Dans « LCP-Lundi C'est Politique », en partenariat avec franceinfo et Challenges, Francis Letellier reçoit cette semaine le président de la cour des comptes, Pierre Moscovici.
Depuis le lundi 7 octobre, Francis Letellier présente ce nouveau rendez-vous hebdomadaire, où il reçoit les grands leaders politiques, en partenariat avec franceinfo et Challenges.
Alors que l'Assemblée nationale figure plus que jamais au coeur de la vie politique, Francis Letellier interroge chaque lundi à partir de 19h30 les ténors du parlement et du gouvernement.
En première partie de l'émission : un tête-à-tête d'une quinzaine de minutes avec une grande personnalité politique, pour mettre en perspective l'ouverture de la semaine parlementaire, avant les Questions au Gouvernement du mardi.
Francis Letellier est ensuite rejoint en plateau par trois chroniqueurs, journalistes politiques des rédactions de LCP, franceinfo et Challenges, pour un échange avec l'invité.
Pour conclure l'émission, le face à face : une personnalité issue du monde culturel, économique ou social (écrivain, artiste, expert...) interpelle l'invité et réagit à ses propos.
Hugo au Perchoir, « streamer » politique et parlementaire sur Twitch, intervient également lors de l'émission, en relayant les questions de sa communauté.
Depuis le lundi 7 octobre, Francis Letellier présente ce nouveau rendez-vous hebdomadaire, où il reçoit les grands leaders politiques, en partenariat avec franceinfo et Challenges.
Alors que l'Assemblée nationale figure plus que jamais au coeur de la vie politique, Francis Letellier interroge chaque lundi à partir de 19h30 les ténors du parlement et du gouvernement.
En première partie de l'émission : un tête-à-tête d'une quinzaine de minutes avec une grande personnalité politique, pour mettre en perspective l'ouverture de la semaine parlementaire, avant les Questions au Gouvernement du mardi.
Francis Letellier est ensuite rejoint en plateau par trois chroniqueurs, journalistes politiques des rédactions de LCP, franceinfo et Challenges, pour un échange avec l'invité.
Pour conclure l'émission, le face à face : une personnalité issue du monde culturel, économique ou social (écrivain, artiste, expert...) interpelle l'invité et réagit à ses propos.
Hugo au Perchoir, « streamer » politique et parlementaire sur Twitch, intervient également lors de l'émission, en relayant les questions de sa communauté.
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00:00L'heure des comptes est arrivée. Le gouvernement espère que tous les budgets 2025 seront votés avant la fin du mois, sous le regard de la Cour des comptes,
00:08avec à sa tête Pierre Moscovici, qui a été dans le passé ministre de l'Économie et des Finances.
00:12Il est donc bien placé pour savoir que ce n'est pas un exercice facile, surtout quand il n'y a pas de majorité stable.
00:17Mais aujourd'hui, sa mission est de veiller à ce que l'argent public soit bien utilisé.
00:21Pierre Moscovici, premier président de la Cour des comptes et l'invité de LCP. Lundi, c'est politique de ce lundi 10 février sur LCP.
00:30...
00:45Bonsoir et merci de votre fidélité à LCP. Bonsoir Pierre Moscovici. Merci d'être sur le plateau ce soir.
00:50Je ne serai pas tout seul à vous interroger. Il y a mes confrères et consœurs juste en face de vous que je vous présente.
00:55Thierry Fabre de Challenge. Bonsoir Thierry. Bonsoir Julie-Marie Lecompte de France Info. Bonsoir Clément Méric de LCP.
01:01Et Hugo Couturier. Bonsoir Hugo. Qui anime Hugo Perchoir, qui relaie vos commentaires, vos questions.
01:08Vous le connaissez déjà ?
01:09Oui. Il est venu faire un Twitch à la Cour des comptes.
01:14Bien. Et via cette fois la chaîne Twitch LCP Assemblée Nationale, vous allez remonter tous les commentaires, les remarques qui s'adressent à Pierre Moscovici.
01:22Et avec vous Pierre Moscovici, on va parler des retraites, parce que là c'est vraiment le cœur de votre actualité.
01:26Dans une semaine et demie, vous allez devoir rendre la conclusion de la Cour des comptes sur le coût des systèmes de retraite.
01:31On parlera aussi avec l'invité qui nous rejoindra de l'industrialisation de la France.
01:37On parle beaucoup d'intelligence artificielle, mais il ne faut peut-être pas oublier aussi que pour l'instant, il faut faire vivre aussi l'économie française.
01:42Et ça doit passer peut-être par l'industrie. Notre invité Anaïs Veuilles-Gillis, géographe, auteur de Pour une révolution industrielle, viendra débattre face à vous tout à l'heure.
01:51La France, donc, à l'heure de l'intelligence artificielle. Paris accueille des dirigeants politiques du monde entier et des patrons de la tech jusqu'à demain
01:58pour un sommet international sur l'intelligence artificielle. La technologie de l'IA est en train de bouleverser le monde.
02:03Près de 1500 participants sont présents jusqu'à demain au Grand Palais.
02:07Hier, Emmanuel Macron a indiqué que des entreprises françaises vont investir 109 milliards d'euros dans les prochaines années.
02:16L'Europe va accélérer. La France va accélérer. Et donc, pour nous, la France, 109 milliards d'euros d'investissement dans l'intelligence artificielle sur les prochaines années.
02:26Qu'est-ce que c'est ? C'est exactement l'équivalent pour la France de ce que les États-Unis ont annoncé avec Stargate, c'est 500 milliards. C'est le même rapport.
02:34Pierre Moscovici, ça fait rêver. 109 milliards, on se demande même d'où il vient. Mais c'est une investissement privé.
02:38Mais c'est pas les entreprises françaises uniquement, ni même peut-être principalement, puisque c'est pour 30 à 50 milliards d'euros aussi, j'ai bien compris,
02:44des entreprises des Émirats arabes unis, des entreprises canadiennes, un fonds canadien, et puis le reste est à voir.
02:51En toute hypothèse, ça montre une chose, c'est qu'en effet, la France et l'Europe n'ont pas perdu par avant cette grande bataille de l'IA.
03:00Pour l'instant, nous ne sommes pas positionnés comme des leaders, mais rien n'est perdu.
03:05D'abord nous avons un territoire attractif, ensuite nous avons des capacités, des capacités d'abord intellectuelles, des ressources, des belles entreprises qui peuvent se développer.
03:15Mais ça pose une question de souveraineté, parce que quand vous dites les Émirats arabes unis qui viennent investir ici, avec des données, nos données par exemple, il y a un problème de souveraineté.
03:22Oui, mais ce qui compte avant tout, je pense, c'est pour ça qu'il ne faut pas faire le tri de ces 109 milliards d'euros, c'est comment l'Europe elle-même va pouvoir se positionner.
03:32D'abord, il faut que la France se positionne elle-même, sans doute comme étant un leader en Europe.
03:36Mais si on veut être capable d'être présent dans le monde, notamment avec les industries de semi-conducteurs et autres, il faut le faire ensemble.
03:43Et donc, premier étage de la fusée, faire en sorte que la France prenne toute sa place.
03:48Deuxième temps, le temps européen, parce que c'est une compétition mondiale dans laquelle nous avons encore une fois des atouts.
03:54Nous avons une main d'oeuvre formée, nous avons des ingénieurs, nous avons des scientifiques.
03:58Et le rôle de l'Europe, il doit aller au-delà de la technologie, ça doit être aussi pour favoriser une intelligence artificielle, j'allais dire morale,
04:04pour qu'il n'y ait pas n'importe quoi qui circule, que les données soient bien encadrées.
04:08Bien sûr, mais il y a deux enjeux.
04:09C'est ça le rôle de l'Europe ?
04:11Il y a deux enjeux, il y a l'enjeu éthique et il y a l'enjeu industriel.
04:15L'enjeu éthique, c'est qu'effectivement, on ne peut pas faire n'importe quoi et que tout ça doit être régulé.
04:19Ça ne peut pas être de l'IA à l'Elon Musk.
04:21Les avantages, alors l'Elon Musk, ce n'est pas exactement de l'IA, ce sont des réseaux sociaux.
04:25Mais c'est pour donner une idée.
04:26Mais c'est pour donner une idée et les réseaux sociaux aussi doivent être régulés.
04:29Nous posons tous, je crois, plus ou moins, la question de savoir, par exemple, s'il faut rester sur X ou pas.
04:33Moi, je me la pose presque tous les jours.
04:35C'est un robinaire à sanité.
04:38François, vous y restez ?
04:39Oui, j'y reste pour le moment parce que c'est aussi un moyen d'information, d'en émettre et d'en recevoir.
04:45Mais ce que je souhaite, en effet, c'est que l'Europe prenne sa place.
04:48C'est le parallèle avec l'IA.
04:50Pour réguler les réseaux sociaux.
04:53Pour réguler X, c'est deux démarches parallèles, mais qui finissent par converger.
04:58Ici, je veux dire des parallèles convergentes.
05:00Il est important qu'il y ait une régulation européenne.
05:02Mais l'Europe ne peut pas être uniquement un endroit où nous avons des règles,
05:06là où les autres sont dans la jungle du marché.
05:08Nous devons aussi prendre notre juste part et notre part d'investissement.
05:13Si on se contente de dire, oui, on est plus moraux que les autres,
05:16prenons le parallèle, encore une fois, avec les réseaux sociaux,
05:19il parle peut-être beaucoup à certaines personnes.
05:22Si on n'a pas un réseau alternatif à X, alors à ce moment-là,
05:26c'est sympathique de quitter X, c'est vertueux,
05:29mais c'est aussi se priver de l'accès à l'information.
05:32Encore une fois, à la fois montante et descendante.
05:35L'intelligence artificielle, ça permet plein de choses.
05:37Est-ce que ça pourrait, vous, vous aider à la cour des comptes ?
05:39Mais ça nous aide déjà, imaginez-vous.
05:41D'abord, nous nous en servons beaucoup dans nos contrôles.
05:44Ça, je ne savais pas, franchement.
05:45Oui, beaucoup.
05:46Nous avons recruté une vingtaine de data scientists
05:49parce qu'on manie des données en masse.
05:51On se sert de l'intelligence artificielle.
05:53Nous sommes en train d'élaborer
05:55notre propre système d'intelligence artificielle
05:57parce qu'il y a un certain nombre de données
05:59qu'on ne peut pas laisser justement dans la nature
06:01ou soumettre à des sous-traitants.
06:03Donc l'IA ne remet pas en cause,
06:05au contraire, vous allez embaucher.
06:07Ce n'est pas une question d'embaucher,
06:08c'est qu'on ne peut pas faire des contrôles sans l'IA.
06:10Alors ça va modifier nos métiers.
