Retrouvez « L'édito politique de Patrick Cohen » sur France Inter et sur : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-edito-politique
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00:00L'édito politique Patrick Cohen, Emmanuel Macron face à la grande confrontation qui
00:05peut changer nos vies ? D'abord, un sentiment de sidération, non
00:09pas face à une peur ou une menace qu'on a pu nous-mêmes ressentir, mais face à un
00:12président de la République qui l'exprime solennellement dans une allocution télévisée.
00:17Et qui ne dit pas « le risque est là, mais tout va bien se passer, je fais ce qu'il
00:20faut ». Non, voici un président qui ne se précipite pas pour nous rassurer, qui cherche
00:25d'abord à nous alerter sur la grande confrontation à venir, ou plutôt sur une confrontation
00:29qui a déjà commencé et dont il faut prendre la mesure alors que les Etats-Unis sont en
00:33train de nous lâcher.
00:34Nous avons donc à nos portes une puissance hostile qui dépense plus de 40% de son budget
00:39en armement, dont l'agressivité ne connaît pas de frontière, qui viole celle-ci pour
00:43assassiner ses opposants, pour manipuler des élections et nos opinions, organiser des
00:48attaques numériques contre nos hôpitaux.
00:50Qui peut croire que la Russie d'aujourd'hui s'arrêtera à l'Ukraine ? Demande encore
00:53le président.
00:54Le discours d'hier soir ne ressemblait à aucun autre, dense, dramatique, angoissant.
00:59Emmanuel Macron nous décrit un monde de danger où il faudra du courage, une nouvelle ère
01:04où la prospérité et la sécurité ne sont plus garanties, où a-t-il dit « notre génération
01:09ne touchera plus les dividendes de la paix », où l'innocence est révolue.
01:12Il y eut dans les allocutions présidentielles des dernières décennies de graves traumatismes
01:18et de grandes émotions, les attentats islamistes de 2015, et François Hollande avait alors
01:23exalté comme son successeur l'amour de la patrie, il y eut des deuils et des crises
01:27majeures, le Covid, et avec le recul, Emmanuel Macron devrait regretter son « nous sommes
01:31en guerre » de mars 2020, qu'il empêche de le dire abonnécient aujourd'hui, mais
01:36aucun de ses prédécesseurs n'a, je crois, prononcé de discours aussi sombre, sans grande
01:41éloquence, mais si lourd de conséquences pour les années à venir.
01:44Vous trouvez qu'il est dramatise ? Mais qui peut certifier aujourd'hui que la menace
01:48est exagérée ? Qui peut contester la prise en tenaille de notre continent entre un ennemi
01:53qui veut nous soumettre et un ami qui ne nous veut plus du bien ? D'ailleurs, les français
01:57partagent largement cette inquiétude, malgré des opinions pro-russes de plus en plus présentes
02:01dans l'espace médiatique, sondage Elabe pour BFM TV publié avant-hier, ils sont 76%
02:07à craindre que le conflit armé se propage au-delà des frontières ukrainiennes et 64%
02:13jusqu'aux frontières françaises.
02:14Patrick, que faire de ces angoisses ? Les convertir en volonté d'agir, mais de ce
02:18point de vue, on peut dire qu'Emmanuel Macron a accompli à la fois le plus lourd et le
02:21plus facile, l'appel à la mobilisation de tous, la définition d'un cap et de
02:26principes, réarmement à financer sans nouvelles impôts, coordination militaire européenne,
02:31extension de la garantie nucléaire française, et pour tout cela, des réformes, des choix,
02:37du courage, c'est-à-dire tout ce que le monde politique a abdiqué depuis la dissolution
02:42et les législatives, et que le Président, dans ces temps exceptionnels, voudrait tenter
02:46de réactiver dans les deux ans qui lui restent, c'est vertigineux.