09:25D'ailleurs, les Européens et les Américains
09:27sont très largement responsables du tournant anti-occidental de la Russie,
09:31puisque dans la conférence de Munich,
09:33devenue si célèbre pour le discours de M. Vance,
09:35il y a eu quelques années, il y a longtemps,
09:37un discours de M. Poutine,
09:39où il ouvrait presque explicitement la voie
09:42à une candidature de la Russie à l'Union Européenne.
09:44Deux fois. Et il n'a pas été entendu.
09:47Donc, nous avons une part de responsabilité
09:49dans le retournement de l'Ukraine,
09:51comme nous avons d'ailleurs une responsabilité
09:53dans l'islamisation de la Turquie,
09:55à qui on a fermé la porte.
09:57Ceci étant dit,
09:59il faudra créer les conditions d'une guerre inévitable.
10:02La guerre de 1914,
10:04elle n'aurait jamais dû avoir lieu.
10:06Et c'est un engrenage qui l'a rendue inévitable.
10:10Un engrenage absurde.
10:11Nous sommes dans une situation qui n'est ni celle de 1914,
10:14ni celle de 1938,
10:16mais il faut tirer les leçons des deux.
10:18Pas provocateur,
10:20mais serait armé.
10:21Mais vous employez une formule forte,
10:23il faut rentrer dans une économie de guerre.
10:25Une économie de guerre, ça veut dire transformer
10:27nos industries, par exemple,
10:29pour faire de l'armement.
10:30Et dédier une part du budget
10:32qui est infiniment plus grande que celle
10:34qu'on dédie aujourd'hui aux questions d'armement.
10:36Alors, je parle d'économie de guerre depuis des années.
10:38Et pour moi, l'économie de guerre, c'est pas seulement
10:40l'économie de l'armement.
10:42L'économie de l'armement, c'est une partie de l'économie de guerre.
10:44L'économie de guerre, ça veut dire prendre conscience
10:46qu'il faut travailler beaucoup plus,
10:48aller beaucoup plus vite dans
10:50les questions écologiques.
10:52J'ai été tout à l'heure au téléphone avec
10:54un grand industriel australien en Australie
10:56qui me disait combien la situation était
10:58tragique en termes de sécheresse,
11:00comme elle l'est d'ailleurs dans une large partie
11:02de l'Afrique.
11:04Il faut à tout prix
11:06que ceux-ci nous mettent en économie de guerre
11:08à l'égard des changements nécessaires écologiques.
11:10Vous écoutez, ça veut dire que c'est une opportunité
11:12pour faire un certain nombre de réformes
11:14et lancer un certain nombre de choses.
11:16Mais est-ce qu'il faut vraiment parler de guerre ?
11:18Est-ce qu'il faut lier les deux ?
11:20C'est étrange,
11:22c'est en effet assez paradoxal.
11:24Moi je défends depuis de longues années
11:26l'idée qu'il y a deux sortes d'économies.
11:28Il y a l'économie de la mort et l'économie de la vie.
11:30Dans l'économie de la mort, il y a tout ce qui est l'énergie fossile,
11:32tout ce qui sont les sucres artificiels,
11:34les drogues et tout ce qui nous tue.
11:36Ça c'est 55 à 60% du PIB mondial,
11:38en particulier en France.
11:40C'est une large partie. Imaginez ce que vous faites,
11:42vous, dans votre dépense personnelle dans ce secteur.
11:44L'économie de la vie, c'est évidemment
11:46les énergies renouvelables, c'est la démocratie,
11:48c'est la culture,
11:50c'est l'éducation,
11:52c'est la santé, c'est le recyclage,
11:54c'est l'eau et c'est aussi la défense.
11:56Parce que la défense fait partie de l'économie de la vie.
11:58Donc nous avons besoin de
12:00bouger le curseur
12:02et d'avoir une économie de la vie
12:04à 70-80% du PIB
12:06le plus vite possible.
12:08C'est une économie de guerre qu'il faut mettre en place.
12:10Une économie de guerre pour la vie.
12:12Vous n'êtes pas le seul à alerter,
12:14on a eu le rapport de Mario Draghi à l'automne 2024,
12:16il y a aussi eu le rapport
12:18de l'ancien Premier ministre italien Enrico Letta,
12:20et on a l'impression que
12:22ces rapports ne sont pas
12:24entendus, notamment par la commission européenne,
12:26qu'on a du mal à passer
12:28à cette économie peut-être plus positive.
12:30Oui, c'est une économie.
12:32L'économie positive,
12:34c'est l'économie pour l'économie de la vie,
12:36qui prend en compte l'intérêt des générations futures.
12:38On y reviendra peut-être.
12:40Mais j'ai l'impression que ça bouge un peu.
12:42Vous savez, je suis...
12:44Par exemple, est-ce que le plan annoncé par Ursula von der Leyen,
12:46de la commission européenne, 800 milliards d'euros,
12:48est-ce que ça va dans le bon sens ?
12:50Oui, bien sûr, ce n'est pas un plan, c'est un montant.
12:52Maintenant, il faut savoir ce qu'on en fait.
12:54Est-ce qu'on en fait pour la défense ?
12:56Et puis ce qu'on en fera aussi
12:58pour les autres secteurs.
13:00Sur la défense, j'ai entendu récemment quelqu'un qui dit quelque chose de sage,
13:02trop d'argent peut être une catastrophe.
13:04Est-ce que trop d'argent peut nous amener
13:06à continuer à acheter n'importe quoi,
13:08des armes du passé ?
13:10C'est comme si, comme on l'a fait d'ailleurs en 1938,
13:12ils avaient acheté des armes nécessaires
13:14pour gagner la guerre de 1914.
13:16Et là, il faut se rendre compte
13:18qu'un acteur très important
13:20de l'économie de la défense
13:22et de l'Europe de la défense,
13:24c'est l'Ukraine.