06:12Il y a un certain nombre de choses,
06:13de traitements de données, même de rédactions,
06:15qui vont être modifiées.
06:17Ça va s'amplifier.
06:18Oui, bien sûr, il y a les métiers qui vont changer,
06:20sans aucun doute.
06:22Les greffes.
06:23Par exemple, on pourra aussi faire des résumés.
06:25C'est beaucoup plus simple.
06:26Mais très rapidement,
06:27est-ce que ça pourrait permettre, à la cour des comptes,
06:29de suivre les dépenses publiques en temps réel ?
06:31La deuxième chose que nous faisons,
06:33c'est que nous contrôlons aussi l'usage
06:35de l'intelligence artificielle dans l'administration.
06:37Nous avons regardé ce qu'était la stratégie
06:39de recherche en matière d'intelligence artificielle française.
06:42Nous avons fait un rapport et nous regardons aussi
06:44comment est utilisée l'intelligence artificielle dans l'administration.
06:46Et alors, quelles sont les conclusions ?
06:48Elles sont variées.
06:50Est-ce qu'il y a des dérives ?
06:52Mais par rapport à notre stratégie,
06:54c'est que nous devons faire preuve d'ambition.
06:56Est-ce qu'il y a déjà des dérives de l'intelligence artificielle
06:58dans l'administration ?
07:00Probablement, mais ce n'est pas tellement ça
07:02que nous avons établi.
07:03Nous avons surtout cherché à voir quelle était déjà
07:05la proportion d'utilisation de l'intelligence artificielle
07:08et comment on pouvait développer l'intelligence artificielle.
07:10Pourquoi ? Pour faire des économies à l'arrivée ?
07:12Non, ce n'est pas l'objectif.
07:13C'est simplement que c'est une révolution technologique
07:15dont on ne peut pas se passer.
07:16Pourquoi faut-il que l'administration se mette à l'IA ?
07:18On va tous s'y mettre.
07:20On va le faire.
07:22Après, ça pose des tas de problèmes.
07:24Ça pose des problèmes éthiques, on l'a vu.
07:26Ça pose des problèmes existentiels.
07:28Est-ce que l'IA, au fond, est appelée à remplacer l'humain ?
07:31Comment est-ce que l'humain se confronte
07:33à l'intelligence artificielle ?
07:34La réponse est non.
07:36Ma réponse est non, ça ne remplace pas l'humain,
07:38mais se confronter, oui.
07:39C'est-à-dire que si vous avez, moi j'ai déjà eu accès à ça,
07:42des informations plus importantes que les vôtres,
07:45plus rapidement, avec en plus une tournure humaine,
07:47parce que le chatbot vous répond aussi
07:49des choses que vous avez envie d'entendre,
07:51tout ça, ça pose des questions éthiques
07:53absolument fondamentales.
07:55C'était pas le sujet de nos rapports.
07:57En tout cas, nous travaillons avec l'IA
07:59et nous travaillons sur l'IA et nous allons le faire
08:01de plus en plus bien sûr.
08:03On va parler de la réforme des retraites,
08:05parce que je le disais, c'est au coeur de vos travaux en ce moment.
08:07François Bayrou vous a confié la mission de faire la lumière
08:09sur la situation financière des systèmes de retraite en France.
08:11On n'est pas dans l'obscurité.
08:13Non, pour éclairer, on va dire,
08:15les discussions des partenaires sociaux
08:17que le Premier ministre a mises en place.
08:19Julie et Marie Lecomte.
08:21Pierre Moscovici, d'abord vous êtes dans les temps,
08:23pour prendre ce rapport.
08:25Le 19 février.
08:27Le 19 février à 17h.
08:29La semaine prochaine, vous voulez que ce rapport
08:31soit indiscuté et indiscutable.
08:33C'est vous qui le dites comme ça ?
08:35Je suis certain qu'il sera indiscutable,
08:37parce que nous faisons un travail
08:39qui est parfaitement objectif
08:41et qui sera objectivé.
08:43Autrement dit, d'abord, nous ne partons pas de rien.
08:45C'est pour ça que je dis qu'on n'est pas dans l'ombre.
08:47Ne faisons pas comme si on allait réinventer la lampe à huile.
08:49Il y a par exemple les rapports du Conseil d'orientation des retraites.
08:51J'y viens.
08:53Si vous me laissez deux mots, nous allons partir de ce qui existe.
08:55D'abord, les rapports du Conseil d'orientation des retraites
08:57nous opposaient au CORE.
08:59En tout cas, ce n'est pas moi qui le souhaite.
09:01On aurait pu dire que ce serait le CORE
09:03qui aurait fait cette expertise. On nous l'a confiée.
09:05Mais nous travaillons avec le CORE et sur la base des modèles du CORE
09:07auxquels nous soumettons nos propres hypothèses.
09:09Il y a aussi les données de la CNAV,
09:11la Caisse nationale d'assurance vieillesse.
09:13Il y a celle de la DGFIP,
09:15les finances publiques, et celle de la Direction générale du Trésor.
09:17Et nous modélisons tout ça.
09:19Et nous faisons à partir de ça un certain nombre d'hypothèses
09:21sur l'évolution des chiffres.
09:23Donc, on va avoir un rapport en trois parties.
09:25Je vous dis presque tout.
09:27Première partie, quel est l'état du financement des retraites
09:29aujourd'hui.
09:31Et de tous les régimes de retraite,
09:33ceux du privé comme ceux du public, les supplémentaires, les surcomplémentaires,
09:35les régimes spéciaux, même les régimes agricoles,
09:37puisque le Premier ministre a inclus l'agriculture
09:39dans le champ de la Conférence sociale.
09:41Et puis, dans un deuxième temps,
09:43on va se projeter à 10 ans,
09:45à 20 ans, pas au-delà.
09:472035 à 2045, pour voir quel est
09:49le besoin de financement qu'il s'agit de combler.
09:51Enfin, dans une troisième partie,
09:53on verra quels sont les leviers d'action.
09:55Ils ne sont pas mystérieux.
09:57Mais tout ça sera indiscutable.
09:59Je viens à indiscutable discuter.
10:01Pourquoi sera-t-il indiscutable ?
10:03Parce que, voilà, on sait ce que c'est.
10:05C'est augmenter l'âge de la retraite,
10:07ou le diminuer, d'ailleurs.
10:09Augmenter la durée de cotisation.
10:11On pourrait en envisager aussi,
10:13puisque certains partenaires sociaux le demandent.
10:15Donc on va voir ce que ça donne.
10:17Tous les scénarios sont sur la table.
10:19Beaucoup de leviers d'action.
10:21Le montant des cotisations.
10:23Le niveau des prestations.
10:25Vous n'excluez pas le retour à 60 ans ou 62 ans.
10:27On ne va pas aller jusque-là, je crois.
10:29Mais, en tout cas, on va voir ce que ça donne.
10:31Quand ça monte ou ça baisse ?
10:33Vous baissez jusqu'à quoi ?
10:35Le rapport est en train de se faire.
10:37Mais c'est intéressant.
10:39Une fois que vous avez mobilisé
10:41ce que donne un trimestre en plus,
10:43un trimestre en moins, vous pouvez le multiplier
10:45par X trimestre et vous passez à 60.
10:47Tout ça, oui,
10:49ce sera parfaitement objectivé
10:51et indiscutable.
10:53Après, sera-t-il indiscuté ?
10:55Pas discuté au sens où ce sera contesté.
10:57Je pense qu'après,
10:59on va se saisir du menu d'options
11:01pour dire que je suis d'accord ou pas.
11:03Je joue sur ce levier et pas sur celui-là.
11:05Vous savez, il y a une chose...
11:07Pourquoi vous nous disiez
11:09qu'on ne va pas examiner le retour à 62-60 ans ?
11:11Parce qu'on ne va pas faire des scénarios comme ça.
11:13On va juste regarder.
11:15Vous augmentez la durée de cotisation
11:17de trois mois.
11:19Vous augmentez...
11:21Voilà quel est l'impact financier.
11:23Après, si vous voulez,
11:25ça, c'est un travail d'expertise
11:27qui donnera lieu forcément
11:29à discussion politique.
11:31Non, non, non.
11:33Là aussi, je suis à trois étages.
11:35Premier étage, l'expertise,
11:37et ce sera indiscutable.
11:39Deuxième objectif, la négociation sociale
11:41qui forcément discutera des différents paramètres.
11:43Et troisième objectif,
11:45la transposition parlementaire.
11:47Je parle volontairement de transposition
11:49parce que je ne souhaite pas
11:51que s'il y a un accord des partenaires sociaux,
11:53on rouvre tout le dossier.
11:55Nous mettons la table.
11:57C'est pas nous qui faisons la cuisine.
11:59Et les partenaires sociaux, ensuite, font le plat.
12:01Si j'ai bien compris, le gouvernement
12:03vous a commandé un deuxième rapport
12:05au mois d'avril.
12:07D'habitude, la Cour des comptes,
12:09vous contrôlez les résultats d'une politique.
12:11Là, on vous demande de vous projeter,
12:13de faire de la prospective sur les impacts
12:15d'une modification des paramètres
12:17de la réforme des retraites
12:19sur la compétitivité et sur l'emploi.
12:21Est-ce que c'est vraiment
12:23dans les missions de la Cour des comptes
12:25de faire ça ?
12:27Oui, parce que là, en l'occurrence,
12:29on n'utilise pas la Cour des comptes comme un contrôleur.
12:31C'est ça que vous voulez dire ?
12:33Oui, mais ça fait partie des quelques cas limités
12:35où nous pouvons faire des rapports
12:37à la demande du gouvernement.
12:39Là, nous jouons davantage une mission de conseil.
12:41Mais il y a les compétences lourdes à la Cour des comptes ?
12:43Parce que c'est un travail d'économiste.
12:45Mais nous avons ça, bien sûr.
12:47À la Cour des comptes, nous avons des macroéconomistes
12:49de très grande qualité, des spécialistes des retraites.
12:51Nous faisons aussi appel à l'expertise extérieure.
12:53Et ça, nous l'avons déjà fait.
12:55Par exemple, le Premier ministre Jean Castex
12:57m'avait demandé, pour le coup,
12:59c'était un de ses futurs personnels,
13:01un rapport sur la stratégie de finances publiques
13:03en sortie de crise.
13:05Nous sommes tout à fait capables de nous projeter, bien sûr.
13:07Mais ce n'est pas un rapport de contrôle,
13:09c'est davantage une mission confiée à la Cour des comptes
13:11de réflexion.
13:13Vous savez, faire une mission flash
13:15en un mois, la Cour des comptes
13:17ne l'a jamais fait.
13:19Mais nous l'avons jamais fait.
