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Le ministre de la Défense britannique, John Healey, a mis en garde Moscou après qu'un "navire espion russe" a été repéré lundi dans la Manche par la Royal Navy. Il avait déjà été détecté il y a quelques semaines au-dessus de câbles sous-marins dans les eaux britanniques. Faut-il y voir une "guerre hybride" orchestrée par Moscou ? Patrick Martin-Genier, spécialiste des questions européennes et internationales, est l'invité pour tout comprendre dans RTL Soir.
Regardez L'invité pour tout comprendre avec Yves Calvi du 22 janvier 2025.

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Transcription
00:00Yves Calvi et Agnès Bonfillon, RTL Soir.
00:04Il est 18h44, bonsoir Patrick-Martin Jeunier.
00:07Bonsoir Yves Calvi.
00:09Vous êtes spécialiste des questions internationales, merci beaucoup de prendre la parole sur RTL.
00:12C'est une menace directe à l'adresse de Vladimir Poutine.
00:15Le ministre de la Défense britannique met en garde le président russe.
00:18Un navire espion, je cite, a été repéré dans la Manche.
00:21Je cite toujours le ministre, nous savons ce que vous faites
00:24et nous n'hésiterons pas à prendre des mesures énergiques pour protéger le Royaume-Uni.
00:28La tension est montée d'un cran, c'est grave ?
00:31Ah oui, c'est très grave ce qui se passe parce que c'est le fameux navire russe, le Yantar,
00:36qui a pénétré dans la zone économique exclusive du Royaume-Uni,
00:41c'est-à-dire dans la limite des 45 miles, les 72 kilomètres dans la zone économique.
00:46Donc ce sont des eaux sous souveraineté britannique.
00:49Et c'est grave ce qui se passe parce que ce sont des navires espions
00:52qui officiellement vont pêcher ou faire d'autres activités.
00:56Il s'agit du navire Yantar et ce n'est pas la première fois que ce navire russe pénètre
01:00dans les eaux territoriales britanniques ou zones économiques exclusives,
01:03c'est la deuxième fois puisque ce navire avait déjà pénétré au mois de novembre 2024.
01:09Donc en effet, ce qui se passe est grave.
01:11Vladimir Poutine teste l'Europe, teste le Royaume-Uni qui est une puissance nucléaire
01:16et donc en effet, on teste la volonté du Royaume-Uni,
01:20mais le Royaume-Uni ne se laisse pas du tout impressionner
01:23car le gouvernement britannique a en effet envoyé deux navires de guerre,
01:26le HMS Somerset et le HMS Stein,
01:29pour bien demander à ces navires de sortir des eaux territoriales
01:34et donc de se remettre dans le droit chemin, s'il ose dire.
01:37Vous le disiez, ce n'est pas une première pour ce navire russe baptisé Yantar.
01:42Connaît-on précisément ces activités ?
01:45Écoutez, très officiellement, on ne connaît jamais ces activités,
01:49mais ce sont des navires espions, manifestement,
01:52qui veulent faire des photos,
01:55repérage de toutes les infrastructures critiques sous-marines,
01:59notamment donc tous les câbles,
02:02les infrastructures de télécommunications qui relient la France et le Royaume-Uni,
02:06mais au-delà de cela également toute l'Europe.
02:09Donc ce sont des navires espions, ils repèrent,
02:11pour éventuellement après pouvoir endommager.
02:13Rappelez-vous ce qui s'est passé au mois de décembre,
02:15le câble Estlink 2 qui avait été endommagé entre l'Estonie et la Finlande,
02:21avec 145 km sous les eaux du Golfe et de Finlande.
02:26Donc ce sont des navires de repérage, pour le cas échéant,
02:30de demander à d'autres navires de pouvoir endommager
02:33et de pratiquer ce qu'on appelle une guerre hybride,
02:36et pour le coup sous-marine.
02:37Mais physiquement, est-ce qu'il avait le droit d'être là où il se trouvait, dans la Manche,
02:41en l'occurrence malgré les sanctions dont fait l'objet la Russie ?
02:45Ah ça c'est autre chose.
02:47On sait que la Russie brave les sanctions.
02:49Ce n'est pas la première fois que les Britanniques, avec l'OTAN d'ailleurs,
02:53vont arraisonner des bateaux qui ne respectent pas les sanctions.
02:56Il y a eu plusieurs dizaines, plusieurs vingtaines même,
03:00de navires qui ont été arrêtés pour n'avoir pas respecté
03:04ces interdictions liées aux sanctions de la Russie.
03:07Ça ce n'est pas nouveau.
03:09Ils bravent effectivement, ils testent,
03:11mais ce qui est nouveau c'est le fait que ces navires espions soient là
03:15et ils sont effectivement en repérage.
03:17Donc ils nous testent en réalité,
03:19et comme vous l'avez dit, le ministre de la Défense britannique a dit
03:23nous vous voyons, nous sommes là.