13:26Sans savoir si l'Ukraine sera ou pas
13:28membre des institutions européennes,
13:30mais l'Ukraine nous montre
13:32quels armements sont nécessaires,
13:34quels combats doivent être menés,
13:36quelle est la formation des militaires,
13:38et donc il faut réorienter nos industries de la défense
13:40vers ces nouvelles armes,
13:42quel que soit le montant dont on est.
13:44Mais est-ce que la souveraineté militaire
13:46de l'Union Européenne est possible
13:48quand on sait que 60%
13:50de l'équipement militaire
13:52qu'elle se procure est américain ?
13:54Il faut changer ça.
13:56C'est pour ça qu'une des clés
13:58de ce programme européen,
14:00que beaucoup appellent maintenant
14:02« European Defense by Act »,
14:04c'est-à-dire l'obligation d'acheter
14:06des matériels européens.
14:08Même ce matériel purement européen,
14:10il est disparate, il est éparpillé ?
14:12Peu importe.
14:14Qu'il soit européen déjà, c'est déjà une chose.
14:16Mais il faut que les industriels
14:18de l'armement européen acceptent de collaborer ensemble.
14:20Pas forcément.
14:22Il faut qu'il soit développé.
14:24Il y a une formidable industrie en Italie,
14:26une formidable industrie en Allemagne,
14:28en Italo-Allemande sans la France,
14:30très bien, très bien.
14:32Il faut avancer dans ces directions.
14:34Et il faut prendre conscience que
14:36cette industrie de l'armement
14:38est duale.
14:40Que ce n'est pas de l'argent gaspillé,
14:42c'est un facteur de croissance.
14:44J'aurais préféré que ce soit autre chose.
14:46C'est un facteur de nouvelles technologies aussi ?
14:48C'est aussi un facteur de nouvelles technologies importantes
14:50dans d'autres secteurs.
14:52D'où vient Internet ?
14:54De l'industrie de la défense.
14:56Les technologies d'innovation fondamentale
14:58viennent de l'industrie de la défense.
15:00Il faut monter à quelle part du PIB
15:02pour les questions de défense
15:04et d'armement ?
15:06Emmanuel Macron dit 3%, 3,5%.
15:08Sébastien Lecornu,
15:10le ministre des armées,
15:12dit qu'il faut doubler le budget
15:14à une perspective plus longue.
15:16Je pense qu'il faut aller très vite
15:18et ne pas mettre la charrue avant les bœufs.
15:20C'est-à-dire définir d'abord la stratégie,
15:22la nature des armements dont on a besoin
15:24et le montant. Le montant, pour moi, doit être 1,4%.
15:264% du PIB ?
15:28Oui, mais il y a beaucoup de choses qu'on peut réduire.
15:30Ce qui représente plus de 100 milliards ?
15:32Oui, il y a beaucoup de choses qu'on peut réduire
15:34à condition de bien le gérer
15:36socialement.
15:38Je vous donne deux exemples.
15:40Je crois que les subventions pour les énergies fossiles
15:42sont supérieures à 100 milliards.
15:44Je parle sous le contrôle de ceux qui calculent cela
15:46parce qu'il y a des calculs très différents.
15:48J'ai trouvé récemment un exemple,
15:50qui parut dans plusieurs rapports publics,
15:52qui montre que sur une toute petite section
15:54des sucres artificiels,
15:56le Parlement a voté des amendements
15:58qui subventionnent
16:00des produits sucrés, des poisons
16:02pour 2 milliards.
16:04Voilà, des économies faisables.
16:06Sur les énergies fossiles, on a l'expérience
16:08notamment des gilets jaunes
16:10qui rendent tout cela très théorique.
16:12Pas très théorique, ça n'a peut-être pas été
16:14aussi bien géré que ça aurait pu être.
16:16Mais il faut y passer.
16:18Il faut y passer. Il faut aller
16:20de la façon la plus juste possible.
16:22C'est pour ça que je n'exclus évidemment pas
16:24des hausses d'impôts, à la différence de ce qu'a fait le Président de la République,
16:26pour y parvenir.
16:28Demandez aujourd'hui
16:30un effort social. Travailler plus,
16:32par exemple, allonger
16:34le temps de travail, soit hebdomadaire,
16:36soit repousser l'âge de la retraite.
16:38Est-ce qu'il n'y a pas quand même un risque que les gens disent
16:40on ne va pas faire cet effort-là,
16:42nous, pour l'Ukraine.
16:44Et qu'à la fin, on n'ait ni l'effort pour l'Ukraine,
16:46ni les réponses que vous souhaitez.
16:48C'est un problème politique aussi, très largement.
16:50On ne fait pas cet effort pour l'Ukraine,
16:52on fait cet effort pour nous-mêmes.
16:54Et quand on voit les entreprises de l'industrie de la défense
16:56qui se mettent à travailler
16:58en 3 fois 7, 7 jours sur 7,
17:00je pense que les gens sont contents
17:02dans les villages et les villes
17:04où ceci se produit.
17:06Parce que ça crée des emplois, ça dynamise
17:08l'économie, c'est pas forcément
17:10un mauvais.
17:12C'est ce que j'appelle de l'altruisme intéressé.
17:14Nous avons intérêt à être altruistes.
17:16A l'égard de l'Ukraine, parce que c'est bon pour nous.
17:18Nous avons intérêt à être altruistes
17:20à l'égard de l'Afrique, parce que c'est bon pour nous.
17:22Nous avons intérêt à être altruistes pour
17:24le climat, parce que c'est bon pour nous
17:26et les générations futures.
17:28Mais ça veut dire qu'il faut le porter politiquement, pédagogiquement,
17:30vis-à-vis de la société française.
17:32Est-ce que Emmanuel Macron vous semble l'homme de la situation ?
17:34Aujourd'hui, il arrive quand même
17:36quasiment à la fin de son second mandat,
17:38il n'a plus de majorité politique au Parlement.
17:40On fait avec.
17:42Et c'est une affaire
17:44qui dépasse une présidence.
17:46C'est le Président. Je trouve qu'il,
17:48en matière de politique étrangère et de défense,
17:50il a le bon discours. Peut-être faut-il être
17:52plus dans l'avenir.