13:21Il y a quand même un magistrat de la Cour des comptes
13:23qui a expliqué dans les colonnes de l'Humanité
13:25la plus-value de la Cour me semble nulle,
13:27on est moins bon que le Conseil d'orientation des retraites.
13:29Je ne sais pas qui est ce magistrat, il ferait mieux de se taire.
13:31En l'occurrence,
13:33je suis quand même très clair,
13:35s'il s'est exprimé sur la base de l'anonymat,
13:37c'est vraiment nul.
13:39Il n'a qu'à s'exprimer à vis-à-vis des joueurs
13:41et à montrer en quoi. Parce qu'au fond,
13:43qu'est-ce que fait la Cour des comptes ?
13:45Elle fait du corps plus, c'est-à-dire nous partons
13:47de ce que fait le corps, nous travaillons avec le corps.
13:49C'est pour ça qu'on se demande pourquoi vous demandez un rapport.
13:51Le rapport de diagnostic, il existe,
13:53on le connaît depuis des années.
13:55Le corps, qui est un organisme où siègent
13:57les partenaires sociaux, a fait moult rapports.
13:59Pourquoi aujourd'hui refaire une évaluation
14:01si ce n'est pour gagner du temps ?
14:03Ce n'est pas à moi qu'il faut poser la question,
14:05mais en tout cas, on ne gagne pas beaucoup de temps,
14:07puisqu'on l'aura fait en un mois.
14:09Ce sont exceptionnellement rapides.
14:11J'imagine, je vais vous dire ce que je comprends.
14:13D'abord, je pense que le rapport avec le corps était compliqué,
14:15qu'il y a eu des discussions,
14:17des polémiques, etc.
14:19Même sur l'existence du Conseil de renseignement ?
14:21Je ne trouve pas juste, mais néanmoins,
14:23il y avait sans doute l'envie d'aller vers une institution,
14:25la Cour des comptes, qui, elle, pour le coup,
14:27est indiscutée.
14:29Nous avons, nous, 90 % de notoriété,
14:3170 % de bonnes opinions.
14:33Les gens respectent ce que nous faisons
14:35et nous font crédit de ça.
14:37C'était la volonté, sans doute, de crédibiliser davantage.
14:39La deuxième chose, c'est que les partenaires sociaux
14:41sont dans le corps.
14:43C'est le sentiment que, peut-être,
14:45ils seraient jugés partis.
14:47C'était la volonté que j'ai comprise
14:49de faire, dans un premier temps,
14:51une expertise comme ça, neutre, à plat,
14:53et dans un deuxième temps,
14:55la négociation, plutôt que de mélanger les deux temps.
14:57Mais moi, je n'ai rien demandé.
14:59Imaginez-vous que je l'ai appris
15:01au moment de la déclaration de politique générale.
15:03Le Premier ministre m'en avait parlé
15:05assez vaguement.
15:07Je suis disponible, mais moi,
15:09je n'ai pas de polémique avec le corps.
15:11J'ai rencontré tous les partenaires sociaux.
15:13Tous, sans exception.
15:15Ceux qui sont dans le conclave ou la conférence sociale.
15:17J'ai rencontré M. Marrette,
15:19qui va animer le débat,
15:21et j'ai rencontré Gilles Berset, le président du corps,
15:23que je connais depuis très longtemps,
15:25et nous travaillons avec le corps.
15:27Donc, nous ne croyons pas
15:29d'un conflit inutile.
15:31Oui, M. Moscovici,
15:33il y a une question pour vous de tranche.
15:35Est-ce que vous assumez, par vos différents mandats
15:37et votre travail post-énat à la Cour des comptes,
15:39l'inévitabilité dans la situation actuelle traversée
15:41par l'État français n'est-ce pas contradictoire
15:43pour quelqu'un qui s'est toujours désigné de gauche ?
15:45Ça fait beaucoup de questions à la fois.
15:47Vous savez, j'ai été ministre des Finances,
15:49c'est exact, de 2012
15:51à 2014.
15:53Ça fait donc 11 ans maintenant.
15:55J'ai pris ma part,
15:57bien sûr, à cette situation.
15:59Et quelle était cette part ? Quand je suis arrivé à Bercy,
16:01les finances publiques étaient avec un déficit de 5,2 millions.
16:03Quand je l'ai quitté, elles étaient à 3,9.
16:05Alors la dette, elle a continué d'augmenter,
16:07compte tenu de ce qu'étaient les taux d'intérêt à l'époque.
16:09J'ai vraiment fait un gros effort
16:11pour réduire les déficits.
16:13Ensuite, je suis obligé de considérer
16:15que la situation s'est beaucoup dégradée
16:17ces toutes dernières années.
16:19Je suis obligé de le dire. En réalité,
16:21à quel moment se fait la différence entre la France
16:23et les autres pays de l'Union européenne ?
16:25C'est après la crise Covid. Les autres ralentissent,
16:27nous nous continuons d'accélérer.
16:29Et en plus, nous avons une année...
16:31C'est le bilan d'Emmanuel Macron.
16:33Mais non, mais pourquoi voulez-vous toujours...
16:35Ce qui est la mienne, c'est le président de la Cour des comptes.
16:37Je dis simplement ce qui est.
16:39Et depuis 2020,
16:41je suis le président de la Cour des comptes.
16:43C'est une obligation d'impartialité et d'indépendance totale.
16:45Julie, voulez-vous parler du débat
16:47indiscuté et indiscutable,
16:49notamment sur la place du politique derrière ?
16:51Oui, d'après nos confrères de contexte,
16:53Matignon regarde d'un oeil l'idée d'avoir un débat sans vote
16:55après la remise de votre rapport.
16:57Vous en pensez quoi ?
16:59C'est très simple. Moi,
17:01je vais le 19...
17:03Le 19, je rends le rapport.
17:05A 17h, vous avez dit ?
17:07Je pense à 17h, mais ça peut changer.
17:09Je pense que le Premier ministre me demandera,
17:11et je l'accepte bien volontiers,
17:13d'aller le présenter devant
17:15les partenaires sociaux.
17:17C'est naturel, pour pouvoir le discuter avec eux.
17:19Si on nous demande à la Cour des comptes
17:21de mettre à disposition une expertise,
17:23notamment, on parlait avec la deuxième partie,
17:25nous le ferons,
17:27mais mon rôle s'arrête le 19 au soir.
17:29Ensuite, si on me demande d'aller devant le Parlement,
17:31naturellement, j'irai.
17:33On me le demandera peut-être.
17:35Peut-être devant les commissions des affaires sociales.
17:37Je suis naturellement disponible.
17:39Si il y a une chose, c'est que quand je viens chez vous,
17:41je me sens pas chez moi, mais dans un endroit
17:43qui m'est familier. Pas parce que j'ai été parlementaire,
17:45mais parce que je vais une trentaine de fois par an
17:47devant les commissions parlementaires
17:49pour présenter tout type de...
17:51Il retournerait une nouvelle fois pour présenter la mission Flash.
17:53Même vous le souhaiteriez, à la limite.
17:55Je ne suis pas contre.
17:57Je suis totalement transparent par rapport à ça,
17:59parce que la Cour des comptes,
18:01c'est dans la Constitution.
18:03Elle contrôle l'action du gouvernement
18:05et elle est à la disposition du Parlement
18:07pour aussi...
18:09Jusqu'où irez-vous ?
18:11Vous avez vu dans son discours de politique générale
18:13que le Premier ministre avait modifié un peu
18:15le calcul du déficit des retraites.
18:17Ce n'est plus 6, mais 55 milliards,
18:19si on le suit.
18:21Ca a créé une polémique.
18:23D'où vient ce calcul ?
18:25Est-ce que vous trancherez là-dessus ?
18:27Vous évoquerez le sujet.
18:29Ca veut dire quoi ?
18:31Aller jusqu'au bout ?
18:33Il y aura la partie levier d'action.
18:35Non, c'est pas la partie levier d'action.
18:37Au fond, le Premier ministre
18:39part d'une analyse que divers experts
18:41ont présentée, notamment un bien connu
18:43qui s'appelle Jean-Pascal Beaufray,
18:45mais je crois que c'est Jean-Pierre Levade,
18:47dans cette idée qu'il y a des différences
18:49de calcul entre les différences du financement
18:51des retraites du privé et du public.
18:53Ce qu'il assimile à des subventions,
18:55c'est pas le même taux.
18:57Surtout, y a-t-il des différences
18:59qui s'expliquent en partie.
19:01Ce sont aussi des différences de convention.
19:03Le sujet ne sera pas esquivé.
19:05Cela dit, la base sur laquelle
19:07la Cour des comptes travaille,
19:09c'est les lois organiques sur les lois de finance,
19:11c'est les conventions qui sont acceptées
19:13par tous, y compris par le corps.
19:15Le sujet sera traité,
19:17mais je pense que le chiffre que nous donnerons
19:19sera plus proche
19:21de ce qu'on connaît d'habitude.
19:23Ca veut dire quoi ?
19:25Il sera plus proche de quoi ?
19:27Plus proche de 6 milliards que de 55.
19:29Plus proche du déficit affiché
19:31que du nouveau calcul de François Bayrou.
19:33Je fais pas de politique, mais j'en ai quand même fait un peu.
19:35C'est juste pour savoir ce que vous dites.
19:37Ce sera plus proche de 6 milliards que de 55.
19:39Je dis que le chiffre de 55,
19:41la question posée par le Premier ministre,
19:43c'est une question légitime.
19:45C'est un mode de raisonnement que je comprends.
19:47Et que vous ne retenez pas.
19:49C'est pas à moi de le retenir ou pas.
19:51C'est pas celui que retiennent les partenaires sociaux.
19:53Je dis simplement une chose.
19:55J'ai fait un peu de politique dans ma vie,
19:57juste une trentaine d'années.
19:59Pendant ce temps-là, j'étais 20 ans parlementaire,
20:017 ans ministre.
20:03Je me dis, si j'entre dans un conclave,
20:05j'ai été voir un très bon film,
20:07je sais pas si vous l'avez vu,
20:09sur des cardinaux enfermés dans une salle
20:11et à la fin, il y a une fumée blanche
20:13et il y a un pape.
20:15Si vous dites à des gens,
20:17vous vous attendez à ce qu'il s'est 15,
20:1915 plus tard, 30 plus tard.
20:21Et c'est difficile.
20:23Parce qu'ils sont pas du tout dans la même position.
20:25Si vous leur dites qu'il y a 55 sur la table en plus...
20:27Ça va les déprimer.
20:29Je crois que ça dure peu de temps.
20:31Je ne suis là ni pour alléger le fardeau,
20:35donc nous dirons la vérité des chiffres.
20:37Ils sont probablement un peu moins bons
20:39que les chiffres du corps...
