Dans le cadre de la Journée nationale d'hommage aux victimes de terrorisme, une cérémonie va avoir lieu ce mardi au Parc Jouvet de Valence devant le monument aux morts à 11h. L'association Remaid qui a aidé notamment les familles de victimes du Bataclan et de l'attentat de Romans sera présente.
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00:00Jusqu'à 9 heures, ici matin.
00:03Il est 7h46 à présent, une cérémonie de commémoration pour les victimes du terrorisme se tient ce matin au Parc Jouvet à Valence.
00:12Notre invité, Emmanuel Champal, il dira un mot.
00:15Oui, à l'occasion de cette journée nationale d'hommage, bonjour Jean-Michel Cresson.
00:18Bonjour.
00:19Président de l'association dromoise d'aide aux victimes, Remed, vous allez dire quoi tout à l'heure, à 11 heures, devant le monument aux morts à Valence ?
00:27Alors, je vais dire que le terrorisme, c'est aussi une forme de guerre.
00:33On parle beaucoup de guerre aujourd'hui, on nous dit, on nous promet, on évoque des problématiques de guerre intenses, comme on dit.
00:41Mais le terrorisme, c'est déjà une forme de guerre, parce qu'il y a des victimes, il y a des morts, il y a des blessés.
00:46Et le terrorisme a comme objectif de mettre à plat, au fond, notre société, la psychologie des habitants de notre pays.
00:57C'est une forme de guerre, et aujourd'hui, il faut se préparer.
01:01Dix ans après Charlie Hebdo, les attentats de Paris, l'attentat du musée du Bardot à Tunis aussi,
01:07cinq ans après l'attentat de Romand, en quoi cette cérémonie, ces cérémonies, dans un cadre plus général, restent-elles importantes ?
01:15C'est important, parce qu'on a souvent tendance à oublier, heureusement d'ailleurs.
01:19Heureusement, on a des formes de résilience.
01:22Un attentat passe, on en parle beaucoup, les médias, vous, vous êtes dessus, évidemment, nous aussi.
01:28Et puis, la vie continue, et puis on oublie.
01:32On oublie d'autant plus que ces derniers temps, il y a eu des attentats en France.
01:36Cette année encore, il y en a eu, il y en a eu à la Grande-Motte, à Abt, à l'affaire Thébernard, à Mulhouse, on en a parlé.
01:42On oublie, on oublie. Moi, j'ai l'habitude de dire qu'aujourd'hui, c'est des formes d'attentats low-cost.
01:48C'est des gens qui arrivent avec un couteau, qui vont poignarder au hasard un prêtre dans une église, un passant sur un marché, etc.
01:56Ce qui n'en reste pas moins traumatisant, et c'est très traumatisant.
02:00Imaginez-vous, la victime de l'attentat de demain, elle ne sait pas qu'elle sera victime d'attentat aujourd'hui.
02:05Ça peut nous arriver à chacun d'entre nous, demain matin, tout à l'heure en sortant, on ne sait pas.
02:10Mais c'est des attentats, je reviendrai sur ce terme, un peu à bas bruit.
02:16Donc, du coup, on les oublie. Alors, on n'a pas oublié le Bataclan, parce que le Bataclan, c'était des centaines de morts.
02:22On n'a pas oublié même des attentats ailleurs.
02:26Si il y a cette journée nationale, c'est parce qu'on commémore l'attentat de Madrid, de la guerre d'Atocha,
02:33c'est là où il y a le plus de morts en Europe.
02:36180, je ne sais pas exactement combien, peu importe,
02:40191 morts, mais il y a ces petits attentats du quotidien.
02:44Jean-Michel Cresson, vous êtes président de l'association Remède, et vous utilisez ce matin le mot « oubli ».
02:50Est-ce que les personnes, est-ce que les dromois que vous avez accompagnés,
02:54après l'attentat de Romand notamment, oublient, arrivent à oublier ?
03:01Je crois que oui. Je crois que oui, pas tous, pas vite,
03:08mais heureusement, j'ai employé le terme « résilience », heureusement,
03:12on a des capacités de surmonter les choses.