17:54Moi, je plaide pour qu'on ait un grand plan
17:56France 2040. Je rêve,
17:58et d'ailleurs, la fondation que je préside,
18:00France Positive, nous allons publier
18:02un plan France 2040
18:04et un programme pour les élections présidentielles prochaines
18:06à la cantonade, pour tous les candidats,
18:08parce que nous pensons qu'il faut inscrire tout ça dans une vision.
18:10Alors le Président, il n'a que deux ans devant lui,
18:12mais la France a eu d'autres présidents,
18:14elle en aura d'autres après lui,
18:16et il faut écrire
18:18une charte d'évidence
18:20qui sera partagée par la plupart
18:22des candidats. Tout le monde en France...
18:24Y compris par les extrêmes, l'extrême-gauche,
18:26la France insoumise, l'extrême-droite...
18:28Je séparerai
18:30les dirigeants
18:32de l'extrême-gauche
18:34du reste,
18:36et une partie des dirigeants de l'extrême-droite
18:38avec eux.
18:40Je pense qu'il y a un consensus de bon sens
18:42en France,
18:44très large.
18:46Plus de justice sociale, plus de prise en compte
18:48de l'environnement, plus d'éducation,
18:50plus de santé, moins de poison
18:52de toute nature, plus de moyens de protection,
18:54de défense et de sécurité intérieure.
18:56Tout ça, c'est un consensus.
18:58Et c'est un consensus qu'on peut mettre plus social-démocrate
19:00ou plus
19:02de droite libérale.
19:04Et simplement pour revenir sur
19:06la manière
19:08dont Emmanuel Macron doit justifier
19:10nos efforts de défense,
19:12est-ce qu'il faut qu'il commence à assumer
19:14peut-être le concept
19:16d'une politique d'austérité ?
19:18C'est-à-dire, est-ce qu'il va falloir,
19:20pour financer l'effort de défense,
19:22assumer de taper dans le social,
19:24d'augmenter les impôts ?
19:26Je ne pense pas que ce soit nécessaire.
19:28D'abord, ce n'est pas un sujet français,
19:30c'est un sujet européen.
19:32L'argent ne manque pas, je répète,
19:34l'argent ne manque pas,
19:36l'argent ne manque pas.
19:38La BU est la première banque d'investissement publique du monde.
19:40Elle est en train de modifier
19:42enfin ses statuts pour pouvoir considérer
19:44les investissements dans la défense
19:46comme possibles.
19:48Il y a beaucoup d'argent dans les fonds régionaux qui ne sont pas utilisés
19:50et qui pourraient être... L'argent ne manque pas.
19:52Qu'il fasse, par ailleurs,
19:54faire des économies budgétaires
19:56parce qu'il y a des gaspillages de toute nature,
19:58ce n'est pas normal qu'en Allemagne
20:00les professeurs soient deux fois moins payés,
20:02deux fois plus payés qu'en France
20:04et qu'ils aient un budget
20:06de l'éducation identique.
20:08Ça prouve qu'il y a des gaspillages dans le système
20:10et on pourra citer des milliers d'exemples.
20:12Mais il y a un débat à gauche,
20:14notamment c'est de faire contribuer
20:16un peu plus les plus riches.
20:18Est-ce que vous êtes pour augmenter
20:20les impôts des plus hauts revenus en France ?
20:22Je serai ravi d'en payer davantage
20:24puisque je ferai certainement partie de ceux
20:26qui seront mis à contribution
20:28pour un plan juste,
20:30en particulier en matière d'éducation, de santé
20:32et de défense.
20:36On va parler de la guerre économique
20:38dans un instant mais auparavant, effectivement,
20:40les questions express. D'abord, aller sur Mars
20:42en 2026, 2031 pour l'homme,
20:44est-ce que Martel,
20:46Elon Musk, avec ses fusées Starship,
20:48c'est utile ou pas ?
20:50Il ne faut pas renoncer à nos rêves.
20:52Je pense qu'il ne faut pas renoncer
20:54à tout ce qui nous fait avancer.
20:56Je ne sais pas si ce sera utile
20:58mais ça fait partie des rêves de l'humanité.
21:00Il faut aussi des rêves
21:02en matière écologique.
21:04Il faut rêver
21:06d'avoir des énergies gratuites.
21:08Il faut rêver d'avoir des moyens
21:10d'enseigner à tout le monde
21:12à peu de moyens.
21:14Il faut rêver de guérir
21:16toutes les maladies. Il faut rêver de supprimer la douleur.
21:18Il faut rêver de vivre tous 120 ans.
21:20Il ne faut pas supprimer nos rêves,
21:22quels qu'ils soient.
21:24Le secrétaire général de l'Élysée, Alexis Kohler,
21:26peut-il refuser
21:28de répondre à une commission d'enquête
21:30parlementaire sur le dérapage
21:32des comptes publics ?
21:34Franchement, ça ne m'intéresse pas à cette question.
21:36Je ne me sens pas concerné.
21:38Il y a beaucoup d'autres sujets plus importants que celui-là, si vous permettez.
21:40La ministre des Sports
21:42estime que le voile n'est pas synonyme
21:44d'entrisme islamique.
21:46Est-ce qu'elle a raison ou tort ?
21:48Moi, je suis contre
21:50toute manifestation publique
21:52qui pourrait ressembler
21:54à du prosélytisme.
21:56Le voile, ça dépend lequel.
21:58Si c'est un foulard, ce n'est pas un foulard, etc.
22:00La frontière est complexe.
22:14Jacques Attali est notre invité.
22:16Jacques Attali, vous êtes écrivain, essayiste,
22:18économiste et président de France Positive.
22:20A mes côtés pour vous interroger ce dimanche,
22:22Geoffrey Maringioris de M6
22:24et Perrine Tarnot de Public Sénat.
22:30Jacques Attali, vous dites que
22:32Donald Trump est un apprenti dictateur.
22:34Vous allez nous expliquer pourquoi.
22:36Et n'est-il pas un simple businessman ?
22:38Oui, c'est ça.