20:41Un peu moins bons que les 6 milliards ?
20:43Parce que la situation s'est dégradée.
20:45Ce sera plus que 6 milliards, donc ?
20:47Ce n'est pas un chiffre.
20:49La situation de la productivité, du chômage,
20:51des finances publiques n'est pas exactement la même.
20:53On ne va pas mentir.
20:55C'est un peu plus chargé qu'à l'époque.
20:57En revanche, je ne suis pas là non plus
20:59pour charger la mule, la barque.
21:01On va essayer de faire notre travail indiscutable.
21:03Et objectif.
21:05J'ajoute une chose.
21:07On a discuté indépendant.
21:09Moi, à la Cour des comptes,
21:11depuis 5 ans,
21:13personne ne m'a posé une analyse
21:15que la Cour des comptes n'avait pas produite.
21:17Ce ne sera pas le cas cette fois-ci.
21:19On vous demande dans le chat
21:21dans votre fusée des retraites,
21:23est-ce que vous êtes pour ajouter
21:25un étage convention citoyenne avec le concours du CESE ?
21:27Conseil économique et social et environnemental.
21:29On a l'impression que les citoyens...
21:31On parle du corps, mais les citoyens
21:33sont quand même assez éloignés.
21:35Après le 20 février, ce sera le temps du social et du politique.
21:37Il y aura de la place pour tout le monde.
21:39C'est reparti pour une nouvelle
21:41semaine de motions de censure et de 49.3.
21:43Cette année encore, le gouvernement
21:45fait adopter les budgets sans vote, faute de majorité.
21:47Cet après-midi, la quatrième motion
21:49de censure de la France insoumise a été rejetée.
21:51Dans la foulée, François Bayrou a remis
21:53un 49.3 sur le projet
21:55de loi de finance de la Sécurité sociale.
21:57Thierry,
21:59on va d'abord
22:01s'intéresser à 2025.
22:03Oui, on va s'intéresser à 2025.
22:05D'abord, j'ai envie de vous poser une question.
22:07Le budget a été adopté, mais est-ce que vous avez eu
22:09peur précédemment ? Est-ce que vous avez craint
22:11au fond de vous-même une crise financière
22:13si ce budget n'avait pas été adopté ?
22:15Non, parce que j'étais sûr qu'il serait adopté.
22:17Ah bon ? Vous êtes optimiste ?
22:19Non, je ne suis pas optimiste. Je réfléchis à une situation.
22:21J'étais sûr qu'il serait adopté d'abord parce que
22:23la motion de censure avait créé
22:25une forme de pression aussi.
22:27Il fallait qu'il y ait un budget. On en avait besoin.
22:29C'était indispensable.
22:31On ne pouvait pas continuer à vivre l'expédient
22:33type loi spéciale.
22:35Et pour le coup, ça commençait quand même à coûter
22:37assez cher à tous égards.
22:39Je ne prononce pas sur les chiffres qui ont été donnés.
22:41Je dis simplement que c'était de l'incertitude.
22:43Et l'incertitude politique, c'est de l'incertitude financière.
22:45Et tout ça commençait à peser
22:47sur le crédit de la France
22:49de manière massive.
22:51Il fallait qu'il y ait un budget.
22:53On a au Parlement des forces politiques
22:55qui sont à même de le comprendre.
22:57En plus, le Premier ministre a souhaité d'emblée
22:59discuter de façon à élargir un peu son socle.
23:01Il a fait des concessions.
23:03En réalité, je me disais...
23:05Je suis toujours un optimiste.
23:07Si les gens sont rationnels, on va y arriver.
23:09Alors, ce budget adopté, est-ce qu'il est crédible ?
23:11Est-ce qu'on peut éviter cette année, à votre avis,
23:13les mésaventures de l'année précédente,
23:15à la fois sur les recettes
23:17et sur les dépenses ?
23:19On voit bien qu'on a révélé
23:21une méconnaissance, en tout cas
23:23une surévaluation des retraites
23:27et les dépenses n'ont pas été tenues.
23:29Qu'est-ce qui vous fait dire aujourd'hui
23:31qu'on évitera ça ?
23:33Je ne dis pas tout à fait ça.
23:35Je préside un organisme qui s'appelle
23:37le Haut conseil des finances publiques
23:39qui rend des avis sur les projets de loi de finances.
23:41Il a rendu un avis sur ce projet
23:43et sur le projet de loi de finances sociale.
23:45Nous disons que 5,4,
23:47c'est un chiffre qui est d'abord moins bon
23:49que le 5 de Michel Barnier,
23:51que c'est sans doute le minimum de ce qui était possible,
23:53qu'il ne faut pas que ça se dégrade,
23:55mais que la marge de manœuvre est extrêmement faible.
23:5750 millions ?
23:59Non, la marge de manœuvre, pour le tenir.
24:01On ne peut pas aller au-delà.
24:03C'est du gouvernement, c'est ce que j'ai lu.
24:05C'est pas comme ça que nous mesurons.
24:07Nous disons simplement qu'il y a un certain nombre de risques
24:09qui sont des risques
24:11qui sont plutôt des risques baissiers.
24:13Par exemple, la croissance
24:15est évaluée à 0,9 par le gouvernement.
24:17Le consensus des communes, c'est plutôt 0,7.
24:19Et l'acquis de croissance n'est pas très élevé.
24:21Il en va de même pour les dépenses,
24:23pour les recettes.
24:25On préjuge d'un certain nombre d'évolutions.
24:27Donc au final, il faut être très vigilant.
24:29Et nous écrivons même
24:31que s'il advenait,
24:33qu'il y ait un aléa sur la croissance
24:35ou les dépenses ou les recettes,
24:37il faudrait prendre des mesures en cours d'année.
24:39Parce qu'il est hors de question,
24:41à mes yeux, à nos yeux,
24:43de revivre le même scénario d'un dérapage
24:45si on se retrouve encore à 5, 8, 5, 9, 6% à la fin de l'année.
24:47Croyez-moi, là, on n'est pas bien du tout.
24:49Donc il faut que 64 soit non seulement voté,
24:51mais exécuté.
24:53Et revu éventuellement.
24:55Alors, tout ça,
24:57c'est ce que...
24:59Je vais comprendre plus techniquement votre question.
25:01Mon sentiment, c'est quand même que
25:03c'est un peu plus facile sur les dépenses
25:05parce qu'au fond, l'effort est centré
25:07sur l'Etat, cette année.
25:09C'est quand même ce qu'on tient le mieux.
25:11Même s'il est dur pour l'Etat.
25:13Et il faudra, les années suivantes,
25:15qu'on équilibre mieux quand même.
25:17Parce que ça devient difficile.
25:19Et puis, la deuxième chose, c'est que sur les recettes,
25:21j'espère, et je crois,
25:23qu'on a tiré quand même quelques leçons
25:25des années passées.
25:27Pas du 100%, mais je ne crois pas qu'on assistera
25:29à des dérives de même ampleur.
25:31De moindre recette, vous voulez dire ?
25:33L'année dernière, on a eu
25:35un effondrement des recettes,
25:37une imprévisibilité, une imprévision des recettes
25:39sur notamment la TVA
25:41et surtout sur l'impôt sur les sociétés.
25:43Ce ne sera pas le cas cette année, vous pensez ?
25:45Moi, en tout cas, et j'espère pas du tout.
25:47Clément.
25:48Juste pour rebondir sur ce que disait Thierry,
25:50et vous-même, les prévisions de croissance du gouvernement
25:52sont plus optimistes que le consensus des économistes.
25:54Il y a la croissance qui a basculé
25:56dans le rouge au dernier trimestre,
25:58le chômage qui progresse, les entreprises qui vont avoir
26:00des impôts qui vont augmenter.
26:02Est-ce qu'on n'est pas vraiment dans le scénario
26:04du futur dérapage budgétaire ?
26:06Est-ce que le gouvernement
26:08ne pêche pas par excès de confiance ?
26:10C'est un peu ce que vous aviez dénoncé
26:12devant les parlementaires quand vous aviez été entendu
26:14sur le dérapage budgétaire.
26:16Je l'avais dit de manière extrêmement claire
26:18devant la commission d'enquête parlementaire.
26:20On avait assisté quand même à des prévisions
26:22qui étaient extrêmement limites ces dernières années.
26:24Il y avait 1,4 % de croissance
26:26pour 2024,
26:28alors qu'il y avait...
26:30Pour 2023, alors qu'il y avait 0,8 %
26:32dans le consensus des économistes,
26:34on était à 0,6 %.
26:36Là, le Haut conseil a proposé une formule
26:38que je vais répéter.
26:40Nous disons que c'est un peu élevé,
26:42mais ce n'est pas inatteignable.
26:44On ne peut pas exclure qu'il y ait une bonne surprise.
26:46Mais on ne peut pas non plus exclure
26:48que ce soit un consensus qui se réalise.
26:50Vous savez pourquoi je dis ça ?
26:52Justement, dans cette année 2023,
26:54on se perd un peu dans les années,
26:56il y avait eu un très bon trimestre,
26:58totalement imprévu.
27:00Personne n'a jamais su...
27:02Eric Lombard, ministre de l'Economie,
27:04promet qu'il y aura des outils de contrôle en temps réel.
27:06D'abord, on est un peu surpris d'apprendre
27:08qu'il n'y en avait pas.
27:10C'est encore un boulot pour vous, ça ?
27:12Non, c'est un boulot pour l'administration.
27:14Il faut qu'il y ait des outils de contrôle,
27:16surtout des recettes fiscales,
27:18notamment des recettes d'IS.
27:20Si on suit un peu la façon
27:22dont l'impôt sur les sociétés
27:24est versé par les entreprises du CAC 40,
27:26parce qu'il y a 5 à 30 par an,
27:28on doit pouvoir avoir quelques idées.
27:30Et ça, en effet, ça a pêché.
27:32C'est le boulot de l'administration.
27:34Comme disait Julie, c'est impressionnant
27:36d'imaginer qu'il n'y avait pas de contrôle.
27:38Il s'est passé quelque chose, quand même.
27:40Les années 2023-2024 sont des années
27:42terribles pour les finances publiques.
27:44Les leçons ont été tirées ?
27:46J'espère, je le crois.
27:48Frédéric Wagenberg, à Bercy,
27:50a fait appel à des économistes pour les aider
27:52à comprendre pourquoi ils s'étaient autant trompés.
27:54Est-ce que, vraiment, on peut dire
27:56aujourd'hui qu'ils ont tiré les leçons ?
27:58Disons qu'en tout cas, le budget tel qu'il est fait,
28:00me paraît plus prudent
28:02et plus réaliste que les précédents.
28:04Ca, c'est certain.
28:06Après, est-ce qu'ils vont jusqu'au bout ?