03:16Alors, les gens qui ont été blessés dans leur chair, ou qui ont perdu des êtres chers,
03:20eux n'oublieront jamais. Mais, on se rend compte que les personnes qu'on a suivies,
03:25notamment par exemple les victimes directes ou indirectes de l'attentat de Romand,
03:29aujourd'hui sont moins demanderesses d'accompagnement, et c'est tant mieux.
03:35Elles font moins appel à vous ?
03:36Oui.
03:37Vous avez accompagné combien de victimes, au total, sur les divers attentats ?
03:41Alors, sur les divers attentats, sur Romand par exemple, on a accompagné…
03:47Attaque au couteau, on le rappelle.
03:48Oui, Attaque au couteau à Romand, il y a cinq ans, il y a exactement cinq ans,
03:52on a accompagné 41 personnes directement, on a fait 280 entretiens,
03:59c'est nos psychologues, nos sophrologues, etc.,
04:02et on a suivi cinq personnes au-delà des trois ans.
04:08Des gens qu'on voit toujours d'ailleurs, que nos psychologues rencontrent régulièrement,
04:12alors on est moins dans l'intensité de la chose.
04:14À quelle fréquence, c'est quoi, c'est tous les six mois, c'est tous les trois mois ?
04:16Alors, aujourd'hui…
04:17Qui décide en fait ?
04:18Alors, c'est la victime, c'est la victime, nous on n'est absolument pas intrusifs,
04:21on répond à la besoin de la victime, et si la victime a envie d'appeler,
04:25et encore aujourd'hui, des victimes d'attentats de Romand,
04:27qu'on va encore voir tout à l'heure d'ailleurs au Monument aux Morts,
04:31nous appellent, ne serait-ce que pour donner des nouvelles,
04:35dire voilà, ça va mieux, ça y est, j'ai retrouvé le sommeil, ça y est, voilà.
04:39Vous constatez une véritable évolution ?
04:41Oui, oui.
04:42Une véritable résilience ?
04:43Oui, oui, oui, oui, nettement, et heureusement.
04:47Vous avez peut-être l'occasion de rencontrer des victimes d'attentats de Romand,
04:50et qui se sont reconstruits, avec des blessures, des blessures qui sont toujours là,
04:55des cicatrices qui ne se passeront jamais, mais ils se sont reconstruits.
04:59Certaines personnes que vous suivez ont-elles encore du mal à se reconstruire ?
05:04Oui, il y en a, ça existe aussi.
05:06Oui, imaginez, on accompagne des familles, par exemple, de victimes du Bataclan.
05:13Combien ?
05:14On a accompagné de l'attentat du Bataclan, deux familles.
05:17Deux familles, ces gens-là, à vie seront marqués, à vie auront ce traumatisme,
05:24mais ça ne les empêche pas aujourd'hui d'avoir repris leur activité,
05:27d'avoir repris leur travail, d'avoir repris leur vie sociale, professionnelle, culturelle,
05:33mais on ne leur enverra jamais ce qui s'est passé, ce drame qu'ils ont touché.
05:38Vos mots, les mots des psychologues, n'effaceront jamais le traumatisme ?
05:43Ça ne l'effacera jamais, notre objectif c'est d'atténuer, d'accompagner,
05:49non pas de guérir, parce qu'en tout cas on n'est pas des thérapeutes.
05:53On ne guérit pas d'attentat ?
05:55Je crois pas, on l'a toujours au fond de soi, on a toujours ces souvenirs, ce traumatisme,
06:02mais on évolue et c'est tant mieux.
06:06Et c'est tant mieux parce que ça montre aussi que le terrorisme a comme objectif
06:10de nous détruire de l'intérieur finalement, mais que la résilience fait qu'au bout du bout,
06:16il ne gagne pas.
06:18Parlez pour se reconstruire, parlez pour ne pas oublier aussi ces primordiales.
06:21Jean-Michel Cresson, président de l'association d'aide aux victimes remèdes,
06:26vous serez tout à l'heure à 11h pour cette cérémonie de commémoration
06:30pour les victimes du terrorisme devant le monument aux morts au parc Jouvet à Valence.
06:34Merci à vous, passez une bonne journée.
06:36Merci à vous.