22:40C'est un businessman
22:42qui ne fonctionne que par
22:44deal,
22:46comme il dit, c'est-à-dire contraint
22:48et sur des rapports de force.
22:50Alors, est-ce qu'il va être
22:52un dictateur ? En anglais, on dit
22:54jury is still out, ça veut dire on ne sait pas encore.
22:56J'espère que non.
22:58Ça veut dire qu'il menace la démocratie américaine.
23:00Ça veut dire qu'il pourrait la menacer
23:02s'il continue dans la direction
23:04et s'il fait ce qu'il dit.
23:06On va le voir.
23:08On va le voir avec
23:10la justice. Est-ce qu'il va
23:12respecter les règles de la justice ?
23:14On va voir ce qu'il va faire avec
23:16les démocrates et le Congrès.
23:18Il y a
23:20une très belle pièce de théâtre
23:22qui s'appelle
23:24La Résistible Ascension d'Arthur Huy
23:26qui a été écrite par Bertolt Brecht en 1940-41
23:28qui n'a d'ailleurs jamais été jouée
23:30avant l'après-guerre et qui
23:32par cet écrivain
23:34juif allemand qui avait émigré aux Etats-Unis
23:36reprend
23:38tout ce qui s'est passé dans l'Allemagne
23:40des années 30 dans une parodie
23:42qui est un gangster
23:44qui prend le contrôle
23:46du cartel des producteurs de
23:48chou-fleurs à Chicago.
23:50La biologie est parfaite.
23:52Aujourd'hui c'est le cartel
23:54des voitures, les Tesla.
23:56C'est une pièce très intéressante qui se termine par une phrase
23:58mondialement célèbre aujourd'hui
24:00Il est encore fécond, le ventre d'août
24:02a surgi, la bête du monde.
24:04Je ne dis pas
24:06qu'il est un dictateur
24:08je dis qu'il pourrait le devenir
24:10si les formidables contre-pouvoirs
24:12qui existent dans la société américaine
24:14ne se mettent pas en place. J'avais écrit
24:16un article
24:18où j'expliquais que
24:20les Etats-Unis sont la dernière
24:22des grandes démocraties à ne pas
24:24être passées par une phase totalitaire.
24:26C'était le cas en Grande-Bretagne avec Cromwell
24:28c'était le cas en France plus souvent
24:30qu'à son tour et partout. Les Etats-Unis, non.
24:32Le Canada non plus.
24:34On peut penser que
24:36même si Tocqueville avait annoncé
24:38dès 1848 pour d'autres raisons
24:40que
24:42la démocratie aux Etats-Unis
24:44n'est pas à l'abri
24:46d'une période totalitaire.
24:48Faire ces comparaisons là, que ce soit
24:50avec les années 30,
24:52le fait d'être un dictateur, etc.
24:54Est-ce que ça ne risque pas de conforter
24:56ceux qui finalement aujourd'hui
24:58rejettent le système, rejettent
25:00les élites ? Est-ce que ça n'alimente pas
25:02finalement le
25:04national-populisme ?
25:06Vous avez raison, il ne faut pas
25:08je ne dis pas que M. Trump
25:10est un dictateur
25:12je fais simplement
25:14des parallèles historiques qui montrent
25:16parce que c'est toujours important de comprendre l'histoire
25:18qui montrent ce qui s'est passé dans certaines circonstances
25:20évidemment pas Hitler
25:22mais il y a des points
25:24de comparaison avec certains dictateurs
25:26qui méritent d'être notés.
25:28Dans ce contexte, Emmanuel Macron
25:30résume sa position
25:32d'une formule dans un entretien donné à la presse quotidienne
25:34régionale. Il faut rester au contact
25:36avec Donald Trump pour éviter, je cite
25:38le sur-accident. Est-ce que c'est le bon credo ?
25:40C'est très bien, il ne faut pas faire de provocation
25:42ni avec Trump, ni avec
25:44Musk, ni avec Poutine
25:46il ne faut pas faire de provocation
25:48je vous dis, c'est
25:50ni la guerre de 14, ni la guerre de 39
25:52la guerre de 39 était inévitable
25:54et malheureusement nécessaire, c'est pas la même chose
25:56la guerre de 14 n'a eu lieu
25:58que parce qu'il y a eu une série de provocations mal gérées
26:00donc il faut rester au contact
26:02il faut essayer de retourner dans la bonne direction
26:04il faut montrer aux Russes
26:06et aux Américains qu'ils ont intérêt à long terme
26:08on a une Europe forte et il faut surtout
26:10se concentrer sur nous-mêmes
26:12ne pas se lancer dans une guerre d'invectives
26:14et construire notre force. Il ne faut pas oublier que nous sommes
26:16la première puissance économique du monde
26:18nous avons les moyens d'avoir la première défense du monde
26:20nous avons les moyens d'avoir une industrie de la défense
26:22qui soit la meilleure du monde, d'ailleurs la France
26:24a la deuxième industrie
26:26d'exportation militaire du monde
26:28il ne faut pas avoir de complexe
26:30il faut avancer sereinement.
26:32Ce qui est insidieux peut-être chez Trump
26:34c'est qu'il donne souvent l'impression
26:36dans ses déclarations que la démocratie
26:38finalement c'est une perte de temps
26:40que ça empêche d'agir
26:42C'est en effet une lecture qu'on peut avoir
26:44qu'on retrouve chez Peter Thiel
26:46qui est l'aspirateur de J.D. Vance
26:48et qu'on retrouve chez certains
26:50ceux qui disent que la démocratie
26:52ça ne sert à rien, ce n'est pas le bon système, ça ne marche pas
26:54Est-ce que ce n'est pas un truc dangereux finalement ?