28:08Ca, c'est ce que nous vérifierons en cours d'année.
28:10Je ne veux pas, moi, vous signer sur mon sang
28:12que cela est parfait.
28:14Je crois simplement qu'ils ont beaucoup réfléchi
28:16et que personne, en réalité,
28:18et surtout pas le ministère des Finances,
28:20qui est une administration d'une extraordinaire qualité,
28:22n'a envie que ce qui s'est passé se reproduise.
28:24Mais vous savez, ces deux années post-Covid,
28:26elles ont été des années terribles
28:28parce que tous les autres ont baissé
28:30leur déficit.
28:32Ils ont baissé leur niveau de dette.
28:34Nous avons continué et nous avons accéléré.
28:36Ca, c'est des choix politiques.
28:38En tout cas, c'est une erreur de prévision.
28:40Mais ce sont des choix politiques.
28:42Nous la payons, je veux le rappeler,
28:44à 3 % de déficit.
28:46C'est deux fois plus que ce qu'on doit faire.
28:48C'est deux fois plus.
28:50Je ne suis pas là pour donner des bons et des mauvais points.
28:52C'est deux fois plus que la moyenne de la zone euro.
28:54Nous avons un char de la dette.
28:56C'est-à-dire que nous remboursons chaque année...
28:58On a l'impression que vous prêchez dans le désert.
29:00Vous dites ça depuis plusieurs années.
29:02Mais nous n'avons pas du tout prêché dans le désert.
29:04Je pense que nous avons, au contraire,
29:06été tout à fait entendus.
29:08Vous savez, l'émission, ça n'arrive pas par hasard.
29:10Les gens ont constaté que dans une période
29:12où on s'interrogeait beaucoup,
29:14où il y avait des questions
29:16sur la maîtrise des finances publiques
29:18et sur la qualité des prévisions,
29:20il fallait se tourner vers un tiers de confiance.
29:22Nous n'avons pas prêché dans le désert.
29:24Simplement, il y a eu des erreurs de prévision
29:26qui doivent être expliquées et rectifiées.
29:28Un mot sur le budget à venir de 2026.
29:30Vous parlez pour une dépense publique
29:32plus efficace.
29:34Pouvez-vous nous donner 2-3 exemples
29:36de dépenses publiques inefficaces
29:38qui permettraient de faire des économies substantielles ?
29:40Un message qui est très clair.
29:42On s'est focalisés, à juste titre,
29:44sur le PLF 2025 et le PLFSS 2025.
29:46C'est normal. C'est une situation politique
29:48totalement inédite,
29:50dans un désordre incroyable.
29:52C'est quand même la première fois
29:54dans la Ve République
29:56que le PLF et le PLFSS
29:58sont votés en février.
30:00Ça n'est jamais arrivé.
30:02Très tard. Il y avait eu un précédent,
30:04en 1979, et c'était une petite erreur
30:06qui a été rectifiée dès les tout premiers jours
30:08de 1980.
30:10Jamais ça n'est arrivé.
30:12Donc, situation incroyable.
30:14Quels sont les pistes de dépenses inefficaces ?
30:16Pardonnez-moi. Je veux quand même
30:18dire l'essentiel, qui n'est pas ça.
30:20L'essentiel, c'est que
30:22les Français doivent savoir
30:24qu'ils doivent s'attendre à des efforts
30:26pendant 5 ans.
30:28Des efforts qui, en plus, ont été accrus
30:30par le fait qu'il y a eu une dérive des finances publiques.
30:32Et pendant 5 ans, il faudra faire
30:34des efforts comparables à ce qui a été fait cette année.
30:36Donc, ça va être douloureux.
30:38Et il ne faut pas laisser penser
30:40que c'était un coup difficile
30:42puisqu'après, on retrouve le chemin.
30:44Quel que soit le gouvernement.
30:46Et je veux ajouter autre chose,
30:48c'est qu'il faudra le faire différemment.
30:50On a fait beaucoup de fiscalité
30:52et pas beaucoup d'économies en dépenses.
30:54Les années suivantes, on ne pourra plus faire de fiscalité,
30:56il faudra faire des économies en dépenses.
30:58Et après, il faudra regarder
31:00dépenses publiques par dépenses publiques.
31:02Là où c'est efficace.
31:04Il y a des exemples, on en a plein.
31:06J'ai rendu un rapport, il y a quelques semaines,
31:08c'était juste au moment du vote du PLF,
31:10sur les dépenses de sortie de crise.
31:12On a examiné certaines dépenses écologiques
31:14ou non écologiques.
31:16Par exemple, est-ce qu'il faut donner des primes
31:18aux véhicules lourds de 1940 kilos ?
31:20On a regardé les gardes d'enfants.
31:22Les gardes d'enfants,
31:24est-ce qu'il ne faut pas
31:26reconditionner en fonction des revenus
31:28comme ça existait, tout simplement,
31:30avant la crise Covid en 2021 ?
31:32Je sais ce que c'est, je suis moi-même concerné.
31:34Certains peuvent perdre de l'argent là-dessus,
31:36mais ils peuvent se le permettre.
31:38Troisième et principale piste
31:40dans notre rapport,
31:42c'est tout ce qui concernait l'apprentissage.
31:44On a eu une politique d'apprentissage extrêmement ambitieuse
31:46depuis 2017, et à juste titre,
31:48alors que le choix de jeunes s'est amélioré.
31:50Mais elle coûte extrêmement cher,
31:52et elle concerne aussi maintenant des jeunes
31:54qui sont dans l'enseignement supérieur.
31:56Nous avons toutes les raisons de penser,
31:58et on le sait, il y a eu quelques mesures prises
32:00que ce ne sont pas
32:02ces jeunes-là qui ont besoin.
32:04Ils ne sont pas des vrais apprentis, d'abord.
32:06C'est des alternants, sans doute,
32:08mais surtout, si vous voulez,
32:10ils n'ont pas besoin de ça
32:12pour avoir accès à l'emploi.
32:14Il y a des milliards d'euros qu'on peut gagner,
32:16et il y en a partout, partout.
32:18Dans la sécurité sociale, dans l'occupation locale.
32:20Moi, je ne plaide pas pour l'austérité, je n'ai jamais été pour.
32:22L'austérité, c'est ce qui appauvrit.
32:24Je plaide pour la performance et pour la qualité des dépenses publiques.
32:26Il faut faire systématiquement,
32:28toutes les dépenses, ce qu'on appelle des revues de dépenses.
32:30Et justement, on parle beaucoup des dépenses,
32:32mais il y a aussi les recettes.
32:34L'économiste Gabriel Zucman
32:36parle de la France comme étant un paradis fiscal
32:38pour milliardaires qui payent
32:40très peu d'impôts par rapport aux autres Français.
32:42Pourquoi c'est si difficile
32:44d'aller chercher l'argent
32:46chez les milliardaires ?
32:48J'ai échangé là-dessus avec Gabriel Zucman
32:50ces derniers jours, je vais le voir.
32:52Sur le thème paradis fiscal,
32:54parce que j'ai été,
32:56outre ministre des Finances, commissaire européen
32:58en charge de la fiscalité de l'économie
33:00et d'autres sujets,
33:02un paradis fiscal, c'est pas exactement ça la définition,
33:04c'est aussi un endroit
33:06où la législation fiscale est totalement
33:08obscure,
33:10où il y a une absence de transparence
33:12et un défaut d'information. Je ne pense pas que la France
33:14soit un paradis fiscal pour être tout à fait franc,
33:16mais j'aurais ce débat avec lui. En revanche, ce qui est certain,
33:18c'est que oui, la fiscalité a été quand même
33:20très favorable ces dernières années à ceux qui ont beaucoup d'argent,
33:22incontestablement.
33:24Ça, c'est pas à moi de le dire,
33:26mais il y a sans doute des marges.
33:28Et de ce point de vue-là, observons
33:30que les mesures de justice fiscales qui figurent dans le budget,
33:32en réalité,
33:34ne sont pas totalement
33:36contestées. La question, c'est
33:38jusqu'où on va. Et je pense, moi,
33:40qu'il y a aussi une limite à ce qu'on peut faire en matière fiscale.
33:42Le ras-le-bol fiscal que j'évoquais...
33:44On parlait du budget de la sécurité sociale, qui est actuellement
33:46en discussion. Je le disais tout à l'heure,
33:48François Bayrou est intervenu à la tribune de l'Assemblée nationale
33:50parce qu'il dit, lui, il le répète sans arrêt,
33:52il faut sauver le contrat social,
33:54notamment.
33:56Ce budget, ces recettes
33:58sont insuffisantes pour
34:00faire face aux dépenses,
34:02puisque les dépenses montent à
34:04666 milliards
34:06d'euros,
34:08et ce qui fait donc
34:10un déficit de l'ordre de
34:1222 ou 23 milliards.
34:14Considérable,
34:16et en progression.
34:18Ce qui me permet de donner raison
34:20à tous ceux qui, à la tribune,
34:22se sont exprimés pour que nous ayons
34:24à l'avenir une vision
34:26différente, que nous
34:28puissions envisager
34:30des trajectoires qui soient des trajectoires
34:32autant que possible
34:34de retour à l'équilibre.
34:36Donc toujours le problème de financement de la Sécu, Julie.
34:38Ça c'est la protection sociale,
34:40ça c'est l'un des
34:42grands chantiers. Est-ce qu'il faut avoir un débat
34:44collectif sur les mécanismes
34:46de financement de notre système
34:48de protection sociale ? Amélie de Montchalin,
34:50la ministre des Comptes publics.
34:52Je disais, on a fait un certain
34:54nombre de revues de dépenses, on en a fait une sur les
34:56publicités locales qui ont été rendues publiques, on en a fait une deuxième
34:58sur les dispositifs de sortie de crise,
35:00on va en faire une troisième sur les dépenses
35:02d'assurance maladie. Parce que ce que je crois au fond,
35:04la philosophie qui nous inspire,
35:06c'est celle d'amélioration de la qualité de la dépense, c'est pas celle
35:08de faire du rabot bête et méchant.
35:10On fait du rabot en ce moment ?
35:12Un peu quand même, oui.
35:14Je pense qu'il voulait tirer
35:16le trait d'une loi spéciale,
35:18c'est ce qui permet de faire passer un PLF, mais
35:20l'année prochaine, je souhaite qu'on soit plus intelligents,
35:22et les années prochaines. Et ça, je crois qu'il y a tout à fait
35:24moyen de faire, y compris sur l'assurance maladie,
35:26y compris sur la sécurité sociale.
35:28Mais y compris dans un contexte d'instabilité politique, vous imaginez que ce soit possible ?
35:30Monsieur Le Tellier, je vais vous dire,
35:32je conçois que tout ça est extrêmement
35:34difficile. Je ne suis pas inconscient
35:36de la situation politique. Elle est
35:38très inconfortable, elle est très dure.