03:24Et donc c'est effectivement une tension.
03:26Tant qu'on ne remet pas dans le droit chemin la Russie, Vladimir Poutine,
03:30ils nous testent.
03:31Ils nous testent d'autant plus que Donald Trump vient d'arriver à la Maison-Blanche.
03:36Comment établit-on qu'un navire est un navire espion
03:39et surtout comment le tractons, puisque c'est le terme employé par les autorités britanniques ?
03:44Oui, alors les Britanniques,
03:46alors d'abord pour répondre à la question que m'avait posée Yves Calvi,
03:49ils n'avaient pas le droit de se situer dans une zone territoriale
03:52parce que c'est la zone économique exclusive de 45 milles du Royaume-Uni.
03:56Donc là où on ne peut pas faire grand-chose,
03:58c'est lorsqu'on est dans les eaux internationales,
04:00puisqu'il y a une liberté de circulation.
04:02Mais la Manche étant un endroit très étroit,
04:04en réalité il y a très peu d'eau internationale entre la France et le Royaume-Uni.
04:09Ça ne commence qu'au sud de Cap-Grinet,
04:12un peu plus au sud de la Manche, là où commencent les eaux internationales.
04:15Et pour répondre à votre question,
04:17les Britanniques ont mis en place, ont créé un système extrêmement performant
04:23qui s'appelle le Nordic Warden, c'est-à-dire le gardien de la mer du Nord,
04:28qui est là pour surveiller ce qu'on appelle la flotte de l'ombre.
04:31La flotte de l'ombre c'est la flotte russe,
04:34ce sont des flottes effectivement de navires espions,
04:37avec un système électronique qui marche avec l'intelligence artificielle
04:41très, très perfectionné,
04:43et qui permet de repérer très concrètement
04:46avec des outils de l'intelligence artificielle
04:48et des outils électroniques extrêmement performants,
04:51s'il y a des outils dans des navires
04:54qui permettent effectivement de procéder à des espionnages,
04:58à des repères pour les câbles électroniques.
05:00Donc si c'était qu'un simple navire de pêche, il n'y aurait pas de souci,
05:03mais grâce à ce système extrêmement performant
05:06mis en place par le Royaume-Uni concomitamment avec l'OTAN,
05:09il est facile désormais de repérer un navire
05:12qui se livre à des activités d'espionnage.
05:14Donc j'ai bien compris que vous venez d'expliquer aux auditeurs d'RTL
05:17comment on espionne un navire espion.
05:19Oui absolument, tout le monde s'espionne,
05:24mais là il en va de la sauvegarde de la sécurité nationale du Royaume-Uni,
05:29comme de la France, d'ailleurs il y a une coopération
05:31entre la France et le Royaume-Uni,
05:33et donc on va espionner des navires espions,
05:36mais tout cela pour préserver la sécurité nationale du Royaume-Uni,
05:40les infrastructures absolument essentielles
05:43aux activités du Royaume-Uni et de la France.
05:46Il faut savoir qu'au-delà de la Manche,
05:48c'est également la mer du Nord qui est concernée
05:51avec environ 22 zones critiques en mer du Nord
05:55où les Russes vont se livrer à des activités d'espionnage.
05:58Lorsque le ministre de la Défense britannique prévient la Russie
06:04en disant « nous n'hésiterons pas à prendre des mesures énergiques
06:07pour protéger le Royaume-Uni »,
06:09on entend quoi par là, mesures énergiques ?
06:12Écoutez, vous savez qu'on essaye toujours de baisser la tension,
06:16d'éviter l'escalade,
06:18et donc que ce soit dans l'espace aérien ou dans l'espace maritime,
06:21on essaye d'abord de mettre en garde les navires
06:24qui vont dans les eaux territoriales
06:27ou dans la zone économique exclusive,
06:29donc on les avertit.
06:30Ensuite, il y a des sous-marins britanniques
06:32dont certains d'ailleurs étaient en poste en Méditerranée
06:35qui sont remontés en urgence à la demande du gouvernement britannique
06:39et qui ont fait surface à côté de ces navires
06:43pour bien leur montrer qu'on les avait vus
06:45et que le Royaume-Uni n'était pas dupe des activités de ce navire.
06:49Donc premièrement, est-ce que ça peut aller jusqu'à des frappes
06:53ou à couler un navire ?
06:55Bien évidemment qu'en général on n'en arrive pas à ce point,
06:59mais manifestement si un navire continuait malgré des avertissements,
07:03cela pourrait aller jusqu'à un accrochage militaire.
07:06Donc tout est traçable, même au fond de l'eau.
07:08Merci infiniment de toutes ces informations,
07:10Patrick Martin-Jeunier, spécialiste des questions internationales.
07:13Dans un instant, un capitaine au long cours,
07:15il s'apprête à jeter l'encre dans le port d'RTL.
07:17Cramponnez-vous, ça va tanguer.
07:19Marc-Antoine Lebray pour le Breaking News.

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