26:56Oui, ça rejoint
26:58la Chine
27:00qui elle aussi considère que la démocratie
27:02n'est pas le bon système. J'ai récemment dialogué
27:04avec un très grand intellectuel chinois
27:06qui nous a dit que notre système ça ne marche pas
27:08vous n'arrivez à rien. Nous on a
27:10aussi un système de
27:12sélection
27:14qui est très efficace
27:16c'est une sélection progressive
27:18dans le parti, des élites
27:20qui vont progressivement gérer les villes
27:22les régions et qui ensuite montent
27:24à l'appareil d'État. On a un très bon système
27:26de sélection qui est meilleur que le vôtre
27:28et on a un système qui fonctionne
27:30donc il y a une idéologie
27:32qui conduit à l'apologie de la dictature
27:34qui à mon avis ne marche pas
27:36parce qu'à mon avis le pire défaut de la dictature
27:38c'est que la liberté
27:40de parole n'existe plus
27:42l'innovation disparaît, ce qu'on a vu
27:44en Union Soviétique, ce qu'on voit aujourd'hui
27:46très menacé aux États-Unis, c'est pourquoi je rêve
27:48C'est paradoxal parce que par exemple Donald Trump
27:50aujourd'hui revendique une liberté
27:52d'expression totale. C'est ce qu'on appelle la liberté
27:54formelle par opposition à la liberté réelle
27:56et aujourd'hui
27:58j'appelle à
28:00les grands pays européens, les grandes universités européennes
28:02les grandes écoles
28:04à faire tout ce qu'ils peuvent
28:06pour attirer
28:08Il faut accueillir les chercheurs américains qui sont menacés
28:10quand on voit ce qu'il se passe par exemple à l'université de Columbia
28:12à New York. Plus qu'attirer
28:14il faut aller les chercher
28:16Mais on a les moyens
28:18quand on voit qu'on a déjà du mal en France
28:20à financer notre propre recherche
28:22Vous avez raison, je pense qu'il faut faire un statut spécial
28:24provisoire pour attirer les grands talents
28:26qui sont américains
28:28brésiliens
28:30et de partout pour pas qu'ils aillent
28:32ailleurs que chez nous. L'attaque contre
28:34les universités américaines c'est pour vous le pilier
28:36de la démocratie américaine qui est le plus touché par Donald Trump
28:38aujourd'hui ? Il y a eu un excès du
28:40wokeisme qui à mon avis
28:42a été beaucoup trop loin comme toujours
28:44quand les choses sont ce qui était
28:46absolument nécessaire pour
28:48la libération des femmes était fondamentale
28:50mais il y a eu des excès. Ce n'est que des excès
28:52mais au point
28:54que ça a permis
28:56aux industriels derrière
28:58Trump de parler du capitalisme woke
29:00et il met dans le
29:02capitalisme woke tout ce qui est
29:04l'industrie de l'environnement, l'industrie de la santé
29:06etc. Il ne faut pas faire ça
29:08le wokeisme c'est très bien
29:10mais il y a eu des excès
29:12Autre gros dossier
29:14diplomatique entre la France
29:16et l'Algérie. Le pays refuse
29:18de reprendre ses ressortissants
29:20qui sont sous OQTF
29:22sous obligation de quitter le territoire
29:24français. Faut-il remettre
29:26en cause les accords de
29:2868 si Alger
29:30ne veut pas répondre à nos demandes ?
29:32Il faut discuter
29:34de la situation. Moi je suis né en Algérie
29:36je connais bien la situation, je l'ai quitté j'avais 12 ans
29:40Il ne faut pas rester au ressentiment
29:42entre la France et l'Allemagne
29:44où il y a eu une monstruosité extraordinaire
29:46en particulier celle
29:48d'Ouradour Soghlan mais qui n'est qu'une
29:50parmi des milliers d'autres
29:52que nous avons connus
29:54et en particulier les camps de concentration
29:56on a mis seulement 10 ans à dire
29:58l'avenir c'est ensemble
30:00et pas séparément. Là en Algérie
30:02avec l'Algérie ça fait plus de
30:0460 ans, c'est trop long.
30:06Comprenez-vous
30:08les réticences semble-t-il d'Emmanuel Macron
30:10à dénoncer les accords d'Alger
30:12de 68 qui facilite
30:14l'entrée d'Algériens sur le territoire français ?
30:16Il faut négocier
30:18et si on n'obtient pas de résultats satisfaisants
30:20dans les négociations, il faudra en venir là.
30:22Mais pas tout de suite.
30:24Et est-ce que vous trouvez la mobilisation suffisante
30:26face au sort de l'écrivain franco-algérien
30:28Boualem Sansal ? Il est détenu maintenant
30:30depuis plus de 200 jours.
30:32Je pense que cette détention est unique
30:34qu'il devrait être libéré ne serait-ce que pour
30:36des raisons de santé et qu'il devrait avoir le droit
30:38de revenir dans le pays qui est maintenant le sien.
30:40Mais sur la mobilisation en France, vous trouvez que les politiques
30:42les intellectuels sont suffisamment mobilisés ?
30:44Je ne sais pas. Je pense qu'il faut
30:46agir plus
30:48et l'importance est entre les mains du gouvernement algérien.
30:50Vous savez, j'ai beaucoup d'amis
30:52qui sont des prisonniers politiques un peu partout à travers le monde
30:54et il n'y a pas beaucoup de mobilisation
30:56pour eux un peu partout.
30:58Peut-être un mot sur Bruno Rotailleau,
31:00ministre de l'Intérieur, qui laisse en compte
31:02qu'il pourrait démissionner si
31:04la France se montre
31:06trop faible de son point de vue face
31:08à Alger. Faut-il aller jusque-là ? Faut-il durcir
31:10le ton ou au contraire tenter d'assouplir ?
31:12Pour préserver la diplomatie ?
31:14La diplomatie est encore
31:16nécessaire,
31:18comme toujours, sans faiblesse.
31:20Mais à un moment,
31:22ça sera trop.
31:24Ce n'est pas encore le cas.
31:26Quant à M. Rotailleau, c'est un excellent
31:28ministre de droite
31:30qui fait son travail dans l'esprit
31:32d'un ministre de droite
31:34et ce qu'il dit là correspond à l'esprit
31:36d'une direction de droite.
31:38Pour parler maintenant du RN, Jordan Bardella
31:40sera en visite en Israël la semaine prochaine.