35:40Mais il faut se mettre dans l'autre scénario.
35:42Qu'on continue à dire qu'on ne peut rien faire.
35:44Moi, je me mets dans cette dystopie,
35:46une seconde. On ne peut rien faire.
35:48On ne peut rien faire parce qu'il n'y a pas de majorité,
35:50on ne peut rien faire parce que ceux-là ne veulent pas.
35:52Très bien, ne faisons rien.
35:54Donc imaginons qu'on a 5-8, 5-9 à la fin
35:56de cette année. Parfait. Non, attendez,
35:58je vais jusqu'au bout de cette affaire-là.
36:00Qu'est-ce qui se passe à ce moment-là ? A un moment donné, on a quand même des comptes à rendre
36:02aux Européens.
36:04On a un projet de ce qu'on appelle
36:06un PSMT, un projet stratégique à moyen terme,
36:08un plan stratégique à moyen terme, il ne tient plus.
36:10Bon, à un moment donné, on peut avoir
36:12aussi des sanctions. On a des comptes à rendre
36:14au marché. C'est un terrible gros mot, le marché.
36:16Mais il n'empêche que ce sont surtout des gens qui nous ont prêté
36:18de l'argent. Ce sont nos créanciers.
36:20Nous sommes, nous, leurs débiteurs.
36:22Et au bout d'un moment, s'ils considèrent qu'on n'est pas crédible,
36:24qu'est-ce qui se passe ? Les taux d'intérêt augmentent.
36:26Quand les taux d'intérêt augmentent, la charge de la dette augmente,
36:28explose. Et à la fin, quand vous ne payez
36:30plus 25 milliards ou 50 milliards,
36:32mais 100 milliards de remboursement annuel
36:34de la dette, comment est-ce que vous voulez financer les investissements
36:36de demain ? Les investissements intelligents,
36:38la recherche, l'innovation,
36:40la défense, l'écologie,
36:42surtout. Et donc, moi, ce que je dis,
36:44c'est qu'il faut se désendetter pour investir.
36:46Et j'aimerais qu'on ait un débat
36:48collectif de qualité là-dessus.
36:50Si à chaque fois, on me dit...
36:52Si chaque dépense
36:54est sanctuarisée alors qu'on est
36:56sur-endetté et qu'on a
36:58des déficits énormes, à la fin, on va dans le mur.
37:00Ça, je veux le dire avec beaucoup de force.
37:02Et cette question-là,
37:04ce n'est pas une question de droite et de gauche.
37:06Moi,
37:08j'ai été engagé à gauche pendant 30 ans et...
37:10Il vous en reste quelque chose ?
37:12J'ai pas subi de grève de cerveau en arrivant à la cour des comptes,
37:14même si je suis totalement impartial et indépendant dans ce que je fais.
37:16Mais néanmoins, je dis à mes amis de gauche,
37:18parce que j'en ai, d'écouter plutôt
37:20Pierre Madès France, qui disait
37:22que les comptes en désordre sont le signe des nations qui s'abandonnent,
37:24que ceux qui pensent qu'il n'y a qu'une seule solution,
37:26le tax and spend, toujours plus d'impôts, toujours plus de dépenses.
37:28Parce que là, à la fin, on va dans le mur.
37:30Il faut quand même se poser collectivement ce sujet-là.
37:32Et je prétends...
37:34Je prétends même, je vais affirmer quelque chose,
37:36peut-être un peu sec,
37:38c'est qu'on peut améliorer la qualité de la dépense publique
37:40dans tous les secteurs,
37:42et l'État, et les collectivités locales,
37:44la sécurité sociale, sans réduire la qualité
37:46du service public.
37:48Parce que forcément, il y a des choses à améliorer
37:50dans la gestion des politiques publiques en France.
37:52Il faut changer de culture.
37:54Si on arrive au constat que
37:56le financement de cette protection sociale
37:58ne peut pas s'appuyer uniquement sur les cotisations sociales,
38:00on va chercher où ?
38:02Ah non, mais ça, j'en suis pas à ce degré-là,
38:04de granularité.
38:06Je vous donne une méthode.
38:08Et on discute de tout ça ?
38:10Avec vos perspectives à référendum ?
38:12On avait 18 milliards d'euros l'année dernière
38:14de déficit, on en avait moins de 15
38:16l'année d'avant, on en a 23 cette année.
38:18Est-ce qu'on a l'impression, est-ce que les Français ont l'impression
38:20que leur service public marche mieux ?
38:22Que leur protection sociale marche mieux ?
38:24Est-ce qu'un référendum peut être jouable sur ces questions-là ?
38:26Pas un bon sujet.
38:28Bon. Alors, il y a d'autres méthodes, éventuellement,
38:30de l'étranger, notamment, Clément,
38:32et qui donnent des idées à certains.
38:34Oui, le modèle Trump-Musk semble faire des émules
38:36en France, alors il semble inspirer une partie
38:38de la droite et de l'extrême-droite.
38:40Et puis du côté du patronat, il y a le nouveau président
38:42de la CPME qui a fait
38:44cette proposition de nommer un chef d'entreprise
38:46à la Elon Musk pour traquer
38:48les économies possibles dans la dépense
38:50publique. C'est une bonne idée, selon vous ?
38:54Ça me séduit peu.
38:56Ça quoi ?
38:58Mais pourtant, rien n'a bougé sur le sujet depuis 30 ans.
39:00Vous ne vous dites pas qu'un électrochoc
39:02serait peut-être positif,
39:04vu que les réformes de l'Etat ont toutes échoué ?
39:06Mais là, c'est peut-être ma rigidité intellectuelle.
39:08Je n'ai aucune sympathie
39:10pour ce que fait Donald Trump,
39:12aucune sympathie pour ce que fait Elon Musk.
39:14Et pour le coup, je pense qu'il ne faut pas
39:16prendre les fonctionnaires, les agents publics
39:18comme des boucs émissaires.
39:20L'idée qu'on va taper dans le tas
39:22et sabrer et virer
39:24un paquet de gens ne me paraît pas
39:26du tout, du tout, la bonne démarche.
39:28Alors, associer
39:30les chefs d'entreprise, examiner
39:32les agences publiques,
39:34regarder les politiques publiques,
39:36oui, bien sûr, mais si l'idée,
39:38c'est qu'il faut donner une sorte comme ça
39:40de Kaiser de la dépense publique,
39:42bon courage, ça, c'est pas la France.
39:44On va parler d'immigration, c'est un autre sujet du moment.
39:46Oui, on n'a jamais autant pointé du doigt
39:48l'immigration en France. Est-ce que d'un point
39:50de vue strictement économique,
39:52l'immigration apporte
39:54plus qu'elle ne coûte ?
39:56Vous savez, je parle des travaux de la Cour des comptes et ça,
39:58nous n'avons pas fait de travaux de cette nature-là.
40:00Simplement, ce qu'on sait, c'est que
40:02d'abord, un pays qui vieillit,
40:04un pays qui a des problèmes de croissance,
40:06dans un certain nombre de secteurs,
40:08aura toujours besoin d'immigration.
40:10L'immigration zéro, je n'y crois
40:12absolument pas.
40:14A part ça, il y a aussi des dépenses qui sont consenties
40:16à l'égard des immigrés, qui ne sont pas
40:18considérables, mais elles existent.
40:20Donc, c'est pas comme ça que
40:22je raisonnerais. Je pense que c'est une question
40:24qui est tout à fait fondamentale,
40:26qui est la question de savoir ce qui fait
40:28que nous sommes une nation et ce qui fait
40:30qu'on intègre ou pas. De ce point de vue-là,
40:32je peux avoir une sensibilité, y compris très personnelle.
40:34Justement, Julie ?
40:36Vous pensez que François Bayrou a raison
40:38de lancer ce débat ?
40:40C'est un débat qui est toujours extrêmement périlleux.
40:42Périlleux ? Oui.
40:44Il a raison de se disperser ?
40:46Je ne suis pas un homme politique.
40:48Je ne vais pas me prononcer sur le fait de savoir ce que le Premier ministre a raison de faire.
40:50Oui, mais je ne le suis plus.
40:52Oui, mais vous disiez que vous avez gardé...
40:54Quand j'aurai fini avec la Cour, on verra.
40:56Vous avez dit que vous avez gardé
40:58votre sensibilité de gauche.
41:00Ça ne sert à rien que je le dise.
41:02Je suis un citoyen.
41:04Je suis président de la Cour des comptes
41:06et ça, je vous assure que comme président,
41:08ce que je pense... Très souvent, je présente
41:10des rapports avec lesquels je me sens...
41:12Le citoyen, Pierre Moscovici,
41:14peut se sentir à côté, dans un sens ou dans l'autre.
41:16C'est normal. Une institution,
41:18elle doit être indépendante et impartiale.
41:20Julie ?
41:22Sur cette question-là,
41:24vous ne vous prononcez pas ?
41:26Il y a des sujets sur lesquels je me prononce.
41:28Sur le droit du sol, par exemple,
41:30je ne suis pas emballé.
41:32Vous savez, moi, l'idée de remettre en cause
41:34le droit du sol, je me suis posé
41:36une question assez simple.
41:38Mon père était apatride quand je suis né.
41:40Ma mère est née en France
41:42un an après que ses parents étrangers,
41:44qu'ils sont restés longtemps, soient arrivés en France.
41:46Si on avait changé tout ça,
41:48est-ce que je serais un Français ?
41:50Et comment résoudre ça ?
41:52C'est très compliqué. Il faudrait faire des registres.
41:54Il ne suffirait plus d'avoir une carte d'identité
41:56et un seul parent français
41:58et d'être né en France, ce serait plus difficile.
42:00Et puis, on aurait aussi
42:02beaucoup d'étrangers, supposés,
42:04qui seraient nés en France,
42:06qui ne connaîtraient que le français,
42:08avec des parents qui seraient théoriquement...
42:10Ils deviendraient apatrides ?
42:12Mes grands-parents étaient polonais et roumains.
42:14Mais ni les uns ni les autres
42:16n'avaient le moindre rapport avec la Roumanie,
42:18sinon on est très mauvais.
42:20Si vous voulez, tout ça fait qu'en réalité,
42:22je pense que ce serait une très grande complexité,
42:24ça ne permet pas de traiter du coup la question centrale,
42:26qui est la question de l'immigration irrégulière,
42:28sur laquelle la Cour des comptes a produit un rapport.
42:30Et ce rapport montrait de manière très claire
42:32comment il fallait à la fois améliorer
42:34le contrôle de l'entrée aux frontières,
42:36améliorer nos systèmes
42:38administratifs et éventuellement juridiques,
42:40et comment il fallait aussi
42:42améliorer le système de reconduit
42:44de la frontière.
42:46Il n'y a pas besoin de changer la loi pour ça ?
42:48En tout cas, ce n'est pas ce que proposait la Cour des comptes.
42:50Elle pensait qu'il y avait déjà pas mal de choses à faire.
42:52Et ça repose beaucoup
42:54sur les mécanismes consulaires.
42:56En fait, vous dites qu'il faut appliquer déjà
42:58ce qui existe.
43:00C'est ce que dit la Cour des comptes, non pas vous.
43:02Disons que le rapport de la Cour des comptes
43:04raisonnait iso-législation.
43:06Avec la même législation en disant ça suffit.
43:08Non, on ne disait pas ça suffit, mais on raisonnait.
43:10Vous estimez que vos amis socialistes
43:12ont raison de ce que vous nous disiez,
43:14notamment sur la révision du droit du sol,
43:16de déposer...
43:18Là, je donne une position très personnelle
43:20parce que c'est un sujet qui est de sensibilité.
43:22Vous savez, quand vous vous réveillez un matin
43:24et vous vous demandez si on change tout ou est-ce que je serai encore français,
43:26comme vous voyez, je suis président de la Cour des comptes,
43:28officier de la Légion d'honneur.
43:30Mon père m'a recommandé la Légion d'honneur.
43:32Je ne m'attache pas beaucoup aux décorations,
43:34mais c'est aussi une reconnaissance de ce que c'est
43:36qu'être français, d'une certaine façon.
43:38Si vos amis socialistes ont raison
43:40de déposer une motion de censure un peu plaidoyée
43:42sur la question des valeurs républicaines...
43:44Franchement, ils font ce qu'ils veulent
43:46et j'ai des amis socialistes,
43:48j'ai des amis qui ne sont pas socialistes,
43:50beaucoup.
43:52Et je ne suis pas un membre du Parti socialiste.
43:54Justement sur les amis socialistes,
43:56j'aimerais savoir...
43:58J'ai des amis partout.
44:00Vous avez été...
44:02J'ai aussi des amis socialistes.
44:04En politique socialiste, en action,
44:06des actions importantes au sein du Parti.
44:08Et j'ai aussi des gens
44:10avec qui je ne suis pas ami partout.
44:12Tout à fait.
44:14J'ai envie d'avoir votre sentiment
44:16sur le comportement récent du Parti socialiste
44:18qui a changé de comportement sur le vote du budget.
44:20Est-ce que vous avez le sentiment que, finalement,
44:22la dissolution aura eu un effet
44:24politique positif
44:26pour vous en suscitant
44:28l'émancipation du PS de LFI ?
44:30Oui.
44:32Je dis oui.
44:34C'est clair.
44:36Vous n'êtes pas convaincu.
44:38Ce n'est pas une vraie émancipation.
44:40D'abord,
44:42simplement après avoir censuré
44:44un budget,
44:46un gouvernement,
44:48entraîner sa chute avec d'autres,
44:50ils ont estimé qu'il y avait besoin d'un budget.
44:52Ne croyez pas pour autant qu'ils soient devenus des alliés
44:54des centristes et de la droite.
44:56C'est quand même un comportement raisonnable.
44:58Écoutez,
45:00j'ai été effectivement un élu socialiste
45:02pendant 20 ans.
45:04Il n'y avait pas de NFP.
45:06On ne dépendait pas de LFI.
45:08Je ne suis pas certain
45:10que ce soit la révolution politique.
45:12Vous ne pensez pas que le PS
45:14se soit détaché de LFI ?
45:16Ce n'est pas la question.
45:18Je pense que le PS ne s'est pas détaché de la gauche.
45:20Ceux qui s'imaginent que les socialistes
45:22vont devenir des supplétifs de la droite ou du centre
45:24et qu'on revient à une situation confortable
45:26qu'on connaissait sous la 4e République
45:28ou avant le PS, je ne pense pas qu'ils aient raison.
45:30C'est une réflexion historique.
45:32Arrêtez d'être...
45:34Moi, il faut arrêter
45:36d'être obsédé par LFI. LFI, c'est un parti
45:38qui est parfois un peu pénible
45:40quand même.
45:42Vous avez des amis ?
45:44Ça m'arrive, pas beaucoup quand même.
45:46Mais je peux en avoir.
45:48Je respecte totalement la sensibilité des hommes et des femmes
45:50qui votent pour LFI.
45:52Mais ce n'est pas ça que je dis.
45:54On a l'impression que le monde
45:56tourne autour de LFI. LFI représente 10 % de l'électorat.
45:58C'est beaucoup. Ce n'est que ça.
46:00Oui, monsieur Moscovici, il y a 23 ans,
46:02Jacques Chirac avait prononcé
46:04cette phrase, notre maison brûle et nous regardons
46:06ailleurs. La crise s'est accentuée
46:08et pourtant, nous, on regarde le mur
46:10de la dette plutôt que le mur écologique
46:12qui nous arrive. Question candide,
46:14est-ce que peut-être revenir sur les dettes
46:16du monde entier ? On a fait ça pour les pays africains,
46:18annuler des dettes. Est-ce qu'annuler toutes les dettes,
46:20question candide encore une fois, mais est-ce que ça ne pourrait pas
46:22permettre de mettre les forces sur
46:24la crise climatique
46:26qui nous arrive en pleine cour ?
46:28Le problème, c'est quand on annule les dettes, on annule les dettes de ceux qui se sont
46:30endettés tranquilles sur le dos de ceux qui ont fait
46:32des efforts. Donc je crois qu'on ne peut pas le faire.
46:34Et je dirais même qu'on ne doit pas le faire.
46:36Vous savez, nos partenaires européens...
46:38Mais la maison brûle. Si vous voulez ma réponse,
46:40je l'ai donnée tout à l'heure en réalité.
46:42Réduisons notre dette pour pouvoir investir.
46:44Et pouvoir investir d'abord
46:46dans l'écologie. Là, je suis
46:48mille fois d'accord. C'est là où nous devons
46:50consacrer des dizaines, des centaines,
46:52des milliers de milliards d'euros.
46:54Pour les trouver, il faut effectivement
46:56faire des économies.
46:58Investir dans l'écologie, peut-être dans l'industrie aussi.
47:00On va recevoir un invité qui va débattre face à vous
47:02tout à l'heure, Anaïs Veuglis
47:04qui défend la réindustrialisation
47:06de la France et dont le portrait est signé
47:08Marco Pommier.
47:10Face à vous, Pierre Moscovici,
47:12la sentinelle de la réindustrialisation.
47:14Ce soir, notre invité
47:16nous propose une réflexion
47:18sur la place de l'industrie dans nos sociétés.
47:20Il y a toujours l'idée, je pense,
47:22que l'industrie, surtout la technologie,
47:24c'est ce qui permet
47:26d'apporter des réponses à tous les problèmes.
47:28Docteur en géographie, chercheuse
47:30à l'université de Poitiers, spécialiste
47:32des questions industrielles.
47:34La part de l'industrie dans le
47:36produit intérieur brut français
47:38était de 17% en 2022.
47:40C'était plus de 26%
47:42il y a 40 ans. Mais depuis plusieurs
47:44années, l'attractivité française s'est
47:46redressée. Plus 130 000
47:48emplois en 6 ans. Une bonne nouvelle,
47:50à nuancer, les plans sociaux
47:52se sont multipliés dans les usines
47:54en 2024.
47:56Alors que peut-on réindustrialiser
47:58dans notre pays ? Quand on pense
48:00réindustrialisation, on doit avoir
48:02un peu cette idée d'écosystème.
48:04Comment je m'assure que je ramène
48:06bien toute la chaîne de valeur ? Parce que c'est ça
48:08qui fait la résilience d'un territoire face à des crises
48:10systémiques, géopolitiques,
48:12des problèmes d'approvisionnement, etc.
48:14Notre invité propose dans ce livre
48:16une révolution industrielle.
48:18Et si la France osait écrire
48:20un nouveau chapitre de son histoire,
48:22alliant progrès techniques
48:24et environnement ? Face à vous,
48:26Anaïs Voigilis.
48:28Anaïs Voigilis
48:30est avec nous sur ce plateau et nous rejoint
48:32je vous laisse saluer Pierre Moscovici,
48:34face à qui vous allez débattre tout à l'heure.
48:36Bonsoir, bienvenue.
48:38Parce que vous, vous pensez
48:40beaucoup à
48:42une idée. Il faut relancer
48:44l'industrie en France. C'est comme ça qu'on va recréer
48:46des richesses, y compris environnementales,
48:48une industrie verte, vertueuse.
48:50Je vous laisse débattre avec Pierre Moscovici.
48:52Bonsoir, bonsoir à tous.
48:54Alors, c'est vrai que la question de la
48:56réindustrialisation et de l'industrie est revenue très fortement
48:58dans le débat public en France depuis 2020,
49:00mais aussi à l'échelle européenne avec
49:02la politique qui a été
49:04mise en place et on en a parlé très
49:06récemment et je vais d'abord me
49:08concentrer sur l'échelon européen
49:10avec les déclarations récentes de Ursula von der Leyen
49:12où on parle de deux choses, simplification
49:14et compétitivité. On a l'impression
49:16que c'est deux serpents de mer. La simplification,
49:18je pense qu'on a empilé un nombre de rapports
49:20incroyables sur ce sujet et en particulier en France.
49:22La compétitivité, c'est à l'agenda
49:24de l'Union européenne depuis au moins les années 2000
49:26puisque au Conseil de Lisbonne, en 2000,
49:28on parlait déjà de construire une économie de la connaissance
49:30et faire de l'Europe une des économies
49:32la plus compétitive du monde.
49:34Et une question qui, moi,
49:36m'interpelle, c'est est-ce qu'on n'est pas
49:38toujours dans la recherche de mesures techniques ?
49:40Est-ce qu'il ne manquerait pas à la France et à l'Union européenne
49:42finalement trois choses ?
49:44Un manque de vision par rapport à la Chine
49:46et les Etats-Unis qui ont une vision très claire
49:48de ce qu'ils veulent construire, les Etats-Unis avec
49:50Biden et l'Inflation Reduction Act,
49:52la Chine avec Made in China 2025,
49:54les nouvelles routes de la soie, etc.
49:56Un manque d'ambition
49:58et un manque de récit et d'imaginaire
50:00parce que finalement, quand on regarde les Etats-Unis,
50:02je crois que tous les Américains
50:04se repèrent dans les figures qu'on a sur les billets,
50:06sur les dollars. Je pense que ce qu'on a
50:08sur les dollars européens...
50:10C'est une question.
50:12Une seule question.
50:14On ne va pas débattre face à face
50:16parce que, en réalité,
50:18je suis très convaincu de ce que vous dites.