31:42Considérez-vous que le RN
31:44a définitivement
31:46tourné la page de l'antisémitisme
31:48de Jean-Marie Le Pen ?
31:50Je pense que Marine Le Pen a tourné cette page
31:52à titre personnel.
31:54Les élections récentes nous ont montré
31:56que ce n'est pas le cas
31:58d'une partie significative de ses candidats
32:00et que malheureusement
32:02il existe encore un antisémitisme
32:04de droite ou d'extrême droite
32:06et un antisémitisme d'extrême gauche.
32:08Pour citer une seule fois François Mitterrand,
32:10il me disait souvent en privé
32:12vous savez, l'extrême droite
32:14n'est pas seulement au Front National
32:16elle est aussi dans la droite.
32:18Donc il y a de l'antisémitisme dans la droite
32:20quel que soit le parti
32:22comme il y a un antisémitisme de gauche qui se camoufle.
32:24Effectivement au même moment
32:26il y a cette polémique en France
32:28autour de cette affiche de la France insoumise
32:30avec l'animateur
32:32Cyril Hanouna sous forme d'une caricature
32:34antisémite. Comment vous
32:36vous l'expliquez cet antisémitisme
32:38au sein de la France insoumise aujourd'hui ?
32:40C'est très classique
32:42dans l'extrême gauche.
32:44Tout se passe comme si l'extrême gauche
32:46était antisémite. Je ne dis pas qu'ils le sont
32:48mais tout se passe comme si.
32:50Tout se passe comme si les dérapages
32:52de Jean-Luc Mélenchon
32:54et de plusieurs de ses lieutenants
32:56n'étaient pas des dérapages mais des messages
32:58qu'il croit adresser à la communauté musulmane
33:00pour attirer leur vote. Je pense que ça ne marche pas
33:02parce que les musulmans français sont plus intelligents
33:04que ça et ne tombent pas dans ce piège.
33:06Mais ce dérapage là existe
33:08Je ne dis pas qu'ils sont timides
33:10mais tout se passe comme s'il l'était.
33:12Et c'est une vieille histoire de l'extrême gauche française.
33:14Les caricatures
33:16elles ont connu. Moi-même j'étais victime
33:18et je suis souvent de ce genre
33:20de caricatures
33:22qui renvoient aux vieilles histoires
33:24du début du XXème siècle.
33:26Je ne connais pas
33:28M. Hanouna et je n'ai pas beaucoup
33:30d'appréciation pour
33:32son travail de journaliste mais je respecte
33:34tous les travaux de toute nature
33:36quand il ne viole pas la loi
33:38je trouve que c'est scandaleux ce qui a été fait contre lui.
33:44Alors on va se projeter un petit peu
33:46vers 2027. Raphaël Glucksmann
33:48est en congrès aujourd'hui
33:50à Paris. Est-ce que vous voyez en lui
33:52pourquoi pas un Macron de
33:542027 ? C'est-à-dire
33:56sans parti, un candidat un peu de...
33:58Je pense que
34:00il ne faut pas mettre
34:02la charrie avant les bœufs. C'est tout le travail
34:04de ce que je fais avec les
34:06plusieurs centaines de jeunes qui travaillent
34:08avec moi dans France Positive.
34:10C'est de dire le plus important c'est le programme.
34:12Qu'est-ce qu'on fait ? Après on verra
34:14qui sera le candidat et quelle équipe
34:16parce que ce n'est pas un candidat tout seul qui peut
34:18l'emporter. Un homme seul ne peut pas
34:20emporter un pays.
34:22Il y a quand même une grosse question sur la succession d'Emmanuel Macron
34:24qui ne peut pas s'en emporter. Pour moi la question...
34:26Il y a un bloc central politique qui s'est formé
34:28une droite, une gauche en...
34:30Je vais répondre à votre question sur la personne mais je préfère
34:32dire d'abord...
34:34Sur le plan politique, l'important
34:36c'est de savoir quelles sont les réformes
34:38qui n'ont pas été faites parce qu'Emmanuel Macron
34:40n'a pas fait pour des raisons diverses
34:42toutes les réformes qu'il aurait pu et aurait dû faire.
34:44Toutes les réformes qui restent à faire en matière de santé,
34:46en matière d'éducation, en matière de sécurité,
34:48en matière de défense, en matière d'écologie,
34:50en matière d'économie budgétaire,
34:52en matière de justice fiscale. On peut en faire une longue glisse
34:54et on le fera dans le programme que nous publierons
34:56avant la fin de cette année
34:58pour être prêt à tomber et débattre avec les Français
35:00sur ce programme. Après, on verra la question
35:02des candidats. Alors, il y a beaucoup de candidats possibles.
35:04Je peux vous faire une liste de moins 15 personnes à gauche.
35:06Si vous voulez, on l'a fait.
35:08Et autant à droite.
35:10Faut-il un système de primaires
35:12à droite, un bloc central, centre et droite
35:14comme le réclame, par exemple, Gérald Darmanin ?
35:16Edouard Philippe, lui, semble plutôt hostile
35:18à cette primaire. L'appelez-vous de vos voeux
35:20ou pas pour clarifier la demande ?
35:22Les primaires n'ont pas donné de très bons résultats
35:24à chaque fois qu'on les a employés.
35:26Je pense que
35:28dans le système électoral français, les primaires,
35:30ce n'est pas un bon système.
35:32Donc, il faut que
35:34les camps voient ce qui
35:36surgit.
35:38C'est pour ça que je pense
35:40que le candidat qui s'imposera
35:42sera celui qui, avant la fin
35:44de 2025,
35:46le début de 2026, affichera
35:48des propositions pas nombreuses,
35:50séduisantes pour le pays.
35:52François Hollande a été élu sur une proposition.
35:54Une phrase.
35:56Et on ne peut pas
35:58attacher au candidat actuel
36:00une ou deux propositions. C'est ça qui compte.
36:02Et à mon avis, les Français voudront
36:04avoir...
36:06Quelle est la phrase que vous aviez retenue de François Hollande ?
36:08Mon ennemi, c'est la finance.
36:10C'est la phrase qui a fait basculer...
36:12C'est pas les 75% de...
36:14D'accord. Vous qui avez observé
36:16la relation président-premier ministre,
36:18de très près,
36:20notamment avec François Mitterrand,
36:22ça fera trois mois maintenant
36:24que François Bayrou est Premier ministre.
36:26Au choix, d'après vous, François Bayrou
36:28sera renversé sur une motion de censure,
36:30remercié par Emmanuel Macron,
36:32ou il ira jusqu'en 2027 ?
36:34Je souhaite qu'il aille jusqu'au bout, parce que le pays a bien d'autres choses
36:36à faire que de se payer une crise gouvernementale,
36:38des élections. Mais enfin, il y a beaucoup d'hypothèses.
36:40On peut imaginer que M. Bayrou
36:42se trouve face à la démission
36:44de M. Retailleau quand il sera
36:46ou pas élu président de son parti.
36:48Il l'a d'ailleurs laissé entendre.
36:50On peut imaginer une crise avec
36:52une partie de la gauche de sa majorité,
36:54ou avec une partie de la droite.
36:56Enfin, il y a beaucoup d'hypothèses.
36:58Et on peut imaginer que Mme Le Pen
37:00se trouve confrontée à une situation qui l'amène
37:02à pousser à la dissolution.
37:04Tout est possible. Je ne le souhaite pas.
37:06Je pense que le pays a d'autres choses à faire,
37:08en particulier en matière de défense
37:10et de réforme, que de se payer
37:12une nouvelle crise gouvernementale et de nouvelles élections législatives.
37:16Le grand jury, tout est politique.
37:18Justement, on va parler de la
37:20situation économique.
37:22Vendredi soir, notre pays a échappé
37:24à la dégradation. L'agence de notation
37:26Fitch a laissé un double A
37:28avec perspective négative.
37:30Est-ce que ça, déjà, c'est une bonne nouvelle ?
37:32Oui, c'est une bonne nouvelle. Il faut le mettre dans un contexte
37:34où tout le monde est endetté.
37:36Les Etats-Unis sont en faillite. On vient de le voir
37:38avec la façon dont même les démocrates en panique
37:40ont cru obligés de voter
37:42la prolongation.
37:44Cette année, les Etats-Unis devront
37:46rembourser entre 3 et 4
37:48mille milliards de dollars,
37:50refinancés. Ils peuvent le faire
37:52d'une façon qui nous ennuie, parce qu'ils peuvent, par exemple,
37:54dire aux Européens, vous achetez
37:56nos bons du trésor,
37:58après tout, on va...
38:00En proportion, chez nous, ce n'est pas terrible non plus.
38:02Je termine sur ce point-ci, c'est très important.
38:04Ils peuvent nous dire, vous achetez nos bons du trésor,
38:06après tout, j'ai oublié de vous dire, ça sera
38:080% d'intérêt
38:10sur 100 ans, et puis, si vous ne voulez pas,
38:12on retire nos troupes de l'OTAN.
38:14C'est pour le même chantage. Ça, ça peut venir.
38:16Donc, les Etats-Unis sont
38:18en faillite, et ne sont pas
38:20en faillite virtuelle,
38:22ne sont pas en faillite réelle, parce qu'ils ont les moyens
38:24d'imposer à leurs alliés,
38:26peut-être pas longtemps, à la Chine, qui continue
38:28à financer les déficits américains,
38:30de financer cela.
38:32Mais ce n'est pas en faillite non plus.
38:34Non. Nous avons...
38:36Nous sommes un pays très riche, très puissant.
38:38Nous avons la chance
38:40de faire partie d'une
38:42zone monétaire forte,
38:44même si nous sommes le pays
38:46le plus mal placé dans ces zones,
38:48puisque nous sommes le seul pays de l'Union Européenne
38:50qui a quatre déficits, budget,
38:52balance des paiements, presque équilibre,
38:54budget primaire,
38:56c'est un budget sans service de la dette,
38:58et balance commerciale. Aucun autre pays d'Europe
39:00n'a cette circonstance.
39:02Et nous sommes
39:04protégés par
39:06l'Union Européenne. L'euro
39:08nous permet de faire plus de bêtises
39:10que si nous n'avions pas l'euro.
39:12Maintenant, il faut réagir. Il faut réduire
39:14ces déficits avant qu'il soit trop tard.
39:16Pour tenter de réduire les déficits,
39:18il y a stimuler la croissance. Cela semble compliqué
39:20puisque la Banque de France a réduit
39:22à la baisse sa prévision de croissance pour 2025
39:24de 0,9% à 0,7%.
39:26Est-ce que vous pensez que le pays
39:28court à la catastrophe ?
39:30Non. Je ne pense pas que le pays
39:32court à la catastrophe. Je ne pense pas que le déficit
39:34sera en 2025
39:36ce qui a été dit. Je pense qu'il sera plus élevé
39:38dans les circonstances
39:40actuelles. Ce n'est pas le premier
39:42de nos problèmes. Nous sommes couverts
39:44par la Banque Européenne,
39:46la Banque Centrale. Nous sommes couverts
39:48par l'immense capacité d'emprunt
39:50de l'Union Européenne.
39:52C'est le moment d'investir dans la santé,
39:54dans l'éducation, dans l'armement, dans l'écologie.
39:56C'est le moment d'investir. Ce n'est pas le moment
39:58de faire des économies d'investissement.
40:00Vous avez fait connaître Emmanuel Macron avec
40:02la fameuse commission Attali.
40:04C'était en 2008. Pour libérer
40:06la croissance. Emmanuel Macron
40:08a toujours pensé que la croissance allait régler
40:10tous nos problèmes, notamment
40:12de dette, mais également d'équilibre
40:14pour les retraites,
40:16pour tout ce qui était prestations sociales.
40:18Finalement, ça n'a pas
40:20marché, la croissance, pour
40:22régler tous nos problèmes.