50:20Il se trouve que j'ai été élu pendant 20 ans
50:22et que je n'ai pas été élu à Neuilly.
50:24J'ai été élu conseiller général
50:26de Sochaux,
50:28puis député d'Odincourt
50:30et enfin président de l'agglomération
50:32du pays de Montbéliard.
50:34Comme président de l'agglomération de Montbéliard,
50:36j'avais naturellement lancé un projet d'agglomération
50:38de l'industrie verte et bleue.
50:40Je n'opposais pas l'industrie et l'écologie.
50:42Je sais à quel point
50:44la désindustrialisation est un désastre.
50:46C'est un désastre économique,
50:48mais c'est aussi un désastre social.
50:50Vous l'avez vécu à Peugeot.
50:52C'est un désastre politique.
50:54Quand je suis arrivé dans le pays de Montbéliard,
50:56je n'y suis pas né, puisque je suis
50:58le produit d'une immigration.
51:00Je n'avais pas de racines françaises.
51:02Je suis arrivé là-bas en 1992.
51:04À l'usine,
51:06il y avait 15 000 personnes.
51:08Aujourd'hui, il y en a 5 000.
51:10L'usine faisait 200 hectares.
51:12Elle en fait 100.
51:14On manque de tout ça.
51:16Je crois qu'il faut aimer l'industrie
51:18et qu'il faut avoir une vision pour l'industrie.
51:20J'attends de voir ce que dira Gonçalo von der Leyen
51:22sur les sujets compétitivité,
51:24mais vous avez lu comme moi le rapport Draghi
51:26qui souligne ce que sont nos faiblesses.
51:28Faiblesse industrielle,
51:30faiblesse technologique,
51:32en matière d'écologie...
51:34Vous parlez d'imaginaires,
51:36de repères. Vous parliez des billets de banque.
51:38Je suis quand même...
51:40J'aime l'industrie. Dans ces 20 ans,
51:42j'ai visité des centaines d'entreprises
51:44industrielles, des petites, des moyennes,
51:46des très grosses. Chaque fois que je vais
51:48dans une région, je le fais à nouveau.
51:50Et je ne crois pas du tout
51:52à revenir d'une économie sans industrie.
51:54Nous avons stabilisé les choses,
51:56nous avons limité l'hémorragie,
51:58mais nous n'avons pas repris le chemin en avant.
52:00Je pense que nous avons la nécessité
52:02de le faire.
52:04C'est vous qui le dites, madame.
52:06Je me pose la question à vous
52:08en tant que politique.
52:10Aujourd'hui, ce qu'on est en train
52:12de voir, c'est que l'ensemble des grandes nations
52:14sont en train de vouloir renforcer leur base
52:16industrielle, en particulier en dehors
52:18d'Europe. Aujourd'hui,
52:20on parle... Je reviens sur cette idée de simplification
52:22parce que finalement, on n'en parle, on ne sait pas ce qu'on met derrière.
52:24On ne s'attaque pas à deux fondamentaux
52:26sur lesquels l'Union européenne a peut-être plus
52:28de force que les Etats membres
52:30qui sont la politique de la concurrence et la politique commerciale
52:32et on risque de se retrouver dans une situation de surcapacité
52:34de production mondiale. Est-ce que l'Europe
52:36peut réellement
52:38et décemment se réindustrialiser
52:40sans un moment
52:42changer de doctrine économique ?
52:44Ça, c'est un sujet
52:46qui est un sujet de grand débat, notamment
52:48sur la politique de la concurrence.
52:50J'ai été commissaire européen
52:52pendant cinq ans. Il ne faut pas
52:54se nourrir d'illusions. Nous n'avons pas
52:56de partenaires qui sont disponibles pour changer
52:58les traités en matière de concurrence.
53:00Je me souviens, pendant le débat sur le traité constitutionnel européen
53:02en 2004-2005, le grand débat
53:04c'était la concurrence libre et non faussée.
53:06Il y a eu un non et finalement, on se retrouve avec la concurrence libre
53:08et non faussée et on n'a pas trouvé les mesures qui auraient
53:10permis de l'équilibrer. Moi, je serais plutôt
53:12tenté... Je suis assez séduit, je l'avoue,
53:14par le rapport de Draghi. Je pense que la question
53:16c'est celle de l'innovation,
53:18c'est celle de nous remonter en compétence,
53:20c'est celle de retrouver aussi des métiers,
53:22des hommes et des femmes conformes pour l'industrie
53:24et enfin, c'est la grande question
53:26de l'investissement. Parce que nous n'avons
53:28pas la capacité d'investir à l'échelle nationale.
53:30On a vu à quel point, justement,
53:32nous étions réduits en matière
53:34d'investissement par notre dette.
53:36Et N, c'est limite par rapport à la Chine aux Etats-Unis.
53:38Mais l'Europe a des capacités.
53:40C'est limité par rapport à la Chine aux Etats-Unis ?
53:42Non, non, non. Elle a une capacité de dons de dettements
53:44quasi illimitée, pour le coup, puisque le premier
53:46emprunt qu'elle ait fait, c'est un emprunt
53:48de Next Generation EU en 2020
53:50pour la crise Covid et
53:52elle a des capacités aussi d'investissement
53:54mais la question, c'est de décider
53:56collectivement de le faire. Il faut prendre conscience
53:58en effet, du fait que nous vivons
54:00dans un monde de puissances qui sont des puissances
54:02agressives, des puissances agressives sur le plan
54:04militaire, sur le plan stratégique
54:06mais aussi sur le plan économique et industriel.
54:08Mais, alors, c'est intéressant parce que
54:10l'innovation, c'est pareil.
54:12Ça a été un des noyaux
54:14durs de la politique française.
54:16On s'est détourné de la politique industrielle
54:18en se disant que l'innovation, elle est un remède
54:20à la désindustrialisation, en se
54:22focalisant sur tout ce qui était en amont
54:24des activités de production. Aujourd'hui,
54:26on voit qu'on a parfois l'impression que l'innovation
54:28c'est l'intelligence artificielle
54:30et on est face à des objectifs extrêmement
54:32contradictoires, à la fois
54:34on parle de transition écologique
54:36et il y a un lien entre transition écologique
54:38et réindustrialisation mais qui sont
54:40deux choses qui nécessitent des investissements majeurs
54:42en même temps on veut préserver le pouvoir d'achat
54:44limiter l'endettement et on peut
54:46se demander légitimement, finalement, est-ce que la France
54:48ne doit pas faire des choix ?
54:50Est-ce que l'Europe doit faire des choix ?
54:52Et qui doit faire ses choix ?
54:54Et comment est-ce qu'on assure le financement ?
54:56Parce qu'on a mis beaucoup d'argent
54:58sur la table pour attirer des activités
55:00on se rend compte que même les gigafactories
55:02sont en train d'être pénalisées à la fois par le prix d'énergie
55:04qui est structurellement plus haut en Europe
55:06et par la concurrence non-européenne
55:08qui mène littéralement une guerre des prix
55:10tout en soutenant son industrie
55:12à coup d'aide, contre-regardation.
55:14En matière d'innovation, ce que vous dites, l'orientation
55:16mais aussi le fond, c'est-à-dire que malgré tout
55:18l'innovation et de recherche, la France a décroché
55:20y compris par ses partenaires européens
55:22nous dépensons moins que tous les autres
55:24donc il y a quand même un effort de remise à niveau
55:26et encore une fois, mon slogan de tout à l'heure
55:28c'est se désendetter pour investir
55:30c'est pas se désendetter pour se désendetter
55:32c'est pas faire de l'austérité, je n'y crois pas du tout
55:34ensuite, la principale échelle
55:36elle est quand même européenne
55:38parce que nous avons des capacités à cette échelle-là
55:40et surtout parce que, à l'échelle mondiale
55:42c'est l'Europe qui sera visible
55:44moi, je suis européen
55:46aujourd'hui par réalisme
55:48parce que je sais que si nous sommes divisés
55:50nous sommes 27 nations impuissantes
55:52livrées à la prédation des autres
55:54alors que si nous sommes ensemble, nous sommes une puissance dans le monde
55:56c'est ça qu'il faut penser
55:58Merci Anaïs Veuglidis d'être venu échanger quelques minutes avec Pierre Moscovici
56:00une dernière question qui est dans l'actualité
56:02on attend la nomination d'un président
56:04d'une autre institution
56:06que la vôtre
56:08le Conseil Constitutionnel, Julie Marie Lecomte
56:10il y a vraiment 30 secondes
56:12Oui, vous avez été nommé par Emmanuel Macron en 2020
56:14vous n'étiez pas spécialement ami
56:16avec le président
56:18quelles sont les qualités d'un bon président
56:20du Conseil Constitutionnel selon vous ?
56:22Il faut être
56:24très attaché à l'état de droit
56:26qui peut être menacé
56:28dans les années qui viennent
56:30par les assauts de la démocratie libérale
56:32il faut être
56:34à une capacité de législateur
56:36il faut savoir animer un collectif
56:38et puis s'intéresser tout de même aux droits
56:40Être un ami d'Emmanuel Macron
56:42C'est un atout ou un handicap ?
56:44En général, le président du Conseil Constitutionnel
56:46n'est pas un ennemi du président de la République
56:48Donc un handicap ?
56:50Non, en général, ce n'est pas un ennemi du président
56:52Vous savez qu'il y a un nom qui circule
56:54c'est l'ancien président de l'Assemblée Nationale
56:56Richard Ferrand
56:58C'est un bon président du Conseil Constitutionnel
57:00Premièrement, c'est l'auto-président de la République
57:02de désigner son candidat
57:04C'est un beau parcours, ancien président de l'Assemblée Nationale
57:06c'est cohérent avec le Conseil Constitutionnel
57:08Il y a eu d'autres anciens présidents de l'Assemblée Nationale
57:10Jean-Luc Debray, Laurent Fabius
57:12qui ont été avant Richard Ferrand
57:14Donc ce serait cohérent ?
57:16Ne me faites pas...
57:18J'aime bien Richard Ferrand
57:20mais encore une fois, on ne joue pas comme ça
57:22avec ça
57:24S'il est désigné, le président l'aura choisi
57:26il a beaucoup de qualités
57:28à lui de les montrer aux commissions parlementaires
57:30pour obtenir leur confiance
57:32et puis ensuite, surtout, d'être un bon, voire un grand
57:34président du Conseil Constitutionnel
57:36et vous savez, le Conseil Constitutionnel des années qui viennent
57:38On termine là-dessus, merci Pierre Moscovici
57:40d'avoir été avec nous ce soir
57:42dans Lundi, c'est Politique sur LCP
57:44Bonne soirée sur la chaîne parlementaire, à lundi prochain