40:24J'ai toujours dit, y compris dans le rapport de cette commission,
40:26que beaucoup de réformes auraient dû être
40:28appliquées tant par Nicolas Sarkozy
40:30qui avait demandé le rapport, que par ses deux
40:32successeurs. Ils ne l'ont pas été. On serait dans
40:34des conditions différentes si le rapport avait été appliqué en 2008.
40:36Totalement différentes, y compris
40:38sur le terrain budgétaire. La croissance
40:40est un mot vide de sens.
40:42Parce qu'on peut faire une croissance très forte
40:44avec des énergies pétrolières,
40:46des sucres artificiels, de la drogue
40:48et tout ça, c'est très mauvais. Donc la croissance,
40:50c'est un concept vide de sens. C'est pour ça que plus
40:52de croissance, ça n'a aucun sens. Croissance zéro,
40:54c'est une croissance. Aucun sens.
40:56Une décroissance, ça n'a aucun sens.
40:58Ce qu'il faut, c'est beaucoup plus de croissance de l'économie
41:00de la vie et une très forte décroissance
41:02de l'économie de la mort.
41:04Il faut faire aussi des économies.
41:06Il y a une réforme des retraites
41:08qui a été adoptée il y a peu.
41:10Il y a un conclave qui se tient
41:12en ce moment pour y réfléchir. François Bayrou
41:14vient de dire ce matin non
41:16à un retour de la retraite à 62 ans.
41:18Est-ce que, du coup, ça tue
41:20ce conclave en cours ? Est-ce qu'il faut revoir
41:22la dernière réforme ? C'est Elisabeth Born.
41:24Je pense que
41:26tout ça a été mal géré depuis le début.
41:28Depuis 2017,
41:30quand on a tenté d'appliquer
41:32la réforme de la retraite à points,
41:34qui était celle que proposait
41:36la commission dont vous n'avez pas
41:38parlé tout à l'heure et que j'avais précisé, dont un des
41:40rapporteurs était l'actuel président de la République,
41:42c'était très mal géré à ce moment-là.
41:44Bon, c'est trop tard. Maintenant,
41:46on a d'autres combats à mener.
41:48Mais est-ce que ça a été bien géré ensuite
41:50par Elisabeth Born avec le passage à 64 ans ?
41:52Oui, il fallait le faire. Maintenant, il y a des choses
41:54qui restent à régler, en particulier sur la pénibilité,
41:56sur le fait que certaines personnes
41:58ont besoin de travailler
42:00beaucoup plus que les autres, d'une façon très injuste,
42:02parce qu'ils ont commencé à travailler très jeunes.
42:04C'est absurde. Donc, il y a
42:06une incohérence évidente entre
42:08l'âge de la retraite et la durée
42:10de cotisation. Où on prend l'un,
42:12où on prend l'autre. Moi, je pense que le plus important,
42:14c'est la durée de cotisation, plus que l'âge de la retraite.
42:16Est-ce que vous pensez que ce compte-là est complètement hors-sol ?
42:18C'est la formule d'Edouard Philippe. Il dit qu'il faut faire
42:20des économies,
42:22en incluant la retraite des fonctionnaires.
42:24C'est 55 milliards d'euros par an,
42:26selon ses calculs.
42:28C'est quoi ? C'est une volonté de faire du
42:30social, de la part de François Bayrou,
42:32de ménager le PS ?
42:34Je ne rentrerai pas dans cette
42:36discussion tactique qui ne me concerne pas,
42:38mais je pense que toute occasion de parler
42:40entre partenaires sociaux, il va l'apprendre.
42:42Peut-être qu'il va avoir une bonne idée sur
42:44quelque chose qui reste à régler sur la pénibilité
42:46et sur l'articulation entre la durée
42:48du travail et la durée de cotisation.
42:50Le Grand Jury
42:52inattendu.
42:54Un dernier moment, puisqu'il sera bientôt temps
42:56de passer à table. Vous prenez le retour
42:58au temps long lors des
43:00repas. 1h20, c'est votre
43:02idée.
43:04Pourquoi ?
43:06J'écris une histoire longue de l'alimentation,
43:08comme j'écris une histoire longue de beaucoup de sujets,
43:10dont les villes dont vous avez parlé.
43:12Dans cette histoire longue, j'ai montré que
43:14à partir de la fin du XIXe siècle,
43:16le capitalisme américain a tout fait pour tuer le repas.
43:18En inventant
43:20des produits insipides,
43:22et ensuite des
43:24produits pour compenser l'insipidité
43:26par des produits chimiques, etc.
43:28Et en tuant le repas, pourquoi ? Parce que le repas, c'est
43:30anti-capitaliste. Quand vous êtes
43:32à table, vous ne consommez pas, en dehors de ce que
43:34vous avez fabriqué pour consommer.
43:36Vous ne l'achetez pas, vous ne vendez pas,
43:38vous ne travaillez pas. Très mauvais pour l'économie
43:40marchande. Et pire encore,
43:42vous parlez.
43:44Et vous n'êtes pas sur votre téléphone.
43:46Vous parlez. Et ça, c'est très dangereux.
43:48Donc, c'est pour ça que tout a été fait
43:50pour qu'on ne mange plus ensemble, même le dimanche.
43:52Donc, pour vous manger, c'est un geste anti-capitaliste.
43:54C'est un geste de... Politique.
43:56C'est un geste politique.
43:58Je ne dirais pas seulement anti-capitaliste, je dirais
44:00contre le développement
44:02de l'économie marchande et ce qu'elle a de suicidaire.
44:04Alors, il faut prendre son temps. Ça ne veut pas dire
44:06qu'il faut manger beaucoup. On peut manger
44:08très peu. Ça ne veut pas dire qu'il faut manger beaucoup de sucre.
44:10Surtout pas. Ça ne veut pas dire qu'il faut manger beaucoup de graisse.
44:12Surtout pas. Mais il faut passer du temps
44:14à table.
44:16Merci beaucoup pour ce grand jury.
44:18Bon dimanche à tous. Bon appétit.
44:20Et à la semaine prochaine.